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KI TISSA - SÉRIE 1984

Le cours

 

  (1984)  כִּי תִשָּׂא

Parashah  כִּי-תֵצֵא:

Fin de Parashah  כִּי-תֵצֵא dans דְּבָרִים chapitre 25 à partir du verset 17.

De nouveau nous avons une correspondance puisque c’est le texte qui rappelle le conflit d’Amaleq contre Israël au moment de la sortie d’Egypte, et que de nouveau cet épisode se retrouve dans une toute autre époque, celle que commémore-la fête de Pourim, et de nouveau Israël dispersé dans le royaume de Perse est en butte avec la descendance d’Amaleq par le biais d’Aman. 

Parashah תְּצַוֶּה:

L’exception dans le récit de la תּוֹרָה depuis que la תּוֹרָה nous parle de Moïse c’est la seule Parashah où son nom n’apparait pas.  

 

27 :20

וְאַתָּה תְּצַוֶּה אֶת-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל, וְיִקְחוּ אֵלֶיךָ שֶׁמֶן זַיִת זָךְ כָּתִית--לַמָּאוֹר:  לְהַעֲלֹת נֵר, תָּמִיד

Et quant à toi, tu ordonneras aux בְּנֵי יִשְׂרָאֵל et ils prendront pour toi de l’huile d’olives pures broyées pour le luminaire pour faire monter une lumière perpétuelle

 

C’est la forme très analogue à celle rencontrée dans la Parashah תְּרוּמָה mais en plus avec la forme דַּבֵּר, אֶל-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל, il y a וְאַתָּה תְּצַוֶּה et quant à toi ...

Le thème concerne les מִצוֹת concernant l’huile du candélabre.

 

Il s’agit donc de la מִצְוָה concernant l’éclairage du Temple - qui est ici le מִּשְׁכָּן le tabernacle provisoire dans le désert – à travers le candélabre et il faut que ce soit de l’huile la plus pure possible : 1ère pression.

 

On s’attendrait à la forme צַוה אֶת-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל וַיְדַבֵּר יְהוָה, אֶל- מֹשֶׁה לֵאמֹר mais le texte embraille directement avec וְאַתָּה תְּצַוֶּה.

 

En partant d’un point de vue beaucoup plus général, le commentaire fondamental auquel je me réfère dit ceci :

Chaque נְשָׁמָה d’Israël a un lien avec la תּוֹרָה. La תּוֹרָה a été donnée pour Israël et Israël est l’Israël de la תּוֹרָה. Et donc ce principe que je vous cite est un enseignement traditionnel de la parshanout – l’étude du texte de la תּוֹרָה en tant que récit – indépendamment de l’étude du texte de la loi qui est l’étude du Talmud – c’est que chaque juif, chaque בֵּנ יִשְׂרָאֵל a son propre חִדֻשׁ de la תּוֹרָה – son propre visage de la תּוֹרָה qui lui correspond et qui ne peut être mis en évidence que par lui. Chaque נְשָׁמָה a une prérogative de pouvoir mettre en évidence un sens de la תּוֹרָה qui est vrai pour tous mais que elle seule à la capacité, le privilège, de pouvoir dire, de faire passer de la תּוֹרָה שֶׁבִּכתָּב à la  תּוֹרָה שֶׁבְּעַל פֶּה – de la תּוֹרָה écrite à la תּוֹרָה parlée.

 

C’est la notion de חִדֻשׁ: les mêmes enseignements dits par tel ou tel personne ont une valeur de תּוֹרָה très spécifique et chacun a sa spécificité propre. Ne serait-ce que dans un verset, un mot, chacun a son חִדֻשׁ.

 

Tous les grands חֲכָמִים on écrit un פִּירוּש de la תּוֹרָה -  leurs commentaires personnels. Il s’en est perdu malheureusement énormément. Mais de ce qui est resté en nombre et en valeur on s’aperçoit de toute cette חוֹכְמָה de la Parshanout de la תּוֹרָה. Sommes considérables de חוֹכְמָה de différentes valeurs, de différentes portées, mais que chaque נְשָׁמָה est capable d’apporter. On a souvent l’impression que tout a déjà été dit. Que peut-on ajouter de plus ? Sa façon de dire !

 

On a remarqué à ce propos que l’auteur du פִּירוּש qui n’a rien à dire sur une Parashah particulière : c’est précisément la Parashah de sa mort dans laquelle il ne voit rien de plus.

תְּצַוֶּה indique cela par le fait que le nom de Moïse n’apparait pas dans le texte. Cela se relie a l’un des contenus de l’une des deux prières que Moïse a faite après la faute du veau d’or et qui est le thème de la Parashah de כִּי-תִשָּׂא.

 

כִּי-תִשָּׂא chapitre 32 :

Nous allons immédiatement isoler le verset  qui se relie à ce 1er thème à la base de l’enseignement donné précédemment : le nom de Moïse n’apparait pas et cela se relie à ce principe général que toute נְשָׁמָה a sa propre lecture de מֹשֶׁה תוֹרָת, sauf dans la semaine où il va mourir. Ne me demandez pas comment cela fonctionne je ne le sais pas.

 

Correspondance entre le nombre de נְשָׁמוֹת d’Israël qui ont reçu la תּוֹרָה au Sinaï, les 600 000 âmes d’Israël, et le nombre de lettres de la תּוֹרָה. D’après la tradition, il y a 600 000 lettres dans la תּוֹרָה. Ne vous amusez pas à les compter vous ne trouverez jamais 600 000. La manière de compter pour que cela fasse 600 000 est une manière secrète.

 

« יִשְׂרָאֵל = Yesh Shishim Ribo Otiot LaTorah : Il y a 600 000 lettres dans la תּוֹרָה ».

D’autre part un des noms d’Israël est יְשֻׁרוּן.

יְשֻׁרוּן = “Yesh Shishim Ribo Neshamot - Il y a 600 000 âmes”.

 

Il y a donc 600 000 נְשָׁמוֹת de base et 600 000 lettres dans la תּוֹרָה.

Si on compte, on ne les trouve pas mais c’est une manière secrète. Exemple : ל décomposé en 2 lettres = Vav + Kaf donc 2 lettres... etc.  

Un livre d’un très grand kabbaliste qui a écrit un livre sur les lettres de la תּוֹרָה qui s’appelle « דָּוִד מָגֵן » mais qui est introuvable et qui explique chaque lettre et sa composition.

 

Chaque juif d’Israël a son חִדֻשׁ de la תּוֹרָה qui se traduit dans son פִּירוּש, son commentaire, qui est sa manière de lire et d’expliciter le texte.

 

C’est pourquoi il y a une Halakha que lorsque quelqu’un dans son étude a établi une nouveauté dans la formulation, il a le devoir de le faire partager avec tous et donc de le mettre par écrit. Parce que la תּוֹרָה appartient à tout Israël et celui qui ne donne pas le חִדֻשׁ qu’il a reçu est appelé גָזלָן – pirate violent.

 

C’est vrai tant pour les תּוֹרָה חִדֻשֵׁי que pour les חִדֻשִׁים dans le דֶּרֶךְ אֶרֶץ au niveau de la sagesse de la morale en général. Darka déAra en araméen.

Chacun qui a une idée apparemment nouvelle doit vérifier si c’est nouveau.

 

****

 

Très brièvement, avant d’entrer dans la Parashah de כִּי-תִשָּׂא et avant d’arriver au thème du 7 Adar lui-même en relation avec cette question, je vous rappelle les événements de ces chapitres là 30 à 32 de la Parashah de כִּי-תִשָּׂא.

