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Compte du OMER et Confinement

Dans cette période particulière ou le temps semble s’être suspendu et la tendance naturelle qu’a l’humanité à se répandre sur le monde, a laissé la place au dégagement et au retrait, le gouvernement Français a annoncé les premières mesures de déconfinement avec une date désormais inscrite pour des millions de français qui est celle du 11 Mai. Le compte est lancé, et même si on sent un certain relâchement dans l’attitude de solidarité et de respect des règles qui avaient prévalu lors des premiers temps de ce confinement historique, la France attend cette date avec impatience et fébrilité. Même si l’anxiété provoquée par cette épidémie ne s’est pas encore dissipée, on peut commencer à compter les jours qui nous sépare de ce moment de libération nationale. Parallèlement à ce nouveau rythme du calendrier imposé par le virus, non seulement à la France, mais au monde entier, notre tradition, la tradition hébraïque, est insérée dans un autre calendrier, celui du compte du OMER. C’est la période qui sépare la fête de Pessah, qui réactualise la sortie du peuple des hébreux de l’esclavage en Egypte pour les amener à l’événement du don de la Torah qui s’est réalisé pour des raisons secondes, que nous ne développerons pas ici, sur le Mont Sinaï. Cette période relie donc la commémoration de la sortie d’Egypte du peuple Hébreu avec l’objectif d’aller s’installer sur sa terre, à l’événement de la révélation de la Torah. La fête de Chavouot, qui n’a pas de date précise dans le calendrier, est reliée à la fête de Pessah, et nos récits mettent donc en évidence le lien fort, indéfectible, entre l’événement de la sortie d’Egypte et celui de la révélation de la Torah. Tout se passe comme si la fête de Chavouot, qui commémore le jour de la révélation de la loi était, en quelque sorte la clôture de la fête de Pessah. Manitou nous expliquait que la période qui relie Pessah de Chavouot, ces 50 jours qui sont constitués de 49 jours de mérites à acquérir, à conquérir, plus le dernier qui est donné, est précisément une période vulnérable ou les acquis de la sortie d’Egypte peuvent se renforcer, en cas de réussites, de succès pour aller vers le don de la loi morale, ou au contraire s’inscrire dans une ligne d’échecs, de fractures qui risquent de remettre en cause les acquis de la sortie d’Egypte elle-même. Et Manitou rajoutait pour nous expliquer un peu mieux l’intensité de cette période, qu’il s’agit d’une période vulnérable car elle nous fait passer d’une libération physique, l’accès à la terre, à une libération plus spirituelle, le don de la Torah. De la même manière que l’être humain est corps et âme, le corps d’Israël est sauvé à Pessah son âme est sauvée à Chavouot. Le passage entre les deux est une période de vulnérabilité qui peut remettre en cause les lignes de réussites qui ont été acquises jusque-là. Les enseignements concernant cette période sont innombrables, et il ne s’agit pas ici de tous les citer, mais, peut être essayer de réfléchir à l’éclairage que l’intensité et la centralité de cette période peuvent apporter à la situation que nous traversons collectivement aujourd’hui. Au départ cette période était une période de joie pendant laquelle chacun pouvait aller apporter les prémices de sa récolte, la gerbe de blé, au temple. Elle était appelée la fête des prémices avec le thème fort, et cher à notre tradition, sur l’altérité, le sens du retrait pour laisser la place pour l’autre. Le fait de donner les prémices en cette période comme un acte de dégagement pour offrir à « l’autre » plus de place qu’à soi-même. Et les récits de la relation entre Cain et Abel nous reviennent en mémoire pour nous rappeler que la faute de Cain est d’avoir refusé de laisser, à l’autre que soi, une place dans le monde, comme l’illustration de l’échec du comportement moral. Cette période est devenue, à la suite de l’épisode de la perte définitive de l’indépendance nationale, après la catatrophe de la défaite de l’armée de Bar Korba, qui était aussi représentée par les élèves de Rabbi Akiva, une période de deuil. Et aujourd’hui au sein même de notre tradition des discussions sont en cours pour savoir si cette période, ce décompte du OMER, doit toujours être considérée comme une période de deuil, ou si au contraire compte tenu de la reconstruction de l’identité Hébraïque sur sa terre, elle doit de nouveau être considérée comme une période de joie. Au cœur même de cette fête qui nous incite pourtant à l’unité nationale, les divisions se poursuivent.  