L’OEUVRE DE LA CRÉATION
LES ENGENDREMENTS
JUIFS OU HÉBREUX
ISRAËL ET LES NATIONS
MESSIANISME
THÈMES FONDAMENTAUX

KI TISSA - SÉRIE 1995

Le cours

 

(1995)   כִּי תִשָּׂא

 

Chapitre 30, verset 11.

Le thème essentiel de cette Parashah est le récit de la faute du veau d’or.

 

Quelques précisions : Cette faute-là n’est pas vraiment une faute d’idolâtrie dans le sens simple de sa définition : remplacer l’adoration du Créateur par l’adoration d’une idole, c’est-à-dire de quoique ce soit des forces de la réalité du monde érigé en idole à la place du Créateur. Et il y a d’autre part des comportements païens et c’est plutôt de cela dont il s’agit ici.

On se posera la question de savoir qui est à l’initiative de cette faute ? Est-ce Israël ? Est-ce le grand-prêtre Aaron ? Est-ce le עֵרֶב רַב?

 

1er thème au chapitre 31 verset 12.

 

Le livre de שְׁמוֹת possède 11 Parashiot qui en général se groupent de 2 manières.

שְׁמוֹת, וַיֵּרָא, בֹּא, בְּשַׁלַּח, יִתְרוֹ, מִּשְׁפָּטִים = שׁוֹבַבִים, la première partie du livre qui concernent le récit des différentes péripéties de la sortie d’Egypte.  

Dans שְׁמוֹת et וַיֵּרָא c’est l’accélération des événements de la persécution des hébreux en Egypte, l’intervention de Moïse et le début des dix plaies.

בֹּא et בְּשַׁלַּח, la fin des plaies et la sortie d’Egypte géographique et la traversée de la mer rouge.

Ensuite, יִתְרוֹ et מִּשְׁפָּטִים la révélation des 10 commandements et la jurisprudence de la תּוֹרָה.

Tout cet ensemble forme une unité de cohérence, c’est l’événement de la sortie d’Egypte.

 

La 2ème partie est constituée de 5 Sidrot :

תְּרוּמָה et תְּצַוֶּה qui constituent les lois de la construction de la préfiguration de ce que sera le Temple de Jérusalem, le Tabernacle מִּשְׁכָּן ou אֹהֶל מוֹעֵד. C’est un sujet important.

Il s’agit de l’objectif de la sortie d’Egypte. Tout de suite après le récit de la sortie d’Egypte, la תּוֹרָה nous raconte les lois de construction du Temple dans cette préfiguration qu’est le מִּשְׁכָּן comme temple provisoire pendant les 40 ans du désert. Cela correspond à une question très importante si on se demande dans la définition du 2ème  livre de la תּוֹרָה, le livre de l’Exode- שְׁמוֹת, qui est le récit important de la fondation d’Israël en tant que nation.

 

La question importante qui se pose : chaque fois que la תּוֹרָה nous raconte l’histoire d’Israël en tant que nation, c’est toujours à la sortie d’un exil. L’histoire d’Israël commence avec Abraham à la sortie d’exil d’Our-Qasdim, l’histoire d’Israël comme peuple se constitue à la sortie de l’exil d’Egypte. Et ainsi pour la suite des temps jusqu’à nous. L’histoire de la fondation du royaume de Judah au temps du 2ème temple c’est à la sortie d’exil de Babylone. Et de notre temps, de nouveau la fondation de l’état d’Israël 2000 ans après, la restauration de l’état hébreu à la sortie d’exil de 2000 ans dans la civilisation romaine et ses annexes dans les civilisations de l’islam.

 

On ne peut pas être frappé de cette permanence : l’histoire d’Israël surgit, émerge, toujours d’un exil. C’est un sujet pour lui-même, c’est un cas particulier de l’histoire des hommes.   

 

Quoiqu’il en soit, une question centrale se pose à propos de la définition du récit du livre de l’Exode : quelle était la finalité de la sortie d’exil ?

 

Le 1er épisode est la sortie d’Abraham de l’exil d’Our-Qasdim. 

 

Le Midrash Raba se pose la question suivante : il y a deux fois dans le récit de l’histoire d’Abraham, l’expression לֶך לְךָ. La 1ère fois quand Dieu s’adresse à Abraham alors qu’il avait déjà quitté Our-Qasdim par lui-même. Cf. la fin du chapitre 11 et le début du chapitre 12 de בְּרֵאשִׁית, la famille d’Abraham sur initiative d’Abraham avait décidé de quitter l’exil d’Our-Qasdim et de rentrer au pays des hébreux qui est appelé le pays de Canaan à cette époque parce qu’à l’époque des patriarches les cananéens avaient conquis le pays sur la descendance de Shem auquel le pays appartient.

Ceci est indiqué dans un des versets de l’histoire de Joseph que ce pays est connu en ce temps-là comme étant le pays des hébreux «  אֶרֶץ הָעִבְרִים ».

C’est d’autant plus important de savoir cela que lorsque Moïse s’adresse au Pharaon pour exiger la sortie d’Israël de la civilisation égyptienne, il s’adresse à lui au nom du Dieu des hébreux -  אֱלֹהֵי הָעִבְרִים. Par trois fois au moins dans le début du livre de l’Exode.

 

Dans ce temps de civilisation dont nous parlons au début de la constitution d’Israël comme nation au temps de Moïse à la sortie d’Egypte par rapport au Pharaon de ce temps-là, et bien toute la civilisation de ce temps connait l’identité hébraïque. Ce n’est que dans ces derniers siècles qu’on a oublié le fait que l’identité d’Israël est hébraïque, alors on parle de juifs au temps des hébreux ce qui est un anachronisme. 

 

