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Hamakom

« L’Etat hébreu doit se préparer à une alyah massive due au coronavirus ». C’est la déclaration assez surprenante faite cette semaine par la ministre israélienne de la Diaspora Tzipi Hotovely à l’occasion d’une rencontre avec la direction de l’organisation Nefesh B’Nefesh qui encourage l’immigration juive américaine. Selon, le Times of Israël, la ministre aurait évoqué « un réveil parmi les communautés » et assuré « que le gouvernement devait être préparé à une vague d’alyah ».  On peut comprendre que certains juifs de diaspora en Europe comme aux Etats-Unis s’inquiètent d’une épidémie qui frappe surtout les pays occidentaux. Mais ces raisons sanitaires paraissent insuffisantes, à elles seules, à expliquer la vague attendue. D’une part, le virus ne menace pas spécifiquement les Juifs – même s’il provoque ici ou là une remontée de l’antisémitisme – et, d’autre part, Israël n’est pas épargnée par la maladie, même si la réaction des gouvernants semble avoir été plus adaptée.   Il convient sans doute de s’interroger plus avant pour tenter de rendre raison de ce nouvel élan après plusieurs décennies pendant lesquelles les Alyihot en provenance des Etats et d’Europe se déroulaient, en dépit des chocs internationaux, de manière modérée et progressive.  Si l’on quitte le sens « pchat » (simple) de l’annonce ministérielle, on peut constater aisément que l’épidémie de coronavirus aura eu comme première conséquence concrète de ramener chacun chez soi, que ce soit au niveau individuel avec le confinement ou que ce soit au niveau collectif avec le rétablissement des frontières. En contraste avec les appels du monde global qui vantait les mérites d’une existence sans appartenance, la consigne est dorénavant donnée de « rester chez soi ». Et de fait, chacun a été contraint de retrouver son lieu d’habitation. Cette impérieuse nécessité a aussi été l’occasion d’une plus grande introspection. Chacun d’entre nous a eu le loisir de réexaminer le sens de son existence. Et ce faisant de rendre actuelle la question de savoir où les Juifs devaient habiter. La propension de certains d’entre eux à vouloir maintenir le primat de leur intégration à l’universel s’est heurtée à la réalité d’une nouvelle assignation à résider quelque part. Dès lors les Juifs de diaspora ne peuvent plus vraiment éluder la question de leurs appartenances territoriale et nationale.  Exemple d’une telle remise en cause : cette lettre poignante envoyée par un rabbin américain à sa communauté dans laquelle, après avoir fait un méa culpa sur son attitude passée, il encourage ses fidèles à immigrer en Israël. Irrépressiblement, le questionnement de savoir où l’on habite surgit de l’actualité du moment sous la forme de l’urgence. Il éclaire sans doute aussi, au-delà des considérations sur les craintes de l’épidémie, la perspective d’un regain de l’Alyah en provenance des Etats-Unis et d’Europe de l’Ouest lorsque ce retour sera à nouveau concrètement possible. Cela permet de rappeler que les Juifs ne sont pas seulement des bâtisseurs de temps. HaMakom, le lieu, est aussi un des noms de Dieu. Le terme renvoie à l’espace consacré à la présence divine. Lieu où la transcendance peut s’insérer dans l’immanence sans la dénaturer. Le Traité des pères nous apprends qu’« il n’y a pas une chose qui n’ait pas sa place » (Chap. 4). Et le Maharal de Prague interprète : « C’est pourquoi « endroit » se dit Makom, car il fait exister (mekayem) la chose qui s’y tient » (Netsah Israel).  En revenant sur notre lieu, nous accédons ainsi un nouveau niveau d’existence. Pour le peuple juif, le retour sur sa terre est de nature à rendre possible la réussite de sa mission : conduire l’humanité sur le chemin d’une rédemption en permettant au divin de résider parmi nous.    Antoine Mercier Journaliste

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Le Calendrier Israélien et le Déconfinement

