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29 Mai 2018

LE SEPTIÈME JOUR DE PESSA'H : LE PASSAGE DE LA MER DE JONC

INTERVENANT(S) : MICHEL AMRAM Z"L

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Le septième jour de Pessa'h : le passage de la Mer de Jonc


L'épreuve de la Mer

Pirqei Avot V, 4 : « Par dix plaies le Saint, Béni est-Il, a frappé l'Égypte. Et dix sur la mer ». Pour que la fin de la servitude en Égypte soit possible il fallait, d'une part, délivrer de l'oppression humaine égyptienne par les plaies et, d'autre part, témoigner de l'intervention dans l'histoire humaine de la Providence divine qui se sert, à son gré, pour Son dessein, du déterminisme des lois naturelles.

La Hagada de Pessa'h insiste sur la multiplication des plaies survenues sur la mer au nombre de dix, de cinquante ou de deux cents alors qu'elles ne furent que de dix sur l'Égypte. La Torah, parasha Béshala'h (Shémot XIII, 17 à XVI, 26), nous fournit le récit de l'évènement du passage de la mer de Jonc, et elle le considère comme une délivrance encore plus grande que celle du passage au désert à partir du pays de Goshen, contrée égyptienne d'où le peuple des enfants d'Israël est parti.

D'ailleurs, la mer de Jonc, ים סוף, yam souf peut signifier en hébreu "yam sof, la mer Fin", mer de la fin de toutes les fins, étendue angélique liquide de la finalité. La mer ים, yam est d'équivalence numérique 50 qui est le compte des jours du 'Omer depuis Pessa'h jusqu'à Shavou'ot, Fête des prémices, cinquantième jour non compté et qui est donné à la fin par Dieu comme Fête de pèlerinage au Temple de sainteté à Yéroushalayim.

 

L'endurcissement de l'ennemi

Le peuple hébreu, à peine débarrassé du carcan totalitaire qui l'oppressait depuis trop de temps, butte déjà à une épreuve de courage : devant lui le front de mer et derrière lui le front de guerre avec les chars d'élite égyptiens. Pharaon voyant les trois jours impartis aux Hébreux écoulés, se met à leur poursuite. Moshé et Israël avaient été prévenus que cette épreuve ne les concernerait pas directement mais que le Pharaon ennemi en serait la cible, Shemot XIV, 4 : « Et Je raffermirai le cœur du Pharaon et il les poursuivra. Puis J'accablerai de Ma puissance le Pharaon avec toute son armée et les Égyptiens sauront que Je suis Hashem ».

Cette épreuve fait partie d'une stratégie interventionniste divine d'endurcissement du Pharaon ayant un but pédagogique pour le monde entier : savoir que la Providence procure assistance au-delà des conditionnements naturels. Le Maharal de Prague indique (Guévourot Hashem), que les épreuves de la sortie d'Egypte ne devaient cesser qu'après le passage de la mer de Jonc. Elles correspondent à deux expériences de la délivrance vécue par les Hébreux. D'une part, avec les dix plaies, la certitude que la Protection divine leur était assurée et qu'Elle les délivrerait de la servitude d'autrui. D'autre part, au passage de la mer de Jonc, d'être sauvé du déterminisme des lois naturelles.

La certitude et la sécurité du salut tant attendu furent vécues à ce moment-là par le peuple des Hébreux sorti de la servitude totalitaire renversée en délivrance totale. Le verset qui indique cette finalité de délivrance introduit le Cantique de la Mer, la Shirat Hayam שירת הים qui, elle-même, est devenue le leitmotiv de la liturgie du septième jour de Pessa'h, et, par extrapolation, du Rituel de Prières de tous les jours. Selon le Livre du Zohar, chacun doit se commémorer qu'il se tient dans les flots de la mer à pied sec, les Égyptiens sont noyés et Israël est sauvé, Shemot XIV, 30 : « Et Dieu sauva, en ce jour-là, les enfants d'Israël de la main de l'Égypte ». "En ce jour-là" signifie évidemment le jour du passage de la mer de Jonc, mais aussi "en ce jour-ci", c'est-à-dire chaque jour que Dieu renouvelle et crée où chacun prie Dieu et Le remercie, avec beaucoup d'intention et de ferveur, de le sauver du Pharaon de l'époque, à chaque instant de l'existence (Rabénou Ha'Hida, 'Avodat HaQodesh, Tsiporen Shamir II).