[J’ouvre une petite parenthèse. J’ai souvent entendu de grands sages de la nation d’Israël faire peut-être inconsciemment, peut-être intentionnellement cette anachronisme. Il n’y a pas de juif au temps de la Bible, il y a les hébreux. L’identité hébraïque est l’identité originelle distincte de l’identité juive qui est celle des juifs héritiers des hébreux mais étant en exil. Le mot de « juif » désigne les judéens dans l’exil à partir de la fin du 1er royaume de Judah. Les 1ères fois où le terme de Yéhoudi est employé pour dire « judéen », c’est après le schisme séparant le royaume du nord au royaume du sud de Judah, et les juifs sont des rescapés des hébreux. Le grand royaume d’Israël avait pour capitale Samarie, le royaume du nord qui a résulté du schisme après le roi Salomon. Après la perte du royaume du nord et les dix tribus, les judéens qui étaient les membres du royaume du sud seront dénommés juifs par la suite et qui vont avoir dans leur mémoire cet héritage de l’identité hébraïque détruite par la destruction du 1er royaume d’Israël, et puis cette 1ère exigence messianique de restitution de la nation hébraïque pour que les temps messianiques commencent. C’est une chose très peu connue à laquelle je vous demande de vous référer. Dans le messianisme judéen va s’ajouter une 1ère dimension de messianisme national de restaurer la nation d’Israël, la nation des hébreux. Ensuite apparait le messianisme des Prophètes d’Israël, le messianisme de la fin des temps, de la paix universelle, de la résurrection des morts, de la transfiguration du monde, mais il y a d’abord une 1ère étape messianique nationale de restaurer la nation hébraïque détruite. Et ce messianisme là s’appelle le messianisme du « fils de Joseph ». Le messianisme de la fin des temps est celui du « fils de David ». Les juifs sont héritiers des hébreux et dans une circonstance socio-politique bien précise : après la destruction de la nation des hébreux, les derniers des hébreux étant les judéens descendus en exil, en français cela s’appelle des « juifs », dans les autres langues on a conservé le terme de judéen. En français le mot de « juif » est le mot « judéen » corrompu au moyen-âge. Je cite souvent le cas de l’espagnol qui dit « judio » derrière lequel se trouve « yéhoudi », dans le sens membre du royaume de Juda. En français, c’est l’identité juive qui est une identité de l’exil et qui s’est toujours connu comme provisoire entre deux temps hébreux qui a remplacé l’identité d’Israël des hébreux. Alors il y a des anachronismes. Parler d’Abraham comme étant le génie de l’identité juive est un anachronisme monumental. Abraham n’a jamais été un juif mais un hébreu. Parler de la révélation du Sinaï comme étant le judaïsme… Il y a des raisons pour cela. Vous avez entendu parler d’Abraham Livni dans ces deux livres : « le retour d’Israël » et « l’espérance du monde » qui m’a donné l’explication suivante. Il était un français converti au judaïsme. Il a étudié avec le Rav Kook d’ailleurs. Professeur de philosophie d’origine protestante. Il m’avait donné comme réponse qui ne me satisfait pas vraiment mais cela vaut la peine d’être cité : étant donné que les chrétiens dénient aux juifs l’identité d’Israël de la Bible, c’est un bien de s’opposer à cela en parlant des juifs pour que ce soit bien clair que ce sont les juifs qui sont Israël. Quoiqu’il en soit du point de vue même de l’intention de la תּוֹרָה l’identité hébraïque est autre que l’identité juive. Elle en est la racine mais c’est surtout le fait que l’identité hébraïque est au temps de la prophétie. Alors que l’identité juive apparait après l’arrêt de la prophétie. L’identité juive est une identité d’exil alors que l’identité hébraïque est celle d’Israël sur sa terre. Les différences sont énormes. Les Juifs ont oublié qu’ils étaient des hébreux. C’est pourquoi il y a tant de problèmes en particulier chez les juifs religieux opposés au sionisme. Le sionisme est un mouvement historique important qui ramène les juifs à leur identité hébraïque. C’est plein de problèmes mais c’est un événement massif. Beaucoup de juifs religieux ou pas mais surtout les juifs religieux antisionistes ont un obstacle à régulariser leur situation en devenant israélien c’est-à-dire redevenir hébreu, parce que cela leur apparait comme une sorte de trahison vis-à-vis de l’identité juive. Or, l’identité juive a toujours été une identité provisoire entre deux temps hébreux. Cela a pris tellement de temps, l’inertie fait que des évidences s’inversent. Les juifs se sont toujours connus pendant 2600 ans depuis l’exil du 1er royaume de Judah, et le 1er à qui officiellement est donné le nom de juif en tant que juif, c’est le Judéen Mardochée [Ester 2:5]   אִישׁ יְהוּדִי, הָיָה בְּשׁוּשַׁן הַבִּירָה; וּשְׁמוֹ מָרְדֳּכַי

 

Le mot de « יְהוּדִי» signifie d’abord membre de la tribu de Judah, membre du royaume de Judah et après seulement cela signifie juif de l’exil. Le 1er grand juif de l’exil est Mardochée qui est un judéo-perse. Un hébreu qui devient persan et qui est à la cour du roi Assuérus exactement comme Joseph et Moïse à la cour du Pharaon : judéo-quelqu’un d’autre. C’est une identité d’exil.

Je vous engage à réagir car c’est le sort de notre identité et la dignité de notre identité qui est en jeu chaque fois qu’on entend ces anachronismes, il faut remettre les choses au point. Plus jeune je n’ai jamais eu le courage de la faire. Lorsque les universitaires parlent de judaïsme en parlant de l’identité hébraïque de la Bible c’est un anachronisme négatif.

Nous vivons un temps qui a renvoyé l’identité juive à la préhistoire. Les juifs de la diaspora sont nos ancêtres préhistoriques déjà. C’est important parce que le statut socio-politique juif est un statut anormal et provisoire. C’est pourquoi si on attache la révélation de la תּוֹרָה à cette identité galoutique anormale et provisoire, c’est une catastrophe. En réalité notre génération a rejeté le statut juif de l’exil. Beaucoup de juifs ont rejeté le judaïsme avec. C’est un problème que nous avons depuis 4000 ans. Les juifs ont oublié qu’ils étaient des hébreux, d’où les problèmes avec l’Etat d‘Israël. Et les israéliens risquent d’oublier qu’ils étaient des juifs, d’où les problèmes des ‘Hilonim qui rejettent la תּוֹרָה en même temps que l’exil. Qui est responsables ? Les responsables sont ceux qui ont attachés la תּוֹרָה avec l’exil. Alors que l’exil est contraire à la תּוֹרָה. La תּוֹרָה n’a été révélée à Israël que quand il est sorti d’exil et Jacob n’a reçu le nom d’Israël que lorsqu’il est sorti d’exil. Vous voyez la catastrophe de collision de concepts qui se produit là. J’ai vécu ce temps où l’on devait réagir à l’antisémitisme, c’est-à-dire aux anti-juifs, mais il faut prendre conscience que si on revient aux sources on revient aux sources de l’identité hébraïque.]

 

Lorsqu’Abraham est sorti d’Our-Qasdim, sur le chemin de ’Haran, [certains commentateurs disent déjà à Our-Qadim, mais la majorité des commentateurs disent à ‘Haran, alors qu’il avait déjà quitté Our-Qasdim c’est dit dans les versets précédents] Dieu se révèle à Abraham et lui dit : « לֶך לְךָ, va t’en pour toi vers le pays אֲשֶׁר אַרְאֶךָּ - traductions habituelles rendent « que je te désignerai », « que je te montrerai ».

Or, si on comprend bien la situation, elle est incompréhensible : Dieu lui dit « va je t’attends quelque part, si tu vas là-bas tu me trouveras là-bas ».

Il y a une lecture midrashique : « va vers les pays où je Me montrerai à toi אֲשֶׁר אַרְאֶךָּ » 

 

En réalité, le texte nous a déjà dit qu’Abraham était sorti d’Our-Qasdim pour aller vers le pays de Canaan parce qu’il savait où il allait, il rentrait chez lui. Il sait où c’est et on n’a pas besoin de le lui dire. Mais une 2ème fois où « לֶך לְךָ» est employé dans ce récit, c’est quand Abraham est arrivé dans le pays de Canaan, Dieu se révèle à lui pour lui dire : « וְלֶךְ-לְךָ, אֶל-אֶרֶץ הַמֹּרִיָּה - Va jusqu’au mont Moriah ». Et c’est au mont Moriah qu’aura l’épreuve de יִצְחָק עֲקֵדָת. Le mont Moriah est appelé la montagne où Dieu s’est révélé, s’est fait voir : « בְּהַר יְהוָה יֵרָאֶה».

