Vayichlah – série 1986

Le cours

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FACE B

FACE C

FACE D


Texte

/ Face A

Verset 4 chapitre 32

Bref résumé des événements précédents.

Nous aborderons un thème particulier qui apparait dès le début du récit.

Nous nous trouvons au temps où Jacob a fini son exil chez Laban si ce n’est qu’au début et à la fin de ces 20 ans d’exil. Ce sont effectivement des raisons de contraintes et on peut donc bien parler d’exil.

Très rapidement : Il va se lier avec la famille d’Abraham. Pendant 20 ans Jacob sera installé chez Laban et c’est seulement vers la fin que toute cette période se dévoile comme étant vraiment un exil. Il y a la un thème préfiguratif de l’histoire de la descendance des Patriarches lorsque le peuple d’Israël en tant que collectivité connait aussi ces événements d’exil. Au début ce sont des événements de contraintes et on y expérimente et on y ressent la situation d’exil de façon profonde. Ensuite, il y a installation, on pense qu’il n’y a plus d’exil. On appelle d’ailleurs cela la diaspora. Et ce n’est que vers la fin de la période que se dévoile qu’il s’agit d’un exil et c’est cet événement de la haine de Laban envers Jacob qui nous est raconté dans les derniers versets de la Parashah précédente. Et de nouveau sur l’initiative des filles de Laban, femmes de Jacob, Jacob finalement décide de quitter de s’enfuir du pays de Laban. Il est rejoint par Laban et une sorte d’alliance se contracte entre eux. Et voilà que Jacob revient au pays de Canaan.

A ce moment précis, va revenir à la surface, le problème de fond de la rivalité entre Jacob et Esaü, puisqu’il s’agit d’une des principales causes du fait que Jacob ait dû s’enfuir du pays de Canaan.

Nous voyons que Jacob va mettre en place trois stratégies pour tenter de résoudre ce problème de cette haine-rivalité entre Jacob et Esaü.

Ces trois stratégies sont désignées par la Guémara comme étant préfiguratrices des aménagements d’Israël dans son histoire de survie, chaque fois qu’il se trouve dans une période d’exil.

Et nous savons qu’on peut raconter l’histoire d’Israël de deux manières :

–  L’histoire d’une nation entrecoupée de très longs temps d’exil. 

–  L’histoire d’un très long exil entrecoupé de temps nationaux.

Ces 3 stratégies sont d’une part :

–  une tentative de conciliation par concessions : une tentative de négociation avec cadeaux.

–  la prière.

–  se préparer à la guerre si nécessaire.

Ces thèmes sont bien à la racine de notre histoire et sont préfiguratifs.

En fait, la Guémara nous enseigne que la préparation à ces trois stratégies est simultanée, il faut une disponibilité à ces trois stratégies-là simultanément.

On sait très bien qu’il y a un risque de s’habituer à l’une ou l’autre, et l’habitude est cause d’une déformation et du risque de devenir indisponible pour les autres stratégies.

Ceux qui sont habitués aux concessions finissent par fonder un parti des concessions et ne pense plus qu’à cela, et deviennent indisponibles et démobilisées pour les autres stratégies.

Ceux qui ne sont habitués qu’à la prière, on en comprend les conséquences. Lors de ‘Hanoukah, la Halakhah était qu’en aucun cas on ne faisait la guerre le Shabat. Les ennemis d’Israël en ont profité pour envahir le pays le Shabat. Le Beit Din a du intervenir et autoriser la guerre Shabat.

Ceux qui ne pensent qu’à la stratégie de guerre pour réussir l’histoire d’Israël risque aussi d’être pris par cette équation.

Israël est ainsi soumis à une triple interpellation simultanée, parce que corollairement, l’ennemi d’Israël est ici Esaü qui a sa propre stratégie, et une seule, c’est la guerre. S’il n’est pas disponible à toutes les éventualités, il y a un risque grave.

C’est important de voir que lorsque la Torah Shébealpeh – que ce soit le Midrash ou la Haggada de la Guémarah – intervient pour faire un diagnostic sur ce qui s’est passé à la racine de notre histoire au temps des Patriarches, c’est toujours dans un principe d’enseignement pour l’avenir.

Et c’est extraordinaire de voir comment le détail du texte éclaire les péripéties telles que nous les vivons à l’échelle de l’histoire collective.

Il y a une préfiguration à l’échelle de l’histoire personnelle des patriarches qui se retrouve dans le diagnostic de l’histoire à l’échelle collective

Nous retrouvons là le principe que nous suivons depuis le début de cette étude :

Kol mah shé’irah la-avot siman labanim –  ce qui est arrivé aux pères est un signe pour les fils.

Avec cet angle différent que le récit met en jeu des personnages à l´échelle individuel et on risque d’être trompé de croire qu’il s’agit d’une histoire qui se referme sur elle-même et qu’il n’y a qu’un modèle apologétique plutôt herméneutique mais dans le sens de l’enseignement abstrait coupé de la réalité de l’histoire – de la morale pour elle même – de la contemplation de la morale,  alors qu’en réalité, l’objectif des révélations de ces textes de la Torah, et surtout de leurs explicitations par la tradition orale, c’est de nous faire comprendre que l’histoire n’est pas seulement l’idéal.

Je me souviens d’un temps où l’on avait l’habitude de traiter de ces modèles historiques uniquement comme des modèles d’exemplarité de vertu morale à l’échelle individuelle. Et on finit par s’habituer à cette herméneutique-là. Alors que la portée du texte est bien plus importante : c’est d’éclairer l’histoire concrète de la nation d’Israël en tant que nation telle qu’elle a été préfigurée au niveau de la geste des patriarches.

Dans une période d’exil, voilà le scénario : au début les Juifs expérimentent qu’il s’agit bien d’un exil. Ensuite on s’installe, on s’habitue et finalement la même péripétie de l’oncle qui était le beau-père – situation privilégiée dans l’exil, se déclenche l’antisémitisme de fin d’exil.

Là aussi, nous avons de façon très claire cet enseignement de type préfiguratif.

Il faut toujours manier la typologie avec beaucoup de précautions. C’est une science pour elle–même mais c’est précisément cela la science du Midrash : être capable de diagnostiquer dans le détail de l’événement du récit au niveau des Patriarches en donnant un éclairage qui sert à la postérité des Patriarches dans leur histoire.

Finalement, cette lecture a deux versants :

–  D’une part lorsqu’on arrive à comprendre l’événement lorsqu’il arrive, cela éclaire ce que le texte avait dit ;

–  Et inversement, si on comprend bien ce que le texte a dit, cela nous permet de comprendre l’événement lorsqu’il arrive.

Précision de méthode :

Explication du point de vue de la méthode, avant de la voir à travers le texte :

C’est le problème de la relation à autrui : lorsque l’autrui est l’adversaire à l’intérieur de la cohérence du monothéisme. Il faut faire effort pour essayer de comprendre les implications du monothéisme dans le problème de la relation des sujets dans l’histoire.

Le fait de dire que « Dieu est Un », cela veut dire qu’il est simultanément le Créateur et la Providence aussi de l’autre, même et surtout lorsque l’autre est l’adversaire. La tentation serait, en ce qui concerne Israël, de croire que Dieu comme Providence ne serait préoccupé que des intérêts de son serviteur Israël. Et que par définition, il serait contre les ennemis d’Israël, les adversaires érigés en rivalités.

Mais à l’intérieur d’un monothéisme absolu, comme l’est le monothéisme hébraïque, il est évident que c’est le même Dieu unique qui est derrière Israël et derrière l’anti-Israël. Il faut faire un effort très profond d’approfondissement spirituel pour arriver à comprendre ce qui va nous être raconté dans cette perspective-là. On nous annonce dans cette rencontre entre Jacob et Esaü un exemple privilégié de ce thème-là.

Le descendant de Jacob dans l’histoire de Jacob, risquerait de lire, étudier et comprendre le texte qu’avec le postulat que le Dieu dont il est parlé ne protège que les intérêts de Jacob qui est le héros du texte, mis à l’indice de ce Dieu unique dont il est parlé. On risque d’oublier ce principe monothéiste qui est d’ailleurs inscrit dans le Pshat même du verset de base du problème de la relation à autrui qui en hébreu est :  וְאָהַבְתָּ לְרֵעֲךָ כָּמוֹךָ- Véahavta léréakha kamokha.

(Vayikra – Kedoshim 19:18).

On a tendance a oublié la fin du verset :

וְאָהַבְתָּ לְרֵעֲךָ כָּמוֹךָ:  אֲנִי, יְהוָה

Véahavta léréakha kamokha, Ani Hashem Elohekha.

Ici la situation entre Jacob et Ésaü n’est pas celle du prochain mais vraiment celle de l’adversaire, de l’approximation érigée en rivalité. Il n’y a pas de rivalité plus terrible que la rivalité du proche, l’approximation de la proximité. Lorsqu’il y a grande différence, lorsqu’il y a éloignement des identités, les conflits sont simples à résoudre. Tandis que là c’est très ambigu.

Ici, c’est l’autre qui se prend pour l’un dans le personnage d’Esaü. Et c’est l’autre qui est le plus proche possible. Mais il n’était que proche.

Il y a une image mathématique de l’asymptote : la courbe qui s’approche le plus possible d’une coordonnée sans jamais la rejoindre. Esaü est asymptote de l’identité d’Israël. Et c’est la source de la plus grande des haines parce que la plus proche dans la rivalité la plus terrible.

C’est pourquoi la Torah dit tranquillement « tu aimeras ton prochain comme toi-même ».

Pour le lointain, c’est plus facile d’aimer. Le risque auquel vient répondre cette Mitsvah concerne bien le prochain. Le commandement d’amour est précisément le plus nécessaire dans le cas limite du prochain. De la même manière, la haine des frères est la haine la plus terrible. Surtout lorsqu’il s’agit d’un frère jumeau.

Ceci se rattache au schéma suivant :

A chaque étape de l’engendrement d’Israël au niveau de l’histoire des Patriarches, nous avons toujours une approximation de l’identité d’Israël en engendrement, qui s’érige en rivalité parce qu’elle s’est fixée dans cette impasse d’approximation et s’érige en rivalité terrible d’Israël.

Au niveau des enfants d’Abraham l’approximation d’identité qui s’instaure en rivalité de Isaac c’est Ishmaël. Au niveau de Jacob, qui recevra le nom d’Israël, l’approximation d’identité qui s’instaure en rivalité c’est Esaü.

Explication du  Midrash sur le nom de Esaü : 

Parshat Toldot chapitre 25 verset 25:

וַיֵּצֵא הָרִאשׁוֹן אַדְמוֹנִי, כֻּלּוֹ כְּאַדֶּרֶת שֵׂעָר; וַיִּקְרְאוּ שְׁמוֹ, עֵשָׂו

Vayetse harishon admoni.

Le premier est sorti (de la gestation de leur mère) admoni roux

kulo ke’aderet se’ar

Tout entier revêtu d’une cuirasse velue

vayikre’ou shmo Esav

Et ils nommèrent son nom Essav.

Midrash : וַיִּקְרְאוּ שְׁמוֹ, עֵשָׂו vayikre’ou ils nommèrent ? Qui ? Tout le monde. Quiconque le voyait l’appelait Essav. Alors que pour Jacob on dira : וַיִּקְרָא שְׁמוֹ, יַעֲקֹב  Vayiqra Shmo Yaaqov. « Il le nomma Yaaqov ». Qui ? Dieu.

Rashi sur וַיִּקְרְאוּ שְׁמוֹ, עֵשָׂו vayikre’ou shmo Esav :

                      הַכֹּל קָרְאוּ לוֹ כֵּן לְפִי שֶׁהָיָה נַעֲשֶׂה וְנִגְמָר בְּשַׂעֲרוֹ כְּבֶן שָׁנִים הַרְבֵּה

De la racine ‘assé (« faire »). Tout le monde l’a appelé ainsi parce qu’il était « fait », c’est-à-dire qu’il était venu au monde tout velu, comme un homme d’âge mûr.

« Tous l’appellaient ainsi. (On verra ce que représente ce diagnostic d’identité unanime.)

Parce qu’il était déjà accompli, fait et achevé dans sa pilosité comme un enfant très âgé. »

Essav = Ayin-Shin -(Youd)-Vav, est interprété comme si c’était le mot Assouy = déjà fait, déjà accompli. C’est dire qu’il y a là une tentative d’identité qui à un certain moment est immédiatement réalisée, figée dans son approximation de visée de l’avenir. Assouï c’est déjà fait. Et après c’est sélectif, cela s’installe dans l’histoire et il n’y a plus d’histoire, il y  a une durée spécifique mais dès que c’est installé dans sa perfection figée, alors on sait que c’est déjà fini. Même si l’histoire de Rome dure 2000 ans, dès le début on savait qu’elle était caduque.

Alors que Jacob porte en lui une dimension d’éternité.

On retrouve dans le nom Essav (écrit en plein Ayin Shin Youd Vav) exactement les mêmes lettres que Yeshouâ – Jésus.

Il y a donc cette espèce de colère de frustration qui mène à la rancœur qui sont les facteurs de l’émotion d’antisémitisme. On l’avait trouvé la 1ère fois dans le récit biblique avec Caïn par rapport à Abel. Caïn aussi a un nom qui renvoit à la même idée. Qaïn c’est déjà Qanouï, celui qui se ressent comme déjà acquis. C’est au niveau du même problème. Ici, Essav, celui qui se conçoit comme déjà fait. Alors que Jacob porte en lui avenir. 

Tout dans la civilisation de Essav – et en particulier dans ce que deviendra la messianité usurpée de la tradition romaine – est à cet indice du passé déjà révolu : le messie est déjà venu ! Ils sont bien à l’indice du Qets, la fin, le déjà accompli.

« Yaaqov Avinou Lo Met ».

On voit dans les versets qui disent la mort des patriarches toujours trois termes dont « Vayamot et il mourût ». Pour Jacob on ne trouve pas ce terme « il mourût » mais les autres « il expira… »

Alors le Midrash nous dit : « Yaaqov Avinou Lo Met ».

Le cycle de l’identité d’Abraham est accompli, le cycle de l’identité d’Isaac est accompli, mais ce 3ème mouvement de l’identité Jacob avec cette tension vers le nom Israël qu’il ne reçoit qu’à la fin n’est pas encore accompli : donc il est encore vivant.

Le Midrash explique l’absence du terme Vayamot : il y a dans l’identité Jacob une dimension de vie éternelle. Israël tient de Jacob cette dimension de « Koulo ’Haï » tout entier vivant.

Le père de ces deux enfants Esaü et Jacob s’appelle Ist’haq. Le Zohar montre que les lettres du nom de Ist’haq  forment deux noms différents : Qets la fin et ’Haï vivant.

Tout se passe comme s’il avait donné tout Qets à Esaü et tout ‘Hay à Jacob : par conséquent « Yaaqov Avinou Lo Met » !

Effectivement, ce qui descend d’Esaü n’existe qu’à l’indice d’une fin déjà arrivée. Et c’est ainsi qu’est leur messianité. Alors que dans l’identité Jacob une dimension de ’Haï insondable. Ce qui fait du bijou ’Haï un symbole aussi significatif que la Maguen David elle-même.

Pour revenir à cette dialectique entre la fin et la vie, Isaac la porte en lui. Il ne devait pas naître et il est né quand même, il devait mourir et il n’est pas mort… il expérimente les extrêmes dans une identité très particulière – Ist’haq – qui se déploie dans sa descendance.

Esaü emporte avec lui tout Qets, il est le modèle de Qets. Jacob emporte avec lui ’Haï.

C’est pourquoi une fois dans la Parashah de Vayé’hi, lorsque Jacob veut prédire le Qets dans sa descendance, il ne le trouve pas.

C’est en tant que fils d’Ist’haq qu’un Qets est possible mais en tant que fils de Yaaqov il n’y a pas de Qets, il y a un Daat – une pulsion qui est insondable –  propre au psychisme juif – sorte de mouvement en avant et en arrière sans fin et qui porte en lui quelque chose que peut-être même aucune civilisation n’arrive à pressentir.

En poussant à la limite :

La première fonction du messie attendu est de mettre fin à l’exil, mais il a d’autres fonctions.

Quand un juif dit qu’il attend le messie, y a t’il sincérité totale dans cette espèce de ferveur de l’attente du messie ?

Il n’est que de le confronter à « l’année prochaine à Jérusalem » prononcée chaque année…

C’est la force qui vient de Jacob: en tant que « fils de Jacob » on ne voit pas la fin, le Qets. Si on voyait le Qets on serait un fils d’Its’haq.