 

Chaque jour, les miracles de Dieu

La Hagada de Pessa'h témoigne que ces derniers miracles furent encore plus grands que les premiers. La première expérience de salut correspond à la liberté d'un autrui asservissant, et elle est commémorée le premier soir de Pessa'h. La seconde expérience de salut correspond à la brisure des forces naturelles déterministes, et elle est commémorée la nuit du septième jour de Pessa'h. Le cumul de ces deux expériences fonde la foi d'Israël : notre Créateur de la nature est Lui-même notre Sauveur de l'histoire. La certitude de la foi d'Israël est que la délivrance d'une aliénation aux influences étrangères est possible puisqu'a eu lieu la sortie de l'exil le plus endurci, aux contraintes les plus totales.

Exact actuellement : une partie de l'humanité, ainsi que les accusateurs à l'intérieur de notre bon peuple d'Israël, se gavent de vitamines d'endurcissement contre le projet de Dieu, le dessein d'Israël. Que des Goyim soient contre Israël, ce n'est guère nouveau ; que des Juifs rament à contre-courant de l'orientation divine et accablent Israël comme ronce à l'orteil, ce n'est pas nouveau. Ces deux mouvances sont aidées par des organismes internationaux dont toute la gloire est de fulminer contre Israël. Cela ressemble à l'endurcissement du Pharaon. Que Dieu les accable mesure pour mesure, Amen !

Tout se passe comme si les ennemis d'Israël sont poussés, par une force qui les dépasse, pour se liguer contre nous d'Israël. Ou bien Dieu les vide d'un mérite quelconque qui les maintiendrait en vie, à l'instar de la circoncision des musulmans à l'âge de sept ans comme Yishma'ël biblique et de la charité envers Israël de particuliers et de groupes d'individus bien définis de catholiques. Ou alors Dieu les endurcit pour que jaillisse à l'évidence Son intervention directe dans les évènements actuels, permettant la libération de l'assujettissement à toute hégémonie. Enfin, Dieu veut que nous-mêmes reconnaissions Sa Providence qui s'attache à la destinée de chaque individu, de l'humanité et de la collectivité d'Israël. Ces trois expériences sont cumulatives et non alternatives. Elles ont un impact universel : la présence d'une nation qui se définit par sa proximité à Dieu, par sa droiture et par la vérité des lois qui la régissent. Grâce à son rayonnement, les nations du monde se redressent progressivement. Leur façon de penser et leur manière d'être homme se subliment. Elles reconnaissent que Dieu crée, sur la base de la réussite personnelle de ses ancêtres bibliques, une nation particulière et sainte qui développe une grandeur d'âme divine inconnue sur terre (Rav Shlomo Aviner).

Le septième jour englobe le premier jour. La première pulsion est d'obéir à la volonté divine de se départir de la souveraineté humaine pour se soumettre à la souveraineté divine, ce départ est commémoré par la fête du premier jour de Pessa'h. La délivrance réelle est entérinée par l'ouverture de la mer de Jonc, évènement commémoré le septième jour de Pessa'h, le second donnant son importance au premier (Rav Yéhouda Askénazi, KM II, p. 244).

 

La déchirure de la Mer de Jonc

Shemot XIV, 10 : « Et le Pharaon s'approcha, et les enfants d'Israël levèrent les yeux, et voici : l'Égyptien était à leur poursuite et ils eurent très peur. Et les enfants d'Israël crièrent vers Hashem ». Rashi explique : « L'Égyptien, au singulier : d'un seul élan, comme un seul homme. Autre explication, selon la Mekhilta : 'Ils ont vu le prince céleste de l'Égypte venir du ciel pour aider l'Égypte' ». Levant leurs yeux pour regarder au loin si les Égyptiens les talonnent, les Hébreux virent le prince tutélaire, le sar שר, de l'Égypte du ciel venir à la rescousse de l'Égypte sur terre. Selon nos Sages, chaque nation possède 'un ange gardien', un mentor céleste qui la protège, un ange tutélaire qui la coache et plaide pour elle au Tribunal céleste. Il représente la Providence générale accordée par notre Seigneur, Dieu-Un, à chacune des manières humaines d'être. Israël est un cas particulier car la Providence divine le protège directement sans aucun intermédiaire, et cela est encore plus évident en Érets Israël. Le prince céleste est l'essence d'une nation, sa culture, sa civilisation, son idéologie, ce qu'elle représente dans l'Histoire.

Israël eut alors des scrupules quant à son salut car l'Égypte avait déjà été punie pour avoir alourdi sa servitude. Les plaies avaient fait en sorte que l'Égypte sorte innocentée du jugement divin, en stricte justice. Sa culpabilité avait ainsi disparue et Israël était encore à sa portée puisque l'exil n'était pas arrivé au terme des quatre cents ans annoncés à Avraham (Béréshit XV, 13). D'où l'extrême crainte des enfants d'Israël de retourner à l'esclavage antérieur. En effet, la condition des versets de Shemot (V à XII) était remplie : « Renvoie Mon peuple…sinon Je frapperai l'Égypte par dix plaies ». Elles avaient déjà toutes eu lieu et les enfants d'Israël étaient sortis d'Égypte. Pour acquérir le mérite du salut, pour que la balance du jugement divin penchât en leur faveur, il fallait le courage d'un engagement personnel des enfants d'Israël par un acte de dévouement désintéressé.