 

Après la révélation de la תּוֹרָה sur le Sinaï, Moïse est monté sur la montagne pendant 40 jours et le texte nous dit au début du chapitre 32 :

 

כִּי-תִשָּׂא 32:1

 

וַיַּרְא הָעָם כִּי-בֹשֵׁשׁ מֹשֶׁה לָרֶדֶת מִן-הָהָר וַיִּקָּהֵל הָעָם עַל-אַהֲרֹן וַיֹּאמְרוּ אֵלָיו קוּם עֲשֵׂה-לָנוּ אֱלֹהִים אֲשֶׁר יֵלְכוּ לְפָנֵינוּ--כִּי-זֶה מֹשֶׁה הָאִישׁ אֲשֶׁר הֶעֱלָנוּ מֵאֶרֶץ מִצְרַיִם לֹא יָדַעְנוּ מֶה-הָיָה לוֹ

Et le peuple vit que Moïse tardait à redescendre de la montagne s'attroupa autour d'Aaron et lui dit: "Allons! Fais-nous un dieu qui marche à notre tête, puisque celui-ci, Moïse, l'homme qui nous a fait sortir du pays d'Égypte, nous ne savons pas ce qu'il est devenu."

 

וַיַּרְא הָעָם, כִּי-בֹשֵׁשׁ מֹשֶׁה לָרֶדֶת מִן-הָהָר  

Et le peuple vit que Moïse tardait à redescendre de la montagne…

 

Il y a là un moment très important à comprendre, c’est un retard de 6 heures. Le retard, du mot בֹשֵׁשׁ  qui signifie tarder et le Midrash lit ici שֵׁשׁ בֹ  – qui fait 6 – Le Midrash pour les raisons qui lui sont propres dit que le Rdv. auquel le peuple s’attendait (Moïse redescendant de la montagne avec les tables de la loi) n’a pas eu lieu suite à un malentendu horaire de calendrier, suite à un retard de 6 heures. Entre temps le peuple est pris de panique et presse Aaron de faire une idole qui représenterait Moïse qui ne redescend plus de la montagne. C’est le 1er moment de l’épisode du veau d’or.

Lorsque Moïse redescend de la montagne et s’aperçoit que cette partie d’Israël que les textes appellent « הָעָם » le peuple – qui ne signifie pas les descendants des tribus d’Israël  mais du עֵרֶב רַב, la foule sortie d’Egypte en même temps qu’Israël et que Moïse a intégré à Israël au moment de la sortie d’Egypte.

 

Chaque mention de הָעָם  signifie le עֵרֶב רַב. Lorsque le texte veut parler des descendants des tribus d’Israël, le texte emploie l’expression בְּנֵי יִשְׂרָאֵל. Quand la synthèse, l’unité des deux parties du peuple – בְּנֵי יִשְׂרָאֵל descendants des tribus, les Hébreux et tous ceux qui se sont adjoints à la destinée du peuple des Hébreux sortis d’Egypte, le עֵרֶב רַב – est faite, alors le texte emploie l’expression « בְּנֵי יִשְׂרָאֵל הָעָם» – « le peuple des enfants d’Israël

 

Donc, Moïse s’aperçoit que cette partie du peuple avait été responsable de la fabrication de cette idole du veau d’or. C’est un enseignement très précis donné par Judah Halevi dans le Kouzari  que cette idole qu’ils ont construite n’était pas du tout destinée dans leur pensée à fonder un culte païen qui remplacerait le culte du Dieu Unique, mais à remplacer Moïse.

Nous le verrons attentivement dans le texte.

 

Et donc finalement Moïse brise les tables de la loi et puis prie pour intercéder pour que cette faute très grave soi pardonnée. On ne prend pas garde au fait qu’il prie deux fois et qu’il y a donc deux prières. Dans la 2ème de ces prières - chapitre 32, verset 31 :

 

וַיָּשָׁב מֹשֶׁה אֶל-יְהוָה, וַיֹּאמַר:  אָנָּא, חָטָא הָעָם הַזֶּה חֲטָאָה גְדֹלָה, וַיַּעֲשׂוּ לָהֶם, אֱלֹהֵי זָהָב

Et Moïse revint vers הַשֵּׁם et il dit : de grâce, ce peuple a fait une grande faute, et ils se sont faits des dieux d’or

 

 וְעַתָּה, אִם-תִּשָּׂא חַטָּאתָם; וְאִם-אַיִן--מְחֵנִי נָא, מִסִּפְרְךָ אֲשֶׁר כָּתָבְתָּ

Et maintenant soit tu suspends (le châtiment de) leur faute (et ils feront תּשוּבָה) et sinon efface-moi de Ton livre que Tu as écris.

 

Cela veut dire dans le Pshat le plus immédiat la תּוֹרָה, le livre que Dieu a écrit par l’intermédiaire de Moïse. Le Talmud dit ceci : en fin de compte nous allons voir que d’après la réponse de Dieu, qu’Il va accepter la prière de Moïse et suspendre la sanction de la faute du veau d’or. Nous savons d’autre part que cette sanction ne va prendre acte et force qu’après une 2ème faute qui est celle de la faute des explorateurs. La faute du veau d’or ayant été faite, sur l’intercession de Moïse, Dieu va donner un sursis qui prendra fin et la sanction sera scellée au moment de la faute des explorateurs.

 

La faute du veau d’or est par rapport à la תּוֹרָה qui a été promulguée au Sinaï. La faute des explorateurs est par rapport à אֶרֶץ יִשְׂרָאֵל. Lorsque ce peuple ne va pas vouloir entrer en אֶרֶץ יִשְׂרָאֵל, alors Dieu tiendra compte de la faute du veau d’or. Nous allons voir ce verset immédiatement.  

 

La demande de Moïse se résume donc ainsi : « ou bien Tu suspends leur faute ou bien efface-moi de Ton livre que Tu as écris ».

 

C’est une parole terrible que le Midrash explique comme cela : Qu’on ne dise pas Moïse était là pour leur donner la loi (et c’est par rapport à la loi que telle conduite est faute ou pas faute), mais n’était pas là, quant il y a eu faute, pour prier pour eux... Ce sont les deux fonctions de l’intercesseur : entre Dieu et le peuple, la loi (תּוֹרָה) ; et entre le peuple et Dieu la prière (Téhilim).

 

Moïse plaide ainsi dans le Midrash : qu’on ne dise pas que j’étais là pour vous donner la loi c’est-à-dire faire que vos fautes sont des fautes, et que je n’étais pas là pour intercéder pour eux. Si tu ne leur pardonnes pas, qu’on ne dise plus qu’ils ont des fautes par rapport à מֹשֶׁה תוֹרָת, on dira qu’ils ont des fautes par rapport à la תּוֹרָה.

 

Et Dieu lui répond :

 

Verset 33- 35

וַיֹּאמֶר יְהוָה, אֶל-מֹשֶׁה:  מִי אֲשֶׁר חָטָא-לִי, אֶמְחֶנּוּ מִסִּפְרִי

Et dit הַשֵּׁם à Moïse celui qui a fauté contre Moi Je l’effacerai de Mon livre.

 

Sous-entendu pas toi Moïse. Mais en fin de compte nous verrons que la prière de Moïse a été entendue et que Dieu a suspendu cette faute dans la perspective suivante : c’est que le peuple sera mis à l’épreuve dans l’histoire et la sanction sera distribuée dans toute l’histoire et celui qui refera cette faute c’est le signe qu’il l’avait vraiment faite. Et par conséquent, il sera puni de sa faute et de la faute du veau d’or qu’il avait vraiment faite. Et ceci à l’échelle de l’histoire du peuple tout entier.