Dans notre tradition, chaque fête, commémore un événement qui s’est produit dans l’histoire des hommes, et plus spécifiquement dans l’histoire de notre peuple au travers des siècles. Il faut en effet comprendre qu’au-delà de la structure de notre calendrier qui récapitule en une année la vie du monde dans son temps prophétique, chaque fête, chaque commémoration vient célébrer un événement qui s’est réalisé dans notre calendrier. Par exemple la fête de Pessah vient commémorer la sortie des hébreux de l’esclavage en Egypte ou encore la fête de Chavou’ot, le jour de la révélation de la Torah. Mais cela ne signifie pas pour autant que la fête n’existait pas avant l’événement qu’elle commémore. Par exemple les patriarches célébraient déjà la fête de Pessah. Ou, autre exemple peut être encore plus parlant et que nous connaissons désormais bien dans notre tradition, c’est la fête de Hanoucca : Le premier homme, Adam, célébrait déjà la fête de Hanoucca. Mais comment cela est-il possible, et comment comprendre cela ? Et surtout, comment se fait il que l’événement tombe à la bonne date ? Par exemple, comment expliquer que la sortie des hébreux d’Egypte ait eu lieu précisément le jour de la pleine lune du printemps, et que c’est précisément un 25 Kislev, jour de Hanoucca, que le temple libéré par les Maccabées fut inauguré grâce à cette fiole qui ne devait bruler qu’un jour et qui a pu bruler huit jours ?  En fait, nous expliquait Manitou, le temps est qualifié, chaque jour à son intensité qui lui est propre, son essence même. Un jour du mois de Tichri n’a pas la même intensité qu’un jour du mois de Nissan. Par exemple, on a l’habitude de dire que tout ce qui se passe pendant le mois de Tichri est dur, difficile de l’ordre du jugement et nécessite un mérite pour pouvoir s’accomplir, alors que ce qui se passe pendant les moments de Nissan est au contraire plus facile, plus doux, et fait appel à la grâce et à la bonté.  La guerre des 6 jours, s’est déroulée autour du mois de Nissan, elle a été une victoire miraculeuse, elle a été offerte en cadeau, par grâce absolue.  Un journaliste a interrogé le ministre de la défense Israélien de l’époque, Moshe Dayan, juste après la victoire et lui a demandé : « Vous ne croyez pas que Dieu vous a un peu aidé dans cette affaire ? » Et Moshe Dayan lui a immédiatement répondu : « Non vous n’avez pas compris. C’est nous qui lui avons donné un petit coup de main ». Alors que guerre de Kippour a été une guerre dure, difficile, périlleuse, ou Israël a risqué de disparaître de nouveau, elle s’est déroulée au mois de Tichri. Il y a donc bien une intensité particulière pour chaque moment de l’année, le temps est qualifié, et on se déplace dans le temps, du mois de Tichri au mois de Nissan, puis du mois de Nissan vers le mois de Tichri, de la modalité de justice stricte, à la modalité de charité pure, entre mérite et grâce. C’est lorsqu’un événement dans l’histoire des hommes rencontre sa date qu’il faut ensuite le célébrer. Et on devine alors que toutes les dates du calendrier n’ont pas encore rencontré leur événement dans l’histoire des hommes, et que l’objectif de notre tradition est de remplir le calendrier, de le compléter afin que chacun des jours de l’année ait rencontré son événement dans l’histoire de notre peuple, et ait révélé l’identité propre qu’il renferme. En réponse à cette attente on peut indiquer qu’il y a 3 calendriers qui se superposent dans notre tradition :   En complément à cet enseignement, Manitou nous faisait remarquer une chose importante : c’est que toutes les commémorations récentes qui concerne l’Etat d’Israël sont logées précisément dans la période que nous sommes en train de traverser et qui est la période du Omer. Tout se passe comme s’il y avait un calendrier à l’intérieur d’un autre calendrier, et que la période du Omer avait un calendrier qui lui était propre, presque autonome, à l’intérieur du calendrier d’une année. Et c’est un fait que Yom Ha Shoa, Yom Haatsmaout, Yom Hazikaron, Yom Yeroushalaim sont des fêtes qui concernent l’Etat d’Israël et sont toutes logées dans cette période du Omer. Comme si notre histoire récente, l’histoire de la reconstruction de l’identité hébraïque sur sa terre, faisait en sorte, de se mettre à jour, de parvenir à identifier les correspondances entre l’intensité de chaque jour dans cette période du Omer, et l’événement dans notre histoire qui lui correspond. Tout se passe comme si ces 49 jours qui vont de Pessah à Chavou’ot doivent se remplir, doivent se compléter des événements historiques afin de faire en sorte que cette période vulnérable entre la commémoration de la sortie d’Egypte et le don de la loi morale, parvienne à nous mener de la libération physique du peuple d’Israël à une libération plus spirituelle. Comme nous sommes contemporains de ces événements nous savons qu’ils ont eu lieu et que ces à ces dates qu’ils se sont réalisés. On peut être rassuré que l’événement a bien rencontré sa date et que nous pouvons le commémorer. Mais du même coup cette rencontre révèle aussi l’intensité de la période que nous traversons, et nous confirme à quel point cette période Omer est vulnérable et délicate, et peut nous amener soit à la remise en cause des acquis de la commémoration de la fête de Pessah s’il y a ligne échec, soit au contraire au renforcement des acquis s’il y a ligne de réussite et de succès. Mais ce que révèle ainsi la conception de notre calendrier, c’est que lorsque l’événement dans l’histoire des hommes se réalise, il dévoile du même coup l’identité profonde de la date à laquelle l’événement s’est réalisé. L’histoire des hommes dévoile l’intensité, l’essence, l’identité de chacun des jour de notre calendrier, et nous voilà sur deux plans parallèles : Un premier plan horizontal qui représente la succession des jours de l’année à l’intérieur du calendrier, puis un second plus spirituel, qui est lui

