Vayera – série 1995

Le cours

Face A

Face B

Texte

/ Sans vouloir mélanger les niveaux différents des différents cours, je voudrais simplement préciser qu’il y a des correspondances dans le calendrier qui nous dépassent, et je voudrais vous citer quelqu’un qui n’est pas du tout une source traditionnelle, je ne pense pas qu’il soit normal de faire des liens arbitraires entre les événements de la semaine et la Parashah de la semaine, bien que suivant la tradition il y a toujours un lien entre les deux. Je me base sur une source non traditionnelle, c’est tout simplement le président d’Amérique qui dans son discours de Hesped a eu la délicatesse de faire allusion à la Aqédat Its’haq. Alors que parallèlement Shimon Perez s’est trompé de Parashah et a cité un verset faux comme d’habitude. Le verset était exact mais avec des fautes d’orthographes. Je ferais simplement cette allusion. L’année dernière nous avons vécu dans cette semaine ce qui est arrivé à Na’hshon Wachsman ( נחשון מרדכי וקסמן‎ ) za’l. On ne peut pas éviter de se rendre compte qu’il y a une réalité que je définis très simplement en rapport avec un grand principe de la Parashah que vous connaissez et que je voudrais expliquer en détail de telle sorte qu’il soit bien clair dans ces correspondance qui sont inévitables à faire :

Midrash Tan’houmah chapitre 7 qui est cité souvent par les grands commentateurs en particuliers Na’hmanide (Ramban sur Bereshit 12:6) : « Kol mah shé’ira laavot siman labanim  (Maassé avot siman lebanim) – « Tout ce qui est arrrivé aux pères (les patriarches) un signe pour les fils ».

Cela signifie que le peuple d’Israël dans son histoire revit les mêmes péripéties d’existence que celle que la Torah nous a raconté comme carte d’identité d’Israël. Avec cette grande différence, et c’est là qu’est la difficulté d’analyse, que les Patriarches ont vécu cette histoire à l’échelle individuelle – Abraham est tout Israël en une personne dans la modalité d’être juste qui était la sienne, le ‘Hessed – Isaac est tout Israël en une seule personne dans la modalité corollaire de Midat HaDin – Jacob pareillement.

Et la Guémara dit très clairement : il n’y a que ces trois-là qui sont dans ce cas  de représenter tout Israël en une seule personne – ce ne sont pas des sosies même si le Midrash indique qu’ils avaient le même visage car le visage d’un Tsadik ressemble au visage d’un Tsadik, mais il n’était pas des sosies dans la vertu. Abraham est le Tsadik de la Midat Ha‘Hessed – Isaac de Midat haDin et Jacob de Midat haEmet.

Mais eux seuls ont eu cette capacité d’être vraiment tout Israël en une seule personne dans leur envergure d’identité qui d’après le commentaire du Maharal est surnaturelle si c’est notre manière d’être homme qui est naturelle. Ils ont une identité klalite, au niveau du Klal de la collectivité en une seule personne. C’est un peu le privilège des Yé’hidim (Yé’hidéi sgoula ) ceux dont on dit qu’ils sont tout seuls à incarner une Yé’hidah, le niveau le plus haut de la Neshamah – il y en a quelques uns par générations à posséder un peu cette dimension de Neshamah klalite. Mais les Avot sont les seuls. La Guemara dans Brakhot dit  « Eïn Avot Elav Shloshah – il n’y a de Avot que trois ». Ce sont Abraham Isaac et Jacob.

Ceci signifie qu’Israël en tant que société, que collectivité, en tant que peuple dans l’histoire, a à vivre ces péripéties d’existence, cette mise à l’épreuve de Olam Hazeh de ce Monde-Ci.

Epreuve non dans le sens de vallée de larmes et de douleurs mais dans le sens de mise à l’épreuve –

nissayon – avec une nuance de sens bien précise. Le monde n’a pas été créé pour être un enfer. Le monde a été créé pour être un laboratoire, une mise à l’épreuve : mérites-tu vraiment d’avoir été créé ? Lorsque l’épreuve a fini, c’est là que commence vraiment l’être réel. Cette existence de mise à l’épreuve c’est cela Olam Hazé, mais à priori, ce n’est pas « la vallée de larmes » qui ressort d’une autre connotation et d’une autre sensibilité. C’est quand même « la vallée de larmes » mais pas à priori.