 

Un des Midrashim explique comme cela à propos de ces problèmes que Dieu dit : « ce peuple a fauté Je vais le détruire ». Le Midrash emploie l’expression habituelle : « Je jetterais la montagne sur eux ». Et Moïse dit : la règle de justice absolue la règle de rigueur la הָדִין מִּדָת veut qu’il en soit ainsi, mais Moïse intercède du point de vue de la הָחֲכָמִים מִּדָת, la מִּדָה de miséricorde : c’est la sanction qu’il faut appliquer mais il faut la distribuer tout le long de leur histoire. La montagne va bien être jetée mais sous la forme de petits cailloux…

 

C’est ce verset là 32-33 que le Talmud cite pour dire ceci :

« La malédiction d’un חֲכָם תַּלְמִיד même si elle n’a pas d’objet se réalise ».

 

Guemara Makot (page 12a) «  Rav Yéhouda dit au nom de Rav : La malédiction d’un Sage est exaucée  en tout état de cause, d’où apprenons nous cela : d’Ahitofel. Lorsque David creusa les fondements du Temple, les eaux des abîmes montèrent et menacèrent d’inonder le monde entier. Rachi explique que le Roi David trouva un morceau de grès qui éleva la voix et lui dit de ne pas le déplacer car, depuis le jour du don de la Thora où la terre trembla, il est placé là pour maintenir l’abîme. David ne l’écouta pas et le prit.

 

 David interrogea alors : Est-il permis d’écrire le Saint Nom sur ce grès et de le jeter dans les eaux pour les apaiser ou non (Rachi explique qu’il contreviendrait alors à l’interdiction d’effacer le Nom divin).  Personne ne dit ce qu’il fallait faire. Le Roi David décréta que tout celui qui a la connaissance de quelque chose et ne le dévoile pas  s’étranglera. Ahitofel  affirma  que pour la paix entre un homme et sa femme, la Thora permet d’effacer le nom de D… écrit dans la sainteté , dans de l’eau ; à fortiori pour le monde entier. Le Roi David écrivit le nom saint sur du grès et le jeta  dans  de l’eau  qui s’immobilisa. Il est écrit que, voyant que son conseil ne se réalisa pas, Ahitofel prit son âne, rentra chez lui et s’étouffa ».  

 

Depuis le début du livre de l’Exode (Chémot), le nom de Moché figure dans toutes les Sidrot sauf celle de Tétsavé. Moshé s’est en effet totalement dévoué au peuple d’Israêl à la suite de la faute du veau d’or ; il a récité 120 prières et a dit ( Exode, sidra Ki tissa chapitre 32,verset 32) « et maintenant si tu pardonnais leur faute !… Sinon efface-moi de ton  livre que Tu as écrit ». Rachi explique ce verset en disant : « Si Tu pardonnais leur faute »- « C’est bien ;     «  Sinon, efface-moi  de  Ton livre »,  il s’agit de la Thora toute entière. Pour qu’on ne dise pas de moi que je n’ai pas été capable de demander pour eux la miséricorde. ».

 

Moïse d’une certaine manière a proféré une malédiction qui n’avait pas d’objet. Mais puisqu’il l’a dite cela va se réaliser d’une manière quelconque. Et le Talmud continue : Cela va se réaliser dans la Parashah de תְּצַוֶּה où le nom de Moïse n’apparait pas.

 

« La malédiction d’un חֲכָם תַּלְמִיד même si elle n’a pas d’objet se réalise » parce que la malédiction d’un חֲכָם תַּלְמִיד a toujours un objet. Cela a été formulé par un חֲכָם תַּלְמִיד, c’est qu’il y a même au niveau le plus inconscient, le moins dévoilé, le plus intériorisé, il y a quand même un objet et à un certain niveau quelconque cela doit se réaliser.

 

Pour répondre à la question que pose ce principe, il y a tout un ensemble de sources qui finalement tendent à dire ceci : Il y a un certain risque de divinisation de Moïse. Et c’est ce risque qui éclate lors de la faute du veau d’or. Lorsque le עֵרֶב רַב a demandé à Aaron une idole pour remplacer Moïse, cela signifie qu’ils avaient divinisé Moïse. Et donc sans parler de responsabilité de la part de Moïse, il y a un certain risque objectif de la divinisation de Moïse, risque dans lequel est tombée toute cette partie du peuple que la תּוֹרָה appelle le עֵרֶב רַב – la  grande foule qui n’était pas les Hébreux et qui n’a pas bénéficié de l’éducation préalable des 6 générations des Patriarches depuis Abraham jusqu’à la sortie d’Egypte, et qui se sont intégrés à Israël avec leurs comportements anciens. Et nous avons là très précisément le risque de la divinisation du médiateur.

 

Donc, la faute du veau d’or est reliée objectivement d’une certaine manière à Moïse, sans parler de culpabilité de Moïse, par le fait que c’est Moïse qui a pris cette initiative de les intégrer à Israël sans cette préparation préalable. Il y a là deux événements qu’il faut penser ensemble :

 

  Il était nécessaire d’intégrer ces hommes et femmes à Israël à la sortie d’Egypte. Et Moïse savait que c’était l’intention ultime de Dieu Lui-même,

 

  Mais cependant c’est extrêmement dangereux et périlleux de les intégrer sans préparation et Moïse l’a fait quand même.     

 

Il faut penser cela simultanément, les deux causes sont vraies ensemble.

Le problème grave contemporain qui s’y relie c’est le problème de כַּהֲלָכָה גִיוּר ou de לֹא גִיוּר כַּהֲלָכָה. Toute la question de l’imbroglio juridique qui se discute à la Knesset c’est ce problème-là. Les uns ont pour motivation la seconde motivation de Moïse : puisque ce sont des candidats à l’histoire d’Israël, ils sont déjà d’Israël. Il faut les prendre tout de suite. Les autres disent oui d’accord mais כַּהֲלָכָה. Pas tout de suite, sinon c’est le עֵרֶב רַב et tout le reste…

 

Cf. Parashah תְּרוּמָה: de la même parcelle d’or que va-t-il en sortir ? Le candélabre et sa lumière pure ou le veau d’or ? Quelle réponse face à un tel problème ?

 

Non pas dans le oui et non comme avec tous les problèmes qui divise la société israélienne. La réponse c’est bien sur oui mais aux conditions de l’authenticité du oui, ce qui s’appelle כַּהֲלָכָה גִיוּר. Cf. aussi dans la société israélienne l’agitation avec le problème des Juifs d’Ethiopie.

 On trouve déjà cette dialectique d’opposition dans le Midrash.

 

Je rappelle les deux formules, les deux principes :

Moïse sait que c’est le plan de Dieu d’intégrer à Israël ceux des hommes des nations qui ont eu la même histoire qu’Israël en Egypte, quelque soit la manière dont ils ont perçu ou vécu cette dialectique גֵּאֻלָה -גָלוּת . Et par conséquent, Moïse sait qu’il faut le faire et je vous donnerais d’autres raisons supplémentaires tout à l’heure au courant de la lecture, mais à certaines conditions. C’est le deuxième principe.

 

La discussion entre Moïse et Dieu dans les Midrashim que cite Rashi est très précise : les deux choses sont vraies et c’est pourquoi finalement c’est le temps d’épreuve de l’histoire qui montrera qui était כַּהֲלָכָה et qui n’était pas כַּהֲלָכָה à l’échelle de l’histoire collective.

 

C’est pourquoi en particulier on va buter très rapidement sur la faute des explorateurs et lorsque cet עֵרֶב רַב va dévoiler qu’il veut à la rigueur de la תּוֹרָה mais pas de אֶרֶץ יִשְׂרָאֵל, alors là se dévoile une catastrophe. C’est à ce moment-là que la sanction sera donnée.

 

Voilà donc pour le premier point, c’est-à-dire la raison pour laquelle le nom de Moïse n’apparait pas en Parashah de תְּצַוֶּה.

 

Pourquoi en particulier dans cette Parashah de תְּצַוֶּה et en corrélation avec ce qu’on a déjà appris comme 1er principe que c’est la Parashah de la mort de Moïse ?