Car en effet la cause profonde donnée par nos sages pour justifier que cette période, vulnérable, délicate, ce soit transformée d’une période de réjouissance en une période de deuil, à cause de cette perte de l’indépendance de notre peuple sur sa terre, est le manque d’unité au sein du peuple. Toutes les personnes qui constituaient l’armée de Bar Korba étaient des grands, de très grands, ils étaient aussi des élèves de Rabbi Akiba, c’était des sages, d’une envergure inouïe nous dit-on. Pourtant ils ne se donnaient pas le respect mutuel, les honneurs, dus à chacun d’entre eux, ils ne s’aimaient pas l’un l’autre, et c’est la raison profonde de la défaite Les enseignements de la Caballe, nous indiquent qu’il y a également un autre événement connu qui s’est joué dans cette période du OMER, et qui était de la même nature. C’est la vente de Joseph par ses frères. La dislocation de l’unité, de cette unité indispensable pour faire la nation, est la source profonde qui risque de remettre en cause les acquis de la fête de Pessah, qui sont comme autant de lignes de fractures qu’il faut réparer. C’est l’unité nationale qu’il faut reconstituer pendant cette période. Et quand on voit ce qu’il se passe actuellement en Israël on se dit que cette unité est indispensable pour la réussite de notre histoire. Comme pour confirmer ces difficultés d’unité, on peut indiquer qu’il y a

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La réflexion morale n’a d’importance, n’a de valeur propre que rapportée à la destinée concrète de chaque homme

La réflexion morale n’a d’importance, n’a de valeur propre que rapportée à la destinée concrète de chaque homme [1] Dans les fissures du désert Laissez à mes cils au moins une larme Perler de tous ces yeux ouverts De tant de morts donnez-moi la mémoire Avec les tréfonds de toutes les mers. Isaïe Spiegel, Et la Lumière fut, Lodz, 1949 « Si on s’en sort entre 100 000 et 200 000 morts on aura fait du bon boulot [2]» On croyait les démocraties immunisées à l’indifférence sadique. «Je crois que beaucoup l’ont eu au Brésil, il y a quelques semaines, ou bien des mois. Ils ont déjà des anticorps[3] ».  Immunisées à la froide contemplation du meurtre.2 Des masques s’échangent au plus offrant sur les tarmacs d’aéroport, des larcins minables sont commis par des nations tout entières au détriment d’autres nations, l’Europe submergée peine à s’unir, tandis que fanfaronnent sans gloire ceux qui ont tout compris. Se taire devant une telle tragédie étant radicalement exclue. Chacun y va au contraire de son bon mot. Mots encombrants, valises, machin-barrière, et « distanciation » dont tout de même l’acception est aussi simple que tout autre, distance ne suffisait-il pas ? Moindres maux ? Peut-être pas. Quand on commence à infléchir le « verbe », le monde fléchit fatalement aussi. Anonymes, militants, déçus, esseulés, paumés, croyants, malheureux, surdoués, vaniteux, nombreux aussi ceux qui claironnent tout savoir de ces cris d’agonie, ces hurlements abandonnés, ces asphyxies dans le néant. Ils ont déjà posé leur conclusion, au « nom des miens », ils livrent leur compte : C’est donc à cause du réchauffement climatique, du libéralisme, de la détérioration des rapports humains, de l’indifférence générale aux mondes en guerre, des choix gouvernementaux, de la mondialisation, de la fracture sociale, de la dislocation familiale, des phoques disparus, des expériences en laboratoire, de Tchernobyl, de la science, des expériences nucléaires, … à cause de ces pêchés que nous sommes condamnés ? Pêché d’un vice collectif ? Peut-être.. Mais est-ce sincèrement au nom de ces ravages, qu’ils crient dans les hôpitaux bondés surchauffés par la mort, ma sœur, mon enfant, mon père, est-ce donc pour dénoncer l’état du service public laissé à l’abandon, ou le meurtre les baleines baltiques que mon ami d’enfance, ma voisine agonisent dans la plus effarante solitude ? Il y a un proverbe yiddish qui dit que là où se multiplient les prophètes, il n’y a plus d’hommes. Et pourtant !