 

Il y a là un enseignement très peu connu : lorsqu’Abraham quitte l’exil et se dirige vers le pays de Canaan, nommé אֶרֶץ יִשְׂרָאֵל quand Jacob sera nommé Israël, Dieu lui dit que le sens de la sortie d’exil est d’arriver au הַמֹּרִיָּה הַר là où le temple sera construit.  

 

Nous voyons cela comme paradigme, comme modèle, de la structure du livre de שְׁמוֹת: on nous raconte la sortie d’Egypte, la fin de l’exil, et tout de suite après les lois de construction du tabernacle qui préfigurent la construction du temple. Cela se réfère à la question concernant la définition du livre de שְׁמוֹת: quel est l’objectif de la fin de l’exil ?

 

Est-ce d’aller au Sinaï pour recevoir la תּוֹרָה et ensuite d’aller n’ importe où dans le monde jusqu’à l’arrivée du Messie ? Ce qui est la thèse des orthodoxes, la thèse la plus hétérodoxe de la תּוֹרָה, je vous parle des orthodoxes antisionistes : recevoir la תּוֹרָה au Sinaï et ensuite aller partout dans le monde pour  des raisons mystérieuses pour expliquer leur présence au sein des גּוֹיִם... Convalescence d’expiation : à l’hôpital dans les terres d’asiles...

J’ai souvent entendu les juifs français parler de la France avec ferveur comme « terre d’asile ».

 

Entendu d’un de mes maîtres : un Midrash sur un Midrash : Israël est souvent comparé au fils du roi. Un roi dont le fils était malade a envoyé son fils au loin pour se soigner avec la consigne : dès que tu es guéri, reviens le plus vite possible !

Il lui a donné une valise de médicaments.

Le Roi s’impatiente et envoie un télégramme révélé : « reviens tu es guéri ! »

Le fils : « pas encore, j’ai encore des médicaments... »

 

La discussion avec des juifs de diaspora fait apparaître l’alibi des מִצוֹת à accomplir en גָלוּת  ... 

 

Judah Halevi : la faute que l’exil puni est précisément l’entêtement à rester dans l’exil. L’exil punit l’exil. Effectivement, lorsque l’histoire des juifs en exil devient une histoire de fous, personne n’y comprenant plus rien, on a oublié que l’histoire de fous c’était d’habiter ailleurs que chez soi. Il faut donc se réhébraïser pour de nouveau voir les choses en clair. La תּוֹרָה nous a déjà raconté cette histoire-là.

 

Effectivement, il y a deux positions :

 

  La position des orthodoxes antisionistes pour qui l’objectif de la sortie d’Egypte était d’aller au Sinaï recevoir la תּוֹרָה pour après aller partout et revenir à l’arrivée du Messie.

 

  La réponse de la תּוֹרָה est toute autre : l’objectif de la sortie d’Egypte était d’aller le plus vite possible construire le Temple à Jérusalem. Il y a eu un retard de 40 ans pour expliquer à cette génération qui est sortie d’Egypte. La sanction des 40 ans vient sanctionner la faute du veau d’or. Mais en réalité, la תּוֹרָה répond, l’objectif de la sortie d’Egypte est de construire le Temple au plus vite.

 

Au début de Parashah שְּׁמִינִי, dans וַיִּקְרָא, le jour de l’inauguration du Temple était le 1er Nissan de la 2ème année de la sortie d’Egypte. Le Midrash dit que ce jour-là est aussi grand que le jour de la création du monde. Un deuxième Midrash ajoute : ce jour là est plus grand que le jour de la création du monde. Parce que Dieu a créé un monde en vue que les créatures qu’Il a créé lui construisent un Temple pour pouvoir résider dans le monde qu’il a créé.

 

Il y a là un principe de la lecture de la תּוֹרָה qui est très important : on comprend les raisons ultimes des choses, lorsqu’on comprend la conséquence. Quelle est la conséquence de la création du monde ? C’est qu’il y a en-haut et en-bas.   

On ne comprend pas le pourquoi de la création mais on comprend la conséquence : la conséquence de la création du monde c’est qu’il y a un en-haut - la demeure de Dieu - et un en-bas - la demeure de l’homme privé de Dieu.

 

Ce Midrash dit que : il n’y a eu de création du monde que pour qu’il y ait un en-bas où Dieu puisse résider. La demeure « naturelle » de Dieu est en-haut. Mais Il a voulu faire un en-bas et Il ne peut y résider que si on lui fait un Temple.

 

Le Midrash dit :

« Itaavah HaQadosh Baroukh Hou Ladour Bata’htonim »

« Dieu a désiré résider parmi les êtres d’en bas »

 

Alors Il a créé le monde.

Certains pourrait poser la question : Et pourquoi Dieu a-t il désiré résider dans le monde d’en-bas ? Ceux qui ont compris la question savent que la question ne se pose pas. Puisqu’il y a un en-bas, c’est donc que Dieu a voulu qu’il y ait un en-bas. C’est ce que le Midrash ajoute : Afin de résider dans le monde d’en-bas. Avec les Ta’htonim, les êtres d’en-bas et pas avec les êtres d’en-haut. Sous forme un peu sibylline : A la question pourquoi Dieu a créé le monde ? Les rabbins ont l’habitude de répondre : il n’y a que les parents d’enfant qui comprennent pourquoi Dieu a créé le monde. Pourquoi avoir des enfants ?

Demander à un père de famille. La question ne se pose même pas.

Chacun qui a encore la mémoire de son premier enfant comprend pourquoi Dieu a créé le monde.

 

En général, les questions qui n’ont pas de réponses sont des questions qui ne se posent pas.  

Cela dépend aussi de qui pose cette question. Celui qui la pose n’est pas dans le coup.

 

Réponse פְּשָׁט à la question :

- Quelle est l’objectif de la sortie d’Egypte ?

- La construction du Temple !

 

Or, je vous rappelle un détail de la Halakha :

Pendant qu’on construit le temple, c’est un monde profane qui n’a pas encore l’endroit de la sainteté : l’expression biblique c’est « אֶל-הַמָּקוֹם אֲשֶׁר-יִבְחַר יְהוָה » lorsqu’il vous sera révélé quel sera l’endroit que Dieu a désiré, choisi pour y résider, ce sera en fin de compte à Jérusalem où le Temple sera construit...

 

A partir du moment où le Temple est construit, il y a une particularité très importante que nous allons étudier dans le texte.

