Manifestation contre l’antisémitisme : Savoir qui on est pour pouvoir nommer ses ennemis
Dimanche 12 novembre s’est tenue en France la manifestation contre l’antisémitisme. 200.000 personnes ont défilé dans les rue de France. Pour une fois il y a un progrès ; cette manifestation n’est pas associée à celle contre le racisme, où défilent généralement, avec beaucoup de décontraction diront les uns, pour refuser de nommer clairement les choses diront les autres, ceux qui sont victimes de racisme, et en même temps, souvent les mêmes qui sont susceptibles d’être taxés d’antisémitisme Les débats politiques qui ont précédé cette manifestation n’étaient pas dignes, et l’ensemble de la classe politique française doit se ressaisir. Alors qu’elle ne se gêne pas pour donner en permanence des leçons de morale à Israël dans son combat contre le Hamas et le terrorisme islamique qui sont à sa porte, à ses frontières ; elle a montré à quel point elle n’était pas à la hauteur de ce qui se jouait actuellement, mais a également fait preuve de prétention et d’arrogance. Le peuple français parviendra, sans aucun doute, à témoigner de l’unité du pays face au fléau de l’antisémitisme et à montrer à la classe politique toute entière à quel point elle doit se remettre profondément en cause et cesser ces positionnements tactiques et clientélistes qui polarisent le pays et finissent par nous rendre tous très irritables. Mais aujourd’hui l’antisémitisme a muté de manière évidente. Celui qui fait des victimes, celui qui tue, celui dont les juifs pourraient avoir peur à travers le pays… ce n’est plus l’antisémitisme d’extrême droite ! L’antisémitisme a changé de visage et ne se tient plus derrière la figure du fanatisme d’extrême droite mais il se tient bien droit, sous les traits de l’islamisme. « A mal nommer les choses on rajoute de la confusion dans le monde » disait Albert Camus. Alors essayons de ne pas rajouter de confusion à une période déjà très confuse. Parallèlement au judaïsme qui a muté depuis la restauration de l’Etat d’Israël, en 1948, et qui a permis à l’identité juive de retrouver la racine de son identité qui n’est pas juive mais hébraïque ; l’antisémitisme s’adapte, mute à son tour, et se trouve caché, tapis, derrière la figure de l’ennemi d’Israël, désormais la figure du mal : L’islamisme. L’identité juive a toujours été vécue comme une identité provisoire entre deux temps hébreux. Il y a deux mille ans, les hébreux sont devenus des juifs. D’une nation vivant sur sa terre, les hébreux sont devenus un peuple, dispersé, resté fidèle à un projet d’identité, avec une longue parenthèse de survie, qu’est l’identité juive, rattachée du point de vue du passé à la nostalgie de l’identité hébraïque, détruite en fin de compte par Rome, mais les yeux rivés vers l’espérance d’une restauration de l’identité hébraïque qu’on a appelé dans la plus pure tradition le messianisme et qui est devenu le sionisme. Autrement dit, il y a deux mille ans les hébreux ont basculé en exil et sont devenus juifs, identité de camouflage, de maquis, avec une écorce de protection, qui a permis à l’identité hébraïque de se survivre à elle-même pendant tout le temps de l’exil. De notre temps, le juif a la possibilité de redevenir hébreu grâce à la matrice d’engendrement qu’est Israël. Nous avons été tellement familiers avec cette identité juive que nous l’avons pensée définitive alors qu’elle a toujours eu un caractère provisoire entre deux temps hébreux. Mais le provisoire a duré tellement longtemps qu’on a fini par inverser les évidences d’identité. Aujourd’hui grâce à la restauration de l’Etat d’Israël, le juif a la possibilité de retrouver son identité originelle qui est l’identité hébraïque. Les ennemis d’Israël ont parfaitement compris cette mutation en cours. Ce qui a conduit dans le même temps l’antisémitisme à muter avec l’identité hébraïque, et à devenir antisioniste. Lorsqu’un juif est attaqué dans les rues de Paris, de Brooklyn ou de Tel Aviv, c’est désormais Israël qui est visé. C’est ce que représente en potentiel ce juif, à travers qui, l’identité Israël est visée. Les ennemis d’Israël sont bien conscients de ce phénomène de la mutation de l’identité hébraïque qui est à l’œuvre aujourd’hui. Le juif n’est plus une cible en tant que juif car l’avenir du judaïsme en dehors d’Israël n’est plus ce que l’humanité peut être désormais à même de détester. L’avenir du juif c’est Israël et c’est donc désormais Israël qui est visée à chaque fois qu’un juif est agressé. Cette marche était importante, digne avec un ton de gravité et de solennité, prétendait s’ériger contre la détestation de l’autre et l’obscurantisme, elle comprenait de nombreux français qui n’étaient pas de confession juive et qui souhaitaient montrer leur solidarité à l’égard des juifs français et réaliser l’unité du pays. Et c’est tant mieux. Mais la destinée du juif est désormais intimement mêlée, scellée à celle d’Israël. L’avenir du juif passe par Israël et l’identité juive en dehors de l’Etat d’Israël est en train de disparaitre progressivement. Cette marche ne pouvait donc pas se constituer en rempart contre l’antisémitisme qui est à l’œuvre aujourd’hui, car désormais l’antisémite est devenu l’antisionisme, et combattre l’antisémitisme c’est combattre ceux qui veulent la destruction d’Israël. Une marche contre l’antisémitisme qui ne serait pas une marche qui place au cœur de sa démarche la protection des valeurs que défend Israël et qui serait un rempart contre tous ceux qui voudrait la détruire, n’est pas une marche contre l’antisémitisme. Parmi ce nouveau camp de la haine il y a ceux qui veulent directement détruire Israël, ceux-là mêmes qui ont perpétré ces massacres abjectes et qui nous ont laissé dans un état de sidération totale, et puis il y a tous ceux qui se taisent, qui ne veulent pas dire les choses ou qui les nomment mal et « qui rajoutent de la confusion dans le monde ». Enfin il y a ceux qui accompagnent le mouvement et qui malgré les atrocités dont Israël a été la victime par ces barbares, tranquillement, parfois avec une prétention et une arrogance inouïe, sans se douter un seul instant qu’ils peuvent être du mauvais côté de l’histoire,