… On voit soudain surgir des trésors d’exceptions dans des lieux insoupçonnés. Internet qui charriait encore si récemment à nos portes boues et glaires, tripes et vomi, se met brusquement un peu à espérer. Si les complotistes ont encore un bel avenir, leur font aujourd’hui face une cohorte d’inconnus qui offre ses services, un autre bataillon qui amuse et fait don de ce bref bonheur dont il faut se saisir, et un autre qui applaudit à tout fendre chaque soir. Soudain le monde se regarde et se détourne indifférent des devins jamais rassasiés. Ensemble, tous les jours plus nombreux, pour survivre, pour espérer, pour se dire que nous mourrons dans une même humanité, dans le silence de nos vies, de celles qui n’ont appartenu qu’à nous seuls, pour se dire que nous vivrons peut-être un peu encore, Nous voilà donc enfin face à face. Car c’est bien ainsi que nous devrions penser, avant d’écouter le bruit des arbres ou des baleines, aussi féériques fussent-ils, oui, c’est en compréhension, cette fois, que nous devrions nous voir, à travers ce miroir qui nous renvoie ce que nous sommes, ou plus exactement, seulement ce que nous ne sommes. Tous. Bisel Mensh, dira-t-il de lui-même, l’écrivain Baashevic Singer lors de la réception de son Prix Nobel : signifiant  « Petit homme »,  « pauv’ gars » en est une autre traduction. Chaque jour, des centaines de pauv’ gars (j’inclue les femmes) se lèvent dignement parmi nous, pour tendre une main gantée à leurs comparses. Après une si certaine tragédie, après, peut-être, pourrons-nous tenter de comprendre et de couvrir le bruit des larmes par des regrets, des remords, des décisions futiles ou décisives pour l’histoire de l’humanité, mais en attendant … Il faut appréhender le jour qui vient. On les voit au loin s’en aller Sans savoir d’où ils viennent, Peut-être sont-ils les dernières ombres Des premiers hommes sur la terre, De l’ère où sur notre planète Se disloquaient les sols et se fendaient les eaux ? Ou peut-être sont-ils les premiers à porter Dans les replis de leur visage Les signes premiers, plus profonds, de la souffrance De l’homme nouveau sur la terre ?[4] Aveugles hier, surgissent enfin à notre vue, à leur taille réelle, ceux qui passaient au travers des cases sociales dont ils n’accédaient que par espoir déchu le plus souvent, ou exaucé à la génération qui leur succédaient. Les voilà enfin aimés. Ceux qui cultivent l’humanité, à mains nues. Ceux qui, honorables, ne font mentir aucun de leurs actes. Ouvriers, postiers, agriculteurs, auxiliaires de vie, aides ménagère, routiers, caissiers, artisans, artistes et tant d’autres encore, à qui si peu était donné. Apparaissent aussi avec une clarté criarde ceux l’on croyait opulents et qui meurent de leur vocation à sauver, infirmiers, médecins, chefs de services… et tant d’autres encore. Ceux en particulier qui ne se commettent pas à comparer un « mort pour un autre », un malade du covid pour un accident de la route ou de trottinette. Et puis, tous ceux également qui aspirent à être solidaires pour des inconnus qu’ils auraient, hier encore, toisés. Vous, moi… Nombreux je l’espère les pauv’ gars immunisés contre nos démocraties, nos mensonges, l’indifférence froide, le manque le plus basique de compassion, immunisés espérons tous ces hommes, ces femmes qui ne misent ni sur le nombre de morts journaliers de pays en pays, ni sur l’avenir sinistre qui pourrait cogner à nos portes.  Alors, pour tous ces sombres crétins et criminels ambitieux, prions pour qu’ils soient reniés par cette nature-là, celle précisément constituée d’hommes et de femmes qui recèlent en eux un pan de céleste et l’avenir possible de notre monde.  Daniella Pinkstein [1]La Parole et l’écrit, I. Penser la tradition juive aujourd’hui,

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Contagion Et brusquement l’humanité prend de nouveau conscience de sa finitude Et fait « Chabbat »

