12 mai 2025

L’antagonisme des deux universels

Les divisions de la période du Omer Nous vivons l’antagonisme entre deux visions de l’universel : Celle des nations et celle d’Israël ? Depuis le début de notre histoire, celle de l’humanité, une tension se joue entre deux forces, deux tendances, deux manières d’être homme et femme : La première se retrouve dans une version moderne théorisée par Edouard Glissant que la France Insoumise à reprise à son compte, sous le nom de « créolisation ». C’est cette façon presque naturelle de penser que les sociétés, les civilisations, les différentes identités humaines au sein de l’humanité peuvent se parler, se répondre et s’interpénétrer. Une manière spontanée de penser la générosité par non seulement l’accueil de l’autre mais aussi l’acceptation que cet autre puisse également me changer, me modifier, faire évoluer mon identité. La seconde est le retour aux identités nationales, une manière spécifique de penser que l’identité de chaque personne vivante tire ses racines dans le pays auquel elle est censée être rattachée (ce qui n’est évidemment pas synonyme d’exclusion de l’autre).  La confrontation entre ces deux manières de penser la relation collective au monde existe depuis les premiers pas de l’humanité et sépare le monde en deux camps radicalement opposés. Et même si cette tension vient des confins de l’humanité elle apparait à notre époque « moderne » de façon brutale et prégnante et convoque deux camps irréconciliables, deux façons de penser le monde, deux visions d’une humanité aboutie possible. Les deux camps apparaissent clairement et s’opposent dans une lutte sans merci.  Les uns parlent désormais du camps des patriotes et des souverainistes contre celui des mondialistes, les autres des progressistes face aux conservateurs, et d’autres encore nous expliquent que la tension s’opèrent aujourd’hui entre les libres penseurs et les défenseurs du bien contre l’obscurantisme des repliés sur soi. Pourtant cette grande idée de l’universel, du mélange des civilisations au sein de l’humanité, n’est pas nouvelle, on l’a dit. Cette espérance d’un universel réalisé qui offrira à l’humanité un horizon de sens et un monde apaisé à traversé les civilisations depuis le début de son histoire. Cette tension sur un projet abouti pour le monde nous vient de l’épisode du récit Biblique de la Tour de Babel.  « Tous les êtres parlaient la même langue et avaient des mots semblables » (La genèse Chapitre 1 verset 11) Pourquoi cette répétition se demande notre tradition ? L’interprétation de ce verset nous conduit à penser qu’il y avait d’un côté la langue universelle parlée par tous les hommes, et de l’autre les différentes langues des nations. Lorsque l’intégralité de l’humanité  parle la même langue c’est que l’universel est en place, il est réalisé. Le critère le plus évident d’une unité humaine, c’est la langue. Avant la dispersion des nations, avec l’échec de la tour de Babel, l’humanité possédait cette langue commune, cette unité, et donc une dimension universelle. On nous raconte alors que cette langue unique a disparu à la suite de la révolte contre le principe d’unité. Les hommes ont cessé de se comprendre. La langue « une » a disparu, il ne restait plus que les langues particulières, spécifiques à chacune des nations. Au moment de la révolte contre le principe d’unité, il ne va rester que les soixante-dix langues des nations. L’universel explose, laissant la place aux conflits entre les différentes manières d’être homme.  L’humanité devient alors en exil, exil de l’unité qui la fondait, juste avant le récit de la tour de Babel et la contestation contre l’unité humaine. Ce rêve d’exigence ne s’est jamais plus réalisé dans l’histoire. Et nous pressentons que les problèmes de l’humanité ne trouveront pas de solution tant que l’on ne réussira pas à restaurer cet idéal qui a un moment dans l’histoire des hommes était réalisé.  L’universel humain est désormais un idéal de projet de société mais il n’a pas d’implantation dans la réalité concrète. Chaque peuple, chaque nation a une carte d’identité particulière, qui lui est propre.  Depuis ce moment l’humanité cherche à retrouver son unité, et deux façons opposées d’y parvenir se confrontent.  Le projet des nations d’un côté . Dans cette quête, les nations ont toujours échoué. Toute République fondée sur l’idéal de l’universel bascule inévitablement dans l’empire. C’est la leçon qu’il faut tirer de l’histoire de l’humanité. La Révolution française, par exemple, érigée en modèle pour tous les pays du monde,  a incarné ce rêve de l’universel. On ne peut pas douter un instant que la Révolution française, avec ses aspirations à une égalité des droits, n’ait constitué un idéal d’universalité pour toutes les nations. Pourtant, quelques années après, la première République a laissé sa place à l’Empire napoléonien. Mais on pourrait citer bien d’autres exemples, comme la Révolution marxiste qui a eu, à sa manière, pour idéal l’universel humain, et qui a abouti à l’Empire soviétique. Le christianisme aussi, s’est perdu dans l’Empire romain. Chaque fois qu’une culture spécifique atteint un degré d’élaboration et de développement qui peut permettre l’établissement de cet universel, elle s’offre à l’impérialisme. La visée est universelle, la réalité est impérialiste. Aujourd’hui, la visée de ceux qui portent une vision moderne de la dissolution des identités nationales dans un grand tout est à n’en pas douter, universelle, son application risque de se heurter à la réalité et de faire basculer la France dans l’empire. Les dérives du système mis en place par la France insoumise et révélée encore récemment nous confirme, pour ceux qui en doutait, le risque du basculement vers un régime de dictature en cas d’arrivée au pouvoir des insoumis. Le contre-projet, c’est Israël qui est censé le porter, et c’est bien un projet qui n’a jamais été testé. On voit bien pourtant comment le processus se met en place. Chaque nation, avec son identité particulière, spécifique, doit se remettre à sa place, retrouver sa singularité et sa valeur propre, et c’est alors Israël dont la spécificité est ce particularisme qui tend à l’universel, qui est composée de personnes venant de pays différents, représentant chaque pays avec sa singularité propre qui doit servir de laboratoire à l’humanité pour montrer comment cette