 

Nous allons voir que dès que les premières מִצוֹת concernant la construction du Tabernacle vont être données et juste avant ce récit de la faute du veau d’or, la תּוֹרָה a décidé de rappeler la loi du Shabbat.

 

Pourquoi rappeler la loi de Shabbat à propos de la construction du Temple en relation avec la faute du veau d’or ?

 

Chapitre 31 verset 12-13

וַיֹּאמֶר יְהוָה, אֶל-מֹשֶׁה לֵּאמֹר

וְאַתָּה דַּבֵּר אֶל-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל, לֵאמֹר, אַךְ אֶת-שַׁבְּתֹתַי, תִּשְׁמֹרוּ:

  כִּי אוֹת הִוא בֵּינִי וּבֵינֵיכֶם, לְדֹרֹתֵיכֶם--לָדַעַת, כִּי אֲנִי יְהוָה מְקַדִּשְׁכֶם

Et Dieu dit à Moïse Quand à toi parle aux enfants d’Israël pour dire Cependant vous préserverez mes Shabbat Car c’est un signe entre Moi et vous pour vos générations Pour savoir que Je suis הַשֵּׁם qui vous sanctifie.

 

On est en train de recevoir les מִצוֹת de la construction du Temple et la תּוֹרָה prévient tout de suite : Cependant vous préserverez mes שַׁבְּתֹת...

Pendant que vous construirez le Temple il faut préserver le Shabbat. On pourrait croire que la tache de la construction du Temple a une valeur supérieure au Shabbat et qu’il doive être construit le plus vite possible, même pendant Shabbat.אַךְ  « seulement » « attention » ! On aurait pu croire que construire le Temple suspende les lois du Shabbat. La תּוֹרָה dit non, il faut garder les lois du Shabbat.

 

כִּי אוֹת הִוא בֵּינִי וּבֵינֵיכֶם, לְדֹרֹתֵיכֶם--לָדַעַת, כִּי אֲנִי יְהוָה מְקַדִּשְׁכֶם

Car c’est un signe entre Moi et vous pour vos générations Pour savoir que Je suis הַשֵּׁם qui vous sanctifie.

 

On ne voit pas trop quel est le rapport ? Apparait de manière très simple le fait que Dieu ait décidé  qu’Israël construise le Temple est le signe que Dieu va sanctifier Israël et qu’Il a décidé que Sa קְדוּשַה sa sainteté va résider en Israël. Quel rapport avec « Gardez mes Shabbat » ?

 

On apprend dans le Talmud [Yerushalmi (Nedarim 3:9)] que le respect du Shabbat équivaut à toute la תּוֹרָה. Shakoul kéneged kol haMitsvot Koulam. Très souvent, suivant les expériences historiques que nous avons eues dans l’histoire, le fait que les maîtres d’Israël mettent en évidence le fait que tel commandement négligé dans telle ou telle circonstance des péripéties de notre histoire si longues et si complexes, doit être mise en évidence avec force et que cela équivaut à toute la תּוֹרָה. Ce n’est pas que le Shabbat en particulier mais il faut comprendre le pourquoi de cette équivalence à toute la תּוֹרָה. 

 

On apprend d’un autre contexte (Kiddoush du Shabbat matin) que ce signe qu’il y a entre Dieu et l’homme « c’est un signe entre vous et Moi... אוֹת הִוא לְעֹלָם … » Que pendant 6 jours הַשֵּׁם a façonné les cieux et la terre ». L’alliance du Shabbat est le rappel que le monde a un Créateur.

 

Le récit de la תּוֹרָה nous dit que pendant les 6 jours du commencement Dieu a façonné le monde et au 7ème jour, l’a transmis à l’homme pour entrer en Shabbat.

 

Pendant 6 jours Il a agit le monde à partir de son état de תֹהוּ וָבֹהוּ l’a façonné pour le rendre habitable pour l’homme : c’est le 6ème  jour et Dieu cesse d’intervenir comme Créateur et cela risque de faire oublier que le monde a un Créateur. Lorsque Dieu a cessé d’intervenir comme Créateur, le monde fonctionne d’après ce qu’on appelle les lois de la nature et cela risque de faire oublier que le monde a un Créateur. Alors la תּוֹרָה institue l’alliance du Shabbat, un jour par semaine sur le modèle des jours du commencement, 6 jours et le 7ème , l’homme s’interdit de vivre dans le monde en tant que nature, il vit dans le monde en tant que création, et il s’interdit d’intervenir dans le fonctionnement du monde.

 

C’est le sens minimum de toutes les lois du Shabbat : l’interdiction de tout acte qui nécessite une décision de la volonté pour modifier quoique ce soit dans le monde. Il ne s’agit pas de travail et repos. D’autre part, indépendamment des 39 travaux interdits le Shabbat il y a le principe du Oneg Shabat qu’il est interdit de se fatiguer, d’autre part. Mais les commandements d’interdiction de travail le Shabbat n’ont rien à voir avec le travail et le repos.

 

Cela ne veut pas dire qu’Il s’est reposé. Shabbat signifie qu’Il a cessé d‘intervenir comme Créateur. D’autre part nous avons un verset qui dit : וַיָּנַח בַּיּוֹם הַשְּׁבִיעִי. Mais c’est un tout autre verset et non pas celui qui définit le Shabbat. Vous vous référerez á cet autre verset. Que signifie וַיָּנַח, בַּיּוֹם הַשְּׁבִיעִי ? Il y a ici une notion d’étape.מְנוּחַ  , le repos est très proche de la racine de Ana’hah qui donnerait le mot de Ta’hanah avec les lettres inversées. Ki lo batem ela meno’ha bela na’hala.

 

Le fait d’avoir introduit cette idée de fatigue et de repos est une erreur sémantique. D’autant plus que l’erreur commence dès le début : quand on dit « Dieu a créé le monde en 6 jours ». C’est faux en hébreu. Dieu a créé le monde dans l’instant du commencement « בְּרֵאשִׁית בָּרָא ». Et pendant les 6 jours « עֲשֵׂה» Il a agit, Il a façonné, Il a fait.

כִּי שֵׁשֶׁת-יָמִים עָשָׂה יְהוָה אֶת-הַשָּׁמַיִם וְאֶת-הָאָרֶץ

עָשָׂה et non pas בָּרָא.

Et il n’y a pas «  יָמִים בְּשֵׁשֶׁת » mais « שֵׁשֶׁת-יָמִים »: Dieu en a fait 6 jours de ce monde du chaos du commencement.  

 

Et donc le fait du Shabbat va faire oublier aux hommes qu’il y a un Créateur. Donc l’alliance du Shabbat réintègre le signe que le monde a un Créateur. Pourquoi est-ce important ?

 

Précisément parce que toute idolâtrie est la négation du Créateur. Donc le Talmud va dire que celui qui pratique le Shabbat, comme il faut le pratiquer, a répudié l’idolâtrie et cela équivaut à toutes les מִצוֹת de la תּוֹרָה.