Au moment de la sortie d’Egypte les choses sont claires :

Mishnah de la Hagadah de Pessa’h : le moment de la fin de l’exil d’Egypte a été calculé à partir du moment de la naissance d’Isaac. C’est grâce au mérite d’Isaac que la fin de l’exil d’Egypte a pu être fixée. S’il ne s’agissait que de l’identité Jacob il n’y aurait pas de fin. 

Et lorsque que Jacob veut prédire la fin, ses yeux s’obscurcissent et il ne voit pas. En tant que fils de Jacob nous ne portons pas en nous l’exigence eschatologique.

C’est vrai que les Juifs attendent le Messie et c’est vrai que chaque fois qu’on leur a présenté une maquette ils ont dit non. Mais à force de dire non aux maquettes, on risque de dire non au sionisme…

Ceux qui attendent le Messie, qu’attendent-ils ? Ils ne le savent même pas eux-mêmes !

En tant que fils de Its’haq, oui, grâce au mérite de Isaac, seul des trois patriarches à n’avoir jamais quitter Erets Israël. Raison pour laquelle c’est son mérite qui joue pour mettre fin à l’exil.

Nous pouvons témoigner que nous sommes les enfants de ce pays grâce à Its’haq, plus que grâce à Abraham ou que grâce à Jacob. En tant que fils de Isaac nous avons une Zikah sur le pays, en tant que fils de Jacob, la fille de Laban se trouve là où elle se trouve… Des fois elle est à Brooklin…

***

Q : Jacob est aussi Israël, or vous disez que la fin d’exil arrive c’est grâce au mérite d’Its’haq ?

R : Les deux niveaux Jacob-Israël sont très différents. Tous les textes qui en parlent, par exemple ceux de Vayé’hi –  nomment Jacob qui est la dimension d’Israël dans l’exil. Bien entendu, Jacob fils d’Isaac s’appelle Israël : c’est d’ailleurs quand Jacob revient en Israël qu’il reçoit le nom d’Israël. On va y arriver par un autre biais.

Q : Ist’haq est-il la synthèse de Qets et de ‘Hay ?

R : C’est plus qu’une synthèse, c’est en tension intérieure perpétuelle. L’identification de l’identité d’Its’haq est un thème pour lui-même très important dans le Zohar. Mais je voulais simplement essayer de vous montrer qu’il y a deux forces radicalement contradictoires et qui n’arrivent pas à s’annuler d’ailleurs. Yits’haq est tout entier Qets et tout entier ‘Haï.

Q : Ist’haq c’est un futur, est-ce un présent continue ? 

R : Oui, il n’y a que cette force du futur qui fait que le présent puisse être continue dans ce sens. Its’haq par son côté ‘Haï – force du futur- ne peut pas s’arrêter là où Essav s’arrête. C’est le thème de l’identification du nom de Essav en tant qu’approximation d’identité qui se fige. Et de là viennent les rivalités les plus terribles.

***

Je reprends le thème d’introduction : lorsque Jacob va rencontrer Esaü, il a peur, non peur d’Esaü, mais parce qu’il sait très bien que derrière Esaü c’est le Dieu unique qui l’interpelle. C’est le Dieu unique qui d’une certaine manière a aussi le dossier d’Esaü à plaider. On voit là la difficulté de la confrontation d’Israël face à ses adversaires qui n’ont pas la même problématique. Ils ont leurs dieux derrière eux qui ne s’occupent que d’eux. Donc, ils ont une ferveur d’engagement suicidaire. Il y a un comportement anthropologique radicalement différent. Pour l’ennemi, son dieu ne s’occupe que de lui, et il est anti-juif. Par contre le Dieu du Juif n’est pas anti-Esaü qui est aussi la créature de Dieu. Dans cette problématique les Juifs sont à part parce que leur monothéisme est cohérent. Vous voyez à quel point cela risque de s’hypertrophier. Très souvent chez les Juifs, on trouve ce comportement qui consiste à dire puisque l’autre c’est l’autre, peut-être a-t’il plus raison que moi puisqu’il est l’autre stam.  

C’est une caractéristique du Juif de la Galout – l’identité de Jacob. Israël n’est pas comme cela.

Jacob est dans ce problème. Les israélien qui se comportent ainsi sont des juifs galoutiques déguisés en israélien.

Nous allons voir toutes les stratégies du juif galoutique qui se mettent en place.

Par exemple lorsque Jacob va se prosterner devant Esaü.

C’est un peu la politique genre « congrés juif mondial » pour amadouer les Goyim. Genre courbettes, alors que c’est quand Jacob va se redresser qu’il s’appellera Israël.

On va tout de suite être prévenu d’un double registre du langage. 

 32:4

וַיִּשְׁלַח יַעֲקֹב מַלְאָכִים לְפָנָיו, אֶל-עֵשָׂו אָחִיו, אַרְצָה שֵׂעִיר, שְׂדֵה אֱדוֹם

Vayishla’h Ya’akov mal’akhim lefanav

el-Essav a’hiv artsah Se’ir sdeh Edom.

Et Jacob envoya des envoyés malakhim devant lui

à Essav son frère, et direction de Séir du champ de Edom.

On est de suite frappé par la répétition des termes dans tous les moments du verset :

mal’akhim lefanav c’est un doublet: s’il envoie des malakhim, c’est devant lui !

el-Essav a’hiv  Esaü, c’est son frère !

Le Midrash va intervenir pour chaque unité de lecture pour l’expliquer pour elle-même.

Il envoit à son frère mais il trouve Esaü…

artsah Se’ir sdeh Edom c’est encore apparemment une répétition.

Au niveau d’exégèse du Zohar de ce texte c’est que dans le même comportement et dans le même dire, il y a deux portées.

Simultanément, Jacob s’adresse à Esaü et en même temps au Dieu unique providence d’Esaü. C’est à dire qu’on va appeler cela en langage traditionnel le Sar d’Esaü, la volonté de Dieu pour Esaü.

Parenthèse :

Dans la Guémara : on enseigne que lorsque Moïse est monté pour recevoir la Torah, il a demandé

un certain nombre de conditions avant de recevoir la Torah. L’une d’elles était qu’il n’y ait plus de prophétie chez les Goyim. Cela intrigue beaucoup les commentateurs. Si tu reçois un cadeau, ce n’est pas beau de refuser qu’autrui reçoive le même cadeau. Toute une théorie économique est basée sur ce principe : si l’autre est aussi riche que moi je me sens pauvre… Nous aurions ici un tel comportement chez Moïse : nous acceptons la prophétie mais ne la donne pas au Goyim…

On sait d’ailleurs que jusqu’à ce temps dans l’histoire, il y a avait dans tous les peuples des prophètes qui comme tous les prophètes étaient capables, comme ceux d’Israël, d’éclairer son propre peuple sur le sens de son histoire d’après le Dieu unique.

Israël possède la prophétie qui éclaire le sens de l’histoire d’Israël d’après la prophétie biblique mais il ne faut pas croire que seule l’histoire d’Israël a un sens biblique et prophétique d’après la prophétie. Cela veut dire que les autres peuples aussi, leur histoire est sous le regard de Dieu. Dans tous les cas nous sommes dans le cadre du monothéisme absolu. Par conséquent, il y a un sens à l’histoire biblique de tous les peuples, et il y a eu un temps où tous les peuples avaient leur prophètes particuliers qui savaient leur expliquer le sens spirituel et prophétique de leur propre histoire. C’est ce que Moïse demande : qu’il n’y ait plus de prophètes chez les Goyim capables d’expliquer le sens prophétique de leur histoire.

Effectivement, nous savons qu’historiquement c’est arrivé. Le dernier étant Bilaam en cette génération-là, qui était non seulement le prophète du peuple particulier de Midyan, mais qui avait cette prérogative d’être le porte-parole de la revendication de l’O.N.U. de ce temps-là : toutes les nations à la fois contre Israël. Bilaam le prophète des nations. C’est pourquoi il a été l’antagoniste de Moïse. En termes de réalités contemporaines, ce qu’on pourrait appeler le porte-parole de l’O.N.U. lorsqu’il formule la propagande de la revendication des nations contre Israël. On connait la force de la propagande, élevée au rang de science politique au temps de Goebbels contre les Juifs.

Moïse va être chargé de transmettre la Torah à Israël : cela signifie qu’Israël va être jugé d’après la Torah, une fois révélée. Cela veut dire qu’Israël va être cette unique nation qui accepte que son histoire soit jugée par la chartre que représente la Torah. Les autres nations non.

Mais Israël sait – et Moïse s’en fait le porte-parole – qu’il va entrer dans une histoire pleine de rivalités et de contestations. Si déjà l’interpellation contre Israël, a priori de toute connaissance du sens prophétique de leur dossier, est si terrible pour le peuple juif, alors à postériori s’ils avaient leur prophètes ! S’ils connaissaient la lecture biblique de leur propre histoire, ce serait impossible pour Israël. C’est ce qui explique ce que Moïse demande à Dieu.

Face B

…/…

Parfois, on voit de petits pays tenir face à de grands pays parce que l’ange du grand pays a été battu là-haut. L’exemple de la Finlande tenant tête à l’empire soviétique : tout se passe comme si ce pays avait un mérite céleste plus grand que cet énorme empire. Les Français avaient gagné la guerre d’Algérie sur le terrain, mais l’ont perdue parce qu’ils n’étaient pas sûr d’avoir raison.

S’il y a un effondrement de la conscience du bon droit, alors cela signifie que l’ange là-haut est vaincu là-haut, et la guerre sur le terrain est perdue même si elle était gagnée. Objectivement, on pourrait plaider le dossier inverse, que les Français n’avaient pas raison de faire la guerre d’Algérie, et qu’ils l’ont perdu parce que leur Sar ne voulait pas la gagner. Et Finalement leur Sar s’est incarné chez De Gaulle, il était leur Goël mais ils ne s’en rendaient pas compte…

Q : inaudible

R : Non, Jacob ne retourne pas chez son frère, mais il retourne chez lui sachant que son frère va le rencontrer en chemin pour l’en empêcher. Esaü n’est pas chez lui dans le pays d’Israël dans lequel Jacob revient. Esaü est chez lui à Séir, à Edom, mais il prétend que cette terre est sa terre sainte. Alors il se met en chemin.

L’exemple de typologie que je vous donnerais c’est ce que nous avons vécu en 1948, avec la ligue arabe ici à la tête de laquelle se trouvaient les britanniques. Il y avait une alliance entre Essav et Ishmaël. Jacob revient chez lui après 2000 ans d’exil dans l’hémisphère nord du monde civilisé et il trouve en chemin son frère qui l’attend avec la légion jordanienne. On va le voir dans un verset ultérieurement.

Q : Edom = Rome et la chrétienté, et les Britanniques ?

R : les Britanniques représentent une des dimensions de Rome.

A deux niveaux :

–  l’identité chrétienne, la conscience chrétienne est née, lors d’une alliance entre Rome et les Iduméens qui occupaient la Judée. C’était au temps de la fin du deuxième temple. Au temps d’Hérode roi de Judée avait fait une alliance avec Rome. Il y avait l’armée romaine sur place qui était les alliés des Iduméens qui occupaient le pays de la Judée. C’est dans ce contexte lá que la conscience chrétienne est née, dans une alliance d’identité entre Rome et Edom. C’est pourquoi la tradition a diagnostiqué dans la civilisation romaine le potentiel de la civilisation de Edom-Esaü le frère jumeau de Jacob. C’est au niveau historique indéniable : l’identité de ce romain qui se prend pour Israël est née au temps où les Iduméens occupaient la Judée sous protection des Romains.

–  Au point de vue typologique même théologique, ce frère de Jacob qui n’est pas Jacob et qui se prétend être Israël, dans l’histoire c’est l’Eglise chrétienne. Par conséquent, c’est bien dans cette manière d’être homme qu’est l’empire romain, d’abord dans sa première phase de Rome païenne et dans sa deuxième phase de la Rome chrétienne, et depuis tous les satellites de Rome – les sociétés de droit romain – la civilisation occidentale dont la religion est la religion chrétienne. Que les occidentaux soient chrétiens ou pas, pratiquants ou pas, croyants ou pas, ils sont cette civilisation-là. Les marxistes de Russie sont tout autant Rome que les fanatiques catholiques de Varsovie : tout cela c’est Rome dans toutes ces dimensions. Ils ont d’ailleurs peut-être inconsciemment repris le même emblème d’Esaü, la couleur rouge. Il y a une science des symboles de l’imaginaire individuel et collectif des sociétés :  la science de l’héraldique. C’est très frappant de voir que les mêmes conduites se réclament des mêmes symboles. Vous avez par exemple dans le commentaire d’Abrabanel sur Isaïe, et déjà au temps de la Guémara, et la Mishna mëme : Edom est identifié à Rome. Il y a une projection de l’identité Edom sur l’identité Rome. Effectivement, nous voyons que dans l’histoire c’est ainsi que cela s’est concrétisé. Les Chrétiens sont pris d’angoisse de découvrir que leur situation dans le récit biblique n’est pas du tout celle d’Israël mais celle d’Esaü. Il y a ensuite oubli par phénomène de refoulement inévitable – sorte de soupape de sûreté de la conscience – sinon ils seraient pris de vertige de se découvrir perdus. 

***

Dès le 1er verset nous avons ce double registre :

32:5

וַיְצַו אֹתָם, לֵאמֹר, כֹּה תֹאמְרוּן, לַאדֹנִי לְעֵשָׂו:  כֹּה אָמַר, עַבְדְּךָ יַעֲקֹב, עִם-לָבָן גַּרְתִּי, וָאֵחַר עַד-עָתָּה

Vayetsav otam lemor koh tomrun ladoni le-Esav koh amar avdecha Ya’akov im-Lavan garti va’echar ad-atah.

Vayetsav otam lemor

Et il  leur prescrit en disant

koh tomrun ladoni le-Esav

Ainsi vous direz à mon Seigneur à Esaü.

Cela s’hypertrophie. C’est là que l’on commence à mieux percevoir le double discours :

ladoni  c’est en-haut.

le-Esav c’est en-bas.

koh amar avdekha Ya’akov

ainsi a dit ton serviteur Jacob

Avdekha c’est en-haut.

Ya’akov c’est en-bas.

 im-Lavan garti va’e’har ad-atah.

J’ai séjourné chez Laban et j’ai tardé jusqu’à présent…

Il y a une sorte de double stratégie : Jacob doit lutter simultanément contre Esaü sur terre et aussi contre l’ange tutélaire d’Esaü dans le ciel. Et tant que l’ange tutélaire d’Esaü dans le ciel n’est pas vaincu, alors Esaü sur terre ne peut pas l’être. Jacob n’a pas peur d’Esaü sur terre mais ce dont il a peur c’est d’Esaü au ciel.

Il a une espèce de doute secret – peut-être Esaü a-t’il raison ? – qui lui donne la force du génie là-haut. Le mot français de « génie » recouvre très bien le sens du mot hébreu Sar. Il y a le sens du mot génie de la magie, djinn en arabe, et puis le génie d’une nation.  Le génie d’une nation c’est lui qui est en jeu dans les conflits d’identité. Effectivement, il n’y a pas de doute que l’histoire juive témoigne de cela, qu’il y a dans la descendance de Jacob cette fascination pour l’autre : peut-être a-t’il raison ?

On ne trouve pas ce complexe dans les sociétés jives du monde de l’islam. Les musulmans ne disputent pas à Israël son identité d’Israël mais lui disputent sa terre. Ishmaël ne se prétend pas être Israël. Tandis que Esaü lui disputent son identité. Les Juifs qui ont vécu en univers chrétien, les  Ashkénazim en dominante, n’ont donc pas eu la même problématique que les Séfardim vivant dans l’environnement musulman. Dans la conscience séfarade, il n’y pas ce doute d’identité comme dans la conscience ashkénaze où il y a ce traumatisme de l’environnement extérieur. « Peut-être est-ce lui qui est Israël ? »

On ne peut pas ne pas être admiratifs quelques soient les plumes qu’on y a laissé de voir ces  communautés traverser 2000 ans d’histoire chrétienne et rester juives. Elles ont du secrêté des anticorps pour cela, carapce de protection par rapport à la foi chrétienne qui finalement a distillé un athéïsem juif qui est venu de là. J’explique le mécanisme : « si croire en Dieu c’est croire en Dieu comme les chrétiens je préfère être athée ! » Voilá grosso modo si vous voulez très schématiquement l’origine de l’athéïsem ashkénaze.  

