29 octobre 2023

QUI EST COMME TON PEUPLE UN PEUPLE UN SUR LA TERRE

L’arrivée en Israël ce jeudi 26 octobre s’est faite dans une ambiance particulière et inédite Personne ou presque dans l’aéroport qui n’est pourtant pas à l’arrêt. Deux personnes attendent à la douane où tous les guichets sont vides. Du jamais vu. Personne ou presque sur les routes. Des alertes aux roquettes régulières.Sur le chemin vers Jérusalem une alerte nous informe qu’une roquette a été tirée en direction de l’aéroport… elle n’atteindra pas son but. La ville de Jérusalem paraît vidée de sa population, de son dynamisme, de son énergie. Les boutiques, les cafés, les hôtels sont presque tous fermés. Les rues sont vides ou presque, quelques femmes marchent dans les allées avec des enfants ou accompagnées d’amies. Un jeune homme en tenue de l’armée accompagne sa copine le temps d’une pause dans sa mission. Des familles entières et nombreuses déplacées du nord et du sud et hébergées dans des hôtels de Jérusalem font de courtes apparitions dans les rues adjacentes à leur hôtel. Quand vient la nuit une impression de fin du monde nous gagne. Plus personne, pas un bruit. Seules quelques sirènes de police retentissent de temps à autre. Disparus les habitants du pays, l’ambiance pleine de vie, le souffle et le dynamisme, les discussions et les rires des jeunes qui échangent, s’amusent et donnent à la ville toute sa vigueur. Cela ressemble un peu à l’époque du Covid nous disent beaucoup d’Israéliens mais à une nuance près, c’est que cette fois ci le pays est réellement en guerre et la jeunesse a enfilé sa tenue militaire, a vidé le cœur des villes pour servir son pays. On a la sensation étrange que la pays entier est en attente, retient son souffle, est suspendu au déclenchement de la bataille qu’il s’apprête à livrer et dont on ne connaît ni l’issue, ni la fin. L’existence même de l’Etat hébreu est menacée. Au-delà de cela, on ressent, quand on discute avec les Israéliens, le sentiment incroyable d’unité et de solidarité qui ont gagné le pays. Le pays paraît plus soudé que jamais. Inévitablement cela fait penser aux études avec Manitou et à son idée de l’universalisme Israélien.  Cette idée qu’Israël est un pays laboratoire dans lequel les hommes et les femmes venus de tous horizons différents, de tous les pays du monde, vont pouvoir vivre ensemble en harmonie dans une relation de fraternité au sein même de cette terre. Certes pour l’instant le pays est divisé, plus que jamais. Les nombreuses manifestations de ces derniers temps ont montré à quel point les fractures sont profondes. Pourtant l’impression qui se dégage désormais après les horreurs du 7 octobre, dans ce pays où le temps semble s’être suspendu, est qu’une unité nationale est en cours de construction. Les personnes se parlent beaucoup, en hébreu évidemment, des personnes qui proviennent de pays très différents, souvent bien éloignés. Les échanges sont vifs, bruyants, parfois peut être véhéments. Ces personnes sont tellement différentes, la langue d’origine n’est pas la même, l’accent hébreu différent, les coutumes et la culture parfois presque incompatibles, cet échange est un défi à la nature. Comment peuvent-elles se parler ? Comment peuvent-elles vivre ensemble ? Dans les discussions, personne n’a les même idées, les uns veulent une paix durable avec les palestiniens et deux états, les autres pensent que c’est impossible, certains considèrent tous les “pauvres palestiniens” aussi dangereux que les membres du Hamas et souhaitent l’éradication de la population de la bande de Gaza, d’autres encore et c’est probablement aujourd’hui l’avis majoritaire au sein de la population, estiment qu’il faut clairement dire que nous sommes le peuple de la Bible qui revient sur sa terre, point. Les uns stigmatisent les erreurs du gouvernement dans les événements et demandent la démission du premier ministre, les autres enfin disent que le problème remonte à bien plus loin. Il y a presque autant d’avis que de personnes qui échangent. On dit que quand deux juifs se parlent il y a trois avis et cet adage se vérifie plus que jamais dans la situation que traverse Israël. Et pourtant tous se parlent, s’écoutent, se mettent en colère parfois, mais essayent de parvenir à se comprendre, de trouver les conditions qui leurs permettraient de parler d’une seule voix, celle du pays. Et soudain on se dit que ce qu’il faut regarder ce n’est pas l’instant présent, le moment figé, mais la trajectoire, la direction, vers ou on va. Alors que dans l’ensemble des pays du monde la trajectoire générale est une sorte d’antagonisme qui est à l’œuvre avec d’un côté la volonté de chaque peuple de retrouver son identité propre et de l’autre une volonté de chaque communauté présente au sein du pays d’affirmer et de revendiquer ses différences, de témoigner de ses particularités et vivre parfois comme une communauté repliée, séparée, de manière plus ou moins autonome. Les peuples de chacun de ces pays pour tenter de préserver la manière d’être qui est la sienne est polarisé entre une volonté de repli nationaliste d’un côté et le souci d’offrir à chaque communauté la possibilité de préserver une partie de sa culture et de son identité. Dans le même temps, on observe que l’inverse est à l’œuvre en Israël. Le pays est divisé, fracturé à travers les différentes communautés qui le composent, et elles sont nombreuses évidemment, puisque provenant du monde entier. De 150 nations, nous dit-on. Mais on sent à l’intérieur de ce pays que la trajectoire est celle de l’unité, de la mise à disposition partielle et progressive des différentes tendances qui composent le pays pour permettre que se réalise l’unité du pays. Chacune des tendances apportant sa singularité à l’ensemble. Ce travail est à l’œuvre actuellement au sein de la société Israélienne de manière profonde. Et depuis le 7 octobre cette tendance semble s’accélérer. Ce double mouvement travaille au sein de l’humanité. Un premier mouvement au sein des nations où l’antagonisme se révèle entre la tentation du repli identitaire d’un côté et la tendance à laisser chaque communauté à l’intérieur du pays