Dans le monde dans lequel nous évoluons, avec les avancées de la science, de la médecine,l’accélération prodigieuse du progrès et des nouvelles technologies, l’immédiateté del’instant dans lequel, il n’est désormais plus possible, de rester capturé, de s’ennuyer, decontempler ou même de penser. Dans ce vacarme incessant des chaines d’informations encontinue, des réseaux sociaux et des outils de communication à distance, cette remise enperspective de la place de l’homme et de la femme dans le monde a certainement quelquechose de bon, et mérite qu’on y réfléchisse de façon posée. Bien entendu il ne s’agit pas de relativiser ou de minimiser le décompte journalier et funèbredu nombre de morts, les drames qui se jouent et qui sont innombrables, le déchirement despersonnes qui ont perdu leurs proches et qui sont anéantis par la douleur. Ce qui se passe aujourd’hui est particulier, intense, oppressant, et les drames et les douleurss’interpellent et se répondent dans une cadence infernale à l’échelle du monde.Mais inévitablement, à ce constat il faut ajouter la mise en cause d’un certain nombre devaleurs sur lesquelles nous avions fait reposer les principes de notre vivre en commun. L’angoisse qui se répand et se transmet, la hantise qui s’empare de tout un peuple, de touteune nation, de toute une humanité, ne traduisent-elles pas aussi, si nous y réfléchissons,cette redécouverte brutale de notre finitude, cette nouvelle révélation qu’il y a des limitesau-delà desquelles l’homme n’a plus accès, qu’il le veuille ou non, que l’éternité n’est pasune option. Nombreux étaient ceux qui nous indiquaient depuis un certain temps déjà que la dérivetumultueuse, impersonnelle et omnipotente, dans laquelle l’humanité s’engageait devaitavoir une fin, et que les périls étaient nombreux et proches. Il ne s’agit bien évidemment pas de faire référence à une quelconque fatalité (dont on peutd’ailleurs se demander si elle existe) mais de se demander si nos angoisses n’auraient pasété moins grandes si nous avions spontanément atténués notre tendance naturelle à vouloirnous répandre sur le monde sans précautions particulières. A force d’avoir imaginé l’illimité à portée de main, nous nous sommes mis à y croire et nousnous sommes pensés invulnérables, éternels. Mais la réalité nous a rattrapé et nous plongeaujourd’hui dans l’angoisse de cette nouvelle révélation que tout cela n’était que construction, et il parait utile de voir aussi cette situation délicate comme une bonnenouvelle. Si on essaye de poser un regard froid sur la situation particulière dans laquelle nous sommesentrés brutalement, qui est sérieuse et aura probablement des conséquences que noussommes bien loin aujourd’hui de pouvoir évaluer, un point malgré tout se détache du restede façon forte. C’est la place du retrait, de l’effacement, de l’évidement, ce renoncement de l’accès à latotalité que nous avions pensé un jour pouvoir atteindre si la nature ne nous avait pasramenée à notre condition d’homme, avec nos failles, nos faiblesses, notre fragilité, nosdoutes et nos peines, et notre finitude avec laquelle nous devons de nouveau accepter devivre. La nature a contraint l’homme à se retirer partiellement du monde, à renoncer à la toute-puissance dont il avait pensé pouvoir se doter pour envahir l’espace du monde sansprécaution, à faire une place autour de lui pour que l’autre que lui puisse exister, et ceretrait, ils ont été nombreux à nous crier d’essayer de le réaliser, mais nous ne les avons pasécoutés, nous ne les avions pas entendus, nous ne les avions pas compris. L’homme est confiné, malgré lui, il se retire de la planète et laisse la place, il laisse enfin uneplace. Il a déserté les villes, cessé d’inonder les rues et de se déverser dans les places, sanségard, sans ménagement, et demande maintenant la permission, la permission de pouvoirentrer, de pouvoir être là, de pouvoir se présenter, de pouvoir sortir, de pouvoir exister.Comme une remise en ordre naturelle des choses. Cette inversion de la norme édictée par l’homme lui-même, cette remise en cause de lamain mise de l’homme sur le monde, se voit aujourd’hui jusque dans les activités les plusinfestées, celles des réseaux sociaux, des conversations virtuelles, des échanges Internet oumême les plus contaminés, les plus aliénés, les plus asservis, commencent progressivementà se retirer, à laisser une place, à donner du temps au calme, au silence, à la lenteur, à lasuspension, au