 

C’est parce que le risque d’idolâtrie vient finalement de ce risque de la divinisation de Moïse et par conséquent c’est à Moise à se débrouiller et s’arranger pour que le culte rendu au Dieu vrai et unique dans le Temple soit sans allusion à Moïse en tant que médiateur, puisque le culte de ce Temple sera la rédemption de la faute d’idolâtrie.

 

וְאַתָּה תְּצַוֶּה...

Quant à toi, et tu sais très bien pourquoi, et Je ne dis pas ton nom pour pas qu’on dise que c’est le temple que Moïse a construit parce qu’on risquerait d’adorer Moïse là-dedans...  

 

Hier, l’exposé de Benno Gross sur le monothéisme de Maïmonide : Tout l’enseignement de Rambam, en particulier dans le Guide des Egarés, de l’intention de toutes les prescriptions de l’ensemble de la תּוֹרָה pour mettre en garde et vacciner contre toutes les tentations de l’idolâtrie.

 

D’une certaine manière c’est en relation avec ce risque de la divinisation de Moïse et par conséquent, sans que son nom n’apparaisse, Moïse doit arriver à ce qu’on construise ce temple de vérité qui fera la rédemption de la faute du veau d’or.

 

Je commence la description de cette faute, il y a nombres d’indications dans le texte qui ne sont pas toujours forcément visibles avec comme objet de l’étude en particulier la raison pour laquelle Moïse a prié deux fois pour obtenir que Dieu suspende la sanction de cette faute.

 

כִּי-תִשָּׂא - Chapitre 32 :

 

Le peuple s’aperçoit que Moïse a tardé et il faut expliquer cette précipitation, cette panique : tout de suite il faut faire le veau d’or. [C’est un thème de calomnie d’antisémitisme classique qui a utilisé cette expression du veau d’or pour accuser le peuple juif de futilité : le veau d’or comme adoration de l’argent... C’est autre chose : c’est une faute de gens très pieux qui ont fait leur idole en or et ce n’est pas l’or en soi qu’ils adoraient…]  

 

כִּי-תִשָּׂא 32 :1

וַיַּרְא הָעָם, כִּי-בֹשֵׁשׁ מֹשֶׁה לָרֶדֶת מִן-הָהָר; וַיִּקָּהֵל הָעָם עַל-אַהֲרֹן, וַיֹּאמְרוּ אֵלָיו קוּם עֲשֵׂה-לָנוּ אֱלֹהִים אֲשֶׁר יֵלְכוּ לְפָנֵינוּ--כִּי-זֶה מֹשֶׁה הָאִישׁ אֲשֶׁר הֶעֱלָנוּ מֵאֶרֶץ מִצְרַיִם, לֹא יָדַעְנוּ מֶה-הָיָה לוֹ

Et le peuple vit que Moïse tardait à redescendre de la montagne et le peuple s’est assemblé contre (littéralement « sur ») Aaron et lui dit «lève-toi » ! Fais-nous des dieux [Ce pluriel ici va se retrouver dans le verbe donc ce n’est pas un singulier mais vraiment des dieux au pluriel, des idoles :] qui marcheront devant nous car celui-là l’homme Moïse qui nous a fait monter du pays d’Egypte Nous ne savons pas ce qu’il est advenu de lui.

 

On voit cette précipitation, avec tout de suite l’indication principale du début de cette étude c’est que l’intention  même de ceux qui voulaient faire le veau d’or, n’était pas de remplacer le culte au Dieu unique qui s’est révélé au Sinaï mais de remplacer Moïse et c’est dit en clair : « Fais-nous des dieux qui marcheront devant nous, qui nous guideront car cette homme Moïse qui nous a fait sortir d’Egypte nous ne savons plus ce qu’il est devenu.. il n’est plus redescendu de la montagne... ». Une ascension sans descente.

 

Il faut essayer de comprendre cette précipitation : Au Sinaï, il s’est passé quelque chose de radicalement nouveau dans l’histoire des religions, dans l’histoire de l’expérience religieuse de l’humanité. En particulier le עֵרֶב רַב qui a eu l’expérience historique analogue à celle d’Israël en Egypte a malgré tout été imprégné des comportements religieux de ces temps-là et avait sa religiosité propre qui était l’adoration et l’asservissement aux forces de la nature. La phrase la plus simple pour définir le paganisme quelque que soit par ailleurs le symbolisme propre à chaque culture et à chaque société, en fin de compte le minimum commun des religiosités païennes est la transfiguration et la divinisation, et donc l’adoration, des forces de la nature érigées en divinités.

 

Et voilà qu’un évènement radicalement nouveau intervient dans l’histoire des religions par l’événement du Sinaï dont Moïse est le porteur : c’est que c’est la loi morale qui va se substituer aux forces naturelles comme étant l’expérience religieuse.

 

C’est vraiment un choc. Les Hébreux sont préparés à cela depuis les 6 générations commençant avec Abraham - Isaac – Jacob - Lévi – Qehat - Amram et menant à Moïse... Les Hébreux sont préparés à cela surtout la tribu de Lévi, en particulier Aaron son frère aîné. Moïse étant le chef politique, Aaron lui est par définition le chef religieux et le grand prêtre de cette religion d’Israël. Son rôle dans la fabrication du veau d’or est mal compris puisqu’apparemment c’est lui qui l’a fait ! Mais en réalité c’est lui qui les a empêchés de le faire.

 

Stratégie d’Aaron :

 

Cette révolution dans l’expérience religieuse où c’est la loi morale qui va se substituer à la relation aux forces de la nature – en particulier les religions astrologiques utilisant les forces du zodiaque – est tellement nouvelle. Or, le garant de cette vérité nouvelle est Moïse qui est apparemment comme une de ces divinités des religions païennes, le médiateur devenu divin et remonté au ciel sans redescendre. Ce qui les fait retomber dans leur mentalité religieuse précédente.

 

Tout naturellement, s’il en est ainsi, et si Moïse est une divinité du type médiateur divinisé, alors ils retombent dans la religiosité antérieure. Au Sinaï, ils ont accepté la loi morale comme religion authentique, Moïse étant présent. Moïse n’étant plus présent alors tout revient comme avant : c’est le constat faux qui est fait que Moïse était une divinité païenne qu’ils veulent donc représenter et symboliser pour le remplacer et l’adorer.

 

C’est ce qui explique sans épuiser le sujet cette panique cette précipitation du peuple, Moïse n’étant plus là. On voit à quel point cette idolâtrie du veau d’or est très analogue aux motivations profondes de l’apparition du christianisme.

 

On est pris de panique devant la loi morale comme étant la règle du salut religieux et on retombe dans le même comportement de divinisation du médiateur... etc. On voit à quel point c’est analogue.

 

Ensuite viennent un certain nombre de versets où Aaron tente de retarder l’événement. Il demande à chaque membre du peuple de donner les anneaux – qui indiquaient l’insigne de la tribu.

En ce temps-là chaque appartenance tribale était indiquée par un certain signe vestimentaire. Exemple du kilt en Ecosse par exemple, et d’autres formes selon les sociétés. En ce temps-là en particulier la filiation familiale ou tribale était indiquée par la forme de l’anneau que l’on se mettait à l’oreille ou au nez. Ici les boucles d’oreilles.

 

La stratégie d’Aaron pour retarder l’événement fût de les inviter à constituer d’abord la première instance de cette divinité médiatrice, c’est-à-dire l’être collectif d’Israël. En guise d’analogie de comparaison : Tout se passe comme si il leur avait demandé de faire un דָּוִד מָגֵן – symbole de l’unité.