Les philosophes les penseurs juifs ashkénazes ont une espèce de coquetterie d’athéisme. On trouve cela dans tous leurs livres contemporains,. Dès qu’ils sont sortis des ghettos : coquetterie d’athéïsme qui s’explique aussi comme cela pour se démarquer de la foi, or la foi est chrétienne. Et la foi chrétienne c’est tellement idolâtre qu’ils choisirent l’athéisme. Mais ceci dévoile quand même que l’athéisme en milieu chrétien pour les Juifs c’est parfois aussi grave que la conversion au christianisme. Parce que c’est l’envers de la médaille sainte. Cet environnement là et la problématique qu’il représente a finalement déjudaïsé énormément d’intellectuels juifs. 

Je crois que le modèle de cette identité que je tente de cerner ici cela restera Kafka : le labyrinthe de l’identité. Qui suis-je ? Vous n’aurez jamais de Kafka Séfardi, il n’aurait jamais pu être séfardi. Sauf maintenant où l’on trouve des Séfardim avec la problématique ashkénaze. C’est un problème qui n’est pas fini. Très tôt la tradition a diagnostiqué cela : cela se passe à Rome.

La rivalité de l’islam vis-àa-vis d’Israël ne concerne par l’identité théologique. Le musulman Ishmaël sait très bien que c’est Israël qui est Israël. Il n’a aucun problème théologique avec Israël. Il ne lui conteste pas son identité d’Israël, mais il lui refuse une plac esu terre, il lui refuse son autonomie politique. Les Chrétiens c’est l’inverse : ils aménagent une place sur terre mais pas au ciel. Les chrétiens ont pris le ciel, les musulmans pris la terre, et comme je le dis souvent il nous est resté l’horizon. Je crois effectivement que cela explique le je juif de l’exil. Le Juif de l’exil a toujours été un être à l’horizon. C’est aussi une dimension de survie. Il y a une expérience que nous sommes peut-être le seul peuple au monde à avoir vécu : le fait d’avoir été le peuple de l’horizon, le peuple du voyage. Cela a notablement enrichi l’expérience de l’âme juive mais ce n’est pas notre condition naturelle. Alors finalement un jour on a décidé de revenir sous le ciel de notre terre. Et pour cela il fallait arriver sur la terre de notre ciel. Et puis le monde entier se demande ce qui arrive ! Cette chose inouïe qu’Israël rentre chez lui…

La stratégie de prière de Jacob :

Sa stratégie de guerre consista au retour des envoyés lui annonçant qu’Esaü venait à sa rencontre avec 400 hommes de guerre :

32:8

וַיִּירָא יַעֲקֹב מְאֹד, וַיֵּצֶר לוֹ; וַיַּחַץ אֶת-הָעָם אֲשֶׁר-אִתּוֹ, וְאֶת-הַצֹּאן וְאֶת-הַבָּקָר וְהַגְּמַלִּים–לִשְׁנֵי מַחֲנוֹת

Vayira Ya’akov me’od vayetser lo vayachats et-ha’am asher-ito ve’et-hatson ve’et-habakar vehagmalim lishneh machanot.

Vayira Ya’akov me’od

Et Jacob eut très peur

vayetser lo

Il fut dans l’angoisse

vayachats et-ha’am asher-ito

Et il divisa le peuple avec lui

ve’et-hatson ve’et-habakar vehagmalim lishneh machanot.

Ainsi que tous les troupeaux en deux camps.

32 :9

וַיֹּאמֶר, אִם-יָבוֹא עֵשָׂו אֶל-הַמַּחֲנֶה הָאַחַת וְהִכָּהוּ–וְהָיָה הַמַּחֲנֶה הַנִּשְׁאָר, לִפְלֵיטָה

Vayomer im-yavo Esav el-hamachaneh ha’achat vehikahu

Il dit : Si Esaü vient contre le 1er des deux camps et le frappe

vehayah hamachaneh hanish’ar lifleytah

Le camp restant sera rescapé.

On retrouve tout à fait le plaidoyer des Juifs de diaspora. Si jamais cela ne va pas en Israël on est ici la réserve…

Un Midrash nous explique que c’est ce que les Juifs de Babel disaient des Juifs de Jérusalem : si l’ennemi vient détruire Israël les Juifs de Babel seront les rescapés…

Alors ensuite Jacob prie :

32 :10

וַיֹּאמֶר, יַעֲקֹב, אֱלֹהֵי אָבִי אַבְרָהָם, וֵאלֹהֵי אָבִי יִצְחָק:  יְהוָה הָאֹמֵר אֵלַי, שׁוּב לְאַרְצְךָ וּלְמוֹלַדְתְּךָ–וְאֵיטִיבָה עִמָּךְ

Vayomer Ya’akov Elohey avi Avraham ve’Elohey avi Yitschak Adonay ha’omer elay shuv le’artsecha ulemoladetecha ve’eytivah imach

Vayomer Ya’akov Elohey avi Avraham ve’Elohey avi Yitschak

Et Jacob dit Dieu de mon père Abraham et Dieu de mon père Isaac

Adonay ha’omer elay

Hashem qui m’a dit (dans la fameuse vision à Béthel)

shouv le’artsekha ulemoladetekha ve’eytivah imakh

« Reviens à ton pays et à ta patrie et Je te ferai du bien ».

32 :11

קָטֹנְתִּי מִכֹּל הַחֲסָדִים, וּמִכָּל-הָאֱמֶת, אֲשֶׁר עָשִׂיתָ, אֶת-עַבְדֶּךָ:  כִּי בְמַקְלִי, עָבַרְתִּי אֶת-הַיַּרְדֵּן הַזֶּה, וְעַתָּה הָיִיתִי, לִשְׁנֵי מַחֲנוֹת

Katonti mikol hachasadim oumikol-ha’emet

Je suis trop petit de toutes les grâces

asher asita et-avdecha.

Que tu as faites à ton serviteur

ki vemakli avarti et-haYardenhazeh

Car c’est avec mon bâton que j’ai traversé ce Jourdain

ve’atah hayiti lishney ma’hanot

Et maintenant je suis (devenu – sous-entendu tellement riche que j’ai) deux camps.

Regardez un peu l’humour noir de Jacob !

Pourquoi a-t’il deux camps ? Parce qu’il a dû séparer pour essayer d’avoir des rescapés ! Et maintenant il rend grâce à Dieu en disant : « je sais que Tu m’as protégé puisqu’en traversant le Jourdain pour m’enfuir je n’avais que mon bâton et voilà que je reviens avec 2 camps… et donc la promesse s’est accomplie ». Vous voyez la dimension d’humour là-dedans !

32 :12

הַצִּילֵנִי נָא מִיַּד אָחִי, מִיַּד עֵשָׂו:  כִּי-יָרֵא אָנֹכִי, אֹתוֹ–פֶּן-יָבוֹא וְהִכַּנִי, אֵם עַל-בָּנִים

Hatsileni-na miyad a’hi miyad Esav

Sauve-moi de la main de mon frère de la main d’Esaü

ki-yare anochi

Car j’ai peur de lui

oto pen-yavo vehikani

De peur qu’il ne vienne et me frappe

em al-banim.

La mère sur les enfants.

Je vous donne un enseignement important:

Ces deux camps-là sont les enfants de Léah d’abord et les enfants de Rachel en second. Voilá comment Jacob a divisé son camp en deux. On retiendra que c’est purement et simplement une stratégie militaire.

Retour en arrière avec les derniers versets de la Sidra précédente :

Après avoir conclu un pacte avec Laban Jacob reprend son chemin :

Verset 2 et 3 chapitre 32 :

וְיַעֲקֹב, הָלַךְ לְדַרְכּוֹ; וַיִּפְגְּעוּ-בוֹ, מַלְאֲכֵי אֱלֹהִים

וַיֹּאמֶר יַעֲקֹב כַּאֲשֶׁר רָאָם, מַחֲנֵה אֱלֹהִים זֶה; וַיִּקְרָא שֵׁם-הַמָּקוֹם הַהוּא, מַחֲנָיִם

VeYa’akov halach ledarko vayifge’ou-vo mal’achey Elohim

Et Jacob alla sur son chemin, le rencontrèrent (comme on rencontre quelqu’un subitement) des anges de Dieu

Vayomer Ya’akov ka’asher ra’am

machaneh Elohim zeh

vayikra shem-hamakom hahou Machanayim.

Et dit Jacob quand il les vit :

« C’est un camp de Dieu »

et il appela le nom de cet endroit les camps.

Ma’haneh dans sa forme duelle : ma’hanayim

Dans le ciel il y avait deux camps et sur terre il y a avait deux camps . Je vais essayer de vous montrer le parallèle entre ces deux camps. Qui sont ces anges  dont Yaaqov perçoit qu’ils sont de deux sortes ?

Rashi sur le verset 32:2: וַיִּפְגְּעוּ בוֹ מַלְאֲכֵי אֱלֹהִים

מַלְאָכִים שֶׁל אֶרֶץ יִשְׂרָאֵל בָּאוּ לִקְרָאתוֹ לְלַוּוֹתוֹ לָאָרֶץ

Et le rencontrèrent les anges de Dieu…

Des anges d’Erets Israël sont venus à sa rencontre pour l’y accompagner (Beréchith raba 74).

Les anges tutélaires d’Erets Israël vont à sa rencontre.

Rashi sur verset 3:  מַחֲנָיִם

שְׁתֵּי מַחֲנוֹת שֶׁל חוּצָה לָאָרֶץ שֶׁבָּאוּ עִמּוֹ עַד

Deux camps, [le mot ma‘hanayim étant au duel] : les anges de l’extérieur du pays qui étaient venus avec lui jusque là, et ceux d’Erets Israël qui s’étaient portés à sa rencontre (Midrach tan‘houma Wayichla‘h).

Les anges de ‘Houts Laarets l’ont accompagné  jusqu’à la frontière et les anges d’Erets viennent à sa rencontre.

Lorsque Jacob rentre en Israël, à ce moment-là il y a deux camps d’anges qui se rencontrent.

Les Malakhim de ’Houts Laarets et les Malakhim d’Erets Israël. Or, sur ce même modèle, pour des raisons apparemment différentes, Jacob est obligé de diviser son propre camps en deux camps.

En haut, c’est Ma’hanayim duel au masculin pluriel: Lashon Zakhar.

En bas, c’est Ma’hanot au féminin pluriel : Lashon Nouqvah.

La différence d’après le Zohar, c’est que Ma’hanayim bien qu’il y ait deux camps là-haut, les anges sont unis. Mais en bas, c’est vraiment désuni.

Or, on finira par diagnostiquer que cette typologie des enfants de Léah c’est la descendance de Jacob en Erets Israël, alors que la typologie des enfants de Rachel c’est la descendance des enfants de Jacob en dehors d’Erets Israël. Yossef et Binyamin. C’est quand Binyamin devient sioniste si j’ose dire que le Mashia’h arrive (coïncidence c’est le prénom de Herzl !). Binyamin joue un très grand rôle dans le temps messianique du retour de l’exil. Je vous en parlerais la prochaine fois : La naissance de Binyamin dans l’histoire de la famille de Jacob, ce qu’il représente dans l’histoire messianique de fin d’exil….

Effectivement, nous savons que Rachel n’est pas enterrée  dans la caverne de Makhpelah mais à Bethle’hem, « sur le chemin de l’exil » dit le texte très clairement. Et le Midrash indique : Pour prier pour ses enfants dans l’exil.

C’est peut-être la raison pour laquelle les Juifs de l’exil  souhaiteraient que l’on rende Beit Le’hem aux Arabes de telle sorte que Rachel continue à prier pour eux, parce que maintenant Rachel est en Erets Israël, et il n’y plus de protection des Juifs de la Galout.

Lorsque Biniamin revient alors c’est la fin de l’exil. C’est vraiment un moment d’identité important.

Noua allons reprendre : cette dualité des 2 camps nous renvoie à la dualité qui est une coupure, une fracture d’identité du peuple de Jacob instauré dans l’histoire en tant que nation : une rupture entre deux manières d’être enfant de Jacob radicalement différentes :

–  Les enfant de Léa – Erets Israël.

–  Les enfants de Rachel –  Galout. 

La société d’Israël a plusieurs lignes de fracture possible, mais celle-ci est l’une des principales. Et puisque cette typologie nous est donnée sur cette ligne-là c’est peut-être la plus grave.

Je vous donne les deux autres qui correspondent ensemble aux trois dimensions d’identité d’Israël :

–  Au niveau Am Israël la fracture est entre les tribus. De notre temps nous vivons l’affrontement Sefardim-Ashkenazim mais c’est très compliqué, il y a douze tribus en Israël. Ce n’est pas simplement deux tribus, les Séfardim et Ashkénazim se divisent en plusieurs tribus… c’est très compliqué. Il y a une ligne de fracture au niveau du peuple par les tribus.

–  Au niveau de Torat Israël : il y a une ligne de fracture entre ceux qui sont pour la Torah et ceux qui sont contre ceux qui sont pour (ils ne sont pas contre la Torah).

–  Au niveau de Erets Israël : c’est la 3ème ligne de fracture peut-être la plus grave, au niveau de Erets Israël – entre Israël et la Diaspora.

Q : inaudible.

R : c’est à cause de VeYa’akov halach ledarko :c’est-à-dire quand quelqu’un s’en va en voyage on lui souhaite VeYa’akov halach ledarko , et qu’il rencontre des anges, un eproteciton, une providence as des malakhei ‘habala.

Le voyage est toujours dangereux. Les Juifs ont vécu cela. C’est très profond dans l’inconscient juif le traumatisme des voyages. Voir le quai de la gare de l’est pour les colonies de vacances juives. C’est spécial.

Plaidoyer de Jacob :

Je vais reprendre le plaidoyer de Jacob

On peut se demander la raison de sa peur puisqu’il sait que Dieu est Providence pour lui. Mais rattaché au problème général : il a peur parce que peut-être Jacob a un dossier qui peut plaider contre lui : lequel ?

D’après le Pshat, la peur de Jacob commence au verset 32:10

וַיֹּאמֶר, יַעֲקֹב, אֱלֹהֵי אָבִי אַבְרָהָם, וֵאלֹהֵי אָבִי יִצְחָק:  יְהוָה הָאֹמֵר אֵלַי, שׁוּב לְאַרְצְךָ וּלְמוֹלַדְתְּךָ–וְאֵיטִיבָה עִמָּךְ

Vayomer Ya’akov Elohey avi Avraham ve’Elohey avi Yitschak

Et Jacob dit : « Dieu de mon père Abraham et Dieu de mon père Isaac »

Et maintenant il se rappelle qu’il avait des parents à ‘Hévron, à Beer Shéva.

Adonay ha’omer elay

Hashem qui m’a dit (dans la fameuse vision à Béthel)

shouv le’artsekha ulemoladetekha ve’eytivah imakh

Reviens à ton pays et à ta patrie et Je te ferai du bien.

קָטֹנְתִּי מִכֹּל הַחֲסָדִים, וּמִכָּל-הָאֱמֶת, אֲשֶׁר עָשִׂיתָ, אֶת-עַבְדֶּךָ:  כִּי בְמַקְלִי, עָבַרְתִּי אֶת-הַיַּרְדֵּן הַזֶּה, וְעַתָּה הָיִיתִי, לִשְׁנֵי מַחֲנוֹת

Katonti mikol hachasadim oumikol-ha’emet

Je suis trop petit de toutes les grâces

asher asita et-avdecha.

Que tu as faites à ton serviteur

ki vemakli avarti et-haYardenhazeh

Car c’est avec mon bâton que j’ai traversé ce Jourdain.

32 :12

הַצִּילֵנִי נָא מִיַּד אָחִי, מִיַּד עֵשָׂו:  כִּי-יָרֵא אָנֹכִי, אֹתוֹ–פֶּן-יָבוֹא וְהִכַּנִי, אֵם עַל-בָּנִים

Hatsileni-na miyad a’hi miyad Esav

Sauve-moi de la main de mon frère de la main d’Esaü

Jacob commence par dire la louange de Dieu, des remerciements : quand il est parti il avait simplement un bâton : le bâton du juif errant, et maintenant il est riche de deux camps.

Puisque j’ai la preuve de ta protection, alors j’ai encore une protection à te demander : « Sauve-moi de la main de Essav mon frère, j’ai peur qu’il me détruise… »Et là les deux versets sont vraimeents séparés. Indépendament de ce pshat, je vais vous donner une autre lecture en reliant tout simplement la fin du verset 11 et le début du verset 12 : 

Fin de verset 32:11:

וְעַתָּה הָיִיתִי, לִשְׁנֵי מַחֲנוֹת

ve’atah hayiti lishney ma’hanot

Et maintenant je suis (devenu) deux camps

Cela suffit déjà pour montrer l’inquiétude de Jacob. Le fait qu’il y ait division dans Jacob : « de cela sauve-moi ! ». C’est une lecture drash.  

Et il n’y a pas de doute que c’est le diagnostic de la société juive : dès que se pose un problème quelconque important, la société juive se divise en deux ! Alors sauve-moi ! Cette division fait que Esaü peut être vainqueur.