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EPREUVES

Voilà plus d’un mois que nous sommes confinés et un nouveau mois semblable au premier s’ouvre devant nous sans que nous sachions ce qui pourrait advenir. Situation proprement inédite et au sens propre inouïe : l’immobilisation et l’isolement de la plus grande partie de l’humanité pendant une longue période. Après avoir connu quelques semaines d’adaptation à nos nouvelles conditions d’existence, nous intégrons l’idée que celles-ci vont se prolonger encore plusieurs semaines. Nous franchissons un seuil. Celui à partir duquel il apparaîtra de plus en plus clairement que nous sommes confrontés individuellement et collectivement à une véritable épreuve. Qu’est-ce qu’une épreuve ? La tradition nous en donne un exemple paradigmatique : l’épreuve pour Abraham de la ligature d’Isaac. La fin de la section « Vayera » qui relate l’épisode commence par ces termes : « Il arriva, après ces faits, que Dieu éprouva Abraham… » (Genèse 22/1). L’épreuve présente deux caractéristiques : 1/ Elle nous place dans une situation incertaine qui nous est imposée. Bien qu’on en connaisse l’origine et qu’on puisse en cerner les contours, sa signification nous échappe. Dans l’exemple biblique, Dieu demande à Abraham de sacrifier son fils alors qu’Il lui a promis dans le même temps que sa descendance passerait par lui. L’impossibilité de donner un sens à l’épreuve est constitutif de sa réalité. Être éprouver, c’est d’abord ne pas connaître avec certitude l’épilogue d’une histoire dans laquelle nous sommes irrémédiablement plongés et vis-à-vis de laquelle nous n’avons ni la possibilité de nous désengager, ni celle de trouver une échappatoire.  2/L’incertitude sur l’issue du processus en cours suscite de l’angoisse même si les conditions d’existence au jour le jour ne sont pas dramatiques. Nous pouvons vivre sans difficultés notre confinement, il n’en demeure pas moins intérieurement éprouvant. Il nous contraint à une décantation intime et à un recentrement sur notre être au monde. Il nous ramène invariablement à ce qui reste de nous quand plus rien ne se passe autour de nous. La perspective peut faire vaciller. Abraham lui-même exécuta l’ordre divin en tremblant. Il demeurait bien décidé à suivre l’injonction qui lui avait été donnée mais il redoutait en même temps son issue. Selon le Midrach, le Satan l’aborda à plusieurs reprises pour le faire renoncer. Dans la conscience du patriarche, rien ne permettait de différencier le scénario finalement heureux de la ligature de celui, tragique, du sacrifice réel. L’épreuve est ainsi faite que tant qu’elle n’est pas achevée, on en ignore le résultat. Sentiment partagé par tous les candidats à des examens, eux aussi soumis à l’épreuve. Vue du point où nous en sommes, celle que nous traversons aujourd’hui peut produire le meilleur comme le pire. Ainsi, être en situation d’épreuve n’implique pas forcément une confrontation avec des difficultés objectives mais elle laisse ouverte toute les options y compris les plus tragiques. Cela explique qu’elle mette les individus en situation de fortes tensions mentale et psychologique. L’avenir s’échappe de toutes les significations ou des projections dans lesquelles on voudrait l’enfermer. Eprouvés comme le serait un matériau en laboratoire dont on cherche à connaître le niveau de solidité, nous sommes appelés à démontrer le degré de résistance des valeurs qui nous animent. Pour Abraham, il s’agissait d’éprouver la confiance dans la promesse que Dieu lui avait faite. Et pour nous ? Individuellement, la question de connaître le sens de l’épreuve reste ouverte. A chacun d’y apporter sa réponse. Et collectivement, que devons nous nous prouver à nous-mêmes ? Qu’il n’est ni possible ni souhaitable de s’accrocher à notre volonté de domination de la nature et à notre désir de maîtrise absolue de nos existences. Qu’il est urgent de sortir de l’agitation égoïste. Qu’il faut retrouver le sens de l’action désintéressée. Qu’il convient de lâcher prise pour laisser une place au déroulement providentiel de l’Histoire. Le récit biblique consacré à la ligature d’Isaac se termine par ces termes : « Toutes les nations de la terre seront bénies par ta postérité ». Les commentateurs y voient la preuve que la perpétuation de l’esprit de l’Akeda dans l’humanité permettra de la faire participer aux promesses des bénédictions divines.  Tel est, selon eux, le testament d’Abraham et telle est la tâche de ses descendants, le peuple d’Israël. Par Antoine Mercier Jounaliste

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Confinement : Retrouvons le sens véritable du Chabbat