 

Talmud:

Shomer Shabat kéhilrato afilou oved avodah zara kélo Enosh moralim lo shene emar shomer shabat me’halelo

Il y a un verset du prophète Isaïe qui parle de celui qui pratique le Shabbat afin de ne pas le profaner מְחָלֵלוֹ. La גְּמָרָא dit : Al tiqré me’halelo Aval Ma’houl lo

Ma’houl lo de quoi ?

De ne pas avoir reconnu que le monde a un Créateur, d’avoir été idolâtre. Etre idolâtre c’est ériger en divinité une des forces du monde créé. L’idolâtrie c’est la négation de la création du monde.

 

Le Talmud dit : Par conséquent, celui qui pratique Shabbat comme il faut, même s’il a été idolâtre comme au temps d’Enosh on lui pardonne.

 

Car le verset dit que celui qui pratique Shabbat le pratique en vue de ne pas le profaner. Or, c’est cela pratiquer Shabbat en vue de ne pas le profaner.

 

Quelqu’un qui a été idolâtre sans avoir l’intention de nier le créateur alors on lui pardonne le fait d’avoir été idolâtre. Celui qui pratique le Shabbat dans sa règle vraiment alors c’est le signe qu’il reconnait qu’il a un Créateur.

 

Si la תּוֹרָה rappelle l’alliance du Shabbat avec la faute du veau d’or, c’est parce que le récit de la faute du veau d’or va monter que à cause de la construction du Temple il y a le risque de violer le Shabbat.

 

Q : Comment comprendre alors la prière de מִנְחָה du Shabbat où est répété une dizaine de fois מְנוּחַ ?

R : c’est pourquoi j’ai parlé de cet autre verset וַיָּנַח בַּיּוֹם הַשְּׁבִיעִי parce que j’attendais cette question.

 

Dès qu’on est habitué à l’étude en hébreu avec les commentaires de la תּוֹרָה שֶׁבְּעַל פֶּה on s’aperçoit vite que toutes les traductions sont fausses. Le grand mystère est cet attrait des hommes pour la תּוֹרָה même dans une traduction fausse.

 

La 1ère traduction : Ptolémée qui a imposé de traduire la תּוֹרָה en grec : la traduction des Septante : les 70 sages du Sanhédrin. Ils les ont séparés chacun dans une chambre. Dieu les a inspirés et leur traduction comportait les mêmes changements. Grande leçon : pour mettre les rabbins d’accord il faut les séparer.

 

***

Il nous faut comprendre l’intention de nous rappeler ce commandement du Shabbat avant le récit de la faute du veau d’or :

 

1ère indication : pendant la construction du Temple, il faut observer le Shabbat. On va l’apprendre de manière paradoxale : une fois le temple construit, dans le temple les lois du Shabbat sont levées.

 

31:14

וּשְׁמַרְתֶּם אֶת-הַשַּׁבָּת כִּי קֹדֶשׁ הִוא לָכֶם; מְחַלְלֶיהָ מוֹת יוּמָת--כִּי כָּל-הָעֹשֶׂה בָהּ מְלָאכָה וְנִכְרְתָה הַנֶּפֶשׁ הַהִוא מִקֶּרֶב עַמֶּיהָ

Et vous préserverez le Shabbat Car il est sainteté pour vous Celui qui le transgressera mourra Et tout celui qui fait un travail le Shabbat Sera retranché Chaque personne Du dedans de son peuple

 

31 :15

שֵׁשֶׁת יָמִים יֵעָשֶׂה מְלָאכָה וּבַיּוֹם הַשְּׁבִיעִי שַׁבַּת שַׁבָּתוֹן קֹדֶשׁ לַיהוָה; כָּל-הָעֹשֶׂה מְלָאכָה בְּיוֹם הַשַּׁבָּת מוֹת יוּמָת

Pendant 6 jours le travail sera fait Et le 7ème jour Shabbat chômage cessation d’activité …

 

31 :16

וְשָׁמְרוּ בְנֵי-יִשְׂרָאֵל אֶת-הַשַּׁבָּת לַעֲשׂוֹת אֶת-הַשַּׁבָּת לְדֹרֹתָם, בְּרִית עוֹלָם

 

31 :17

בֵּינִי, וּבֵין בְּנֵי יִשְׂרָאֵל--אוֹת הִוא, לְעֹלָם:  כִּי-שֵׁשֶׁת יָמִים, עָשָׂה יְהוָה אֶת-הַשָּׁמַיִם וְאֶת-הָאָרֶץ, וּבַיּוֹם הַשְּׁבִיעִי, שָׁבַת וַיִּנָּפַשׁ

 

Et une fois que l’alliance du Shabbat a été rappelée, alors à ce moment-là seulement verset 18 :

 

31:18

וַיִּתֵּן אֶל-מֹשֶׁה כְּכַלֹּתוֹ לְדַבֵּר אִתּוֹ בְּהַר סִינַי שְׁנֵי לֻחֹת הָעֵדֻת--לֻחֹת אֶבֶן כְּתֻבִים בְּאֶצְבַּע אֱלֹהִים

Et Il donna à Moïse lorsqu’il eu achevé de parler avec lui sur la montagne du Sinaï Les deux tables du témoignage tables de pierres écrites du doigt de Elohim

 

Voilà un exemple : comment comprendre, ce en quoi on croit, que les deux tables de la loi étaient écrites par le doigt de Dieu ? Qui comprend cela ? Au point que le Midrash va mettre en évidence qu’il y a avait 2 lettres qui ne tenaient que par miracle : ס et מ.

Et le Midrash dit à côté : Il faut comprendre pourquoi il n’y a pas de ס dans les 10 commandements. C’est à étudier.

 

Et juste après :

Et le peuple vit que Moïse tardait á redescendre de la montagne…

C’est le début du récit de la faute du veau d’or.

 

32:1

וַיַּרְא הָעָם, כִּי-בֹשֵׁשׁ מֹשֶׁה לָרֶדֶת מִן-הָהָר; וַיִּקָּהֵל הָעָם עַל-אַהֲרֹן, וַיֹּאמְרוּ אֵלָיו קוּם עֲשֵׂה-לָנוּ אֱלֹהִים אֲשֶׁר יֵלְכוּ לְפָנֵינוּ--כִּי-זֶה מֹשֶׁה הָאִישׁ אֲשֶׁר הֶעֱלָנוּ מֵאֶרֶץ מִצְרַיִם, לֹא יָדַעְנוּ מֶה-הָיָה לוֹ

Et le peuple vit que Moïse tardait...

 

On va réfléchir sur le mot de Ha-Am le peuple. Et on va apprendre que l’initiative d’avoir réclamé cette idole à Aaron vient du « peuple ». Quel est ce peuple dans ce récit ?

 

Lorsque Moïse est monté sur la montagne pendant les 40 jours, le peuple en-bas attendait le retour de Moïse et il y a eu un retard de 6 heures d’après le Midrash. Leur compte de calendrier n’était pas le même que celui de Moïse. Il leur avait donné rendez-vous 40 jours après, et au bout de 6 heures il n’est pas encore descendu de la montagne...