 

Le Midrash dit que l’or amassé fut jeté dans un creuset et qu’il en est sorti la forme d’un taureau qui est d’une certaine manière le Totem d’Israël en tant que peuple d’après les versets qui comparent telle ou telle tribu à tel ou tel animal. Israël en tant que nation serait donc le שׁוֹר. Bien que de notre temps on choisirait un דָּוִד מָגֵן.

 

Il y a ici une stratégie d’Aaron pour retarder cet événement.

 

En réalité il y a une médiation entre le Dieu unique et Israël. Comment la représenter ? Par l’entité nationale collective. Il y a là d’ailleurs un piège : le substitut de l’entité nationale d’Israël à Dieu lui-même. Quelque chose qui remplacerait la relation au Dieu unique. Substitut à la relation du Dieu unique envers Israël : mettre l’identité d’Israël entre Dieu et les hommes. Dans le temps contemporain un nationalisme évacuant toute référence au Dieu unique et s’y substituant…

Sorte de blasphème d’Israël: « יִשְׂרָאֵל יִשְׂרָאֵל אֱלֹהֵינוּ יִשְׂרָאֵל אֶחָד  שְׁמַע! »

 

Il y a quelque chose de cet ordre-là de la part d’Aaron dans une stratégie de retardement de cette tentation d’idolâtrie à ce moment-là.

 

Verset 32.5:

וַיַּרְא אַהֲרֹן, וַיִּבֶן מִזְבֵּחַ לְפָנָיו; וַיִּקְרָא אַהֲרֹן וַיֹּאמַר, חַג לַיהוָה מָחָר

il y aura une fête pour הַשֵּׁם demain.

« Demain » dit le Midrash quand Moïse reviendra...

 

Verset 32: 4

וַיִּקַּח מִיָּדָם וַיָּצַר אֹתוֹ בַּחֶרֶט, וַיַּעֲשֵׂהוּ עֵגֶל מַסֵּכָה; וַיֹּאמְרוּ--אֵלֶּה אֱלֹהֶיךָ יִשְׂרָאֵל, אֲשֶׁר הֶעֱלוּךָ מֵאֶרֶץ מִצְרָיִם

Et Il prit cet or (des anneaux) de leurs mains…  [Le Midrash insiste en disant que seuls les hommes ont donné leurs bijoux, les femmes ont gardé les leurs, non pour conserver leurs bijoux mais pour ne pas participer à l’idolâtrie – c’est à compter pour le mérite des femmes de cette génération - Nashim Tsedkaniot.] 

…et il le forma dans le creuset et il en fit une statue de veau (עֵגֶל  petit du שׁוֹר) [מַסֵּכָה = objet fondu coulé] Et ils dirent [ceux qui ont demandé qu’on fasse une idole qui représenterait symboliquement Moïse non redescendu de la montagne] « voici tes dieux Israël qui t’ont fait monté du pays d’Egypte».

 

C’est dire : « Voici le génie d’Israël qui t’a fait sortir d’Egypte », génie d’Israël qui n’est pas Dieu Lui-même mais ce génie d’Israël qu’ils ont perçu dans le génie de Moïse.

On apprend tout de suite du verset que ce n’est pas Israël qui a fait cette faute puisque c’est cette partie du peuple qui s’adresse à Israël lui disant « voici Israël tes dieux... »

Ceux qui parlent ici d’Israël ne sont pas des tribus d’Israël ! C’est comme si en actualisant et en laïcisant totalement la formulation du discours nous avions à faire au nationalisme chauviniste de l’identité israélite coupée complètement de la תּוֹרָה qui dirait : « c’est le génie d’Israël qui est le libérateur d’Israël, et pas du tout le Dieu d’Israël ». Le refus de toute transcendance absolue pour se rabattre sur une immanence totale avec un symbole, la דָּוִד מָגֵן par exemple. Je ne dis pas la מְנוֹרָה  qui est beaucoup plus cachère (‘Hanoukka).

 

Il y a plus que cela dans le verset.

 

Cette expression qui a été employée deux fois pour dire la sortie d’Egypte est une expression absolument inhabituelle. La règle est la suivante : Chaque fois qu’il s’agit du « עֵרֶב רַב », l’expression employée est celle de « עָלִיָה ».  לַעַלוֹת מֵאֶרֶץ מִצְרָיִם: la montée d’Egypte. Quant il s’agit d’Israël, l’expression est « מִצְרָיִם מֵאֶרֶץ לִיצִיאָה - la sortie d’Egypte ». Il n’y a pas d’exception dans tout le חוּמָש.

 

On trouve chez les prophètes des versets qui emploient le terme de « עָלִיָה » pour Israël, apparemment c’est une exception mais pas du tout : c’est lorsqu’après la sortie d’Egypte, Israël retombe dans la situation d’exil et retombe dans la situation du עֵרֶב רַב. Et donc pour lui revenir en Israël c’est une « עָלִיָה ».

 

Mais c’est une expression radicalement différente. Quant c’est Israël qui sort d’Egypte, le texte dit « יְצִיאָת מִצְרָיִם». « אֲשֶׁר הוֹצֵאתִיךָ מֵאֶרֶץ מִצְרַיִם» (יִתְרוֹ 20:2)

 

Lorsque c’est le עֵרֶב רַב, c’est « אֲשֶׁר הֶעֱלֵיתָ מֵאֶרֶץ מִצְרָיִם» (כִּי-תִשָּׂא 32:7 et 32 : 23)

  

Voilà une confirmation du fait que l’initiative de cette faute n’est pas prise par Israël lui-même mais par le עֵרֶב רַב que Moïse a intégré à Israël.

 

Il y a quand même une part de responsabilité de la part d’Israël par rapport à l’influence du עֵרֶב רַב qui s’intègre à Israël, et qui a lui pris l’initiative du veau d’or : c’est le fait que Israël n’a pu l’empêcher. C’est dire qu’en fin de compte il y a une sorte de solidarité récapitulée dans la responsabilité.

 

Judah Halevi dans le Kouzari

 

Ce qui apparait c’est que l’objet de la faute du veau d’or c’est de remplacer Moïse.

Judah Halevi dans le Kouzari, dans un grand חִדֻשׁ, va mettre l’accent sur un aspect de l’explication : leur intention n’était pas de remplacer Dieu mais de symboliser la relation qu’ils ont reçu de Dieu grâce à Moïse. En fin de compte, nous revenons à l’explication précédente : le piège était de diviniser Moïse parce que ce n’est pas n’importe qui peut être le véhicule grâce auquel la révélation est possible. C’est la tentation païenne de la divinisation du médiateur.  

Je crois qu’en fin de compte le peuple d’Israël fait la preuve qu’il est pur de cette tentation-là. Quiconque est tenté par cela quitte Israël. C’est ainsi que le christianisme a quitté Israël d’ailleurs.

 

Je n’ai trouvé aucune allusion, aucune trace d’un culte à Moïse jusqu’au risque de trouver l’ingratitude vis-à-vis de Moïse. Etant donné sa valeur on pourrait s’attendre à ce que la liturgie fasse une place particulière à la commémoration de son anniversaire. Mais il n’y a rien ! La mémoire de Rabbi Shimon est une plus grande fête que le 7 Adar ! C’est le mérite du peuple d’Israël de s’être gardé de ce risque de la divinisation de Moïse. S’il s’agissait d’un autre peuple, Moïse serait la plus grande idole de tous les temps. Il n’y a qu’à voir ce que les גּוֹיִם font de leur médiateur lorsqu’ils les divinisent. Au point que la תּוֹרָה ne précise même pas où il est enterré pour éviter un Saint-Sépulcre supplémentaire...

 

Verset 32:7

Il faudrait plus de temps pour étudier attentivement chaque mot.