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NOMMER LA GUERRE

Cette guerre n’a pas encore de nom. On sait où, quand et comment elle a commencé. On ne sait pas où elle finira. Plusieurs références historiques ont été suggérées pour tenter de la qualifier : Les pogroms, la shoah par balle, Pearl Harbour, la guerre de Kippour, le 11 sept d’Israël, le bataclan où d’autres attaques terroristes de masse. Mais on pressent qu’aucune de ces qualifications ne permet de prendre la mesure d’un événement aussi bouleversant. Ce qui semble déjà s’être produit de nouveau, c’est l’unité d’un peuple qui, quelques jours avant encore, se déchirait sur la définition de sa vocation. Deux conceptions d’Israël s’opposaient : fallait-il renforcer la spécificité juive ou se fondre dans l’universalité ? La brutale et cruelle attaque du Hamas à donner une réponse évidente pour tous : Israël n’a pas vraiment le loisir de se poser de question identitaire. Qui doit-il être ? Il est. Que doit-il faire ? D’abord assurer sa survie. Où doit-il aller ? Là où sa vocation le conduit.  Et c’est ainsi qu’au lendemain du massacre du 7 octobre, les Israéliens se retrouvèrent tous – ou presque – sur la même ligne : La valeur de justice qu’ils défendent ardemment impliquait que l’agresseur soit éradiqué. Et les valeurs morales qu’ils portent au-dessus de tout exigeaient d’entrer en guerre et d’en accepter les risques. Tous convaincus que selon la loi juive, c’est un devoir de tuer celui qui cherche à vous exterminer.  Qu’en pensent les autres Nations ? L’événement joue, ici aussi, le rôle de révélateur. Les pays musulmans, au mieux, ne condamnent pas ces violences, au pire ils les soutiennent en parole et en acte. A l’inverse, les pays occidentaux font part de leur indignation et assurent Israël de leur soutien. Mais c’est pour bien vite se reprendre en instrumentalisant les nécessaires exigences humanitaires afin de brouiller la justesse de la cause.  Si bien qu’au total, Israël se retrouve seul avec sa conscience pour défendre le bien, autrement dit l’humanité de homme. Le fait nouveau, c’est qu’aujourd’hui, le pays ne semble pas prêt, malgré les pressions, à céder sur ses valeurs. Le peuple en tout cas n’entend plus laisser de place aux traditionnelles tentations des dirigeants de tergiverser.   Il montre ainsi sa bonne santé et trouve de facto la place et le rôle qu’il se cherchait parmi les Nations : montrer que l’histoire et l’éthique se peuvent concilier. Aux pays islamistes, il réaffirme qu’Israël ne saurait être détruit et remplacé. Aux pays occidentaux, il révèle l’évidence des enjeux de civilisations que porte la période actuelle dans l’espoir de les sortir de leur torpeur et de les convaincre de l’idée que les concessions faites à un ennemi radical n’ont jamais d’effets pacificateurs.   Voilà qui fait sans doute de la situation actuelle un moment unique, inédit. Un moment de basculement qui, une fois nommé, devrait faire avancer d’un pas l’histoire de l’humanité vers son accomplissement.  Antoine Mercier

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