Il fallait obtenir par eux-mêmes un mérite d'être pour que le jugement divin soit plaidé en leur faveur. Israël doit être capable de s'engager dans sa profession de foi afin que Dieu lui octroie le salut ultime, en stricte justice et non en grâce absolue. C'est ainsi que, Shemot (XIV, 15) : « Et le Seigneur dit à Moshé : 'Pourquoi cries-tu vers Moi, parle aux enfants d'Israël et qu'ils avancent' ». La prière de Moshé, notre maître, en cette circonstance, aurait été insuffisante sans un engagement de confiance en Dieu au niveau de la collectivité d'Israël, et Rashi d'expliquer : « Pourquoi cries-tu vers Moi : 'Nous avons appris (Talmud Sota 37a) que Moshé se tenait debout et priait. Le Saint, Béni est-Il, lui dit : 'Ce n'est pas l'heure de prolonger la prière, alors qu'Israël se trouve dans une dangereuse impasse' » ! Or à propos de la prière de 'Hana (I Shmouel I, 12-20), nous voyons qu'une personne qui prolonge sa prière est exaucée : « Comme elle priait longuement devant le Seigneur,…elle enfanta un fils et lui donna nom Shmouel ». De même, Moshé prie pour sa sœur Myriam qu'elle guérisse de la lèpre, Bemidbar XII, 13 : « Moshé implora le Seigneur en disant : 'S'il Te plaît, Mon Seigneur, guéris-la, de grâce ! ». Pour que la prière porte, il faut la prolonger car Dieu aime les prières d'Israël.

Mais là, au moment de קריעת ים סוף qri'at yam souf, de la déchirure de la Mer de Jonc, Dieu est Impatient, Zéïr Anpine, de poursuivre Son projet et il veut qu'Israël passe à l'action pour obtenir un mérite en quoi que ce soit. Le Talmud Sota 37b poursuit : « Moshé demanda : 'Alors, que dois-je faire ? Le Seigneur lui répondit : 'Parle aux enfants d'Israël et qu'ils se mettent en marche ! Et toi, lève ta verge et dirige ta main vers la mer, et divise-la'. Rabi Méïr dit : 'Près de la mer de Jonc, les tribus se disputaient. L'une disait : 'C'est moi qui irait la première dans la mer', l'autre disait : 'Moi, je descendrai la première'. Au milieu de la discussion, la tribu de Binyamin se précipita dans la mer' ». Certaines tribus se disputent en paroles mais seule la benjamine, amoureuse de Dieu, se jette dans la mer afin d'accomplir Sa volonté !

« Rabi Yéhouda dit : Les choses ne se sont pas passées ainsi, chaque tribu disait : 'Ce n'est pas moi qui irait en premier.' Pendant qu'elles palabraient, un homme de la tribu de Yéhouda, Na'hshon fils d'Aminadav, et sa tribu à sa suite, se précipitèrent dans les flots ». Le Talmud ne cache pas les défauts des Hébreux qui préfèrent que leur travail soit fait par quelqu'un d'autre ou, par procrastination, qu'ils remettent à toujours plus tard ce que l'on peut réaliser à court terme, immédiatement. Mais il se fait également l'avocat d'Israël car il nous indique que seule une minorité d'hommes sera toujours prête à se sacrifier pour la cause du plus grand nombre. Tels Binyamin et Na'hshon ben Aminadav, sans crainte du danger, ces avant-gardes du peuple, ces soldats de Dieu se jetteront dans toutes 'les mers en furie' si cela est la volonté divine pour le bien de la Communauté d'Israël.

Dans chaque génération, sans récriminations et sans nombreux calculs, sans noyer leurs prochains par d'excellentissimes conseils, ces Na'hshonim prennent les devants, au moment du besoin. Ces 'haloutsim, ces pionniers forment l'avant-garde agissante, comme une tribu du nom de "Shévet Na'hshon". Cette tribu s'active et s'engage, elle se mesure aux obstacles et aplanit la voie, elle-même, sans tergiverser. C'est par le mérite de s'être engagé en quoi que ce soit, de se jeter le premier dans la mêlée par dévouement et d'entraîner tout le peuple derrière soi, que la terrible frayeur s'évanouit.

Dès lors, le courage grandit dans toute action pour la rédemption de la collectivité d'Israël.

 

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