וַיְדַבֵּר יְהוָה, אֶל-מֹשֶׁה:  לֶךְ-רֵד--כִּי שִׁחֵת עַמְּךָ, אֲשֶׁר הֶעֱלֵיתָ מֵאֶרֶץ מִצְרָיִם

Et הַשֵּׁם parla à Moïse : Va descend ! Car ton peuple s’est mal conduit (littéralement « a détruit son chemin » = שִׁחֵת אֶת-דַּרְכּוֹ) que tu as fait monté du pays d’Egypte.

 

Nous avons appris que cette expression finale confirme qu’il s’agit du עֵרֶב רַב.

Nous en avons la confirmation par un autre verset, au moment de la première prière de Moïse, au verset 32.11 :

 

וַיְחַל מֹשֶׁה, אֶת-פְּנֵי יְהוָה אֱלֹהָיו; וַיֹּאמֶר, לָמָה יְהוָה יֶחֱרֶה אַפְּךָ בְּעַמֶּךָ, אֲשֶׁר הוֹצֵאתָ מֵאֶרֶץ מִצְרַיִם, בְּכֹחַ גָּדוֹל וּבְיָד חֲזָקָה

Et Moïse pria à la face de הַשֵּׁם son Dieu et il dit : Pourquoi Dieu ta colère s’enflammerait-elle ? Contre ton peuple (il s’agit Israël) que Tu as fait sortir du pays d’Egypte avec une grande force et une main forte ?

 

On voit la dialectique qui se met en place : quand Dieu parle à Moïse, Il lui dit « ton peuple à toi Moïse », il s’agit du עֵרֶב רַב et lorsque Moïse intercède dans cette première prière il dit « Ton peuple à Toi Dieu » et il s’agit d’Israël. L’argument de la prière de Moïse ici, c’est : « pour sauver Ton peuple, sauve aussi ceux-là ! »

 

Midrash : c’est un peu le dialogue entre un père et d’une mère quand l’enfant s’est mal conduit. Alors le père dit à la mère : « tu as vu ce que TON fils a fait », et la mère répond « pardonne à TON fils... »  

 

Verset 32:7

Voilà ce que Dieu dit à Moïse :   

וַיְדַבֵּר יְהוָה, אֶל-מֹשֶׁה:  לֶךְ-רֵד--כִּי שִׁחֵת עַמְּךָ, אֲשֶׁר הֶעֱלֵיתָ מֵאֶרֶץ מִצְרָיִם

Et הַשֵּׁם parla à Moïse : va descend ! Car TON peuple s’est mal conduit (littéralement ‘a détruit son chemin’ = שִׁחֵת אֶת-דַּרְכּוֹ) que tu as fait monté du pays d’Egypte.

 

Rashi sur שחת עמך:

 שחת העם לא נאמר אלא עמך, ערב רב שקבלת מעצמך וגיירתם ולא נמלכת בי, ואמרת טוב שידבקו גרים בשכינה, הם שחתו והשחיתו

« Car ton peuple s’est mal conduit :

Le texte n’a pas dit « le peuple העם» mais « ton peuple עמך» ערב רב (cette grande foule sortie d’Egypte en même qu’Israël) que tu as accepté de toi-même et tu les as naturalisé et tu n’as pas pris conseil de Moi et tu as dis : « c’est un bien que des étrangers s’attachent à la  שכינה» C’est eux qui ont fauté et qui ont fait fauter ».Shémot Rabbah 42 :6

 

Dans l’explication que donne Rashi nous avons la réponse : Dieu sait pourquoi Moïse a fait cela : parce c’est un bien que des גֵּרִים s’attachent à la שְׁכִינָה.

La difficulté c’est que cela a été fait avec précipitation. Mais toute la sortie d’Egypte est avec précipitation !? Nous verrons plus loin dans le verset qui suit, un raisonnement plus précis de ce que Moïse répond à Dieu dans sa prière.

 

Mais déjà dans une première approximation de réponse : il y avait un projet de tout cet exil d’Egypte. Dans les Sidrot précédentes, Dieu explique à Moïse qu’il faut prendre patience lorsque Moïse perd patience devant l’accélération des persécutions et de l’intensification des événements.

 

Au début de Parashah בֹּא  dans le livre de שְׁמוֹת, lorsque Dieu dit à Moïse : ce que vous deviez faire en Egypte n’a pas été fait et il ne faut pas que cet exil ait eu lieu pour rien et par conséquent Dieu doit intervenir pour faire que Son Nom soit reconnu par l’Egypte. Si l’objectif des plaies avait été uniquement de contraindre Pharaon à laisser sortir les Hébreux, une plaie aurait suffit, la dernière, la plus terrible qui a d’ailleurs provoqué la décision. Mais Parashahבֹּא  dévoile qu’il y avait une autre préoccupation : il ne fallait pas que le passage des Hébreux en Egypte soit sans objet.

 

קַבָּלָה:

L’exil d’Egypte avait pour objet de ramener en Israël toutes les âmes d’Israël qui étaient restées en dehors à la suite des péripéties de l’histoire.

C’est un enseignement du Ari : La lumière donnée au monde a été trop forte pour que le véhicule qui devait la recevoir puisse la supporter. Et donc, une infinité d’étincelles de lumière qui devrait être dans le véhicule d’Israël sont tombées en dehors. Le Ari ajoute dans un autre chapitre en se rattachant à ce 1er thème : une des  fonctions de l’exil est d’aller là où ces étincelles de sainteté sont tombées et sont enfouies dans la קלִיפָּה - la gangue de l’impureté - pour les sauver et les ramener dans le foyer de la lumière centrale.

 

Ce n’est pas l’objectif de l’exil, mais secondairement si déjà nous sommes en exil alors oui, une des fonctions de l’exil c’est cela. L’objectif c’est d’éveiller ces âmes enfouies à l’extérieur et les ramener à l’intérieur.

 

Moïse sait cela et a fait ce qu’il fallait faire, mais dans la précipitation de l’événement ces deux principes évoqués toute à l’heure sont dans une situation de contradiction : il faut le faire, mais  c’est trop rapide, mais il faut le faire quand même... alors Moïse va décider qu’on va le faire quand même… Ce que Dieu ne peut pas décider Moïse peut le décider.  

 

Je vais vous donner un exemple :

Lorsque Moïse descendant de la montagne voit la scène du veau d’or, il brise les tables de la loi. Et lorsque Dieu ensuite va suspendre le châtiment et redonner les tables de la loi, le verset dit :

 

34 :1

וַיֹּאמֶר יְהוָה אֶל-מֹשֶׁה, פְּסָל-לְךָ שְׁנֵי-לֻחֹת אֲבָנִים כָּרִאשֹׁנִים; וְכָתַבְתִּי, עַל-הַלֻּחֹת, אֶת-הַדְּבָרִים, אֲשֶׁר הָיוּ עַל-הַלֻּחֹת הָרִאשֹׁנִים אֲשֶׁר שִׁבַּרְתָּ

 « Le Seigneur dit à Moïse: "Taille toi-même deux tables de pierre semblables aux précédentes, et tu inscriras sur ces 2ème tables les paroles que j’avais inscrites sur les 1ères tables que tu avais brisées ».  

 

Le Midrash intervient sur l’expression « אֲשֶׁר שִׁבַּרְתָּ que tu as brisé »: cela veut dire « que tu as bien fait de briser !»

Puisque l’expression « que tu as brisées » est de trop, superflue : on sait bien que les premières tables sont celles que Moïse a brisées ! Donc c’est que cette expression est venue pour nous enseigner un חִדֻשׁ, nous enseigner quelque chose de plus. Lequel ? Il faut lire avec les טַעַמִים, avec l’accent : « les tables que tu as brisées (que tu as bien fait de briser)... »

  

Cela veut dire que Dieu attendait que Moïse brise les tables de la loi parce que cette faute du veau d’or est faute par rapport à la loi. Mais si on met provisoirement entre parenthèse la loi, ce n‘est plus une faute et le peuple est sauvé. Mais Dieu ne peut pas briser les tables de la loi parce qu’il est la vérité, alors Il attend que Moïse le fasse pour ensuite l’approuver.  