vide. Dans notre tradition tout cela a un nom. Ce retrait, cet évidement, ce dégagement del’homme pour permettre à l’autre que soit d’avoir une place dans le monde peut senommer : il s’agit du « Chabbat ». Après le « Chabbat de Dieu » au début de l’histoire del’humanité, d’après ce que nous disent les sages de notre tradition, qui a permis à l’hommed’entrer dans le monde libre, on attendait que l’homme, à son tour fasse « Chabbat »,interrompe sa course folle vers des chemins qui ne sont pas toujours authentiques, cessetoute activité de la volonté qui s’associe à la progression des circuits économiques, qu’il seretire de l’activité économique du monde pour se consacrer à des activité plus nobles, plus àla hauteur de ce qu’on est en droit de pouvoir attendre d’un homme : qu’il réalise son travaild’homme. Cet acte de retrait, l’homme n’a pas pu, n’a pas su réaliser par lui-même, cet acte de retraitl’homme a refusé de réaliser jusqu’à l’absurde. Cet acte de retrait qu’on attendait de lui pourpermettre une harmonie du monde et qui n’est pas venu. Cet acte de retrait on le lui afinalement imposé, contre son gré, pour que l’ordre des choses puisse reprendre ses droits,et nous amener vers des chemins plus éclairés. Au retrait de Dieu, au silence de Dieu, que les premiers refusent, que les seconds dénoncentet que les troisièmes, enfin, tentent de décrypter avec gourmandises et espérances, succèdede façon inexorable le silence de l’homme, le retrait imposé à l’homme. C’est une fatalitépour les premiers, un juste retour de la nature pour réintégrer sa condition pour les seconds,un état orchestré a bien plus haut niveau pour les troisièmes. Il ne s’agit pas ici de seprononcer sur telle ou telle option mais de se demander si cette situation n’est pas denature à restituer un ordre plus juste du monde et de remettre l’humanité en harmonie avecle monde dans lequel

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Pessa’h en quarantaine

Pour la première fois dans l’histoire récente de nombreuses familles juives se retrouveront séparées pour fêter Pessah. Celles qui avaient l’habitude de rejoindre parents ou enfants en France comme celles qui retrouvaient pour l’occasion la partie où la branche de la famille vivant en Israël. Le coronavirus est venu limiter inexorablement les voyages et les échanges. Il a figé chacun dans sa place. Tout se passe comme comme si l’heure des choix était venue. Comme s’il fallait choisir son camp ou plutôt son lieu. Etes-vous d’ici où de là-bas ? Il devient plus difficile en tout cas d’être un peu de partout à la fois. Cette nouvelle configuration a valeur d’avertissement pour les Juifs de diaspora. L’incitation à revenir chez soi est également à l’œuvre pour chaque Nation du monde, pour chaque famille, pour tous les individus. Les frontières réapparaissent ainsi que la primauté des politiques publiques et la nécessité d’appartenir à une terre et un groupe humain. Chacun se voit contraint par se retour à soi de tenir compte des autres et de respecter des règles collectives. L’heure requiert un confinement altruiste. Comme prévu par la tradition, le retour d’Israël sur sa terre implique parallèlement une techouva des Nations. Le processus d’effacement des différences à l’œuvre en Occident depuis des siècles atteint ainsi sa limité mortifère. Le Covid 19 oblige à un « reset » ontologique. En ce sens, il est à la fois un mal et un remède. En réassignant chacun à sa place, le virus paraît sonner le glas d’une globalisation débridée. Il amorce une dé-mondialisation généralisée. Il remet en évidence l’impératif de distinction qui est au principe même de la Création du monde. Le texte de la Genèse nous informe en effet que Dieu distingua entre le ciel et la terre, entre la lumière et les ténèbres, entre les eaux d’en bas et les eaux d’en haut, entre les différentes espèces, entre le jour et la nuit. L’ordre premier ne peut être ignoré de même que les différenciations apparues dans l’histoire : celle de la dispersion des Nations comme celle de la distinction entre Israël et les Nations.  