C’est pourquoi le diagnostic des correspondances entre ce qu’ont vécu les Patriarches à travers l’échelle du récit de leur histoire personnelle que nous relisons chaque shabat, chaque année, depuis des milliers d’années, et d’autre part la manière dont Israël revit les mêmes péripéties, ce diagnostic d’identification, ou d’analogie, est très difficile à faire pour ceux qui ne sont pas initiés aux régles de cette sagesse, à cette ‘Hokhmah-là.

C’est une partie de la connaissance du récit de la Torah qui fait partie de ‘Hokhmat HaNistar – les choses cachées – parce que ce dont elle parle est cachée. C’est la ‘Hokhmah des choses cachées.

Cela ne veut pas dire que ce n’est incompréhensible, mais ce n’est compréhensible que si on l’étudie en réfléchissant avec les catégorie de la Kaballah, pour dire les choses directement.

Rares sont les grands commentateurs qui enseignent au niveau du Niglé mais en formulant leur enseignement en allusion à ces choses cachées. Le plus grand d’entre eux a été Na’hmanide, le plus systématique d’entre eux a sans doute été Judah Halévi, et le plus riche, si j’ose dire, est le Shla’h, grand maitre de tradition ashkénaze.   

Le principe « Kol mah shéira laavot siman labanim » renvoie à toute une science et ne peut pas être laissé à l’arbitraire de diagnostic idéologique ou de sensibilité qui par définition est toujours éphémère et contingente.

Par conséquent je vais vous citer un certain nombre de source, mais il est bien clair que il n’y a pas du tout dans ma pensée de faire une allusion de cause à effet ou d’analogie dans le sens massif pour ce que nous venons de vivre et le récit de la Aqedat Its’haq bien que on ne peut pas ne pas être impressionné par le parallèle des péripéties.

Simplement, il faut retenir, qu’une fois de plus, nous avons la preuve que cet enseignement que l’on trouve très exploité chez les ‘Hassidim, que si on veut comprendre  ce qui se passe dans l’existence de la semaine que l’on est en train de vivre, il faut lire la Parashat HaShavouah avec Rashi. Apparemment, quel rapport ? Après on peut comprendre ce qui se passe dans les journaux. Vous imaginez bien à quel niveau de sagesse cela se passe.

Au moment de la guerre des six jours, on avait bien l’impression de vivre, jour par jour, ce qui se passait dans la Haftarah.

***

Aqedat Its’haq :

Quelques mots très rapides pour définir le titre de ce récit : En français l’expression « sacrifice d’Isaac » est fausse. Il ne s’agit pas d’un sacrifice puisqu’il n’a pas eu lieu, c’est une mise à l’épreuve, et l’épreuve concerne Abraham et non Its’haq.

Chapitre 22 verset 1

וַיְהִי, אַחַר הַדְּבָרִים הָאֵלֶּה

Vayehi a’har hadevarim haeleh vehaElohim nissa et-Avraham vayomer elav Avraham vayomer hineni.

וַיְהִי, אַחַר הַדְּבָרִים הָאֵלֶּה

Vayehi a’har hadevarim haeleh

Et il arriva après les événements précédents

Nous étudierons beaucoup cette expression : Que s’est-il passé avant ? Est-ce une simple indication de succession, avant et après, dans l’ordre des événements ?  Ou bien s’agit-il ici du principe d’une relation de cause à effet ? Ce qui s’est passé avant est cause de ce qui se passe maintenant, la mise à l’épreuve d’Abraham ?

Le texte est très clair : « Et Dieu éprouva Avraham » !

C’est une épreuve pour Avraham. Ce n’est pas du tout une épreuve pour Isaac. Vous avez du remarqué, j’y reviendrais, que Isaac est prêt à ce qui est censé arriver si Dieu n’intervient pas. Il n’y a aucune allusion dans le récit à ce que Isaac résiste ou bien ait un doute.

Maharal analyse dans son commentaire de la Mishnah du 5ème chapitre des Pirqey Avot il y dit :

« Abraham a été 10 fois mis à l’épreuve, Aqedat Its’haq en est la dixième. Et il les a toutes surmonté ».