 

C’est un peu analogue ici.

L’intégration des גֵּרִים par Moïse était nécessaire sinon toute l’histoire d’Egypte aurait été à refaire. On aurait laissé ceux qu’il fallait délivrer. C’est Moïse qui intervient pour les délivrer d’un coup. Ce n’est pas du tout contradictoire avec ce que Dieu lui dit dans ce Midrash. « Tu l’as fait sans me demander conseil » C'est-à-dire « tu as bien fait de ne pas me demander conseil ». Si tu me l’avais demandé,  Je t’aurais dit non, alors tu as bien fait de le faire sans me demander... »

 

Confirmation dans la prière de Moïse :

 

כִּי-תִשָּׂא 32:11

וַיְחַל מֹשֶׁה, אֶת-פְּנֵי יְהוָה אֱלֹהָיו; וַיֹּאמֶר, לָמָה יְהוָה יֶחֱרֶה אַפְּךָ בְּעַמֶּךָ, אֲשֶׁר הוֹצֵאתָ מֵאֶרֶץ מִצְרַיִם, בְּכֹחַ גָּדוֹל וּבְיָד חֲזָקָה

Et Moïse pria à la face de הַשֵּׁם son Dieu et il dit : Pourquoi Dieu ta colère s’enflammerait-elle ? Contre ton peuple (Israël) que Tu as fait sortir du pays d’Egypte (Il s’agit d’Israël) avec une grande force et une main forte ?

 

C’est dire : si tu détruis le עֵרֶב רַב c’est mauvais pour Israël car Israël devra retomber dans un exil pour reprendre ces valeurs que les גֵּרִים ont apporté avec eux. Ces valeurs, on a étudié cela dans Parashah תְּרוּמָה, sont périlleuses et dangereuses, mais sont indispensables pour l’achèvement de l’histoire d’Israël. Parce qu’elles arrivent en Israël avec une grande impureté et donc il faut le temps de désintoxication.

 

32:11-12

וַיְחַל מֹשֶׁה, אֶת-פְּנֵי יְהוָה אֱלֹהָיו; וַיֹּאמֶר, לָמָה יְהוָה יֶחֱרֶה אַפְּךָ בְּעַמֶּךָ, אֲשֶׁר הוֹצֵאתָ מֵאֶרֶץ מִצְרַיִם, בְּכֹחַ גָּדוֹל וּבְיָד חֲזָקָה

Mais Moïse implora l'Éternel son Dieu, en disant: Pourquoi, Seigneur, ta colère s’enflammerait contre ton peuple, que tu as fait sortir du pays d'Égypte avec une grande force et une main forte ?

 

לָמָּה יֹאמְרוּ מִצְרַיִם לֵאמֹר, בְּרָעָה הוֹצִיאָם לַהֲרֹג אֹתָם בֶּהָרִים, וּלְכַלֹּתָם, מֵעַל פְּנֵי הָאֲדָמָה; שׁוּב מֵחֲרוֹן אַפֶּךָ, וְהִנָּחֵם עַל-הָרָעָה לְעַמֶּךָ

Pourquoi l’Egypte dirait ainsi : Il les a fait sortir sous un signe maléfique pour les détruire dans les montagnes et les détruire de dessus la face de la terre. Reviens de ta colère et reprend ta décision de mal pour Ton peuple.

 

On trouve dans les dictionnaires le terme de regret qui est trop anthropomorphique appliqué à Dieu.

Nous allons voir que la lecture directe est bien plus précise que cela. Avec les טַעַמִים c’est un autre sens qui apparait : וְהִנָּחֵם עַל-הָרָעָה לְעַמֶּךָ - Et reprend ta décision de sanction.

C’est une unité de lecture, et la fin est pour elle-même : לְעַמֶּךָ en faveur de ton peuple.

Il n’est pas écrit « reviens sur ta décision de faire du mal à ton peuple »

Mais : « reviens de ta décision de sanction, pour (le bien de) ton peuple - en faveur de ton peuple»

 

Confirmation dans un autre verset encore plus explicite d’après les טַעַמִים.

Lorsque Dieu accepte la prière de Moïse alors le verset dit ceci :

 

32:14

וַיִּנָּחֶם יְהוָה, עַל-הָרָעָה, אֲשֶׁר דִּבֶּר לַעֲשׂוֹת לְעַמּוֹ

Et הַשֵּׁם repris sa décision au sujet de ce malheur dont il avait parlé pour agir en faveur de son peuple.

 

Et non pas ce qu’on trouve dans les traductions françaises « qu’il avait parlé de faire contre son peuple ». C’est très clair avec les טַעַמִים.

 

Le nom des טַעַמִים en Séfarade :

Fin du verset 13, on a sous וַיִּנָּחֶם יְהוָה, עַל-הָרָעָה: Maarikh Ta’ha c’est une unité de lecture.

 

Chez les Ashkénazim il s’appelle ..? ..

En tout cas chez les Sefardim il s’appelle Maarikh Ta’ha c’est deux accents à la fois.

לְעַמֶּךָ en faveur de ton peuple : Sof Passouk.

Sinon il y aurait une toute autre accentuation.

 

Au verset 14 c’est la même chose :

וַיִּנָּחֶם יְהוָה, עַל-הָרָעָה:

אֲשֶׁר דִּבֶּר  Maarikh Ta’ha

לַעֲשׂוֹת לְעַמּוֹ: Maarikh Sof Passouk

 

La lecture de la מָסוֹרֶתָ nous montre bien que le sens de la phrase est très différent des traductions habituelles.

  

Je reprends maintenant un verset précèdent : le verset 13 du plaidoyer de Moïse pour Israël. On se souvient de l’argumentation de la prière : « Si tu détruis le עֵרֶב רַב c’est un malheur pour Ton peuple. Alors sauve-les pour sauver Ton peuple ».

 

Il faut mettre en évidence que la première prière de Moïse c’est de prier pour Israël qui n’a pas participer au veau d’or mais n’a pas pu l’empêcher. La 2ème prière sera pour le עֵרֶב רַב lui-même.

 

Voilà comment Moïse plaide :

 

32 :13

זְכֹר לְאַבְרָהָם לְיִצְחָק וּלְיִשְׂרָאֵל עֲבָדֶיךָ, אֲשֶׁר נִשְׁבַּעְתָּ לָהֶם בָּךְ, וַתְּדַבֵּר אֲלֵהֶם, אַרְבֶּה אֶת-זַרְעֲכֶם כְּכוֹכְבֵי הַשָּׁמָיִם; וְכָל-הָאָרֶץ הַזֹּאת אֲשֶׁר אָמַרְתִּי, אֶתֵּן לְזַרְעֲכֶם, וְנָחֲלוּ, לְעֹלָם

Souviens-toi d’Abraham de Isaac et de Israël tes serviteurs auxquels Tu as juré au nom de Toi-même, et Tu leur as parlé en leur disant : Je multiplierais votre postérité comme les étoiles du ciel et toute cette terre que J’ai dit Je donnerais à votre postérité et ils l’hériteront à jamais.

 

Et si tu détruis ce peuple comment s’accomplirait les promesses faites à leur ancêtre ?

Pour que cette promesse s’accomplisse il faut donc que le עֵרֶב רַב s’introduise en Israël.

 

Dans la perspective du thème du Ari : Tout se passe comme si au moment de la constitution d’Israël une quantité de l’être d’Israël est restée à l’extérieur et une des fonctions de l’exil est de restaurer cette complétude, cette finitude, cette unité, cette entité d’Israël. Ceci est un thème que nous apprenons d’autre part. C’est le thème de la 13ème tribu.