Le virus remet également à l’honneur une autre valeur phare en Israël : Le sens de l’intérêt général et l’interdépendance de chaque individu. Les Israéliens connaissent tous l’adage talmudique : « Kol Israël haverim ze ba ze ». La guemara ((Chevouoth 39a) cite en appui à cette affirmation un verset du Lévitique emprunté au chapitre des bénédictions et des malédictions : « Ils trébucheront, l’homme sur son frère, comme en face de l’épée, et pas de poursuivant » (Lévitique 26/37). Le talmud explicite la dracha : « Ils trébucheront, l’homme sur son frère, à cause du péché de son frère. De nombreux midrachim reprennent l’expression pour expliquer que la faute d’un seul peut faire trébucher toute la collectivité de même qu’à l’inverse, le mérite d’un seul peut la sauver. Que la véracité de deux grands principes de la tradition d’Israël se trouve ainsi dévoilée au grand jour est le signe d’une étape nouvelle : l’amorce d’une reconnaissance universelle des vérités que le peuple juif a mission de transmettre à l’Humanité. La sortie d’Egypte version 5780 -que chacun fêtera en son lieu- aura sans nul doute cette année un goût plus prononcé encore qu’à l’accoutumée de délivrance finale.  Antoine Mercier

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L’Europe des peuples ou la Techouva des nations

On dit généralement que la différence entre un homme d’Etat et un gouvernant, est que l’homme d’Etat est non seulement capable d’avoir une vision, mais il est aussi capable d’imposer cette vision à son peuple, alors que le gouvernant a plutôt tendance à savoir plaire, c’est-à-dire à réussir à utiliser notre système démocratique pour se faire élire et essayer de rester au pouvoir avec les idées majoritaires dans le pays. Pour le dire plus simplement : un homme d’Etat va réussir à amener le peuple à ses idées, alors qu’un simple gouvernant va aller là où les idées du peuple vont l’emmener. La fracture, l’antagonisme abyssal et irréconciliable entre les idées majoritaires des peuples des pays européens d’un côté et leurs dirigeants de l’autre nous montre qu’aujourd’hui en Europe, il n’y a plus ni homme d’Etat ni gouvernants. Déjà au début de l’intégration européenne les difficultés pour faire admettre aux peuples, et notamment au peuple français, les avantages de l’Europe, les dirigeants ont dû rivaliser de créativité et d’ingéniosité. On se souvient des débats sur Maastricht ou François Mitterrand, que l’on peut qualifier sans prendre parti, d’homme d’Etat, a mis tout son poids pour faire pencher la balance du côté du « Oui ». Si à l’époque les choses pouvaient apparaitre comme bon enfant il semble que désormais la situation se soit particulièrement tendue, et que le divorce entre la position majoritaire des peuples et leurs gouvernants soit irréconciliable, en Europe. Le double antagonisme qui semble aujourd’hui confirmer cette tendance est d’un côté l’impossibilité des gouvernants de parvenir à convaincre leur peuple d’avancer vers une Europe plus intégrée, de l’autre le refus des gouvernants d’entendre leur propre peuple, et de tenir compte de leur avis, lorsqu’ils sont consultés. Une impression étrange nous dérange comme un système à bout de souffle qui s’enraille avant de cesser de fonctionner. Les exemples sont nombreux : Parmi eux le « Non » au référendum en France en 2005 pour une constitution européenne (aussi appelé traité de Rome II) a laissé des traces. La raison principale était la perte de la souveraineté nationale française au nom de la construction européenne. En 2008 le traité de Lisbonne qui est le texte de 2005 à peine modifié est voté par le parlement, cette fois ci, sans l’avis du peuple. Une impression étrange que l’Europe devait se réaliser coute que coute, en s’affranchissant de l’avis des peuples, a commencé à s’installer en Europe. Plus récemment l’exemple du Brexit vient confirmer cette tendance. Même si l’Angleterre a toujours été un peu à la marge dans la construction européenne, un pied en Europe et un pied en dehors, le vote Anglais en faveur du Brexit parait poser un problème majeur à une partie de l’inteligencia, à l’intérieur et à l’extérieur de l’Angleterre, qui refuse cette idée. Et la situation s’emballe et devient caricaturale, presque grotesque tant on ressent la volonté des gouvernants de s’accrocher encore à l’espoir de voir les Anglais rester dans l’union européenne d’une manière ou d’une autre. Et