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Émor : la multiplication de la vie

Le sujet des Livres de Béréshit et Shémot est la préface historique indispensable du Créateur qui s’adresse à l’homme. Le Livre de Vayiqra, quant à lui, décrit la réaction de l’homme qui s’adresse à son Créateur, en retour. Cette réaction implique l’apparition du détail des harmoniques pour la confirmation de la sainteté. C’est ce qui explique la multiplication des mitsvot pour atteindre la sainteté de la vie. Car la sainteté pour la Torah est l’unité de toutes les valeurs enfouies dans la réalisation des mitsvot. Lorsque l’unité des valeurs se dévoile, la sainteté apparaît. La parasha Émor est entièrement consacrée aux Cohanim. La première partie décrit les Halakhot particulières aux Cohanim. La deuxième partie concerne la sanctification du temps et des Fêtes solennelles de commémoration. La troisième partie concerne la consécration de la terre, la sainteté d’Érets Israël. Ainsi trois paramètres de sainteté définissent trois catégories de la réalité : l’humanité, la temporalité, la spatialité. Il en ressort que le Livre de Vayiqra débute par la sainteté de l’homme, et par là-même le récit poursuit par la sainteté des temps évènementiels commémoratifs pour enfin déboucher sur la sainteté de la Terre. Inversement, avec le Livre de Béréshit, pour la création à son début, c’est d’abord le Shabat qui est sanctifié, le septième jour est mis à part d’entre les six autres, pour le Livre de Shémot, c’est le peuple hébreu qui est sanctifié, peuple saint goï qadosh גוי קדוש mis à part et enfin, le lieu est consacré, l’endroit du mishkan, est mis à part, véhicule de la résidence de la Présence. Le Tabernacle est le point du monde, le point du temps où la sainteté est apparue (Rav Tsvi Yéhouda Kook, Leçons III). Mais cela ne suffit pas et il y a besoin de plus hébreux d’entre les Hébreux : les Cohanim dont la fonction est de faire la paix entre les hommes, entre les hors-la-loi, les résha’ïm, et les justes, les tsadiqim. Cette fonction ne peut être assurée que lorsque les Cohanim endossent pleinement leur sacerdoce d’affirmer la certitude de la Présence divine. Or, quand nous voyons, de nos propres yeux toujours ébahis, avec quelle compétence et quelle enthousiasme nos ‘hazanim, nos fervents s’adressent à Dieu à la synagogue, les officiants au Cotel Occidental ou à l’Armée de Défense d’Israël et avec quel amour, en tout lieu, le fervent israélien prie Dieu, n’est-ce pas là la certitude éclatante de la Présence divine parmi nous, en Terre d’Israël ? Il y a donc besoin intrinsèque et permanent d’hommes saints tout le temps, des professionnels spécialistes ès-sainteté et ce sont les Cohanim qui en ont la fonction. Dans le Livre de Shémot nous voyons se développer la Torah de Moshé qui pose l’axiome comme quoi un individu peut parvenir fondamentalement à proximité du Seigneur. Puis aussi, la Torah du Grand Cohen Aharon qui pose l’axiome comme quoi l’homme est pétri de manques qu’il doit impérativement sublimer en établissant des ponts, élevant ces manques à la dignité morale requise pour aboutir à la sainteté. En français, il y a un terme dépassé avec une consonance