 

Jacob a eu 12 fils fondateurs des tribus et une fille. Et par conséquent, il faut chercher quelque part le fondateur de la treizième tribu qui achèverait l’unité d’Israël et en même temps la relierait à l’unité du genre humain tout entière. Nous avons des textes très clairs dans la תּוֹרָה qui nous parlent de cela.

 

La 1ère stratégie de Jacob pour fonder la 13ème tribu – l’unité a 13 dimensions, valeur numérique du mot אֶחָד  – et donc tout ce passe comme si il y a une porte ouverte dans l’unité d’Israël au niveau 12, porte par laquelle en même temps que s’achève l’identité d’Israël, s’achève l’identité des nations reliées à Israël – consiste à marier Dinah à Shkhem.

 

C’est le thème de la messianité universelle. Le messie d’Israël est le messie de l’humanité entière. Et donc c’est cette entité de la 13ème tribu qui est en question. Vous avez bien compris déjà que c’est la porte par laquelle le עֵרֶב רַב entre pour fermer la porte...

 

La 1ère stratégie de Jacob était de marier Shkhem et Dinah, c’est un échec et il y a une deuxième stratégie avant sa mort : c’est de diviser la tribu de Joseph en deux – Menasheh et Ephraïm  - pour faire 13 tribus. Mais après la faute du veau d’or la tribu de Lévi se retire du compte des 13. Il n’en reste plus que douze et c’est encore en suspend. C’est dans ce principe là que s’introduit l’argumentation de Moïse. Pour que la promesse à Israël s’accomplisse, il faut que le עֵרֶב רַב entre en Israël.

 

Il faut compléter cela par l’enseignement du Ari qui a une portée beaucoup plus métaphysique et profonde. Dès l’origine de la construction d’Israël, quelque chose est restée à l’extérieur. Par conséquent, pour le bien et de l’extérieur et de l’intérieur, il faut que le tri se fasse. Moïse est pris par le temps et il y a accélération des événements. En vrac, il va intégrer le עֵרֶב רַב en faisant confiance à l’histoire future que l’épuration se fasse. Cette épuration a duré 4000 ans. Au bout de 4000 ans on arrive délivré, purifié de cette tentation de divinisation de Moïse. On voit cet abcès qui est sorti, un abcès de fixation qui est vraiment la fondation du christianisme. Ceux qui étaient comme ça sont partis là.

 

A propos des événements contemporains, la reprise du Kotel et de Jérusalem a été effectuée par un Moshé Dayan qui n’a pas été divinisé. Il y a eu une espèce de stage de purification dans l’exil. Tous ceux qui étaient tentés par cela sont partis là où ils sont partis… Dès l’origine il y a cette dimension-là de piège de tentation de risque de la divinisation de Moïse. C’est le contraste qu’il peut y avoir entre la piété chrétienne et la piété juive à tous les niveaux. C’est exactement la différence entre le paganisme et le judaïsme. Le peuple juif est vacciné à ce niveau-là. On a mis le temps pour s’en désintoxiquer mais finalement on y est arrivé.

 

Les 2 prières :

 

  « Sauve Israël et pour sauver Israël pardonne au עֵרֶב רַב... »

 

  Maintenant que Dieu a suspendu la sanction, le עֵרֶב רַב entre en Israël – alors sa faute se dévoile. Tant qu’il n’était pas en Israël, il n’était pas justiciable de la loi, et dès que Dieu accepte de les intégrer à Israël en faisant comprendre à Moïse qu’il avait raison de faire ce qu’il a fait sans prendre conseil sinon Dieu lui aurait dit non, et Moïse savait très bien que c’est ce qu’il fallait faire, pris par le temps de la précipitation de la sortie d’Egypte. Alors que de notre temps comme le dit Isaïe : « A la fin des temps vous aurez le temps… » Depuis la fondation du sionisme jusqu’à nous il s’est passé beaucoup de temps et pourtant toujours dans ce fantasme de précipitation...

 

 La 2ème prière est pour pardonner au עֵרֶב רַב lui-même et c’est là que Dieu dira à Moïse que la sanction sera suspendue pour le עֵרֶב רַב mais le peuple sera mis à l’épreuve. Il y a là un tout autre thème.

 

C’est à ce propos que l’expression « עֹרֶף קְשֵׁה עַם peuple à la nuque raide » est employée. Elle concerne non pas Israël d’abord mais le עֵרֶב רַב. Ce n’est pas comme une calomnie de nommer Israël « peuple à la nuque raide » - la signification de l’expression on la trouve en particulier dans Rashi, c’est « rebelle au repentir ».

 

Le Midrash pose la question ainsi : pourquoi Dieu dit tout de suite « Je vais les détruire » ?

N’y-a-t’il pas la clause du repentir ?

C’est pourquoi Dieu explique à Moise en disant : J’ai vu ce peuple, Je l’ai jugé :

« וְהִנֵּה עַם-קְשֵׁה-עֹרֶף הוּא» : il s’agit du עֵרֶב רַב. « Peuple à la nuque raide » cela veut dire « incapable de se repentir ». C’est pourquoi - et c’est étonnant – le texte ne tient pas compte de la clause du repentir possible. Cela devrait faire l’objet de toute une étude.

 

Mais lorsque le peuple est intégré à Israël, alors cette מִּדָה cette dimension de « עֹרֶף קְשֵׁה עַם» rentre en Israël. Donc ce n’est qu’à postériori d’une certaine manière qu’il y a une générosité de l’Israël hébreu à prendre sur lui ce qui s’est passé à l’extérieur de lui pour l’intégrer dans l’histoire de son salut. L’Israël hébreu a accepté de devenir « עֹרֶף קְשֵׁה עַם» pour pouvoir intégrer le עֵרֶב רַב. Il est évident que maintenant nous ne disposons plus des critères de diagnostic. L’entêtement d’un juif ne le désigne pas forcément comme membre de le עֵרֶב רַב...

 

***

 

le 7 Adar relié à Pourim.

 

Lorsque Haman a jeté le sort pour décider la date du jour de destruction du peuple juif en Perse, à chaque lancer des dés pour chaque jour il y avait le mérite d’un événement de l’histoire d’Israël et en fin de compte il est tombé sur un mois ambigu (12 ou 13ème) et il en fut content car il savait que c’était le mois où Moïse est mort pressentant que c’était un jour néfaste pour Israël sans Moïse, c’est-à-dire lorsqu’Israël n’a plus de relation avec la תּוֹרָה.

 

C’est pourquoi on commence par les assimiler et quand on commence par les assimiler alors on essaie de les détruire. On comprend cette stratégie et lorsqu’on veut les détruire c’est dans le temps symbolique du moment où Moïse n’est plus là qu’Israël est vulnérable.  

 

Midrash : Hamann savait que le 7 Adar c’était le moment de la mort de Moïse mais ne savait pas que c’était également sa date de naissance. Par conséquent, son calcul était vain. Malgré les apparences Israël rester relié à Moïse. On croît que Moïse est mort mais Moïse vient de naître.

 

Maharal dans son livre consacré à Pourim « Or ‘Hadash », toute l’atmosphère de Pourim est une atmosphère de lumière. Midrash : Hamann connaissant sa date de décès ne savait il pas sa date de naissance ?

 

L’explication du Maharal est très profonde : il a cru que l’histoire qui concerne Israël a le même rythme que l’histoire qui concerne les nations. Un commencement, une apogée, et une fin qui est la fin. Il ne savait pas qu’il y a une dimension d’éternité pour Israël. Et que ce qu’il a pris pour la fin n’était pas autre chose que le début du commencement. C’est ainsi qu’il a été pris au piège. Le nom de Moïse n’apparait pas dans Parashah תְּצַוֶּה mais on n’y parle que de lui.

 

 

 

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