Et je crois que dans la société israélienne en tant que société juive, c’était au paroxysme : cela ne peut pas fonctionner parce que dés qu’il faut décider il y en a  49% et 51% comme à la Knesset. Ce sont finalement les trois lignes de fractures, avec la plus dangeureuse qui est la ligne de fracture entre Israël et la diaspora.

Cette division qui met en question aux yeux de l’ange d’Esaü finalement le droit du peuple juif à retourner sur sa terre. Esaü peut quant à lui toujours plaider qu’Israël n’est pas d’ici mais de là-bas…

En s’aidant des statistiques : « Comment affirmer qu’il s’agit de votre terre alors que 4/5 de votre peuple se trouve mieux ailleurs ? »

Voilà, il suffit de le formuler de cette manière. Et on voit bien que les événements que nous vivons

Lorsque cela se dévoile au niveau des événements nous permettent de comprendre le texte et réciproquement.

Or, il y a quand même plus, c’est le fait que Jacob dans son plaidoyer même indique quelle est sa ligne de faiblesse.

Revenons donc au verset 32:5 :

וַיְצַו אֹתָם, לֵאמֹר, כֹּה תֹאמְרוּן, לַאדֹנִי לְעֵשָׂו:  כֹּה אָמַר, עַבְדְּךָ יַעֲקֹב, עִם-לָבָן גַּרְתִּי, וָאֵחַר עַד-עָתָּה

Vayetsav otam lemor koh tomrun ladoni le-Esav koh amar avdecha Ya’akov im-Lavan garti va’echar ad-atah.

C’est le message qu’il envoie à Esaü :

וַיְצַו אֹתָם, לֵאמֹר, כֹּה תֹאמְרוּן, לַאדֹנִי לְעֵשָׂו:  כֹּה אָמַר, עַבְדְּךָ יַעֲקֹב, עִם-לָבָן גַּרְתִּי, וָאֵחַר עַד-עָתָּה

Vayetsav otam lemor

Et il  leur prescrit en disant

koh tomrun ladoni le-Esav

Ainsi vous direz à mon Seigneur à Esaü

 im-Lavan garti va’e’har ad-atah.

J’ai séjourné chez Laban et j’ai tardé jusqu’à présent.

וַיְהִי-לִי שׁוֹר וַחֲמוֹר, צֹאן וְעֶבֶד וְשִׁפְחָה; וָאֶשְׁלְחָה לְהַגִּיד לַאדֹנִי, לִמְצֹא-חֵן בְּעֵינֶיךָ

Vayehi-li shor vachamor tson ve’eved veshifkhah

 va’eshlechah lehagid ladoni limtso-chen be’eyneykha.

Rashi : Ne crois pas que cela me vient de la bénédiction que tu prétends que je t’ai prise, tout cela me vient de mon travail…

עִם-לָבָן גַּרְתִּי, וָאֵחַר עַד-עָתָּה

im-Lavan garti va’e’har ad-atah.

J’ai séjourné chez Laban et j’ai tardé jusqu’à présent.

C’est ce verset qui explique cette grande terreur du verset 8 auquel j’ai fait allusion tout à l’heure.  

J’ai séjourné chez Laban et j’ai tardé jusqu’à présent.

Nous avons deux Midrash. Parce que là encore deux informations que nous connaissions déjà :

Premiérement le fait que Jacob avait séjourné chez Laban, c’est la parashah de la semaine dernière. Et on sait très bien qu’il a tardé jusqu’á présent ! Et avec une grande patience Esaü l’attendait. Il sait qu’il arrive. Il est prêt. Peut-être si Jacob était revenu plus tôt la légion jordanienne n’aurait pas été sur pied, enfin je veux dire l’armée d’Esau…  Imaginez que les Juifs soient revenu deux siècles avant. Il n’y aurait peut-être pas eu de ligue arabe à ce moment-là. Enfin, c’est un autre problème, mais c’est le problème de Jacob et Esaü antique.

Rashi :

Rashi sur Im Laban Garti :

גַּרְתִּי

לֹא נַעֲשֵׂיתִי שָׂר וְחָשׁוּב אֶלָּא גֵּר אֵינְךָ כְּדָאי לִשְׂנוֹא אוֹתִי עַל בִּרְכוֹת אָבִיךָ שֶׁבֵּרְכָנִי הֱוֵה גְּבִיר לַאֲחֶיךָ שֶׁהֲרֵי לֹא נִתְקַיְּמָה בִּי. דָּבָר אַחֵר גַּרְתִּי בְּגִימַטְרִיָּא תַּרְיָ”ג כְּלוֹמָר עִם לָבָן הָרָשָׁע גַּרְתִּי וְתַרְיָ”ג מִצְוֹת שָׁמַרְתִּי וְלֹא לָמַדְתִּי מִמַּעֲשָׂיו הָרָעִים

J’ai séjourné : Je n’y suis devenu ni un prince ni un notable, mais j’y suis resté un étranger, [le mot garti, (« j’ai séjourné ») étant de la même racine que guér (« étranger »)]. Tu n’as plus aucune raison, par conséquent, de me haïr à cause de la bénédiction que m’a donnée ton père : « sois un chef pour tes frères » (supra 27, 29), car elle ne s’est pas réalisée (Midrach tan‘houma Wayichla‘h 5). Autre explication : La valeur numérique des lettres de garti est six cent treize, comme si Ya‘aqov avait voulu dire : Tout en séjournant chez Lavan l’impie, j’ai continué d’observer les six cent treize commandements et je n’ai pas suivi ses mauvais exemples.

« Garti : en réalité cette information véhicule une information importante, un plaidoyer : Im Laban Garti j’ai séjourné chez Laban. Le verbe Garti c’est un verbe que vous connaissez Lagour, cela veut dire séjourner comme un étranger Guer. Et le Midrash que cite Rashi dit : « ne crois pas que je sois devenu prince important mais je suis resté Guer métèque ».

Cela veut dire dans son plaidoyer : « Je n’ai jamais oublié Erets Israël et ne me suis jamais cru chez moi chez Laban… »

Et par conséquent, tu n’a pas à me haïr  à cause des bénédictions de ton père que ton père m’a donné parce qu’il m’avait dit « Sois Guévir sur ton frère » mais je n’ai pas été Guévir, j’ai été Guer cela ne s’est pas réalisé pour moi…

Guévir ce n’est pas « noble ». Etymologiquement le mot de « baron » vient de guibor. Alors c’est dans le sens de baron dans l’ancien français. Il lui dit : « Je n’ai pas été Guévir, j’ai été Guér ! ».

J’ai entendu une fois un très joli ‘Hidoush là-dessus : Mon père m’a béni pour être Guévir, mais je n’ai été que Guer dit Rashi : Guévir – Guer. Jacob dit qu’il a été béni par Guévir mais le Bi de Guévir ne s’est pas réalisé…

Première explication du Midrash cité par Rashi : « j’ai séjourné chez Laban » cela veut dire « j’ai été Guer » lis mon histoire j’ai été métèque et dans les ghettos pendant 2000 ans donc Esaü n’a aucune raison de jalouser son frère. On retrouve le plaidoyer de l’Agence Juive à l’ONU…

Deuxième explication de Rashi : Garti begematria Tariag = 613 mitsvot.

Une allusion à Essav : « non seulement je ne suis pas devenu prince de cet endroit mais j’ai gardé les 613 commandements, et bien que ce soit chez Laban le méchant et je n’ai pas appris de ces mauvaises conduites… »

Dans les dimensions de ce Midrash que cite Rashi il y a quelque chose de très important. Je vais vous l’expliquer directement comme le Ben Ish ‘Haï l’a expliqué:

Se dévoile ici un plaidoyer de Jacob qui va aller jusqu’au moment de la lutte avec l’ange, où l’ange va être obligé de lui reconnaître le nom d’Israël.

Ben Ish ‘Haï indique:

Yaaqov c’est le principe du peuple d’Israël, Am ce peuple doit passer au niveau Israël mais pour cela il faut qu’il mérite deux autres dimensions. Or, rappelez-vous ici cette dimension Guer à travers l’explication de Rashi: la dimension Guer signifie qu’il a gardé son identification par Erets Israël. Or finalement c’est au temps du roi David que cette souveraineté politique sur Erets Israël sera en fin obtenue. D’autre par ce que dit Jacob : non seulement je fais partie d’Erets Israël mais j’ai gardé la Torah. Et la Torah c’est Mosheh qui l’a donné. Alors voilà ce que dit le Ben Ish ‘Haï :

Jacob c’est le peuple, Am Israël.

David c’est la terre, Erets Israël.

Mosheh c’est la Torah.

Et c’est l’identité qui fait que Jacob devient Israël : Am Israël, Erets Israël, Torat Israël.

Le Ben Ish ‘Haï nous le montre avec le procédé cabaliste habituel de la guématria. Et dans ce cas-là, vous allez le comprendre par vous-même, i ne peut pas y avoir de coïncidences de ce genre ce n’est pas possible :  

Yaaqov + David + Mosheh = Israël

182 + 14 + 345 = 541

Nn seulement c’est comme cela comme 2+2 font 4 mais c’est aussi ce que dit le Midrash cité par Rashi : Jacob dit à Esaü quelque soit tes prétentions : premiérement je suis resté Guer et deuxièmement j’ai toutes les Mitsvot. Cela veut dire : moi Jacob et donc fidèle à Am Israël, je suis resté Guer et donc fidèle à la terre, et j’ai gardé les 613 mitsvot et donc fidèle à la Torah

Jacob + David + Mosheh = Israël…

C’est si vous voulez le point de force de Jacob devenant Israël.

Quelle était alors son inquiétude ?

C’est dans le même verset.

im-Lavan garti va’e’har ad-atah.

J’ai séjourné chez Laban et j’ai tardé jusqu’à présent

J’ai tardé jusqu’à présent…

Il avoue que quelque soit les mérites dont il peut se prévaloir quant à la promesse que Dieu lui avait faite au moment où il est parti, il y a une faille: peut-être que le mérite ne va pas lui être imputé. Pourquoi ? Parce qu’il a tardé !

La Guémara de [Sanhedrin 68b – Brakhot 4a] :  

« Et Jacob eut très peur… » Rabbi Yaaqov met en évidence une contradiction entre deux versets :

Dieu dit à Jacob : « tu peux partir, Je suis avec toi et Je te préserverai là où tu iras ».

Ici il a très peur ? Réponse : la peur que la faute invalide le mérite. Quelle faute ?

C’est ici que cette faute se dévoile : c’est-à-dire que la consigne était de partir et de revenir tout de suite dès que possible. Mais voilà que Jacob lui-même va s’avouer son retard dans une expression précise : « j’ai tardé ». Il aurait pu employé une toute autre expression mais il dit sous forme d’aveu : « j’ai tardé ! ». On tarde toujours par rapport à une certaine date, c’est évident !

C’est très éclairant : cette peur de Jacob dans cette rencontre, elle vient de ce retard. Et c’est très lié avec ces Ma’hanot ces deux camps…

Face C

…/…

Le Nom d’Israël

Nous verrons que cela nous est retraduit par deux fois, ce sont deux scènes différentes: la 1ère fois c’est un ange qui nomme Jacob Israël et la deuxième fois c’est Dieu lui-même qui confirme ce changement de nom. Cela pose toute une série de problèmes : en premier lieu comprendre ce qu’est un ange. La Sidra en parle beaucoup. On n’a jamais pris le temps d’étudier cela à fond. Je ne sais pas si on aura le temps de le faire ce soir. Quelque soit les implications c’est surtout la cohérence du récit que nous allons suivre. Et le Midrash que Rashi cite explique que cette ange qui la première fois change le nom de Jacob pour le nom d’Israël, c’est l’ange d’Esaü. C’est le 1er thème que nous étudierons.

Et ensuite, Dieu confirme ce changement de nom. Après cette introduction nous lirons le 1er verset de la Sidra puisqu’il s’agit de l’initiative que prend Jacob au moment où il revient de son exil chez Laban d’offrir la paix à Esaü. Or, cette offre de paix est sans suite et il va donc y avoir une lutte. C’est à la suite de cette lutte entre Jacob et l’ange d’Esaü que finalement Jacob aura pour nom Israël.

D’après les versets eux-mêmes, il semblerait que le nom « Israël » est déjà préparé : tout se passe comme si tant l’ange en question, qui est l’ange d’Esaü, à l’issu de ce combat, que Dieu lui-même, attendent depuis toujours l’occasion de pouvoir donner ce nom d’Israël à quelqu’un.

La logique d’explication de ce nom d’Israël et le changement de nomination que cela représente par rapport à Jacob nous est donné par le contexte  du verset, mais il semble que ce nom d’Israël en tant que titre était au fond le nom attendu depuis le début de l’histoire de l’homme de telle sorte d’identifier la manière d’être homme, le type d’homme qui aurait réussi à mériter de le recevoir.

Il ne s’agit pas tellement d’une fonction précise à l’intérieur de l’histoire humaine – ce qui est le cas précis pour chacun des récits où l’on voit qu’un certain personnage, héros du récit biblique, se trouve être nommé de tel nom parce que c’est telle ou telle fonction à l’intérieur de la société humaine en général. Nommer quelqu’un c’est lui donner sa fonction, son programme, sa destinée au sens de destination, une fonction dans le métier d’homme.

Israël a une portée plus générale : c’est vers lui que converge tous ces efforts pour engendrer la créature, l’homme, que Dieu voulait créer lorsqu’il a créé le monde. C’est à l’intérieur de cette cohérence que finalement apparait ce personnage de Jacob dans l’histoire qui lui est propre et il reçoit le nom Israël.

Midrash et Baal HaTourim : c’est pour Israël que le monde a été créé ; dès l’origine, Dieu a vu qu’Israël acceptait la Torah alors il a créé le monde.

Effectivement, ce terme d’Israël est censé désigner, apriori de toute histoire, l’être que Dieu a voulu créer. Et puis voilà que le monde a été créé à un certain point de départ de l’histoire, du temps, de la durée, et puis il est arrivé qu’une des manières d’être homme a coïncidé avec ce modèle « transcendant » par rapport à l’immanence de l’histoire proprement dite.

Nous vivons aujourd’hui dans une ambiance culturelle qui est allergique aux catégories de la transcendance et qui essaie de rendre compte du mystère de l’existence uniquement dans les perspectives de l’immanence. Il faudrait réfléchir pourquoi l’homme moderne a peur de la notion de transcendance. Il y a plusieurs réponses possibles : la principale réponse juive est que la notion de transcendance implique celle d’un jugement.

S’il y a une transcendance ou une perspective transcendante, apriori de l’histoire, c’est donc qu’il y a un modèle par rapport auquel on est confronté : une certaine essence qu’il faut arriver à incarner. Et que bien sûr toute cette tentative pour rejoindre ce modèle qui existe apriori, cette tentative elle-même c’est l’histoire et elle se fait dans une immanence permanente et quotidienne.

Il y a un modèle qu’il faut arriver à rejoindre. Que ce modèle se façonne en tant que modèle transcendant lui-même, que son visage se figure, au fur et à mesure de la tentative dans l’immanence c’est vrai aussi. Mais il n’en reste pas moins qu’il y a un but à atteindre et à rejoindre.

Ce que nous dit le Midrash qui nous dit que le nom du Messie – Shmo Shel Mashia’h – donc la figure du Messie – préexiste à l’histoire du monde.

Il faut comprendre ce que cela signifie. Cela ne signifie pas que tout est joué à l’avance. Cela signifie qu’il y a un projet qu’il faut arriver à rejoindre. Ce projet ce n’est pas l’homme qui l’invente. C’est le fait de réussir le projet qui est le mérite de l’homme. Le projet, c’est le Créateur qui le propose.

Ce projet, cette figure du Mashia’h, figure de l’homme réussi, cette authenticité humaine, celle dont au fond chaque individu posséde l’exigence au fond de lui, préexiste à toute histoire.

Est-ce que cela voudrait dire que l’histoire n’a pas de sens, puisque cela préexiste ? Est-ce que cela serait prédéterminé ? Pas du tout ! Le projet existe mais il faut le réaliser. Cela est vrai de toutes les valeurs. Il est bien évident que l’effort de l’homme en tant que créature est de réaliser les valeurs. Ces valeurs l’homme ne les invente pas.

A la limite on peut dire qu’il y a eu des archétypes de l’humanité – les Avot – qui ont réussi à être les premiers à deviner quel était ce projet qu’il fallait réussir et réaliser. Et par conséquent en ce sens-là on peut les considérer comme les inventeurs, non du projet lui-même, mais des moyens de le réaliser pour la première fois. On pourrait citer n’importe laquelle des valeurs.