L’humanité a pris conscience de sa finitude, qu’il était inutile de se répandre sur leur monde sans précautions particulières, qu’il fallait se retirer partiellement du monde, qu’il était temps de faire preuve d’attention et de délicatesse, peut être aussi d’exigence morale et s’est brusquement mise à faire Chabbat. Un Chabbat imposé certes, contraint, mais l’histoire retiendra probablement qu’à un moment dans son histoire l’humanité a fait Chabbat et a donné la possibilité au monde d’arriver à des jours plus authentiques. Mais au bout de plusieurs jours de confinement généralisé à l’ensemble de la planète, ou presque, après quelques semaines de ce Chabbat imposé à l’homme, on voit apparaitre les premiers signes de relâchement, d’installation dans une sorte de routine alors que le confinement n’est pas levé. Les sorties se multiplient dans une ambiance un peu étrange. On voit en même temps se multiplier également les premiers signes d’impatience, d’incivilité, d’inélégance parfois d’énervement ou de violence. La patience est mise à rude épreuve et nos individualités se réveillent malgré elles et font apparaître par moment avec force nos défauts devant cette situation intense et interminable qui inscrit l’homme dans la réflexion, dans la lenteur et dans le dégagement. Les échanges entre les personnes deviennent plus difficiles, plus tendus, la suspicion et la méfiance font leur apparition dans le domaine public au moment des sorties, lorsque les personnes se croisent, peut être aussi à l’intérieur du domicile. La peur d’être contaminé provoque des attitudes de repli, de rejet, d’hostilité, de mise à distance de l’autre. Le premier temps de ce confinement universel qui était apparu comme un formidable retrait de l’homme pour laisser la place a l’autre que lui, et pour finalement un peu plus rapprocher les hommes entre eux, est en train de laisser la place à un second temps plus dure, plus difficile dans les relations entre les personnes, qui lui a plutôt tendance à les éloigner, à faire en sorte que chacun se replie sur lui-même en essayant de nouveau de s’approprier le plus de territoire possible dans ce qu’il est possible de prendre. Comme si chacun était un peu seul au monde et seul sur terre. A l’autre extrémité de ce second temps, après une période de sidération, les échanges misérables ont repris sur les réseaux sociaux, les petites blagues, les vidéos sans aucun intérêt et pas à la hauteur de la situation, cette vacuité, ces bavardages creux et vides de sens, et ces rires, ces rires que l’on entend parfois et auxquels on veut crier, taisez-vous ! Certains ont-ils vraiment conscience qu’un drame se joue au sein de l’humanité et qu’il faut respecter ce drame ? Mais finalement tout cela est assez logique, la nature des caractères revient progressivement à la surface, et la célébration du chabbat, qui rythme notre calendrier, est une célébration qui revient alors avec force au cœur de toutes nos réflexions et sur laquelle il est utile de se poser. Faire Chabbat n’est pas si simple, cela demande une exigence morale, une volonté, et l’instauration d’un rythme ou d’une habitude, et il nous revient désormais, à nous, peuple juif, peuple hébreu, à Israël, à ce peuple qui s’est réinstallé sur sa terre après deux mille ans d’exil, de prendre ses responsabilités, et de faire preuve de pédagogie, pour apporter ses lumières au monde, qui découvre soudainement cette fête, et de donner un sens à ce Chabbat que vit aujourd’hui l’humanité. Qu’est ce que signifie « faire Chabbat » ? Le signe du déclin d’une civilisation, c’est souvent la façon qu’elle a d’envisager les loisirs. Or, le Chabbat est devenu, souvent en exil, le jour où l’on se repose après une semaine de fatigue et d’efforts. En Occident, on fait une pause un jour ou un jour et demi par semaine, comme une machine qui a trop fonctionné et doit être mise à l’arrêt. Le Chabbat est entré dans le champ de la société occidentale. Il n’exige plus du Juif d’interpeller le monde, de veiller à être en phase avec le calendrier, mais il l’encourage à se fondre dans l’univers laïc du dimanche, de constituer une société plus harmonieuse, plus reposée. Le Chabbat, c’est pourtant tout autre chose. Ce jour-là, nous entrons dans un autre monde. Ce n’est plus le temps de l’efficacité, ni celui de notre rapport à l’objet. Nous devons cesser de nous investir dans les circuits économiques, d’intervenir dans les mécanismes du monde, qui nous obligent à travailler pour subvenir à nos besoins. Nous ne devons plus laisser agir notre volonté pour intervenir dans les mécanismes économiques. Nous devons nous concentrer sur notre rapport à l’homme, de manière désintéressée, sans rien attendre en retour. Le jour du Chabbat, nous pénétrons dans une dimension où nous sommes capables de nous retirer du monde, de nous en dessaisir partiellement et de donner plus d’importance à l’autre qu’à nous-mêmes. Le jour du Chabbat, nous sommes les invités de quelqu’un, alors que les six autres jours de la semaine, nous ne dépendons que de nous-mêmes pour agir sur les problèmes du monde. Il ne s’agit pas ici de recharger les accus d’un ordinateur ou d’un téléphone portable, mais bien de s’inscrire dans un moment différent, dans lequel le dynamisme de la technique et de la science n’aurait plus aucune prise. Un moment qui place les relations d’homme à homme au centre du questionnement, qui tente de répondre à la question du sens et de la sainteté morale. Un moment dans lequel l’homme ne doit plus travailler pour vivre, mais doit s’élever pour retrouver sa véritable identité d’homme. Cela fait inévitablement penser à ce juif qui tourne à l’extérieur, autour de la porte d’entrée de son immeuble le jour du Chabbat, parfois avec un ou deux de ses collègues, en attendant qu’une âme extérieure et impure lui donne accès à son l’immeuble en appuyant sur le bouton électrique de la porte d’entrée. La tradition hébraïque nous enseigne souvent que nos actes sont jugés en permanence et qu’il n’y a pas de refuge à l’abri duquel nos actes peuvent être revus.

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Compte du OMER et Confinement