 

Le Midrash le dit sur l’expression כִּי-בֹשֵׁשׁ מֹשֶׁה  car Moïse a tardé : בֹשֵׁשׁ = ב שֵׁשׁ  pendant les 6 heures de retard. Il y a là un mystère de la קַבָּלָה. Qu’elle est cette impatience qui fait croire que Moïse ne va pas redescendre, et pourquoi cette panique à cause de 6 heures ?

Je ne vous parlerais pas des 6 heures mais du retard.

 

Voilà ce qu’il faut comprendre : Ce qu’a apporté Moïse dans la révélation de la תּוֹרָה à cette génération est une révolution totale dans l’histoire des religions. Jusque-là, c’est le paganisme et  l’humanité était habituée à adorer Dieu à travers les forces divines dans le monde. D’une certaine manière il y a dans la religiosité païenne, une très grande ferveur religieuse de diagnostic de la divinité dans le monde. C’est la racine du paganisme. On le retrouve dans tous les rituels de la liturgie chrétienne tirée de l’astrologie païenne biblicisée. Tous les grands rites que les chrétiens appellent mystères sont des projections du paganisme astrobiologique de l’antiquité païenne d’avant la תּוֹרָה sur le récit de la bible.

 

Il y a un mythe astrologique dont le modèle est celui d’Isis et Osiris des égyptiens. Je découvre là un problème auquel vous n’êtes peut-être pas familier. Mais le christianisme est, 2000 ans après, une projection du récit de la faute du veau d’or dans la diaspora juive de la destruction du 2ème royaume de Judah.

On voit que c’est l’irruption de l’idolâtrie du עֵרֶב רַב en Israël. Elle a triomphé avec le christianisme. J’en donnerai quelques indications: c’est le mythe du soleil ressuscité, qui est le mythe d’Isis et Osiris chez les grecs. Ceux qui sont familiers avec le rite chrétien, surtout catholique, il y a énormément de choses qui pour eux sont des mystères car ils ont même oublié le sens de cette idolâtrie, et que pour les comprendre il faut avoir étudié les paganismes astrologiques.

 

Exemple : les églises sont orientées de telle sorte que les vitraux du fronton soient face au levant. C’est au moment où le 1er rayon de soleil frappe le vitrail que le prêtre dans la cérémonie de la messe, élève l’hostie.  C’est une religion du mythe solaire. Raison pour laquelle il reprenne le jour  du dimanche, qui est le jour du soleil,  comme jour du Seigneur.

 

Retenir que c’est un mythe astrologique de type égyptien qui a fait irruption dans la société judéenne au temps du 2ème temple. Et c’est la formation du christianisme.

Cf. : les expressions de type astrologiques : « Il y a beaucoup de chambre dans la maison de mon père » se réfère aux signes du zodiaque.

 

Le drame c’est que l’ensemble des chrétiens, sauf les chrétiens orthodoxes qui ont conservé le sens de ces rites, ont complètement perdu de vue tout cela. Cela s’est évanoui dans la mémoire chrétienne, et ils appellent cela des « mystères »...

Le soleil ressuscite comme par hasard à la pleine lune du printemps.

Il meurt à Noël ... c’est l’histoire du cycle solaire.

Ils ont repris un calendrier solaire dans leur hérésie proprement chrétienne et en particulier en déplaçant la fixation de la date de pentecôte qui n’est plus 50 jours après Pâques mais 50 jours après le Shabbat de Pâques, le dimanche des rameaux pour eux.

 

***

 

On va surtout tenter de comprendre le mot de עָם.

 

שְׁמוֹת Chapitre 12 verset 38.

La תּוֹרָה raconte la sortie d’Egypte. Au verset 37 elle nous raconte que les enfants d’Israël étaient au nombre de 600 000 et le verset 38 ajoute :

 

שְׁמוֹת - בֹּא  12:38

וְגַם-עֵרֶב רַב, עָלָה אִתָּם, וְצֹאן וּבָקָר, מִקְנֶה כָּבֵד מְאֹד

Et même un grand mélange monta avec eux ainsi que du menu et du gros bétail en troupeaux très considérables

 

En hébreu la racineעֵרֶב  = ע/ר/ב a plusieurs sens qui tous se référent à cette idée de mélange. Par exemple, l’adjectif « עָרֵב» dans « עָרֵב קוֹל» signifie une voix douce, agréable dans le sens de la synthèse des contraires et donc l’idée de mélange. עָרֶב: la douceur qui vient d’une mélodie où l’on a mélangé.

« עֶרֶב » le soir : moment où les formes commencent à se mélanger. Le moment où les formes qui étaient distinguées pendant la journée. « בֹקֶר » le matin, le moment de la distinction des formes. « לְבַקֵר » racine qui a différent sens = critiquer, diagnostiquer, mais surtout distinguer.

 

La גְּמָרָא donne un certain nombre de critères dont l’un est passé dans le français (sûrement à travers l’école de Rashi) :

 

  Distinguer entre chien et loup au moment du crépuscule du matin où l’on peut déjà distinguer deux choses qui se ressemblent beaucoup, le chien et le loup. Cela a un sens intellectuel et spirituel important : c’est la même identité à l’état sauvage et à l’état domestiqué. Lorsqu’on arrive à distinguer cela, c’est un des signes du שְׁמַע קרִיאָת du matin.

 

  Distinguer entre le bleu et le blanc : la גְּמָרָא s’étonne : même pendant la nuit on distingue au clair de lune ? Non : Bein Tekhelet Bein Laban Shebo : entre une étoffe bleue et des fils blancs qui sont restés dans la laine non encore teinte : le moment où Jacob sort de chez Laban en fin d’exil. La גְּמָרָא attribue la couleur bleue à Jacob. 

 

Voilà la source de la גְּמָרָא [Sotah 17b] :

Pourquoi particulièrement le תְּכֵלֶת [pour la מִצְוָה de Tzitzit] parmi tous les autres matériaux de couleur? Parce que le תְּכֵלֶת est semblable à la mer, et la mer est semblable au ciel, et le ciel est semblable à trône de la Gloire. Comme il le dit, "Et ils ont vu le Dieu d'Israël: sous ses pieds, il y avait l'image d'une brique de saphir, comme le ciel de la pureté (Exode 24:10)," et comme il est écrit : «comme une pierre de saphir était l'apparence du trône » (Ezéchiel 1:26).

 

Tekhelet domél haYam, Yam domel haRaqia ve raqia domel haKissé Hakavod

Le bleu dont on parle ressemble à la mer : bleu couleur de la profondeur. Si on perçoit l’épaisseur de l’eau apparait une couleur qui est vert-bleu, c’est תְּכֵלֶת.

De la même manière l’épaisseur du ciel a la couleur bleue. S’il y a des peintres parmi vous, ils savent cela.