L’effort moral est par exemple d’être bon. Mais la bonté n’a pas été inventée par l’homme. Il y a une trancendance qui fait que la bonté est ce qu’elle est. Mais l’effort moral n’en garde pas moins sa logique puisqu’il s’agit d’inventer les moyens de l’être.

Ceci vaut pour toutes les valeurs et pas seulement pour les valeurs morales. Mais aussi tout ordre de valeurs. La philosophie contemporaine en parle : tout un conflit entre les philosophies de l’essence et les philosophies de l’existence : c’est un conflit que ressemble un peu à celui de l’immanence contre la transcendance…

Le fond du problème est qu’il y a des essences et que c’est l’existence elle-même qui arrive à les incarner, et qu’il y a une transcendance mais que c’est dans l’immanence qu’elle doit s’exprimer. Cela n’a pas beaucoup de sens de nier l’un par rapport à l’autre. 

Midrash : la figure du Mashia’h existe avant l’histoire puisque c’est elle qu’il faut arriver à réaliser. De la même manière le Midrash cité : tout se passe comme si dans ce texte le nom d’Israël était préparé à l’avance.

2 références :

La première lorsqu’il s’agit de l’ange de Essav qui nomme Jacob du nom d’Israël, et nous expliquerons ce que représente cet ange d’Essav pour le Midrash. Chapitre 32 verset 29. C’est au moment où dans la luttte entre Jacob et l’ange d’Essav, Jacob est victorieux, alors l’ange lui dit :

וַיֹּאמֶר, לֹא יַעֲקֹב יֵאָמֵר עוֹד שִׁמְךָ–כִּי, אִם-יִשְׂרָאֵל:  כִּי-שָׂרִיתָ עִם-אֱלֹהִים וְעִם-אֲנָשִׁים, וַתּוּכָל

Vayomer lo Ya’akov ye’amer od shimkha

Ce n’est pas Jacob que sera nommé ton nom

Ki im Israël

Mais Israël

ki-sarita im-Elohim ve’im anashim vatuchal.

Parce que tu as rivalisé lutté (vaincu) avec Elohim et avec les hommes et tu as pu.

C’est là ensuite l’explication selon laquelle Jacob mérite ce nom Israël. La fin du verset ne vient pas expliquer pourquoi Jacob est nommé Israël. C’est le nom d’Israël qui est donné à Jacob, et ensuite le verset explique pourquoi Jacob a pu l’obtenir. L’explication  ki-sarita im-Elohim ve’im anashim vatuchal n’explique pas le nom Israël. Jacob a été nommé Israël, nom qui est préparé pour l’homme qui aura éussi à être le Tsadik. Ensuite le verset explique pourquoi c’est Jacob qui a réussi à être ce Tsadik.

Cette double lutte à deux niveaux contre les réalités divines d’une part et contre les realités humaines d’autre part, est une sorte de clef de lecture de tous ces textes de la Sidra écrivant cette rencontre entre Jacob et Esaü.

 On pourrait dire d’ailleurs que ki-sarita im-Elohim c’est au niveau de la transcendance ve’im anashim vatuchal c’est au niveau de l’immanence.

Deuxième référence 35:10 :

Lorsque Dieu confirme à Jacob que cette réussite est effective, définitive et irréversible :

 וַיֹּאמֶר-לוֹ אֱלֹהִים, שִׁמְךָ יַעֲקֹב:  לֹא-יִקָּרֵא שִׁמְךָ עוֹד יַעֲקֹב, כִּי אִם-יִשְׂרָאֵל יִהְיֶה שְׁמֶךָ, וַיִּקְרָא אֶת-שְׁמוֹ, יִשְׂרָאֵל

Vayomer-lo Elohim shimkha Ya’akov lo-yikare shimkha od Ya’akov

ki im-Yisra’el yihyeh shmekha

vayikra et-shmo Yisra’el.

Et Dieu lui dit ton nom de Jacob ne sera plus nommé Jacob

Mais Israël sera ton nom

Et il nomma son nom Israël.

Au sens Pshat, le nom d’Israël est Yashar El : celui qui a réussi à réaliser la droiture de Dieu.

On a l’habitude de citer une autre explication : celui qui peut lutter avec/contre Dieu d’après le sens du verset, mais c’est une explication partielle, inexacte, puique le verset dit deux choses : celui qui peut lutter contre l’ange et les hommes. Mais dans Israël il n’y a pas la notion de lutte contre les hommes, alors on ramène la dimension du nom d’Israël à Yashar El pour dire l’homme qui a réussi à incarner littéralement « la droiture divine ».

Et cela s’oppose à Yaaqov : dont la racine est interprêtée par Essav lui-même dans les textes précédents [27:36] lorsqu’Esaü a perdu d’une part la Berokhah – l’aînesse – et d’autre part la Brakhah – la bénédiction – alors il dit en se plaignant à son père Isaac.

וַיֹּאמֶר הֲכִי קָרָא שְׁמוֹ יַעֲקֹב, וַיַּעְקְבֵנִי זֶה פַעֲמַיִם

Vayakveni zeh fa’amayim il m’a trompé…

Isaïe dans une de ses prophéties éclaire cela. « Il arrivera un jour où ce qui est tortueux deviendra droit ». וְהָיָה הֶעָקֹב לְמִישׁוֹר[Isaie 40:4].

On passe de Yaaqov à Yeshouroun, à travers Israël.

Yashar El c’est l’effort qui va de Jacob à Yeshouroun – nom ultime d’Israël qui indique l’idée de droiture.

Ce que dit le prophéte : tant que nous sommes dans les efforts de l’histoire immanente, il y aura des chemins tortueux. Mais finalement lorsque le but est atteint, alors le nom de Israël apparait, et de façon ultime le nom de Yeshouroun.  

Donc effectivement il arrive un certain stade où Jacob dans les apparences s’appelle Yaaqov dans le sens de Yéaqov ce qui est tortueux se voit confirmé dans son nom d’Israël, c’est-à-dire la droiture dans sa Midah du Emet, juste le contraire.

Cette phrase וַיַּעְקְבֵנִי זֶה פַעֲמַיִם  « vayakveni zeh fa’amayim et il m’a trompé celui- ci par deux fois » est dite par Esaü au moment où il arrive pour recevoir la bénédiction d’Isaac. Il avait demandé à son fils de lui préparer un repas pour le bénir à travers le goût de ce repas. Et voilà que Jacob sur les conseils de Rivqah a déjà préparé ce repas et le lui a apporté. Le texte dit que juste au moment où Jacob sort, Esaü est entré. Alors la marmite du repas de Jacob était encore là. Le Midrash dit qu’en disant  וַיַּעְקְבֵנִי זֶה פַעֲמַיִם  vayakveni zeh fa’amayim Esaü a désigné le chaudron, la marmite, par Zeh.

Effectivement, c’est par deux fois qu’il s’est fait avoir au cours d’un repas.

La première fois par le plat de lentilles.

La deuxième fois avec le chevreau.

Dans la division des tâches et objectifs d’Esaü et de Jacob dans le plan de Isaac, il fallait qu’un des deux jumeaux, qui à eux deux portent l’identité humaine, s’occupe des tâches matérielles. Ce sont les valeurs matérielles et terrestres qui nous donnent l’existence. Par conséquent, c’est en principe  Esaü qui devait savoir préparer à manger et donner un goût à la vie terrestre.  C’est ce goût-là qu’Isaac avait dans la bouche et qu’il imputait à Esaü.

Isaac pensait donner les bénédictions matérielles à Esaü parce qu’Esaü sait préparer à manger : une vie terrestre qui ait du goût. Or, on voit qu’Esaü a été disqualifié à ce niveau-là à cause du fait que Jacob a dû lui-même préparer à manger une deuxième fois. Il s’est avéré encore une fois que Jacob était aussi capable donc de donner ce goût de la vie terrestre et matérielle, qui était la prérogative en principe d’Esaü.

Il y a dans tout ce conflit deux équations possibles, indiquées par le fameux verset :

« La voix de Jacob et les mains d’Esaü »…

–  un homme du monde de la matière qui s’occuperait des tâches de l’esprit et c’est l’échec parce que le Shoresh ‘Homri rend impur le Roua’h. C’est l’homme des évidences matérielles qui s’occupe des tâches de l’esprit et donc l’esprit est rendu impur.

–  Alors qu’à l’inverse si l’homme de la vocation spirituelle qui s’occupe aussi des tâches matérielles alors la matière est sanctifiée, transfigurée. Et c’est Jacob qui a réussi à faire cette preuve qu’il est capable de faire à manger même pour Esaü. Esaü arrive à un stade où il ne peut plus avaler mais survient Jacob pour lui redonner le goût de la vie terrestre, matérielle.

Nous reverrons une autre péripétie de cette lutte entre Jacob et Esaü à deux niveaux : terrestre et céleste dans l’épisode suivant.

Il faut d’abord retenir ce passage important : il y a un apriori du critère de la victoire de l’homme en tant que créature, et finalement Jacob qui arrive à en faire la preuve qu’il est capable de s’affirmer dans son mérite d’être tant face aux réalités célestes et divines, qu’aux réalités terrestres proprement 

humaines. Et ceci finit par se cristalliser avec le génie d’Esaü. Pendant tout le temps de cette histoire il s’appelle Yaaqov et Yaaqov cela veut dire Aqov le talonneur celui qui attrapait déjà au moment de la naissance son frère au talon, et c’est effectivement ce que nous avons vécu : ce dont toute  l’histoire nous a accusé, mais en fin de compte il y a habilitation que c’est Jacob qui est Israël.

Jacob-Israël :

D’après le Méfarshim, alors que la mutation d’identité en Abraham par exemple est irréversible à partir du moment où Abram devient Abraham, celle de Jacob en Israël n’est pas forcément irréversible. Il peut y avoir des péripéties où Israël est de nouveau nommé Jacob. C’est en partie ce que dit le verset où « Dieu appelle Israël dans les visions de la nuit et lui dit : ‘Jacob, Jacob’ ». 

46 :2

וַיֹּאמֶר אֱלֹהִים לְיִשְׂרָאֵל בְּמַרְאֹת הַלַּיְלָה, וַיֹּאמֶר יַעֲקֹב יַעֲקֹב; וַיֹּאמֶר, הִנֵּנִי

Vayomer Elohim le-Yisra’el bemar’ot halaylah

Et Dieu dit à Israël dans les visions de la nuit

vayomer Ya’akov Ya’akov vayomer hineni.

 Et il dit Jacob, Jacob…

A propos de ce verset la Guémara enseigne que lorsque Jacob retombe de nouveau dans les péripéties+ de ce qui est traduit par les visions de la nuit alors il ne s’appelle plus Israël mais Jacob.

C’est dire qu’il peut y avoir dans le déroulement de l’histoire postérieure à cette réussite à l’échelle individuelle, de nouveau des péripéties où Israël se nomme de nouveau Jacob.

En particulier, le nom d’Israël en Galout c’est Jacob, et le nom de Jacob en Erets Israël c’est Israël.

Jacob est obligé d’entrer dans cette stratégie tortueuse, comme toute stratégie de lutte, contre l’adversaire représenté par Esaü.

A la limite, le thème qui apparait là et qui est très important, c’est tout ce débat qu’il y a déjà de notre temps entre juifs et israéliens qui se trouve cristallisé dans la tension et l’opposition entre ces deux termes : Jacob d’un côté et Israël de l’autre.

Mais il faut quand même lire le Pshat : c’est Jacob qui est Israël et non pas n’importe qui d’autre.

Et cet Israël peut avoir de nouveau les péripéties de ce que représente Jacob, bien qu’à l’échelle individuelle ce soit irréversible. Et cela signifie que tant que le conflit entre Israël comme nation et ce que représente Esaü, n’est pas achevé, alors il y a nécessité que Israël de nouveau prenne l’apparence de Jacob quand il est dans la lutte. Ce n’est que lorsque la lutte contre l’ange d’Esaü est achevée que le verset dit (32:32) : וַיִּזְרַח-לוֹ הַשֶּׁמֶשׁ « Et le soleil brilla pour lui » et qu’il est nommé Israël de façon définitive et irréversible.

Nous retrouvons là le fameux principe des péripéties des Avot, des patriarches, comme préfiguration de l’histoire d’israël dans son monde.

***

Caïn et Abel:

Nous allons finir le 1er verset de la Sidra, puisque le Midrash porte un jugement sur cette initiative prise par Jacob. C’est un jugement assez ambigu.

On va mettre en évidence d’une part la vertu d’humilité de Jacob qui s’adresse à Esaü en prenant l’initiative de la paix, alors que nous apprenons d’autre part qu’il y a un véritable conflit – qui deviendra conflit d’identité entre, d’une part, l’être issu de l’identité issue des Patriarches et qui peut réussir à devenir Israël, et puis d’autre part, l’être issu de cette même sélection d’identité mais qui lui représente l’échec.

Il y a deux tâches à résoudre ensemble, mais il y a une attitude de la volonté, une attitude de l’âme, qui fait qu’on est soit Esaü soit Jacob. C’est le problème de tout homme d’avoir simultanément à résoudre le mérite d’être au niveau matériel, au niveau du Kéli de l’être, au niveau du corps, et le mérite d’être au niveau de la vie spirituelle.

Et puis, cette tâche est déjà proposée au 1er homme : l’histoire humaine toute entière commence par ce problème : c’est le problème de Qaïn et de Hevel qui sont aussi des frères jumeaux qui ont eu à se répartir les tâches spirituelles (celles du berger) et les tâches matérielles (celles de l’agriculteur) au niveau où l’on prend le récit comme point de départ de l’histoire.

Mais cela est repris à l’intérieur de l’identité de la famille d’Abraham dans la perspective d’une solution. Au niveau de l’homme en général qui est Caïn ou Abel, il n’y a pas de solution, c’est le meurtre perpétuel. Mais au niveau de cette même histoire reprise dans l’identité de la famille d’Abraham, c’est alors dans la perspective d’une solution

Mais cette solution devient effective dans le récit à la génération postérieure au moment de l’histoire de Joseph.

C’est un Klal qu’ont enseigné les Kabalistes : il n’y a qu’une seule histoire que raconte toute la Torah dans ses Sipourim : le fait que l’on cherche un type d’homme où il n’y aurait pas cet échec permanent qu’il y a à partir de Caïn et d’Abel lorsque le frère tue le frère. Parce qu’il y a deux tâches contradictoires à résoudre ensemble, celle de la vie spirituelle et celle de la vie matérielle, et c’est cette équation-là qui est à l’origine de tous les conflits.

Et finalement, on voit qu’il y a échec perpétuel, on arrive à une humanité dont la régle est la violence perpétuelle et où le frère tue le frère : c’est l’histoire des guerres.

Jusqu’au moment où commence à émerger cette identité d’Israël avec Abraham. Avec Abraham et Loth, les deux frères antinomiques ne se massacrent pas. C’est la première fois qu’il n’y a pas de massacre avec le problème de Caïn et Abel. Cela commence déjà à s’arranger un peu.

A la génération suivante, l’histoire de Isaac et Ishmaël qui finalement arriveront à se reconcilier. C’est dire qu’il y a la Ra’hmanout déjà qui intervient entre les hommes. Mais ce n’est pas encore cela.

Et puis Jacob et Esaü au stade suivant…

Et puis au terme de toute cette sélection, on comprend pourquoi la bible fouille ce problème : elle a raconté le meurtre de Abel par Caïn très rapidement. C’est le problème de l’humanité, c’est le probléme qu’il y a à résoudre. Arrivé au niveau des patriarches, elle donne beaucoup plus de détails parce qu’il y a une solution qui se cherche. On sent que quelque soit les motifs de haine, et ils sont inexpiables, alors il y a déjà tentative. C’est cela le ‘Hidoush de l’identité humaine à partir d’Abraham. On commence déjà à entrevoir la possibilité d’une solution par l’amour du frère par le frère. Tous les problèmes humains se retrouve dans cette équation.

Ce n’est pas pour rien que Rabi Akiba a été le premier à dire, en citant Moïse, « Véahavtah léréakha kamokha, zeh klal gadol baTorah »

‘Hidoush: zeh klal shel gadol baTorah.

« Tu aimeras ton prochain comme toi-même, c’est un grand principe de Torah »

« Il faut être un grand dans la Torah pour arriver à aimer son prochain comme soi-même ».

Ce n’est pas simplement un grand principe dans la Torah parce qu’avec de grands principe on arrive nulle part. L’enfer est pavé de ces grands principes. Pour arriver à vivre, à réussir, ces grands principes, il faut être un grand dans la Torah.

Targoum : « Tu ne feras pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse ».