Dans cette période particulière ou le temps semble s’être suspendu et la tendance naturelle qu’a l’humanité à se répandre sur le monde, a laissé la place au dégagement et au retrait, le gouvernement Français a annoncé les premières mesures de déconfinement avec une date désormais inscrite pour des millions de français qui est celle du 11 Mai. Le compte est lancé, et même si on sent un certain relâchement dans l’attitude de solidarité et de respect des règles qui avaient prévalu lors des premiers temps de ce confinement historique, la France attend cette date avec impatience et fébrilité. Même si l’anxiété provoquée par cette épidémie ne s’est pas encore dissipée, on peut commencer à compter les jours qui nous sépare de ce moment de libération nationale. Parallèlement à ce nouveau rythme du calendrier imposé par le virus, non seulement à la France, mais au monde entier, notre tradition, la tradition hébraïque, est insérée dans un autre calendrier, celui du compte du OMER. C’est la période qui sépare la fête de Pessah, qui réactualise la sortie du peuple des hébreux de l’esclavage en Egypte pour les amener à l’événement du don de la Torah qui s’est réalisé pour des raisons secondes, que nous ne développerons pas ici, sur le Mont Sinaï. Cette période relie donc la commémoration de la sortie d’Egypte du peuple Hébreu avec l’objectif d’aller s’installer sur sa terre, à l’événement de la révélation de la Torah. La fête de Chavouot, qui n’a pas de date précise dans le calendrier, est reliée à la fête de Pessah, et nos récits mettent donc en évidence le lien fort, indéfectible, entre l’événement de la sortie d’Egypte et celui de la révélation de la Torah. Tout se passe comme si la fête de Chavouot, qui commémore le jour de la révélation de la loi était, en quelque sorte la clôture de la fête de Pessah. Manitou nous expliquait que la période qui relie Pessah de Chavouot, ces 50 jours qui sont constitués de 49 jours de mérites à acquérir, à conquérir, plus le dernier qui est donné, est précisément une période vulnérable ou les acquis de la sortie d’Egypte peuvent se renforcer, en cas de réussites, de succès pour aller vers le don de la loi morale, ou au contraire s’inscrire dans une ligne d’échecs, de fractures qui risquent de remettre en cause les acquis de la sortie d’Egypte elle-même. Et Manitou rajoutait pour nous expliquer un peu mieux l’intensité de cette période, qu’il s’agit d’une période vulnérable car elle nous fait passer d’une libération physique, l’accès à la terre, à une libération plus spirituelle, le don de la Torah. De la même manière que l’être humain est corps et âme, le corps d’Israël est sauvé à Pessah son âme est sauvée à Chavouot. Le passage entre les deux est une période de vulnérabilité qui peut remettre en cause les lignes de réussites qui ont été acquises jusque-là. Les enseignements concernant cette période sont innombrables, et il ne s’agit pas ici de tous les citer, mais, peut être essayer de réfléchir à l’éclairage que l’intensité et la centralité de cette période peuvent apporter à la situation que nous traversons collectivement aujourd’hui. Au départ cette période était une période de joie pendant laquelle chacun pouvait aller apporter les prémices de sa récolte, la gerbe de blé, au temple. Elle était appelée la fête des prémices avec le thème fort, et cher à notre tradition, sur l’altérité, le sens du retrait pour laisser la place pour l’autre. Le fait de donner les prémices en cette période comme un acte de dégagement pour offrir à « l’autre » plus de place qu’à soi-même. Et les récits de la relation entre Cain et Abel nous reviennent en mémoire pour nous rappeler que la faute de Cain est d’avoir refusé de laisser, à l’autre que soi, une place dans le monde, comme l’illustration de l’échec du comportement moral. Cette période est devenue, à la suite de l’épisode de la perte définitive de l’indépendance nationale, après la catatrophe de la défaite de l’armée de Bar Korba, qui était aussi représentée par les élèves de Rabbi Akiva, une période de deuil. Et aujourd’hui au sein même de notre tradition des discussions sont en cours pour savoir si cette période, ce décompte du OMER, doit toujours être considérée comme une période de deuil, ou si au contraire compte tenu de la reconstruction de l’identité Hébraïque sur sa terre, elle doit de nouveau être considérée comme une période de joie. Au cœur même de cette fête qui nous incite pourtant à l’unité nationale, les divisions se poursuivent.  Car en effet la cause profonde donnée par nos sages pour justifier que cette période, vulnérable, délicate, ce soit transformée d’une période de réjouissance en une période de deuil, à cause de cette perte de l’indépendance de notre peuple sur sa terre, est le manque d’unité au sein du peuple. Toutes les personnes qui constituaient l’armée de Bar Korba étaient des grands, de très grands, ils étaient aussi des élèves de Rabbi Akiba, c’était des sages, d’une envergure inouïe nous dit-on. Pourtant ils ne se donnaient pas le respect mutuel, les honneurs, dus à chacun d’entre eux, ils ne s’aimaient pas l’un l’autre, et c’est la raison profonde de la défaite Les enseignements de la Caballe, nous indiquent qu’il y a également un autre événement connu qui s’est joué dans cette période du OMER, et qui était de la même nature. C’est la vente de Joseph par ses frères. La dislocation de l’unité, de cette unité indispensable pour faire la nation, est la source profonde qui risque de remettre en cause les acquis de la fête de Pessah, qui sont comme autant de lignes de fractures qu’il faut réparer. C’est l’unité nationale qu’il faut reconstituer pendant cette période. Et quand on voit ce qu’il se passe actuellement en Israël on se dit que cette unité est indispensable pour la réussite de notre histoire. Comme pour confirmer ces difficultés d’unité, on peut indiquer qu’il y a

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La réflexion morale n’a d’importance, n’a de valeur propre que rapportée à la destinée concrète de chaque homme