 

C’est comparé au bleu de la mer qui est comparé au bleu du ciel qui est comparé au הַכָּבוֹד כִּסֵּא le trône de la gloire. Cette couleur est attribuée à Jacob qui est appelé « עוֹלָם שֵׁל תַכלִיתוֹ» la finalité du monde. תְּכֵלֶת c’est la couleur du תַכלִית. C’est la perception de la profondeur : l’épaisseur.

 

Et alors la גְּמָרָא explique le verset de וַיִּשְׁלַח  32 :26

 

וַיַּרְא, כִּי לֹא יָכֹל לוֹ, וַיִּגַּע, בְּכַף-יְרֵכוֹ; וַתֵּקַע כַּף-יֶרֶךְ יַעֲקֹב, בְּהֵאָבְקוֹ עִמּוֹ

Voyant qu'il ne pouvait le vaincre, il lui pressa la cuisse; et la cuisse de Jacob se luxa tandis qu'il luttait avec lui

 

où Jacob a été atteint à la paume de la hanche : בְּכַף-יְרֵכוֹ  c’est le כַּף du mot de יֶרֶךְ. Il a été atteint au הַכָּבוֹד כִּסֵּא. Cela veut dire qu’avant qu’Esaü ne triomphe c’est la figure de Jacob qui est la figure de l’homme dans le trône des 4 figures (l’aigle, le lion, le taureau et l’homme). Quand Esaü a triomphé, la figure de Jacob est tombé du הַכָּבוֹד כִּסֵּא, donc Esaü a atteint Jacob à la paume de la hanche כַּף-יֶרֶךְ, cela veut dire que dans la lignée des engendrements de Jacob, il y a la tête d’Esaü. Ce sont tous les descendants de Jacob qui quittent l’identité d’Israël pour passer chez Esaü et effectivement nous savons que כַּף-יֶרֶךְ יַעֲקֹב, tout ceci va être commémoré par la מִצְוָה du גִּיד הַנָּשֶׁה que l’on traduit par le nerf sciatique alors que c’est le nerf qui innerve les organes sexuels. C’est le nerf des engendrements. C’est très schématique tout ceci s’étudie dans la גְּמָרָא.

 

Le bleu est la couleur de Jacob. Il est en exil chez Laban, Lorsque Jacob sort de chez Laban => lorsqu’on arrive à distinguer Jacob de Laban c’est-à-dire le neveu et l’oncle, l’identité de sortie d’exil et l’identité d’exil, c’est le temps du שְׁמַע קרִיאָת du matin.         

 

Alors effectivement, c’est la distinction quand c’est בֹקֶר, on arrive à distinguer les choses qui étaient confondues... Entre chien et loup, entre bleu et blanc...

Et pour la Halakha c’est quand on arrive a reconnaitre son ami à 4 pas. Alors c’est le moment de dire שְׁמַע קרִיאָת. Le critère c’est lorsqu’on distingue l’identité personnelle de chacun.

 

***

 

עֵרֶב signifie donc le mélange.

שְׁמוֹת -  12 :38

וְגַם-עֵרֶב רַב, עָלָה אִתָּם, וְצֹאן וּבָקָר, מִקְנֶה כָּבֵד מְאֹד

Et même un grand mélange monta avec eux ainsi que du menu et du gros bétail en troupeaux très considérables.

 

Rashi sur  עֵרֶב רַב:

תַּעֲרוֹבֶת אוּמוֹת עוֹבְדֵי כּוֹכָבִים שֶׁל גֵּרִים: – mélange des peuples de convertis à Israël.

 

Quel est ce grand mélange de convertis qui est sorti d’Egypte avec Israël ?

 

Au moment où Dieu va révéler à Moïse qui est sur la montagne la faute du veau d’or :

 

. כִּי-תִשָּׂא verset 7

32:7

וַיְדַבֵּר יְהוָה, אֶל-מֹשֶׁה:  לֶךְ-רֵד--כִּי שִׁחֵת עַמְּךָ, אֲשֶׁר הֶעֱלֵיתָ מֵאֶרֶץ מִצְרָיִם

Et הַשֵּׁם parla à Moïse va descend car ton peuple s’est mal conduit (littéralement ‘a détruit son chemin = לְשַׁחֵת אֶת-דַּרְכּוֹ) que tu as fait monté du pays d’Egypte

 

Rashi sur   שִׁחֵת עַמְּךָ

שִׁחֵת הָעָם לֹא נֶאֱמַר אֶלָּא עַמְּךָ עֵרֶב רַב שֶׁקִּבַּלְתָּ מֵעַצְמְךָ וְגִיַּרְתָּם וְלֹא נִמְלַכְתָּ בִּי וְאָמַרְתָּ טוֹב שֶׁיִּדְבְּקוּ גֵּרִים בַּשְּׁכִינָה הֵם שִׁחֲתוּ וְהִשְׁחִיתוּ

« Il n’est pas écrit « Le peuple s’est mal conduit » mais « ton peuple » עֵרֶב רַב le grand mélange que tu accepté de ta propre initiative, tu ne M’as pas demandé conseil, et tu t’es dit : c’est un bien que les convertis s’attachent à la שְּׁכִינָה. Ce sont eux qui ont fauté et ont fait fauter les autres » 

 

On découvre que Moïse a pris l’initiative d’intégrer à Israël tout un mélange de peuples. Et dans le Midrash que cite Rashi, Dieu lui fait le reproche de ne pas avoir pris conseil. 

 

En même temps qu’Israël, en Egypte, énormément de peuples ont été réduit en esclavage asservis par l’Egypte. Et lorsque la sortie d’Egypte s’est faite pour Israël, énormément de peuples ont demandé à profiter de cette sortie d’Egypte et à s’adjoindre au salut d’Israël.

 

Moïse les a acceptés, et il va introduire en Israël un danger. C’est ce peuple-là qui va induire la faute du veau d’or. Le peuple qui était avec les enfants d’Israël a vu que Moïse tardait et a demandé à Aaron de lui faire une idole pour remplacer Moïse. Judah Halevi dans le Kouzari : ce n’est pas du tout une idole pour remplacer Dieu, mais une idole pour remplacer Moïse.

 

Deux questions :

 

  Qu’est-ce qui a mené ce grand mélange à vouloir remplacer Moïse par une idole ?

 

  Pourquoi Moïse a pris l’initiative d’intégrer cet עֵרֶב רַב sachant ce risque de paganisation du lien à la תּוֹרָה en Israël ?

 

Moïse va introduire un bouleversement dans l’histoire des religions. Jusque-là les religions étaient païennes et idolâtres. Une religiosité très profonde mais à travers la divinisation des forces de la nature. Un de ces mythes païens je vous l’ai cité comme mythe fondateur du christianisme. C’est un rite astrologique projeté sur l’histoire d’Israël. Le mythe de la mort et résurrection du soleil très connu dans l’antiquité païenne, en particulier en Egypte.

 

Quelle est cette révolution que Moïse introduit ?