Mais on oublie toujours la fin de la citation qui nous apprend comment il faut faire cela. On oublie la fin de la citation par antisémitisme parce que la fin de la citation c’est toute la Torah et le Shoukhan Aroukh y compris, mais on se borne à citer le principe…

C’est à la génération de Joseph que l’on voit vraiment que la solution est arrivée et qu’il s’agit bien d’Israël. La haine qu’il y avait entre Joseph et ses frères était beaucoup plus grave que celle entre Caïn et Abel parce qu’elle était fondée sur le droit. C’est au nom de la vérité et au nom du droit, et non pas la haine qui procède de la méchanceté et du vouloir supprimer autrui, c’était vraiment la haine des Tsadikim entre eux. Chacun accusait l’autre d’être Rashâ au nom de la Torah ! C’est un procès. Chacun prend acte qu’en réalité il devrait être condamné à mort. C’est Yehoudah qui le dit lorsque Benjamin est attrapé par le piège que lui tend Joseph, alors Judah dit à Joseph : « la faute de tes frères a été dévoilé, met nous à mort c’est ton droit ». Alors Joseph ne peut pas et se met à pleurer : nous sommes arrivé au stade de la Ra’hamanout des frères pour les frères…

C’est parti à l’origine de l’agressivité pure et simple entre les personnes lorsqu’il n’y en a que deux pour que l’histoire commence et s’en suit toute une recherche pour arriver à fabriquer cette identité d’Israël où le problème trouvera sa solution au niveau des enfants de Jacob.

On voit comment la figure de Jacob apparait en gros plan pour indiquer cela : Jacob prend donc l’initiative de faire la paix avec son frère Esaü, quelque soit la haine qu’il y avait entre eux.

Le Midrash juge cette initiative comme ambigüe. Les uns louent la noblesse et l’humilité de Jacob et d’autres disent l’inquiétude de Dieu : la Shekhinah s’est mise à pleurer lorsque Jacob prend l’initiative de s’incliner devant Esaü, fusse pour obtenir la paix. Parce que ce qui est en jeu derrière le sort des personnes c’est le sort des valeurs. Et si Jacob qui est le héros de la vérité morale s’incline devant Esaü, fusse pour faire la paix, alors, et c’est l’autre partie du Midrash, la Shekhinah se met à pleurer parce que c’est risqué, c’est périlleux, c’est grave…

Il va s’agir d’une stratégie pour faire la paix, qui comme toute statégie est à deux niveaux, et c’est celle que Jacob adopte tant qu’il n’est pas reconnu du nom de Israël.

1er point :

Jacob veut faire la paix avec Esaü, et c’est très périlleux, dangereux.

32:4

וַיִּשְׁלַח יַעֲקֹב מַלְאָכִים לְפָנָיו, אֶל-עֵשָׂו אָחִיו, אַרְצָה שֵׂעִיר, שְׂדֵה אֱדוֹם

Vayishla’h Ya’akov mal’akhim lefanav

el-Essav a’hiv artsah Se’ir sdeh Edom.

Et Jacob envoya des malakhim devant lui

à Essav son frère, et direction de Séir champ de Edom.

32:5

וַיְצַו אֹתָם, לֵאמֹר, כֹּה תֹאמְרוּן, לַאדֹנִי לְעֵשָׂו:  כֹּה אָמַר, עַבְדְּךָ יַעֲקֹב, עִם-לָבָן גַּרְתִּי, וָאֵחַר עַד-עָתָּה

Vayetsav otam lemor koh tomrun ladoni le-Esav koh amar avdecha Ya’akov im-Lavan garti va’echar ad-atah.

Vayetsav otam lemor

Il leur ordonna en disant

koh tomrun ladoni le-Esav

ainsi vous direz à mon maitre à Esaü

koh amar avdekha Ya’akov

ainsi a dit ton serviteur Jacob

im-Lavan garti va’e’har ad-atah.

J’ai séjourné chez Laban et j’ai tardé jusqu’à présent

On remarque de suite le parallélisme puisque tout est répété deux fois.

32:6

וַיְהִי-לִי שׁוֹר וַחֲמוֹר, צֹאן וְעֶבֶד וְשִׁפְחָה; וָאֶשְׁלְחָה לְהַגִּיד לַאדֹנִי, לִמְצֹא-חֵן בְּעֵינֶיךָ

Vayehi-li shor vachamor

J’ai pour moi taureau et âne

tson ve’eved

troupeau et serviteurs

veshifchah va’eshlechah lehagid ladoni

et j’ai envoyé (sous-entendu une délégation) pour expliquer à mon seigneur

limtso-chen be’eyneycha.

Pour trouver grâce à ses yeux.

On voit bien qu’il y a une statégie de Jacob qui, comme le dit le Midrash, inquiète la Shekhinah.

Que fait Jacob ? Il risque de tout faire échouer. C’est périlleux.

32:7

וַיָּשֻׁבוּ, הַמַּלְאָכִים, אֶל-יַעֲקֹב, לֵאמֹר:  בָּאנוּ אֶל-אָחִיךָ, אֶל-עֵשָׂו, וְגַם הֹלֵךְ לִקְרָאתְךָ, וְאַרְבַּע-מֵאוֹת אִישׁ עִמּוֹ

Vayashouvou hamal’akhim el-Ya’akov lemor

banou el-a’hikha el-Essav

vegam hole’h likratkha

ve’arba-me’ot ish imo.

Et les anges sont revenus

Chez Jacob en disant 

Nous sommes allés chez ton frère chez Esaü

Et lui aussi vient à ta rencontre

Avec 400 hommes (de guerre) avec lui.

32:8

וַיִּירָא יַעֲקֹב מְאֹד, וַיֵּצֶר לוֹ; וַיַּחַץ אֶת-הָעָם אֲשֶׁר-אִתּוֹ, וְאֶת-הַצֹּאן וְאֶת-הַבָּקָר וְהַגְּמַלִּים–לִשְׁנֵי מַחֲנוֹת

Vayira Ya’akov me’od vayetser lo

vayachats et-ha’am asher-ito

ve’et-hatson ve’et-habakar vehagmalim lishneh machanot.

Et Jacob eut très peur et fut dans l’angoisse

Et il divisa le peuple qui était avec lui

Et les troupeaux en deux camps.

32 :9

וַיֹּאמֶר, אִם-יָבוֹא עֵשָׂו אֶל-הַמַּחֲנֶה הָאַחַת וְהִכָּהוּ–וְהָיָה הַמַּחֲנֶה הַנִּשְׁאָר, לִפְלֵיטָה

Vayomer im-yavo Essav el-hama’haneh ha’a’hat vehikahou

vehayah hama’haneh hanish’ar lifleytah.

Et il dit : « si Esaü vient sur le 1er camp et le frappe

Le camp restant sera rescapé ».

Le premier camp est désigné par le féminin הַמַּחֲנֶה הָאַחַת  Ma’haneh ha-a’hat, alors que le 2ème est donné au masculin : הַמַּחֲנֶה הַנִּשְׁאָר hama’haneh ha-nish’ar.

Rashi explique qu’en hébreu Ma’haneh peut se mettre au féminin ou au masculin. Il va plus loin et il dit que c’est le cas pour un certain nombre d’autres mots comme Shemesh, Roua’h…etc. des mots comme cela, on verra pourquoi.

32 :10

וַיֹּאמֶר, יַעֲקֹב, אֱלֹהֵי אָבִי אַבְרָהָם, וֵאלֹהֵי אָבִי יִצְחָק:  יְהוָה הָאֹמֵר אֵלַי, שׁוּב לְאַרְצְךָ וּלְמוֹלַדְתְּךָ–וְאֵיטִיבָה עִמָּךְ

Vayomer Ya’akov Elohey avi Avraham ve’Elohey avi Yitschak

Adonay ha’omer elay shouv le’artsekha oulemoladetekha ve’eytivah imakh

Et Jacob dit:

Dieu de mon père Abraham et Dieu de mon père Isaac

Hashem qui m’avait dit reviens à ton pays et à ta patrie

Et je ferais du bien pour toi. 

32 :11

קָטֹנְתִּי מִכֹּל הַחֲסָדִים, וּמִכָּל-הָאֱמֶת, אֲשֶׁר עָשִׂיתָ, אֶת-עַבְדֶּךָ:  כִּי בְמַקְלִי, עָבַרְתִּי אֶת-הַיַּרְדֵּן הַזֶּה, וְעַתָּה הָיִיתִי, לִשְׁנֵי מַחֲנוֹת

Katonti mikol ha’hasadim

oumikol-ha’emet

asher assita et-avdekha

ki vemakli avarti et-haYarden hazeh

ve’atah hayiti lishney ma’hanot

Je suis trop petit pour toutes les charités

Et pour toutes les vérités

Que tu as faites avec ton serviteur

Car c’est avec mon bâton que j’ai traversé ce Jourdain

Et maintenant je suis deux camps.

32 :12

הַצִּילֵנִי נָא מִיַּד אָחִי, מִיַּד עֵשָׂו:  כִּי-יָרֵא אָנֹכִי, אֹתוֹ–פֶּן-יָבוֹא וְהִכַּנִי, אֵם עַל-בָּנִים

Hatsileni-na miyad a’hi

 miyad Esav

ki-yare anokhi oto

pen-yavo vehikani em al-banim.

Sauve-moi de la main de mon frère,

De la main d’Esaü ,

Car j’ai peur de lui,

De peur qu’il vienne et ne me frappe mére sur les enfants.

32 :13

וְאַתָּה אָמַרְתָּ, הֵיטֵב אֵיטִיב עִמָּךְ; וְשַׂמְתִּי אֶת-זַרְעֲךָ כְּחוֹל הַיָּם, אֲשֶׁר לֹא-יִסָּפֵר מֵרֹב

Ve’atah amarta

heytev eytiv imakh

vessamti et-zar’acha kekhol hayam

asher lo-yisafer merov.

Alors que Toi Tu avais dit

Faire du bien Je ferai avec toi

Et je rendrai ta postérité comme le sable de la mer

Qui ne pourra pas être comptée en nombre.

Voilà le 1er texte, il y a toute une série de problèmes qui se pose même à la simple lecture.

Question centrale : dans le changement de nom entre Jacob et Israël, l’événement, la péripétie, était la lutte avec l’ange d’Esaü. Que représente cet ange d’Esaü ?

Un enseignement de la tradition nous enseigne que chaque génie humain posséde un correspondant dans le monde céleste qui est son représentant dans le tribunal d’En-haut. Toute cette histoire qui se déroule sur terre et qui est racontée dans les journaux, se développent en même temps dans le ciel pour ainsi dire, c’est-à-dire qu’il y a une récapitulation  au niveau des réalités divines de tout ce qui se passe dans l’immanence terrestre.

Cet enseignement nous vient d’un Midrash au sujet de l’éclatement de l’unité humaine après la civilisation de Babel : l’humanité qui était une a éclaté en 70 nations. En même temps apparait dans les réalités célestes divines ce qu’on appelle Familia Shel Maalah  la famille d’en-haut – ou le Beit Din Shel Maalah le tribunal céleste, suivant les textes, qui décrit à peu près la même réalité.

Un verset dit par exemple : véhaElohim ou véhaHashem suivant les cas au lieu de Elohim ou Hsahem directement, le Midrash nous dit  Hou ouBet Din : Dieu et son tribunal.

Le terme rabbinique Familia Shel Maalah désigne « la famille d’en-haut », l’ensemble des Sarim – les princes célestes – qui sont les génies des nations qui ont apparu sous formes partielles lors de l’éclatement de l’humanité en nations.

Il y a donc une espèce de providence pour les nations du monde qui passe à travers le génie propre à chaque nation. Il faut entendre ce terme de génie dans le double sens qu’il a en français : à la fois le génie au niveau des catégories immanentes, le génie d’un peuple, d’une ethnie, d’une culture et d’autre part le Génie au sens de prince céleste, le Sar de la Oumah (le prince du nation).

Le Midrash explique par exemple que lorsqu’une guerre éclate entre deux nations, leurs Sarim se font la guerre en-haut. C’est celui qui est le plus fort dont la nation triomphe sur le champ de bataille.

Il y a les paradoxes des petites nations résistant et tenant tête aux plus grandes nations. Cela dépend de la force du Sar céleste. Lorsqu’une nation a le droit pour elle-même, elle finit par triompher quelque soit sa force ou sa faiblesse réelle sur le terrain. Il y a ces guerres qui sont gagnées ou perdues pour des raisons d’ordre morale, quelque soit d’autre part la puissance militaire.

L’Indochine contre l’Amérique par exemple.

Le génie correspond à la nation elle-même mais au niveau de sa valeur spirituelle, au niveau de son génie propre.

En sociologie contemporaine, il y a une théorie suivant laquelle chaque nation se définit par un centre et une puissance. Un centre, un projet, une signification. Et une puissance. Le drame c’est que les nations ne se connaissent plus qu’au niveau des puissances et non plus au niveau des projets d’êtres, au niveau du centre de chaque manière d’être.

Dans notre problème, Jacob a à lutter avec Esaü et donc il doit lutter avec le génie d’Esaü.

Face D

…/…

Avec le Sar de Essav. Et le Sar de Essav c’est Satan.

Cf. la Guématria lorsqu’il s’agit de l’éventualité d’un Ben Rivqah qui ne s’appelle pas Yaaqov Ben Rivqah alors la Gématria donne Satan. (Ben Rivkah 52 + 307 = 359)

C’est ce que le Midrash dit que le Sar de Essav c’est le Satan lui-même.

Essav 376 a pour valeur numérique Na’hash ‘Haï serpent vivant = 358 + 18.

Le Satan en haut et le Na’hash en bas.

C’est ce que dit le verset Nombres 23 :23 :

כִּי לֹא-נַחַשׁ בְּיַעֲקֹב

« ki lo na’hash beYaaqov »
“il n’y a pas de serpent, en Yaacov” …
 puisqu’il est chez Essav !

Je vous garantie que ce n’est pas moi qui ait écrit le verset. Un Midrash enseigne d’ailleurs que Essav était né avec un Na’hash tatoué sur la hanche.

Pour en revenir à notre problème: Jacob doit donc lutter avec une manière d’être homme qui représente un potentiel spirituel considérable. Bien sûr un potentiel spirituel négatif, mais les contre-valeurs ont la même charge affective et spirituelle que les valeurs elles-mêmes. Il y a vraiment une puissance de nature divine bien que du côté du mal et contre laquelle il faut lutter. Une certaine manière d’être homme fait exister une certaine manière d’être ange correspondante contre laquelle Jacob doit lutter pour arriver à obtenir ce nom d’Israël et à finir par vaincre. Il va s’agir d’une lutte physique et spirituelle.

L’épisode par lequel Jacob obtient son nom d’Israël est celui où il finit par vaincre l’ange d’Esaü, donc le principe spirituel de ce que représente l’identité d’Esaü.  

A la limite, si vous voulez, en reprenant l’équation de base entre Jérusalem et la Rome païenne de l’empire romain de Titus ou Vespasien : Israël de l’époque, la Judée, a perdu la guerre militaire contre Rome mais elle a gagné la guerre spirituelle. D’ailleurs notre principale troupe de choc était les commandos chrétiens à l’intérieur de l’empire romain. (Les chrétiens comme diaspora d’Israël) La guerre n’est pas finie mais elle est gagnée parce qu’il ne reste plus rien de Rome de l’époque, sinon des statues,des musées, des livres, des universités… Mais la Judée de ll’époque n’a pas disparu puisque c’est nous ! Tandis que les Romains…

Cela veut dire qu’il a fallu lutter non pas seulement contre la manière d’être homme purement matérielle, physique, historique et immanente d’Esaü, mais contre son génie de civilisation. Et nous savons à quel point ce génie de civilisation est grand dans sa force, puisqu’il est Hokhmah par rapport à ‘Hokhmah.

Le Midrash raconte qu’Esaü était tellement fort qu’il arrivait à tromper Isaac. Isaac croyait qu’il était Tsadik.

Nous avons tous été à l’école occidentale : nous avons toujours été rempli d’admiration pour ce qu’on appelle le droit romain jusqu’à ce que l’on devient un peu plus adulte pour s’apercevoir qu’il est le contraire de la morale. Le comble est l’accusation de légalisme à l’encontre des Talmudistes alors que c’est précisément la Midah romaine. C’était une civilisation de type Essav

C’est ce que le Midrash disait déjà depuis 2000 ans: il explique qu’Esaü était capable au plus haut point de ce légalisme. Un spécialiste du pilpoul pour établir la Halakhah.

Il allait chez Isaac qui faisait semblant d’être aveugle et qui lui demandait ce qu’il avait appris à la Yéshivah : il répondait la dîme sur le sel… Il était donc capable d’établir une Halakhah pour le sel…

C’est le juridisme et le légalisme romain par excellence. Il trompait Isaac.