La réflexion morale n’a d’importance, n’a de valeur propre que rapportée à la destinée concrète de chaque homme [1] Dans les fissures du désert Laissez à mes cils au moins une larme Perler de tous ces yeux ouverts De tant de morts donnez-moi la mémoire Avec les tréfonds de toutes les mers. Isaïe Spiegel, Et la Lumière fut, Lodz, 1949 « Si on s’en sort entre 100 000 et 200 000 morts on aura fait du bon boulot [2]» On croyait les démocraties immunisées à l’indifférence sadique. «Je crois que beaucoup l’ont eu au Brésil, il y a quelques semaines, ou bien des mois. Ils ont déjà des anticorps[3] ».  Immunisées à la froide contemplation du meurtre.2 Des masques s’échangent au plus offrant sur les tarmacs d’aéroport, des larcins minables sont commis par des nations tout entières au détriment d’autres nations, l’Europe submergée peine à s’unir, tandis que fanfaronnent sans gloire ceux qui ont tout compris. Se taire devant une telle tragédie étant radicalement exclue. Chacun y va au contraire de son bon mot. Mots encombrants, valises, machin-barrière, et « distanciation » dont tout de même l’acception est aussi simple que tout autre, distance ne suffisait-il pas ? Moindres maux ? Peut-être pas. Quand on commence à infléchir le « verbe », le monde fléchit fatalement aussi. Anonymes, militants, déçus, esseulés, paumés, croyants, malheureux, surdoués, vaniteux, nombreux aussi ceux qui claironnent tout savoir de ces cris d’agonie, ces hurlements abandonnés, ces asphyxies dans le néant. Ils ont déjà posé leur conclusion, au « nom des miens », ils livrent leur compte : C’est donc à cause du réchauffement climatique, du libéralisme, de la détérioration des rapports humains, de l’indifférence générale aux mondes en guerre, des choix gouvernementaux, de la mondialisation, de la fracture sociale, de la dislocation familiale, des phoques disparus, des expériences en laboratoire, de Tchernobyl, de la science, des expériences nucléaires, … à cause de ces pêchés que nous sommes condamnés ? Pêché d’un vice collectif ? Peut-être.. Mais est-ce sincèrement au nom de ces ravages, qu’ils crient dans les hôpitaux bondés surchauffés par la mort, ma sœur, mon enfant, mon père, est-ce donc pour dénoncer l’état du service public laissé à l’abandon, ou le meurtre les baleines baltiques que mon ami d’enfance, ma voisine agonisent dans la plus effarante solitude ? Il y a un proverbe yiddish qui dit que là où se multiplient les prophètes, il n’y a plus d’hommes. Et pourtant !… On voit soudain surgir des trésors d’exceptions dans des lieux insoupçonnés. Internet qui charriait encore si récemment à nos portes boues et glaires, tripes et vomi, se met brusquement un peu à espérer. Si les complotistes ont encore un bel avenir, leur font aujourd’hui face une cohorte d’inconnus qui offre ses services, un autre bataillon qui amuse et fait don de ce bref bonheur dont il faut se saisir, et un autre qui applaudit à tout fendre chaque soir. Soudain le monde se regarde et se détourne indifférent des devins jamais rassasiés. Ensemble, tous les jours plus nombreux, pour survivre, pour espérer, pour se dire que nous mourrons dans une même humanité, dans le silence de nos vies, de celles qui n’ont appartenu qu’à nous seuls, pour se dire que nous vivrons peut-être un peu encore, Nous voilà donc enfin face à face. Car c’est bien ainsi que nous devrions penser, avant d’écouter le bruit des arbres ou des baleines, aussi féériques fussent-ils, oui, c’est en compréhension, cette fois, que nous devrions nous voir, à travers ce miroir qui nous renvoie ce que nous sommes, ou plus exactement, seulement ce que nous ne sommes. Tous. Bisel Mensh, dira-t-il de lui-même, l’écrivain Baashevic Singer lors de la réception de son Prix Nobel : signifiant  « Petit homme »,  « pauv’ gars » en est une autre traduction. Chaque jour, des centaines de pauv’ gars (j’inclue les femmes) se lèvent dignement parmi nous, pour tendre une main gantée à leurs comparses. Après une si certaine tragédie, après, peut-être, pourrons-nous tenter de comprendre et de couvrir le bruit des larmes par des regrets, des remords, des décisions futiles ou décisives pour l’histoire de l’humanité, mais en attendant … Il faut appréhender le jour qui vient. On les voit au loin s’en aller Sans savoir d’où ils viennent, Peut-être sont-ils les dernières ombres Des premiers hommes sur la terre, De l’ère où sur notre planète Se disloquaient les sols et se fendaient les eaux ? Ou peut-être sont-ils les premiers à porter Dans les replis de leur visage Les signes premiers, plus profonds, de la souffrance De l’homme nouveau sur la terre ?[4] Aveugles hier, surgissent enfin à notre vue, à leur taille réelle, ceux qui passaient au travers des cases sociales dont ils n’accédaient que par espoir déchu le plus souvent, ou exaucé à la génération qui leur succédaient. Les voilà enfin aimés. Ceux qui cultivent l’humanité, à mains nues. Ceux qui, honorables, ne font mentir aucun de leurs actes. Ouvriers, postiers, agriculteurs, auxiliaires de vie, aides ménagère, routiers, caissiers, artisans, artistes et tant d’autres encore, à qui si peu était donné. Apparaissent aussi avec une clarté criarde ceux l’on croyait opulents et qui meurent de leur vocation à sauver, infirmiers, médecins, chefs de services… et tant d’autres encore. Ceux en particulier qui ne se commettent pas à comparer un « mort pour un autre », un malade du covid pour un accident de la route ou de trottinette. Et puis, tous ceux également qui aspirent à être solidaires pour des inconnus qu’ils auraient, hier encore, toisés. Vous, moi… Nombreux je l’espère les pauv’ gars immunisés contre nos démocraties, nos mensonges, l’indifférence froide, le manque le plus basique de compassion, immunisés espérons tous ces hommes, ces femmes qui ne misent ni sur le nombre de morts journaliers de pays en pays, ni sur l’avenir sinistre qui pourrait cogner à nos portes.  Alors, pour tous ces sombres crétins et criminels ambitieux, prions pour qu’ils soient reniés par cette nature-là, celle précisément constituée d’hommes et de femmes qui recèlent en eux un pan de céleste et l’avenir possible de notre monde.  Daniella Pinkstein [1]La Parole et l’écrit, I. Penser la tradition juive aujourd’hui,