un vent de panique s’empare violemment d’une Europe à la dérive et prête à tout pour éviter ce désastre. Dernièrement, en Italie, l’accord politique, bancal et contre nature, entre le parti démocrate et le mouvement 5 étoiles, pour évincer Monsieur Salvini du gouvernement, risque d’aggraver un peu plus encore la fracture et l’incompréhension entre le peuple et les gouvernants Italiens. Il risque également d’avoir des conséquences désastreuses au moment des prochains votes ou le peuple Italien pourrait faire payer aux dirigeants cette volonté toujours marquée en Europe de vouloir passer en force, contre l’avis des peuples. Bien entendu il ne s’agit pas de faire l’éloge de ces dirigeants, qui ont souvent pu accéder au pouvoir, notamment, ceux cités ici, grâce à des arguments démagogiques, souvent contestables et parfois faux. Mais il s’agit de faire le constat que nos gouvernants ne sont ni capables d’influencer leur peuple sur une vision renouvelée et plus intégrée de l’Europe, mais ne sont pas plus capables d’accepter d’aller là où les idées sont majoritaires. Et la fracture se dévoile chaque jour un peu plus. Incontestablement deux forces opposées sont à l’œuvre en Europe et plus généralement dans le monde.  Ces deux forces ont toujours exercées leur intensité mais selon le moment de l’histoire une l’emporte sur l’autre. La première veut continuer cette idée qui a été défendu par l’humanité depuis de très nombreuses années, qui est la recherche de l’universel. Mais si l’idée est authentique au départ, elle est fidèle au projet de la vision universelle du monde, la mise en pratique ne finit-elle pas systématiquement par aboutir à l’impérialisme, et par échouer, comme l’histoire l’a montré si souvent par le passé ? N’est-ce pas ce qui est en train d’arriver avec l’idée européenne qui semble désormais souhaiter s’imposer plus que de recueillir l’adhésion, et dont le projet se fracasse sur la difficulté de la réalité ? La seconde marque une volonté claire d’un retour aux Etats nations. Elle exprime le souhait diffus des pays de retrouver leur identité, leur manière d’être, à l’échelle de la nation, et que l’intégration européenne aurait plutôt tendance à dissoudre dans une vague identité européenne qui a encore beaucoup de mal à se définir. Et qui d’ailleurs se définit plus par l’idée de civilisation plus que par celle d’identité. S’il existe encore un peu partout dans le monde des poches de résistance à la liberté, aux droits et devoirs de l’homme pour son émancipation, cette seconde force se réveille avec vitalité dans le monde qui appelle au réveil des identités nationales, et qui se concrétisent progressivement le plus souvent grâce à un réel processus démocratique. Alors que l’Europe, qui apparait plus que jamais comme une vieille dame essoufflée, résiste à cette tendance générale, avec des procédés parfois contestables et qui poussent les peuples à la révolte, le monde en marche semble, lui, reconnaître ce nouvel ordre des choses. La première force entraine les partisans de l’intégration européenne, la seconde mobilise actuellement la majorité des peuples en Europe et dans le monde pour le retour à

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Election en Israël

Vote Israël : L’incertitude domine, l’universel se dévoile Israël a voté le 17 Septembre pour élire ses députés mais aucune majorité ne semble pouvoir se dégager. La situation apparait presque bloquée. Après le dernier vote en avril qui avait abouti à une impasse, la situation est de nouveau confuse à l’issue de ce vote de septembre puisqu’aucune des deux forces politiques actuelles dans le pays n’est en mesure de pouvoir constituer un gouvernement. Après dépouillement de pratiquement tous les bulletins de vote (en dehors de celui des soldats) le Likoud de Benjamin Nétanyahou obtient 32 sièges et le parti bleu-blanc emmené par Benny Gantz 33 sièges. Aucune de ces deux forces principales du pays ne seraient en mesure de constituer, en collaborant avec leurs alliés naturels, une majorité avec au moins 61 députés à la Knesset. Ancien ministre de Nétanyahou, Avigdor Lieberman, chef du parti Beiténou obtient 9 sièges à l’assemblée. Il semble être est celui qui tient entre ses mains l’avenir de ce