Un joli ‘Hidoush dans un verset de notre Sidra:

Quand Jacob a entendu que Esaü venait à sa rencontre pour lui faire la guerre avec 400 guerriers, alors le texte dit 32:8 :

וַיִּירָא יַעֲקֹב מְאֹד, וַיֵּצֶר לוֹ

Vayira Ya’akov me’od vayetser lo

Et Jacob eut très peur et fut dans l’angoisse.

Rashi sur Vayishla’h 32:8 cite le Midrash:

וַיִּירָא וַיֵּצֶר

( וַיִּרָא שֶׁמָּא יֵהָרֵג. וַיֵּצֶר לוֹ אִם יַהֲרוֹג הוּא אֶת אֲחֵרִים. (ס”א שֶׁמָּא יַהֲרוֹג אֲחֵרִים וְעוֹד גִּירְסוֹת אֲחֵרוֹת וְצָרִיךְ עִיּוּן בַּמִּזְרָחִי הָהֶפְרֵשׁ שֶׁבֵּינֵיהֶם

Ya’aqov s’effraya beaucoup, il fut angoissé 

 Il s’est effrayé à l’idée d’être tué, et il a été angoissé à celle de devoir tuer d’autres-A’herim (Beréchith raba 76, 2).

Il a eu peur d’être tué et l’angoisse de devoir tuer les autres a’herim. Il y a répétition dans le verset.

Un exemple des répétitions dans ces versets.

Le Gaon de Vilna pose un Koushiah là-dessus : « pourquoi ne pas écrire : il a eu peur de tuer son frère ? Et pourquoi est-il dit la peur d’avoir à tuer les autres a’herim ? quels autres ? 

Dans la logique même du Midrash, il a eu peur d’être tué et il était dans l’angoise d’avoir á tuer son frère, alors que signifie A’herim ?

Il répond en citant le principe talmudique à propos d’un très grand maitre de la Mishna : Stam Mishnah Rabbi Méïr.

Et Rabbi Méïr est un converti qui est venu de Edom-Rome. D’ailleurs un Klal de la Guémarah explique que la majorité des convertis viennent du christianisme.

Rabbi Méïr, nous dit le Midrash, était donc inclus dans la Neshamah de Essav : C’était le koa’h de la Torah shébéalpeh : Stam Mishnah Rabbi Méïr.

Par conséquent, lorsque le verset dit d’Isaac qu’il aimait Essav parce qu’il avait le goût du gibier dans la bouche, le Midrash dit : il avait dans la bouche une proie, c’était le Neshamah de Rabbi Méïr. Essav parlait avec l’âme de Rabbi Méïr lorsqu’il faisait du Pilpoul avec son père.

Alors Jacob a eu peur de tuer Rabbi Méïr ! Parce que Halakha ké a’herim zeh Rabbi Méïr.

C’est ce que dit Rashi. Il a eu peur de tuer A’herim.

C’est effectivement la grande différence entre la ‘Hokhmah du droit et la Torah. La ‘Hokhmah du droit est la prérogative des Romains. Lorsqu’elle est pure, kashere, alors elle devient Torah. Et le Koa’h de la Mishnah nous vient de Essav. Mais lorsque cette ‘Hokhmah vient en Israël et qu’elle devient Torah. Il y avait ce Koa’h de la Torah shébéalpéh dans le génie de Edom, dans sa Neshamah.

Ceci pour illustrer le fait que ce combat de Jacob contre Esaü n’est donc pas simplement la lutte au niveau des réalités purement terrestres. Il fallait que Jacob arrive à lutter contre une réalité divine, c’est-à-dire le visage que la divinité elle-même tourne vers cette manière d’être homme qu’est Esaü.

Il faut comprendre cela à l’intérieur de la cohérence du monothéisme absolu. C’est qu’il y a un aspect du projet de l’homme, dans la représentation que Dieu lui-même s’en fait, qui concerne la manière d’être les valeurs de cette civilisation-là, les valeurs de ce génie-là. Il fallait lutter contre cela et être capable de cette guerre-là. C’est lorsque Jacob a réussi cette lutte qu’il est nommé Israël.

Dans le début de la Sidra on voit que Jacob veut faire la paix avec Esaü. Il va échoué.

Esaü a une stratégie corrolaire qui consiste à faire semblant de faire la paix

Il va échouer mais dans son initiative il veut faire la paix avec Esaü et par conséquent il faut aussi qu’il fasse la paix avec l’ange d’Esaü. C’est pourquoi toute cette mission que le début de la Sidra raconte est racontée à deux niveaux. Il se prépare à deux paix simultanées, et comme cela échouera il aura à lutter deux guerres différentes.

D’abord occupons-nous du premier point : La mission des deux paix.

Simultanement, il offre la paix à Esaü en bas sur terre et au génie d’Essav en haut dans le ciel.

On comprend mieux maintenant les termes des versets :

32:4

וַיִּשְׁלַח יַעֲקֹב מַלְאָכִים לְפָנָיו, אֶל-עֵשָׂו אָחִיו, אַרְצָה שֵׂעִיר, שְׂדֵה אֱדוֹם

Vayishla’h Ya’akov mal’akhim lefanav

el-Essav a’hiv artsah Se’ir sdeh Edom.

Et Jacob envoya des malakhim devant lui

Vers Essav son frère, en direction de Séir champ de Edom.

Il y a deux réalités dans cette expression : Essav le chef de ce Na’hash ‘haï, le Satan. Et en bas son frère sur terre. Il faut comprendre que ce sont vraiment deux frères. Nous l’avons étudié la semaine dernière, je vous ai dit un peu de façon brutale : comme le bébé et son placenta au moment de la naissance. Il y a la même intensité d’être des deux côtés. Ce sont vraiment deux civilisations sœurs, qui ont été entremêlées à travers toutes leurs péripéties de l’histoire à travers les siècles. Mais cela commence là à l’origine.

אַרְצָה שֵׂעִיר artsah Se’ir c’est en haut

שְׂדֵה אֱדוֹם sdeh Edom  c’est en bas

32:5

וַיְצַו אֹתָם, לֵאמֹר, כֹּה תֹאמְרוּן, לַאדֹנִי לְעֵשָׂו:  כֹּה אָמַר, עַבְדְּךָ יַעֲקֹב, עִם-לָבָן גַּרְתִּי, וָאֵחַר עַד-עָתָּה

Vayetsav otam lemor koh tomrun ladoni le-Esav koh amar avdecha Ya’akov im-Lavan garti va’echar ad-atah.

Vayetsav otam lemor

Il leur ordonna en disant

koh tomrun ladoni le-Esav

ainsi vous direz à mon maitre à Esaü

לַאדֹנִי לְעֵשָׂו

ladoni c’est pour en haut.

le-Esav c’est pour en bas.

koh amar avdekha Ya’akov

ainsi a dit ton serviteur Jacob

עַבְדְּךָ יַעֲקֹב

avdekha c’est quand il parle à en-haut.

Ya’akov c’est quand il parle à en-bas.

עִם-לָבָן גַּרְתִּי, וָאֵחַר עַד-עָתָּה

im-Lavan garti va’e’har ad-atah.

J’ai séjourné chez Laban et j’ai tardé jusqu’à présent

im-Lavan garti c’est quand il parle à en-bas.

va’e’har ad-atah c’est quand il parle à en-haut.

Rashi sur Vayishla’h Ya’akov mal’akhim lefanav : Et Rashi nous dit : malakhim mamash

Le texte nous dit que Jacob a envoyé des Malakhim cela veut dire des anges. Et Rashi nous dit qu’il s’agit vraiment d’anges, Malakhim mamash ! C’est un Rashi difficile.

Si le texte déjà précise que ce sont des Malakhim, pourquoi Rashi indique que ce sont des Malakhim mamash ? Que veut-il expliquer ? Quelle est la difficulté ?

Pour ne pas perdre de temps, allons directement à la source de ce Rashi qui est un Midrash Rabba qui expose une controverse, une Ma’hloqet : certains disent qu’il s’agit de shilou’hey bassar vadam « des envoyés de chair et de sang » et d’autres disent malakhim mamash « des anges vraiment ».

Nous savons que les deux parties de cette controverse ont raisons puisqu’il y a deux guerres et donc deux missions de ces envoyés : vis-à-vis d’Essav sur terre et vis-à-vis du Sar de Essav au ciel.

Par conséquent, dans le texte le mot de Malakhim signifie les deux choses. Il reste à comprendre pourquoi une opinion du Midrash met l’accent sur le fait que le ‘Hidoush c’est qu’il s’agit des shilou’hey bassar vadam, et l’autre partie du Midrash met l’accent sur le fait que le ‘Hidoush c’est qu’il s’agit des  malakhim mamash.

En fait nous voyons bien d’après l’introduction précédente qu’il a envoyé et des  shilou’hey bassar vadam « des envoyés de chair et de sang » et des malakhim mamash. Pour d’adresser au Sar il faut envoyer des Malakhim. Cela veut dire qu’il en dispose. Et pour s’adresser à Essav il faut envoyer des shilou’hey bassar vadam.

Et d’ailleurs dans la réponse, je vous signale en passant rapidement un des versets :

Dans la réponse de ces Malakhim qui ne sont même pas arrivé jusqu’à Essav, ils sont revenus prévenir Jacob. Ils disent :

Verset 32 :7

וַיָּשֻׁבוּ, הַמַּלְאָכִים, אֶל-יַעֲקֹב, לֵאמֹר:  בָּאנוּ אֶל-אָחִיךָ, אֶל-עֵשָׂו

וְגַם הֹלֵךְ לִקְרָאתְךָ, וְאַרְבַּע-מֵאוֹת אִישׁ עִמּוֹ

Vayashouvou hamal’akhim el-Ya’akov lemor banou el-a’hikha el-Essav

vegam hole’h likratkha ve’arba-me’ot ish imo.

Et les anges sont revenus

Chez Jacob en disant 

Nous sommes allés chez ton frére chez Esaü

Et lui aussi vient à ta rencontre

Avec 400 hommes avec lui.

וְגַם הֹלֵךְ לִקְרָאתְךָ

vegam hole’h likratkha…

Ce terme de Gam lui aussi introduit le Sar de Essav. Pas seulement Essav, mais même le Sar de Essav vient contre toi.

Le Midrash rapproche ce Gam d’un verset de Job au début du livre quand tous les anges se rassemblent pour parler de Job, le verset dit : Vayalo Gam HaSatan Betokham est venu même le Satan avec eux … Alors le Midrash conclu que Gam c’est le Satan…

Effectivement, Jacob selon le verset a donc envoyé des shilou’hey bassar vadam pour parler à Essav et des malakhim pour parler au Sar de Essav. Ces Malakhim comme nous le verrons tout-à-l’heure sont les mérites de Jacob.

En réalité la Mal’hoquet du Midrash indique les deux aspects complémentaires du même enseignement.

Le Midrash nous dit ceci:  

32:4 וַיִּשְׁלַח יַעֲקֹב מַלְאָכִים  Vayishla’h Ya’akov mal’akhim Et Jacob envoya des malakhim

Où est le ‘hidoush ? Le fait qu’il envoie des « envoyés de chair et de sang », cela va de soi, donc le ‘Hidoush c’est qu’il envoit aussi des malakhim mamash. Cela c’est pour l’opinion que retient Rashi

Mais l’autre opinion du Midrash : le fait qu’il envoit des malakhim mamash cela va de soi, et donc le ‘hidoush c’est qu’il envoit aussi des shilou’hei bassar vadam.

C’est là que nous retrouvons notre 1er Midrash, la première introduction que nous avons eu : tantôt le Midrash loue Jacob de cette initiative, c’est lorsqu’il s’adresse en haut, et tantôt il s’en étonne, c’est lorsqu’il s’adresse à Essav en bas.

Rappelez-vous de la règle d’explication:

Rashi explique pour son temps, il explique la Torah qui a été donnée aux Hébreux pour les Juifs.

Le sens Pshat de la Torah donnée aux hébreux, c’est pour le temps des Hébreux, mais Rashi vient nous donner le sens de ce même texte pour le temps des Juifs. Quelle est la différence ? C’est d’abord une différence d’époque, mais surtout le contenu de ces époques. Le temps des Hébreux est celui de la révélation, et où il y a prophétie. Le temps des Juifs c’est le temps de ce même Israël lorsqu’il n’y a plus prophétie.

De l’intérieur de cette règle général, il ne faut pas oublier que Rashi a été le principal commentateur alors qu’il était en plein dans ce conflit Jacob-Esaü, en plein dans la controverse entre les communautés juives d’Europe et la civilisation ambiante, déjà romaine. Rashi cite du Midrash ce qui va pour l’enseignement de la Torah pour les Juifs auquels il parle, lui, Rashi. Rashi c’est la Torah pour le temps des Juifs. Raison pour laquelle on considère Rashi presqu’aussi Qadosh que le texte de la Torah lui-même. Une grande autorité comme le Shla’h (dans son Massekhet Shavouot) nous a révélé que le texte de Rashi a été donné avec le Roua’h HaQodesh.

Les élèves de Rashi : « Il est resté plus de sagesse dans la goutte d’encre qui a séché dans le koulmos de Rashi qu’il n’y a de vague dans l’océan » (Cela veut dire qu’il y a plus dans ce qu’il n’a pas écrit que dans ce qu’il a écrit).

Rashi : pour nous qui lisons ce texte, c’est l’opinion du Midrash qui dit Malakhim Mamash. C’est dire que ce n’est plus le cas ou l’on enverra des émissaires Shilou’hei Bassar Vadam – quand le congrès juif mondial envoie une délégation au Vatican – mais c’est le stade où il faut envoyer Malakhim Mamash au Sar Shel haEssav pour essayer  de faire la paix.

Mais cela reste difficle, parce que dans le fond même de ce Midrash le texte biblique dit Malakhim. Tout ce que le Midrash nous dit, le texte l’avait déjà dit !

Je crois qu’on peut s’approcher de ce problème avec l’aide de cette clef que nous donne le Midrash qu’il y a deux récits paralléles qui s’entremêlent : dans l’un, Jacob est aux prises avec le Sar de Essav, et dans l’autre Jacob est aux prises avec Essav lui-même.

La question importante soujacente au problème:

Pourquoi ne se battent-ils pas au niveau des Sarim ?

Israël n’a t’il pas de Sar qui se battrait pour lui en haut ?

Il faut savoir qu’Israël n’a pas de Sar.

Parce que c’est Dieu lui-même qui est le Sar d’Israël !

C’est ce que dit le verset où Dieu parle à Israël en lui disant [Jer. 7:23 – Ezech. 36:28]

וְהָיִיתִי לָכֶם לֵאלֹהִים, וְאַתֶּם תִּהְיוּ-לִי לְעָם

 « et Moi Je serai pour toi un Dieu »
C’est Dieu qui parle à Israël en lui disant : « Et moi Je serais pour toi un Dieu »

Cela veut dire dire qu’Israël n’a pas de Sar. Cela veut dire Eïn mazal léIsraël.

[« Eïn mazal le Israël que le Rav Askénasi Za’l nous expliquait ainsi “eïn” fait allusion à “Eïn Sof” l’infini, le divin. Dieu est le “mazal“, le “signe zodiacal” d’Israël. Il n’y a pas d’intermédiaire entre le peuple juif et Dieu qui régit directement sa destinée à travers une Providence divine particulière pour pouvoir lui faire accomplir sa fonction universelle ». Monique Schönberg  ]

Chaque nation est une des manières d’être homme qui est le résultat de l’éclatement de l’unité humaine à Babel. Et chacun des Sarim représente un des Goyim, c’est-à-dire une des manière partielle de cette tentative humaine d’incarner le Tselem Elohim.

Israël n’a pas de Sar, Israël n’est pas un parmi les Goyim qui aurait une figure, que l’on pourrait représenter en idôle d’ailleurs. Israël c’est le projet du Créateur lui-même.

Et par conséquent il n’y a pas de Sar qui corresponde à Israël.

C’est pourquoi Jacob doit se débrouiller tout seul, et c’est la seule manière d’être homme qui est capable de cela : de lutter au niveau des réalités terrestres et au niveau des réalités célestes.

C’est pour cela qu’Israël engendre la panique à travers l’histoire, parce qu’il est capable de lutter au niveau des Sarim, il est capable de lutter contre les Génies de l’histoire, et pas seulement contre les hommes dans l’histoire.