Il substitue la loi morale aux lois païennes comme définition de la religion. Si on lit le contenu des 10 commandements, c’est la révélation que la loi morale est la loi religieuse. Le lien à Dieu c’est la loi morale. Ce n’est pas l’astrologie ni la ferveur de la religion des païens qui est le « naturisme ». Les naturistes sont les païens modernes qui adorent les forces de la nature comme étant la véritable divinité. Alors que ce sont des forces que Dieu a créé au service du monde ; et ces forces-là sont divines mais ce n’est pas Dieu.

 

Lorsque ce peuple qui va s’insérer dans le salut d’Israël on voit que Moïse, qui était le prophète de la loi morale comme étant la loi religieuse, c’est la révélation du Sinaï : la loi morale promulguée comme chartre religieuse. Alors que jusque-là ce sont les mystères des forces de la nature qui représentent la divinité dans le monde. Rien à voir avec la loi morale. 

 

J’insiste parce qu’on est tellement familier avec le fait que religion et morale vont ensemble qu’on ne se rend pas compte que pour les גּוֹיִם cela n’a rien à voir. Il y a la religion, la relation à Dieu, à travers des comportements magiques et païens. Il y a énormément de superstitions qui s’insèrent même dans les communautés de croyants monothéistes et qui sont de cet ordre. 

 

Et puis voilà que le prophète de cette nouvelle religion de la loi morale comme médiation religieuse a disparu. Ils se réfèrent alors à cette entité de Moïse comme à celle du médiateur divinisé. Cet homme qui est entre Dieu et les hommes, cet homme qui est le grand inspiré de ce temps, va être considéré comme Dieu lui-même et puisqu’il n’est pas redescendu, il faut une idole pour le remplacer symboliquement.

 

Je vous raconte l’histoire de l’apparition du christianisme. Il faut quelque chose - une idole - qui symbolise ce mythe d’Israël médiateur entre Dieu et les hommes, qui est le mythe chrétien de base.

 

En général, les chrétiens font leur crucifix en or comme cette génération a fait son veau en or. Non pas qu’ils aimaient l’argent. Mais ils aimaient leur dieu qu’ils ont fait en or.

 

C’était un des signes du zodiaque qu’ils se sont mis à adorer en ce temps-là.

On sortait du signe du bélier et ils ont adoré le taureau. De la même manière le christianisme va apparaître quand on rentre dans le signe de la vierge. Avec le slogan : le messie nait de la vierge (signe du zodiaque.) C’est d’ailleurs au moment où le monde est entré dans le signe des poissons. Et comme vous le savez, on vient de quitter le signe des poissons pour entrer dans le signe du verseau. C’est la fin de l’église du poisson. Dans les années 50 on a supprimé cette obligation du poisson le vendredi : on a mis fin à l’église des poissons.

 

Derrière tous ces événements, il y a des réalités d’ordre astrologiques. Les 1ers chrétiens se reconnaissaient par le signe des poissons. L’église a pris acte qu’on est sorti du signe des poissons, pendant ce temps les juifs reviennent à Jérusalem. Et les hommes arrivent sur la lune...      

 

***

 

2 choses :

 

  Pourquoi ce עֵרֶב רַב a demandé à entrer dans le peuple d’Israël ?

  Pourquoi Moïse les a acceptés ?

 

La foi d’Israël c’est qu’on peut être libéré des conditionnements naturels et puis donc ce peuple-là du עֵרֶב רַב a été sensible à ce message que le salut c’est l’histoire d’Israël. Ils ont demandé à participer à la pâque d’Israël.

C’est un peu si vous voulez la proclamation que l’on fait au début du Seder : « que tout celui qui est dans le besoin vienne faire Pessah avec nous » et on ouvre la porte. C’est ce que Moïse a fait.

 

Pessah est le passage du monde de l’aliénation au monde libéré. Moïse a été le libérateur de l’histoire d’Israël, et en cela il a annoncé au monde que le salut est possible : On peut sortir d’exil !

 

Par conséquent, Moïse savait que du point de vue de la foi, ces hommes et femmes faisaient déjà partie d’Israël. Que leur a-t‘il manqué ? 

La préparation d’éducation morale des 6 générations depuis Abraham jusqu’à Moïse. Ce sont des païens qui ont cru dans la foi d’Israël mais qui ont adopté la foi d’Israël sous forme païenne. Cela commence par cette hérésie de l’idole du veau d’or qui remplace Moïse qui a tardé à descendre.

 

Voilà très schématiquement, la problématique de ce problème :

la faute des tribus d’Israël a été de n’avoir pas été capable d’empêcher cela. La faute a été induite par le עֵרֶב רַב mais c’est Israël qui l’a commise. Les descendants d’Israël n’ont pas été capables d’empêcher cela, sauf les membres de la tribu de Lévi en dehors de cette faute.

 

Il faut comprendre pourquoi Moïse a pris ce risque.

 

32:11

וַיְחַל מֹשֶׁה, אֶת-פְּנֵי יְהוָה אֱלֹהָיו; וַיֹּאמֶר, לָמָה יְהוָה יֶחֱרֶה אַפְּךָ בְּעַמֶּךָ, אֲשֶׁר הוֹצֵאתָ מֵאֶרֶץ מִצְרַיִם, בְּכֹחַ גָּדוֹל וּבְיָד חֲזָקָה

Et Moïse pria à la face de הַשֵּׁם son Dieu (une des rares fois où l’on parle du Dieu de Moïse) et il dit Pourquoi הַשֵּׁם ta colère s’enflammerait-elle ?

Contre Ton peuple Que Tu as fait sortir du pays d’Egypte. (Il s’agit d’Israël)

Avec une grande force et une main forte ?

 

On voit le contraste : Dieu reproche à Moïse : ton peuple que tu as fait monter d’Egypte (עֵרֶב רַב) et Moïse plaide pour le peuple de Dieu (Israël). Chaque fois qu’il s’agit d’Israël c’est לִיצִיאָת מִצְרָיִם la sortie d’Egypte et quand il s’agit du עֵרֶב רַב c’est ממִצְרָיִם עֲלִיָה la montée. C’est une règle dans tout le מִקְרָא, il n’y a pas d’exception. (Dans le Deutéronome, l’exception apparente s’explique d’après le contexte). Chaque fois que le texte parle des non-Israël qui montent en Israël ce sont les עוֹלִים חַָדשִים et le terme est עֲלִיָה. לַעֲלוֹת, c’est une montée. Et d’ailleurs lorsque les Juifs reviennent de l’exil pour eux aussi cela s’appellent la עֲלִיָה. Mais à la sortie d’Egypte c’était לִיצִיאָת  et non pas עֲלִיָה.

 

Moïse intercède non pas d’abord pour le עֵרֶב רַב qui a fauté mais pour Israël. Le raisonnement est le suivant : Si Tu perds cet עֵרֶב רַב alors c’est mauvais pour Israël qui devra retourner en exil et attendre de faire sortir un autre עֵרֶב רַב plus « kasher ». Parce qu’une des raisons de l’exil est de faire sortir ceעֵרֶב  de l’exil. C’est dire que toutes ces âmes sont prêtes pour la foi d’Israël ...

 

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