Il y a eu 10 épreuves. La première étant la sortie d’Our-Qasdim, la 9ème étant l’expulsion de Hagar et Ishmaël, la 10ème étant la Akédat Its’haq – la ligature d’Is’haq. Il y a deux enseignements-là : il fallait qu’Avraham traverse les 10 épreuve et les surmonte.

« Ce qu’il a fait, il les a réussi. C’est pour te faire connaître le prix qu’a Avraham aux yeux de Dieu puisque la Torah raconte ces 10 épreuves ».

(Cf. la Mishnah de Avot et la liste des 10 épreuves dans le commentaire de Rashi – et en particulier dans le Derekh Ha‘Hayim le commentaire du Pirqey Avot du Maharal)

Nous savons par une Guémara (Sanhedrin 107b) que les 3 Patriarches ont été mis à l’épreuve chacun dans l’ordre de sa vertu propre. Il fallait savoir – et c’est cela la difficulté, est-ce que Dieu ne le savait pas ? on y reviendra – il fallait savoir si Avraham est capable d’être le Tsadik de la Midat Ha’Hessed, Its’haq le Tsadik de la Midat HaDin et Yaaqov le Tsadik de la Midat haEmet.

Quoiqu’il en soit, on voit que la mise à l’épreuve vient de la Midat haDin, elle vient de Dieu qui réclame le rachat de l’être qu’il a donné en don à la Création. C’est là le Dieu d’Isaac.

Le Dieu d’Abraham, c’est le Créateur qui donne l’être à priori de toute acquisition de mérite qui ne vient qu’à postériori de la naissance. 

Nous avons là deux expressions dans les attributs essentiels du Créateur parmi les treize attributs de l’unité de Dieu, les deux essentiels sont :

–  Dieu se révèle en nous à travers l’attribut de la grâce absolue, la charité absolue, le  ‘Hessed – c’est celui qui créé, qui donne, sans se préoccuper si celui qui reçoit le mérite : c’est le principe de ‘Hessed. C’est ainsi qu’Abraham a connu le Créateur. Créateur dans le sens strict comme celui qui donne – la charité pure. Et la charité pure ne s’occupe pas de savoir si elle donne à des justes ou à des Reshayim. Exemple d’Abraham priant pour les pires pécheurs de Sodome et Gomorrhe. Pour comprendre comment Abraham vit sa relation au Dieu d’Avraham, nous avons l’exemple des ‘Hassidim, au sens étymologique et non sociologique. Dans toutes les communautés existent ces hommes ‘Hassidim qui vivent cette vertu de charité pure absolue : tout est ‘Hessed.

–  Isaac est le Tsadik de la Midah complémentaire et opposée, de la rigueur stricte, de la justice stricte. Isaac vient après Abraham. Il est d’abord le niveau de cette conscience qui sait qu’elle a reçu en grâce et alors arrive la maturité, la majorité de la conscience morale : elle découvre qu’il faut qu’elle mérite en quoique ce soit ce qu’elle a reçu en grâce. C’est le stade Isaac qui vient après Abraham. Il ne faut pas oublier Abraham. La grande difficulté de la foi juive, c’est l’unité de ce Dieu dont on parle en disant qu’Il est premiérement Dieu d’Abraham, deuxièment Dieu d’Isaac.

J’ouvre une petite parenthèse pour montrer à quel point la controverse avec les théologiens chrétiens sur ce point précis est complétement à l’envers.

Pour les Chrétiens, il y a d’abord le temps de la loi à travers lequel on mérite, et ensuite il y a le temps de la grâce. Le judaïsme serait en ce sens préhistorique au christianisme : d’abord la loi comme pédagogie et ensuite la majorité et la maturité de l’expérience religieuse serait la grâce.

Dans l’histoire des Patriarches c’est l’inverse : d’abord le temps de la grâce et ensuite le temps de la maturité où l’on se mesure à la loi pour mériter ce qui a été reçu par grâce.

Dans mes études d’éthnologie, j’ai étudié en monographie des rites religieux à l’ex-Congo. J’ai dû étudié les correspondances entre les missionaires belges et leurs évèques. Beaucoup de congolais qu’ils voulaient convertir au christianisme tenaient à garder des rites familiers dont la circoncision à leur manière. Ils pouvaient alors admettre de christianiser n’importe quel rite sauf ceux présents dans la Torah, dont la circoncision. J’étais étudiant à Paris et en atelier pratique, un jour un missionnaire belge, je lui ai demandé : lorsque vous convertissez un païen, est-ce que vous le convertissez d’abord au judaïsme et ensuite au christianisme ou bien directement ? Interloqué, il n’a pas su me répondre.