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Contagion Et brusquement l’humanité prend de nouveau conscience de sa finitude Et fait « Chabbat »

Dans le monde dans lequel nous évoluons, avec les avancées de la science, de la médecine,l’accélération prodigieuse du progrès et des nouvelles technologies, l’immédiateté del’instant dans lequel, il n’est désormais plus possible, de rester capturé, de s’ennuyer, decontempler ou même de penser. Dans ce vacarme incessant des chaines d’informations encontinue, des réseaux sociaux et des outils de communication à distance, cette remise enperspective de la place de l’homme et de la femme dans le monde a certainement quelquechose de bon, et mérite qu’on y réfléchisse de façon posée. Bien entendu il ne s’agit pas de relativiser ou de minimiser le décompte journalier et funèbredu nombre de morts, les drames qui se jouent et qui sont innombrables, le déchirement despersonnes qui ont perdu leurs proches et qui sont anéantis par la douleur. Ce qui se passe aujourd’hui est particulier, intense, oppressant, et les drames et les douleurss’interpellent et se répondent dans une cadence infernale à l’échelle du monde.Mais inévitablement, à ce constat il faut ajouter la mise en cause d’un certain nombre devaleurs sur lesquelles nous avions fait reposer les principes de notre vivre en commun. L’angoisse qui se répand et se transmet, la hantise qui s’empare de tout un peuple, de touteune nation, de toute une humanité, ne traduisent-elles pas aussi, si nous y réfléchissons,cette redécouverte brutale de notre finitude, cette nouvelle révélation qu’il y a des limitesau-delà desquelles l’homme n’a plus accès, qu’il le veuille ou non, que l’éternité n’est pasune option. Nombreux étaient ceux qui nous indiquaient depuis un certain temps déjà que la dérivetumultueuse, impersonnelle et omnipotente, dans laquelle l’humanité s’engageait devaitavoir une fin, et que les périls étaient nombreux et proches. Il ne s’agit bien évidemment pas de faire référence à une quelconque fatalité (dont on peutd’ailleurs se demander si elle existe) mais de se demander si nos angoisses n’auraient pasété moins grandes si nous avions spontanément atténués notre tendance naturelle à vouloirnous répandre sur le monde sans précautions particulières. A force d’avoir imaginé l’illimité à portée de main, nous nous sommes mis à y croire et nousnous sommes pensés invulnérables, éternels. Mais la réalité nous a rattrapé et nous plongeaujourd’hui dans l’angoisse de cette nouvelle révélation que tout cela n’était que construction, et il parait utile de voir aussi cette situation délicate comme une bonnenouvelle. Si on essaye de poser un regard froid sur la situation particulière dans laquelle nous sommesentrés brutalement, qui est sérieuse et aura probablement des conséquences que noussommes bien loin aujourd’hui de pouvoir évaluer, un point malgré tout se détache du restede façon forte. C’est la place du retrait, de l’effacement, de l’évidement, ce renoncement de l’accès à latotalité que nous avions pensé un jour pouvoir atteindre si la nature ne nous avait pasramenée à notre condition d’homme, avec nos failles, nos faiblesses, notre fragilité, nosdoutes et nos peines, et notre finitude avec laquelle nous devons de nouveau accepter devivre. La nature a contraint l’homme à se retirer partiellement du monde, à renoncer à la toute-puissance dont il avait pensé pouvoir se doter pour envahir l’espace du monde sansprécaution, à faire une place autour de lui pour que l’autre que lui puisse exister, et ceretrait, ils ont été nombreux à nous crier d’essayer de le réaliser, mais nous ne les avons pasécoutés, nous ne les avions pas entendus, nous ne les avions pas compris. L’homme est confiné, malgré lui, il se retire de la planète et laisse la place, il laisse enfin uneplace. Il a déserté les villes, cessé d’inonder les rues et de se déverser dans les places, sanségard, sans ménagement, et demande maintenant la permission, la permission de pouvoirentrer, de pouvoir être là, de pouvoir se présenter, de pouvoir sortir, de pouvoir exister.Comme une remise en ordre naturelle des choses. Cette inversion de la norme édictée par l’homme lui-même, cette remise en cause de lamain mise de l’homme sur le monde, se voit aujourd’hui jusque dans les activités les plusinfestées, celles des réseaux sociaux, des conversations virtuelles, des échanges Internet oumême les plus contaminés, les plus aliénés, les plus asservis, commencent progressivementà se retirer, à laisser une place, à donner du temps au calme, au silence, à la lenteur, à lasuspension, au vide. Dans notre tradition tout cela a un nom. Ce retrait, cet évidement, ce dégagement del’homme pour permettre à l’autre que soit d’avoir une place dans le monde peut senommer : il s’agit du « Chabbat ». Après le « Chabbat de Dieu » au début de l’histoire del’humanité, d’après ce que nous disent les sages de notre tradition, qui a permis à l’hommed’entrer dans le monde libre, on attendait que l’homme, à son tour fasse « Chabbat »,interrompe sa course folle vers des chemins qui ne sont pas toujours authentiques, cessetoute activité de la volonté qui s’associe à la progression des circuits économiques, qu’il seretire de l’activité économique du monde pour se consacrer à des activité plus nobles, plus àla hauteur de ce qu’on est en droit de pouvoir attendre d’un homme : qu’il réalise son travaild’homme. Cet acte de retrait, l’homme n’a pas pu, n’a pas su réaliser par lui-même, cet acte de retraitl’homme a refusé de réaliser jusqu’à l’absurde. Cet acte de retrait qu’on attendait de lui pourpermettre une harmonie du monde et qui n’est pas venu. Cet acte de retrait on le lui afinalement imposé, contre son gré, pour que l’ordre des choses puisse reprendre ses droits,et nous amener vers des chemins plus éclairés. Au retrait de Dieu, au silence de Dieu, que les premiers refusent, que les seconds dénoncentet que les troisièmes, enfin, tentent de décrypter avec gourmandises et espérances, succèdede façon inexorable le silence de l’homme, le retrait imposé à l’homme. C’est une fatalitépour les premiers, un juste retour de la nature pour réintégrer sa condition pour les seconds,un état orchestré a bien plus haut niveau pour les troisièmes. Il ne s’agit pas ici de seprononcer sur telle ou telle option mais de se demander si cette situation n’est pas denature à restituer un ordre plus juste du monde et de remettre l’humanité en harmonie avecle monde dans lequel