scrutin. Il a appelé à une coalition d’union nationale libérale. Le parti uni Arabes remporte 12 sièges et pourrait également jouer un rôle d’arbitre même si les partisans de Benny Gantz ont annoncé qu’ils ne souhaitaient pas former une coalition avec des partis qui refusent le caractère juif de l’Etat d’Israël. Au-delà des difficultés, constatée depuis toujours en Israël, pour obtenir un gouvernement susceptible de mettre en place sa propre ligne politique, et qui tiennent aussi au mode de scrutin à un tour à la proportionnelle intégrale, cette situation témoigne également des difficultés de réaliser une société dont l’un des principes fondateurs est l’universel. Israël est le pays des hébreux, c’est le pays de nos pères, Abraham, Isaac et Jacob, c’est devenu le pays des juifs qui ont eu la possibilité notamment depuis la création de l’Etat d’Israël en 1948, de venir s’installer et de retrouver la racine de leur identité qui n’est pas juive mais hébraïque grâce à la matrice d’engendrement qu’est Israël. Si le juif est cosmopolite, c’est-à-dire capable de s’intégrer dans n’importe quelle société et pouvoir en faire partie, c’est parce que l’hébreu, qui est à l’origine de son identité, lui est à l’indice de l’universel. Et c’est un fait que les juifs du monde entier sont venus depuis leur pays de naissance, depuis leur pays d’exil, depuis le pays dans lequel ils ont vécu intégrés de nombreuses années, pour s’installer en Israël, tenter de redevenir hébreux, et essayer de faire société ensemble. L’universel se dévoile pour montrer que toutes les nations du monde pouvaient parvenir à vivre ensemble en harmonie au sein d’une même société et cela, dans un premier temps, à travers leurs juifs. Mais tout cela n’est pas si simple et les clivages existent aussi dans la société Israélienne, qui reflète, en miniature, les divergences qui existent entre les différents pays du monde. Les spécificités propres à chaque manière d’être homme se dévoilent de manière plus forte et plus prégnante à l’intérieur de la société Israélienne qui est le reflet de la diversité des nations. La tentative du communautarisme, du repli autour de la communauté de laquelle on vient est très forte et explique très probablement l’éclatement du vote de ce jour de Septembre en Israël. Chaque parti semble représenter une force qui est à l’œuvre dans la société comme par exemple la Russie parait se dévoiler à l’intérieur d’Israël derrière le personnage d’Avigdor Liberman, même si cela est probablement un peu caricatural. Derrière les difficultés que traduit ce vote, une lumière apparait et semble nous donner le chemin. C’est la lumière du retour, du retour à une tentative de construction de l’unité du pays. L’appel à un gouvernement d’union national est un appel qui a régulièrement été lancé en Israël. Réussir à faire converger les différentes tendances traditionnelles qui existent dans le pays, n’est pas chose facile. Mais les difficultés de cette année à faire émerger dans le pays une force, qui serait en mesure de gouverner, et la situation de quasi blocage actuelle à l’issue du scrutin de septembre, témoignent peut être que le temps de la restauration de l’unité est en marche, que la clé véritable de cette unité est un retour aux sources traditionnelles de la morale et de la pensée hébraïque, que les hébreux se reconstituent en nation sur leur terre, afin de permettre à toutes les composantes de la société, tout en préservant la spécificité et la singularité de chacune d’entre elles, de pouvoir participer ensemble à la vie démocratique du pays. Peut être que ce refus du peuple Israéliens d’attribuer aujourd’hui à une des forces en présence une majorité absolue, pour lui permettre de gouverner le pays, sans l’avis des autres, rend compte de cette volonté de parvenir à trouver l’unité du pays pour réussir à faire converger l’ambition du projet d’Israël en tant que nation, et sa réalité au quotidien et faire éclater la dimension universelle du peuple hébreux. A quelques jours des fêtes de Roch Hachana et de Yom Kippour avec la perspective de la Techouva, ce retour que l’on devra faire sur soi même, l’idée parait en tout cas séduisante. Olivier Cohen

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