Dans cette controverse l’ordre est inversé. Il y a d’abord Abraham et ensuite Isaac.

D’autre part, il n’est pas facile lorsque l’on vit l’expérience de la relation au Dieu d’Isaac de se souvenir de l’expérience de la relation au Dieu d’Abraham. Si je vis cette Pa’had Its’haq cette terreur d’Issac de savoir qu’il doit payer le prix de son être, on risque de ne plus comprendre ni vivre la ferveur propre à Abraham : d’avoir reçu en grâce cet être, qu’il faut d’autre part racheter.

Pour Isaac, il n’y a aucun problème : le jour est venu pour Isaac d’avoir à racheter l’être qu’il avait reçu en grâce. La Midat HaDin éprouvant Its’haq, et bien son épreuve n’est pas une épreuve.

Effectivement, le seul prix à payer pour le rachat de l’être, c’est l’être lui-même. Par conséquent, Isaac est prêt à rendre son être lorsque le moment est venu de le racheter.

Le secret de cet enseignement c’est que Dieu ne voulait pas que Isaac meurt mais qu’il soit prêt à accepter d’être sacrifié. Et dès qu’il est prêt à accepter de l’être, l’ange vient et arrête le bras d’Abraham. C’est à dire que l’épreuve était dans la mise à l’épreuve. 

J’ouvre une parenthèse, et d’ailleurs le Midrash en parle : Abraham, Issac ne savaient-ils pas que ce Dieu Un, celui qui donne mais qui demande le rachat, n’est pas le Dieu monstreux des sacrifices humains ? Est-ce qu’ils ne savaient pas que Dieu inévitablement avant la fin de l’épreuve allait intervenir pour arrêter l’épreuve ?

La génération de la guerre et de la Shoah montre que lorsqu’on est dans une épreuve de cet ordre très parallèle à ce qui se passe là pour Isaac (je dis bien poru Isaac et pa spour Abraham c’est un autre type d’épreuve), de se rendre compte que tout est là jusqu’à la solution finale… Et que malgré tout il y a la foi que Dieu est un Dieu sauveur. Et ce sont là deux convictions. Il y a deux convictions présentes contradictoires : celle provenant de la réalité de l’existence (« c’est la fin ! »)  et puis celle qui vient de la foi qui est certitude d’être sauvé tout de même.

Nous avons eu cette expérience-là durant la Shoah, cette certitude d’être sauvé, par la foi. Mais qui sera sauvé ? C’est le mystère de la destinée individuelle de chacun. Et pourtant la réalité était telle qu’il n’y avait pas de salut possible. Les 2 choses étaient vécues simultanément : l’épreuve est vraiment une épreuve. Ce tourment de l’épreuve de savoir qu’il n’y a pas d’issu on l’a vécu comme s’il n’y avait pas de salut possible et pourtant d’autre part on avait la foi du salut.

A l’échelle collective du peuple c’est clair, mais à l’échelle individuelle, il y a ceux qui ont disparu dans la Shoah. Il sont considérés par la tradition comme morts Léqidoush Hashem.

J’ai indiqué cela pour essayer de faire comprendre pourquoi pour Isaac ce n’est pas une épreuve : lui il est prêt. Tout ceux qui sont allés au martyre, au sacrifice, dans l’histoire des hommes, juifs ou non, avec cette joie du sacrifice (avec aussi ces caricatures des kamikazes du ‘Hamas) montrent que ce n’est pas une épreuve. Ils sont de l’ordre de la Midah de Its’haq. Il faut être dans ce cas pour expérimenter vraiment de quoi il s’agit.

Simplement, en lisant le récit on s’aperçoit que ce n’est pas du tout Isaac qui est interpellé parce que lui est prêt.. Par conséquent, il est clair que l’épreuve concerne Abraham.

Sanhedrin 107b.

Je vous l’explique rapdiement en me référant à un enseignement de Sanhedrin 107b qui pose deux questions, j’en prendrais une seule :

Pourquoi le texte de la Torah n’a raconté explicitement que les épreuves d’Abraham alors que les épreuves d’Isaac et les épreuves de Jacob sont mentionnés et déduites des allusions du texte ?