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Pessa’h en quarantaine

Pour la première fois dans l’histoire récente de nombreuses familles juives se retrouveront séparées pour fêter Pessah. Celles qui avaient l’habitude de rejoindre parents ou enfants en France comme celles qui retrouvaient pour l’occasion la partie où la branche de la famille vivant en Israël. Le coronavirus est venu limiter inexorablement les voyages et les échanges. Il a figé chacun dans sa place. Tout se passe comme comme si l’heure des choix était venue. Comme s’il fallait choisir son camp ou plutôt son lieu. Etes-vous d’ici où de là-bas ? Il devient plus difficile en tout cas d’être un peu de partout à la fois. Cette nouvelle configuration a valeur d’avertissement pour les Juifs de diaspora. L’incitation à revenir chez soi est également à l’œuvre pour chaque Nation du monde, pour chaque famille, pour tous les individus. Les frontières réapparaissent ainsi que la primauté des politiques publiques et la nécessité d’appartenir à une terre et un groupe humain. Chacun se voit contraint par se retour à soi de tenir compte des autres et de respecter des règles collectives. L’heure requiert un confinement altruiste. Comme prévu par la tradition, le retour d’Israël sur sa terre implique parallèlement une techouva des Nations. Le processus d’effacement des différences à l’œuvre en Occident depuis des siècles atteint ainsi sa limité mortifère. Le Covid 19 oblige à un « reset » ontologique. En ce sens, il est à la fois un mal et un remède. En réassignant chacun à sa place, le virus paraît sonner le glas d’une globalisation débridée. Il amorce une dé-mondialisation généralisée. Il remet en évidence l’impératif de distinction qui est au principe même de la Création du monde. Le texte de la Genèse nous informe en effet que Dieu distingua entre le ciel et la terre, entre la lumière et les ténèbres, entre les eaux d’en bas et les eaux d’en haut, entre les différentes espèces, entre le jour et la nuit. L’ordre premier ne peut être ignoré de même que les différenciations apparues dans l’histoire : celle de la dispersion des Nations comme celle de la distinction entre Israël et les Nations.  Le virus remet également à l’honneur une autre valeur phare en Israël : Le sens de l’intérêt général et l’interdépendance de chaque individu. Les Israéliens connaissent tous l’adage talmudique : « Kol Israël haverim ze ba ze ». La guemara ((Chevouoth 39a) cite en appui à cette affirmation un verset du Lévitique emprunté au chapitre des bénédictions et des malédictions : « Ils trébucheront, l’homme sur son frère, comme en face de l’épée, et pas de poursuivant » (Lévitique 26/37). Le talmud explicite la dracha : « Ils trébucheront, l’homme sur son frère, à cause du péché de son frère. De nombreux midrachim reprennent l’expression pour expliquer que la faute d’un seul peut faire trébucher toute la collectivité de même qu’à l’inverse, le mérite d’un seul peut la sauver. Que la véracité de deux grands principes de la tradition d’Israël se trouve ainsi dévoilée au grand jour est le signe d’une étape nouvelle : l’amorce d’une reconnaissance universelle des vérités que le peuple juif a mission de transmettre à l’Humanité. La sortie d’Egypte version 5780 -que chacun fêtera en son lieu- aura sans nul doute cette année un goût plus prononcé encore qu’à l’accoutumée de délivrance finale.  Antoine Mercier

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