A compléter avec l’enseignement important de la Guémara : « Eïn mazal leIsraël ». Israël n’a pas de Sar, Israël n’a pas de mazal. Mais la Guémara précise les cas : si Israël est vraiment Israël, alors il n’a pas de Sar. Si Israël n’est pas vraiment Israël, alors il y a un Sar pour Israël. Mais ce Sar pour Israël est un Sar un peu spécial, ce n’est pas n’importe lequel : les Sarim sont les archanges dont parle le livre de Daniel. Mais l’un d’entre eux est spécial c’est Mikhaël.  Mikhaël qui signifie « Qui est comme Dieu ».

Cela veut dire que chaque fois qu’Israël se fabrique un Sar, le Sar n’a qu’une chose à lui dire: regarde plus haut : Mi – ka – El !

Ce qui est frappant c’est que dans la théologie chrétienne, lors de la distribution des archanges aux nations, elle a donné l’archange Saint-Michel à la France et à l’Eglise.

Il y a eu d’ailleurs au début de l’histoire chrétienne toute une série d’hérésies venues du fait que le messie des chrétiens était nommé Mikhaël. Il y a eu des églises hérétiques (et qui le sont devenues parce que les autres ont triomphé) qui reconnaissaient le messie non pas comme le fils de Dieu mais comme le prince des anges, c’est-à-dire Mikhaël.

C’est très important parce que c’est une ‘Hokhmah de la théologie chrétienne, catholique en particulier, qui va s’attribuer comme tel comme substitut d’Israël, l’archange d’Israël. C’est une

profonde ‘Hokhmah parce que cela veut dire que l’Eglise sait qu’elle représente un « Israël » qui n’est pas Israël puisqu’elle s’attribue comme archange Mikhaël.

La France, fille ainée de l’Eglise et le fils ainé de Dieu…  avec des fiançailles espérées.

Mais c’est quand même en France qu’il y a eu l’abbé Grégoire, enfin je veux dire que s’est produite tout de même d’une part l’émancipation et d’autre part Herzl le sionisme au départ de l’affaire Dreyfus. C’est de France qu’est parti tout cela. L’émancipation après la révolution française et le sionisme après l’affaire Dreyfus.

Israël n’a pas de Sar, il a un avocat qui plaide pour lui, c’est Mikhaël, mais Mikhaël en quelque sorte n’a pas d’équation personnelle. Il n’est là que comme relai vis-à-vis du Créateur lui-même.

Voilà pour ce thème et je voudrais l’éclairer par un Rashi très connu.

***

Rashi : 68

Sur le verset 32:7:

עִם-לָבָן גַּרְתִּי, וָאֵחַר עַד-עָתָּה

 im-Lavan garti va’e’har ad-atah.

1- Rashi commence par se demander ce que signifie « j’ai séjourné im Laban Garti »

Jacob va expliquer à Esaü pourquoi il a tardé jusqu’à présent.

Je ne suis pas devenu important, prince, noble, puisque j’étais comme un Guer chez Laban. Par conséquent, tu n’as plus à me haïr à cause de la bénédiction de ton père.

Voilà la première explication de im-Lavan garti j’ai séjourné chez Laban. En hébreu cela veut dire inférieur, Garti, comme un étranger qui n’était pas chez lui. Et par conséquent ne va pas croire que je t’ai pris cette bénédiction: en fait mon histoire n’est pas celle dont tu m’accuses. C’est effectivement l’accusation classique contre le peuple juif, « peuple sûr de lui et dominateur »… alors qu’en réalité nous avons été des métèques partout. C’est ce Rashi-là.

2- Rashi ajoute Davar A’her, une deuxième explication Béguématria : la valeur de guématria de Garti est Tariag soit 613 allusion aux 613 Mitsvot : Bien que j’aie séjourné chez Laban, le Rashâ, malgré cela je n’ai pas appris sa conduite, et j’ai pu préserver Shamarti les 613 commandements.

Ce que effectivement Israël peut dire en sortant des civilisaitons épouvantable qui lui ont fait la guerre contre la Torah pendant 2000 ans et malgré cela, nous sommes revenus avec nos Guémarot.

Exactement ce que dit Rashi-là. …Shamarti. Alors on voit très bien l’intention du commentaire : l’une des parole concerne le discours de Jacob à Essav son frère sur terre, et l’autre concerne le discours de Jacob à l’ange d’Esaü. Il lui dit : « à nous deux !» parce que j’ai eu l’épreuve la plus dure : traverser la civilisation blanche – Im Laban Garti – et j’ai malgré tout conservé les 613 Mitsvot. Cela il fallait le faire !

Je vous donne un deuxième Midrash sur la fin du verset.

 וָאֵחַר עַד-עָתָּה

Et j’ai tardé jusqu’à présent.

Le Midrash dit que Jacob veut expliquer à Esaü pourquoi il a autant tardé. L’initiative qu’il y a ici est de faire la paix avec Esaü. Et c’est toute cette ambiguïté du jugement du Midrash au sujet de l’initiative de Jacob de faire la paix avec Esaü : la grandeur de Jacob qui veut malgré tout faire la paix avec Esaü qui est son frère, et d’autre part l’échec que cela risque de représenter lorsque l’on voit Israël arriver au bout de cette histoire si terrible et puis qui joue à courtiser la civilisation Goy.

C’est ce qui se passe à travers 2000 ans. Et depuis l’émancipation on a cru à « nos ancêtres les Gaulois ». 

Si l’initiative c’est de faire la paix, il faut donc d’après ce Pshat, qu’il explique à Esaü pourquoi il a tellement tardé. Après tout, si on voulait offrir la paix à la civilisation d’Edom pourquoi cela a-t’il duré 2000 ans ?

Alors le Midrash nous dit :

וָאֵחַר עַד-עָתָּה va’e’har ad-atah Et j’ai tardé jusqu’à présent.

Jusqu’à quand Jacob a t’il tardé avant de décider de son retour ?

Jusqu’à ce que Joseph soit né ! 

C’est ce que le Midrash dit : וָאֵחַר עַד-עָתָּה va’e’har ad-atah et j’ai attendu jusqu’à présent, parce que Joseph n’était pas encore né !

Maintenant que Joseph est né, je peux venir à la rencontre d’Esaü. Puisque la force de Jacob par rapport à Esaü, c’est Joseph. Sitno shel Essav

Le Midrash complète en disant qu’il faut rapprocher ce Atah d’un autre Atah, qui se trouve dans le verset de Devarim chapitre 10 verset 12, le verset où la Torah y enseigne la loi de la Teshouvah :

Ve atah Israël ma Hashem shoel…

וְעַתָּה, יִשְׂרָאֵל–מָה יְהוָה אֱלֹהֶיךָ, שֹׁאֵל מֵעִמָּךְ:  כִּי אִם-לְיִרְאָה אֶת-יְהוָה אֱלֹהֶיךָ לָלֶכֶת בְּכָל-דְּרָכָיו, וּלְאַהֲבָה אֹתוֹ, וְלַעֲבֹד אֶת-יְהוָה אֱלֹהֶיךָ, בְּכָל-לְבָבְךָ וּבְכָל-נַפְשֶׁךָ

Ve’atah Yisra’el mah Adonay Eloheycha sho’el me’imach ki im-leyir’ah et-Adonay Eloheycha lalechet bechol-drachav ule’ahavah oto vela’avod et-Adonay Eloheycha bechol-levavcha uvechol-nafshecha.

Quel est ce Atah ? Véatah Israël ! Jacob a du attendre jusqu’au moment où le Koa’h de la Teshouvah pouvait apparaître. Vous comprenez le rapport des deux versets.

וָאֵחַר עַד-עָתָּה va’e’har ad-atah Et j’ai tardé jusqu’à présent.

Cela veut dire que tant qu’il n’y a pas cet effort de Teshouvah qui s’est fait en Jacob, il lui était incapable de décider de revenir. Et Téshouvah cela veut dire le retour, littéralement.

Joseph est le Messie qui ramène les Juifs de diaspora, c’est Mahia’h ben Yossef et Judah est le Messie de la transfiguration pour le monde à venir, c’est Mashia’h ben David.

Ne vous trompez pas, Joseph n’est pas du tout le mashia’h qui s’installe dans la diaspora, cela c’est le juif qui est déchu, assimilé. Joseph est celui-là qui ramène même les ossements en Israël, pour ne pas laisser de trace. Nous retrouverons ce thème dans l’histoire de Joseph plus tard.

Enseignement de Rabenou Yossef :

On peut indiquer que Rashi a choisi l’explication de Malakhim Mamash parce qu’effectivement c’est Jacob qui dispose de cette force du Malakh. Le Malakh c’est cette réalité d’en-haut qui apparait dans la relation entre le projet de Dieu et ce que l’homme en fait. Chaque réalisation est régie par un Malakh – c’est-à-dire l’envergure de la volonté du Dieu unique pour la réalisation en question. L’exemple le plus simple donné par les textes: tous les noms des Malakhim se déclinent par la terminaison en El, c’est-à-dire le nom de Dieu lui-même, la volonté de Dieu lui-même, mais en tant qu’elle est désignée et concernée par tel ou tel aspect de la réalité. Par exemple, Raphaël c’est Dieu s’occupant de guérir la maladie.

Par conséquent, le Malakh c’est la diminution d’envergure de la volonté d’Hashem (Tsimtsoum) pour tel ou tel événement. On apprend de ces textes-là que Jacob dispose des Malakhim. Il est arrivé à un stade de l’identité humaine où il y a effectivement relation dévoilée entre le projet de Dieu et sa réalité à lui Jacob. Et dans les deux sens. Le rêve qu’il voit de l’échelle décrit des Malakhim qui montent et qui descendent. Du Kéli vers le Or et du Or vers le Kéli.

Shem Havayah 26 + Adonaï 65 = Malakh 91.

Yâaqov 182 = 2 x Malakh 91 = 182

Mais ce que les Méfarshim enseignent c’est que Malakhim est un pluriel, deux en est la quantité minimale, et effectivement Jacob dispose de cette réalité du Malakh dans les deux sens : de haut-en-bas et de bas-en-haut. Parce que la valeur numérique de Jacob est égale à deux fois celle de Malakh.

Ben Ish ‘Haï:

Dans l’enseignement du Ben Ish ‘Hay on retrouve le même thème.

Dieu s’adresse à Jacob pour lui dire ton nom Jacob ce ne sera plus qu’un nom occasionnel :

«Ton nom Jacob ne sera plus encore Jacob

Mais Israël sera ton nom

Alors il le destina à être Israël. »

Dieu confirme que c’est Jacob qui peut être le véhicule, le support, de cette identité qui est Israël et pour qui le monde a été créé.

Je ovus dit souvent que n’importe quelle lignée humaine aurait pu devenir Israël. Jacob est cette lignée humaine qui a pu le devenir, alors il a reçu ce nom Israël. Et il se dévoile aposteriori que c’est pour lui que le monde a été créé. Cela prouve qu’il était Qadosh dès l’origine, dès la racine, depuis la racine, puisque c’est lui qui a pu réussir.

« On peut comprendre de cette manière le surplus de signification du nom d’Israël que Dieu lui a donné. C’est le fait que le nom Israël équivaut à Jacob, Mosheh et David. »

Par conséquent, le surplus – ce Yitron – dans Israël, c’est ce que représente Mosheh et David.

Voyez l’équaiton qui se met en place : Israël a la même valeur numérique que Jacob + Mosheh + David. Or, Jacob c’est Israël donc ce qu’il a de plus en Israël c’est Mosheh et David.

Jacob est l’engendreur d’Israël, c’est le père. Mosheh est le maître. David est le roi

Il y a trois fonctions qui ensemble font Israël et qui sont d’ailleurs toutes trois des fonctions messianiques.

Mais comprenez bien que Israël c’est plus que Jacob, en ce sens que Jacob fabrique le Kéli, la Oumah, la nation d’Israël ; mais il resterait Jacob comme Kéli pure tant que il ne reçoit pas ce que Moïse lui a donné et ce que David a confirmé. Le fait que Moïse ait donné la Torah et que David ait rendu la Torah souveraine sur Israël. On apprend que ces deux fonctions-là sont reconnus à Jacob à l’échelle individuelle. Mais en tant que Jacob, il est l’engendreur du peuple, mais en tant qu’Israël il porte aussi en germe et Mosheh et David. Ce sont les 3 fonctions pour qu’Israël puisse être Israël.  
« Parce que ces trois Tsadikim Jacob Mosheh David sont vraiment unifiés ‘hibour »

Si l’on regarde la situation contemporaine on s’aperçoit que ces trois forces-là, Jacob, Moïse et David, existent mais séparément. D’où le Balagam qu’il y a.

Quand ces trois-là seront bé’hibour alors effectivement Israël sera Israël.

Parce que Yaaqov, Mosheh et David ensemble représentent la réussite des Kélim des deux dernières lettres du Nom de Dieu, Vav et Hé.

Le Shem Havayah Youd-Hé-Vav-Hé déploie la souverainté de Dieu sur le monde et ses deux dernières lettres représentent un ensemble de valeurs qui ont été précisément réussies dans l’histoire par Jacob, Moïse et David.

Q : est-ce le Hé d’Abraham ?

R : Le Hé d’Abraham c’est le premier du Olam HaBriah : Véhibaréam – Véhébaream. C’est le Hé de Binah. Ici c’est le 2ème qui désigne Malkhout.

Précision de vocabulaire :

Avant toutes les Mitsvot, nous disons une formule de préparation à la Mitsvah que la Mitsvah va être faite dans l’intention d’unifier Youd-Hé et Vav-Hé.

Leshem Yi’houd Qoudsha Brikh Hou ouShékhinteih

Cela veut dire : Nous allons agir par cette Mitsvah et tenter de réaliser cette valeur en vue d’unifier Qoudsha Brikh Hou ouShékhinteih – Dieu et sa Présence. C’est en araméen.

C’est dire qu’il y a un projet divin nommé dans le nom Youd-Hé, c’est le Olam de ‘Hokhmah et Binah comme disent les Kabalistes, c’est-à-dire la vision abstraite et parfaite apriori de ce que l’être doit faire. C’est dans ce Youd et dans le Hé. Youd au niveau de la vision de ce qu’il y a à faire, et Hé du monde qui le fera. C’est-à-dire qu’il y a un Olam de Youd-Hé qui est le Olam supérieur, qui est le Olam du projet que Dieu se représente. Notre monde est parfait déjà au niveau du projet. 

Par exemple, lorsque nous disons Allélouyah : Alélou Yah = louez Yah : cela signifie que nous pouvons déjà louer le nom de Dieu au niveau des 2 premières lettres Youd-Hé par ce que là c’est déjà parfait, puisque c’est la vision du projet. Et cette vision du projet est parfaite et elle sera donnée à la réalisation. Alors le Youd descend et devient un Vav, et le Hé d’en-haut se retrouve dans le Hé d’en-bas.

Alors Vav et Hé ce sont les mondes, les Olamot de Yetsirah et de Assiah, les mondes de l’incarnation des valeurs qui sont en germe dans le Youd-Hé.

Tant que dure l’histoire du monde tout se passe comme si Youd et Hé sont séparés de Vav et Hé.

Alors, faire une Mitsvah signifie unifier la vérité avec la réalité. Le monde de la réalité, en cours d’histoire, c’est Vav et Hé. Le monde de la vérité c’est Youd et Hé. Alors faire une Mitsvah, c’est unifier le monde de la vérité et le monde de la réalité. C’est cela Torah.

Dans toutes les cultures, le monde de la vérité est en haut et il reste en haut ; et le monde de la réalité est en bas et il reste en bas. Et il y a vraiment un renoncement à l’idée qu’on pourrait unifier, qu’on pourrait faire descendre la vérité dans le monde de la réalité ou faire monter la réalité dans la vérité.

C’est là ce Sod de :

Leya’hed Qoudsha Brikh Hou= Youd-Hé  

Veyi’houd Shakhen = Vav Hé

l’union de Dieu de sa Shekhinah.

Et il y a un verset qui le dit en Pshat [Zakariah 14:9]:

בַּיּוֹם הַהוּא, יִהְיֶה יְהוָה אֶחָד–וּשְׁמוֹ אֶחָד

Bayom hahou Yiyeh Hashem e’had oushmo e’had

En ce jour-là Il sera Hashem Un et son nom Un

Yiyeh cela veut dire « il sera » : le Shem Yiyeh c’est le Shem du monde à venir : « Il sera » !

Dans le nom Yiyeh c’est Yah-Yah : le Vav redevient un Youd, le Vav a repris la dignité de l’unité.

Le Shem du monde à venir c’est Yiyeh. C’est le verset qui le dit : Yiyeh.

Dans ce monde-ci, c’est Youd Hé Vav Hé

Dans le monde-à-venir, c’est Youd Hé Youd Hé. Yiyeh – Il sera.

C’est ce que le Ben Ish ‘Hai nous explique ici.

Il nous montre que nous avons Jacob et Mosheh et David…

< fin >

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