négative : pontifier, c’est-à-dire obtenir la protection des divinités tutélaires selon les augures, des « ponts » par lesquels une relation, une communication, un lien peuvent s’établir et qui a donné le terme pontife. Mais ce terme est absolument fautif pour traduire la signification hébraïque du mot Cohen car il est pétri de mentalité culturelle gréco-romaine et de spiritualité chrétienne. Le Cohen est le lien entre l’Infini totalement inconnaissable et le fini totalement connaissable, par la prière et le service divin au Temple. Pour combler ses manques, l’homme et le peuple ont besoin d’un corps « pontifical » intermédiaire indispensable par le truchement duquel ils pourront communiquer avec la Présence. Et ceci est en contraste extrême avec Moshé, notre maître, qui entrait dans la Tente d’Assignation, en relation intime avec la Présence, sans vêtements particuliers dont les Cohanim sont généralement obligés d’endosser pour le service. La sanctification du Nom du Seigneur Le Rav Kook écrit, Orot p. 54 : « Le peuple d’Israël, dans son ensemble, est la preuve de l’existence de la sainteté. Israël est l’unique preuve de la possibilité de la sainteté que nous observons à travers la reconstruction de la vie, partout en Érets Israël ». La construction de l’État d’Israël est la preuve incontestable de la victoire de la sainteté. La sanctification du Nom consiste à s’attacher au fait national juif de la société israélienne actuelle, en augmentant la diffusion de la lumière divine, et ainsi de vivre au sein de l’État d’Israël d’une parfaite harmonie, afin que l’ensemble de la nation vive au diapason de l’unité entre l’esprit et la matière ressuscités. Les pesanteurs du train-train quotidien, la monotonie inlassable des jours dissipent l’illumination de la sainteté qui entoure la vie. Ces obstacles et ces déconvenues exigent de nous un indispensable renouvellement. Sans renouvellement de l’âme qui entraîne le corps dans son sillage, l’homme sombre dans une détresse indicible. Ce renouvellement est assuré par les solennités, les rencontres avec la sainteté, mais également grâce à la présence des Cohanim au sein de la nation, les plus grands hommes idéalistes. Ils assument leur rôle de qedoshim, de saints qui montrent l’exemple, et qui prient pour prouver qu’il y a éternité malgré le temps. L’homme triomphe ainsi du temps. De plus, Érets Israël possède, elle aussi, un caractère fondamentalement saint qui influe sur la sainteté des êtres acceptés par elle sur son propre espace tellurique, et plus évidemment lors des Fêtes de commémorations solennelles. Les trois paramètres de ce renouvellement constituent trois lucarnes ouvertes à la lumière divine : triple rencontre dans l’espace, le temps et la personne humaine, détentrice du libre arbitre, dont le rôle éminent est d’accéder à la perfection, au bien universel (Séfer Yétsira VI, 1 ; Kozari II, 16-20, IV, 25). Selon Shemot XIX, 18, à la Déclaration des Dix-Commandements : « Or, le Mont Sinaï était tout עשן ‘ashan, fumée, parce que le Seigneur y était descendu au sein de la flamme ; sa fumée montait comme celle d’une fournaise, et la montagne

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