Sans trop approfondir ; C’est Abraham le 1er des Patriarches, et à partir du moment où lui le 1er le point de départ, a surmonté ses épreuves, alors la généalogie qui mène à l’identité Israël émerge et se met en place. Et par conséquent, Isaac est second par rapport à Abraham, ce qui ne signifie pas secondaire, mais Abraham est premier dans cette mise à l’épreuve de l’identité d’Israël – Abraham, Isaac, Jacob – et lorsque l’on arrive finalement aux épreuves de Jacob – c’est beaucoup plus haut –  et qu’il réussit, alors il obtient le nom Israël.

La 2ème question :

Dieu ne savait-il pas qu’Abraham était Tsadik ? ie. capable de résister à une mise à l’épreuve de ce genre ? En quoi consistait-elle pour Abraham cette mise à l’épreuve ?

Question de fond du Maharal :

Est-ce que Dieu ne savait pas ? Le verset qui pose la question c’est lorsque l’ange arrête le bras d’Abraham  et lui dit :

Vayera 22:12 :

וַיֹּאמֶר, אַל-תִּשְׁלַח יָדְךָ אֶל-הַנַּעַר, וְאַל-תַּעַשׂ לוֹ, מְאוּמָה:  כִּי עַתָּה יָדַעְתִּי, כִּי-יְרֵא אֱלֹהִים אַתָּה, וְלֹא חָשַׂכְתָּ אֶת-בִּנְךָ אֶת-יְחִידְךָ, מִמֶּנִּי

Vayomer al-tishla’h yadkha el-hana’ar ve’al-ta’as lo me’oumah ki atah yadati ki-yere Elohim atah velo ‘hasakhta et-binkha et-yechidekha mimeni

וַיֹּאמֶר, אַל-תִּשְׁלַח יָדְךָ אֶל-הַנַּעַר

Vayomer al-tishla’h yadkha el-hana’ar

N’envoie pas ta main sur l’enfant

Un enfant de 33 ans, certains disent 37 ans, il y a deux sources. Mais l’âge cabalistique, c’est 33 ans. C’est ce qu’on appelle l’âge du « corps glorieux ». Je referme la parenthèse. En tout cas pour ceux qui n’ont pas encore 33 ans, méfiez-vous parce qu’à cet âge il y a toujours-là un choc. Vous l’expérimenterez…

וְאַל-תַּעַשׂ לוֹ, מְאוּמָה

ve’al-ta’as lo me’oumah

et ne lui fait rien.

un Midrash extraordinaire explique qu’Abraham a voulu agir au moins en faisant couler un peu de sang pour qu’il y ait quelque chose dans la réalité. Pour Abraham il y a finalement deux épreuves : l’épreuve d’amener son fils au sacrifice, et l’épreuve qui consiste à  sacrifier son sacrifice…

La deuxième épreuve est peut-être plus difficile, et il faut un désengagement à toute cette affectivité et cette ferveur. Encore une fois, on voit là à quel point la traduction « sacrifice d’Isaac » est fausse : le sacrifice n’a pas lieu ! Et par conséquent, prendre ce récit d’une part comme modèle de la passion chez les Chrétiens ; et surtout d’autre part, comme modèle pour la Shoah est une erreur : le sacrifice n’a pas eu lieu contrairement à celui de la Shoah qui a bien eu lieu pour 6 millions de juifs et avec « un ange 6 millions de fois en retard pour stopper le sacrifice » pour reprendre le mot de Elie Wiesel. JE referme cette parenthèse.

כִּי עַתָּה יָדַעְתִּי, כִּי-יְרֵא אֱלֹהִים אַתָּה

ki atah yadati ki-yere Elohim

car maintenant je sais que tu es Yiré Elohim

D’après les Taamim de la Massorètes on peut lire autrement :

maintenant je sais parce que tu es Yiré Elohim

Ki peut se traduire soit par « que » soit par « car ».

Mais alors Dieu sait quoi ?

C’est là la question que le Maharal avec la Guémara va poser. Que signifie « maintenant je sais » pour Dieu ???

J’ouvre une parenthèse. C’est dans la préface du Rav ‘Hayim de Volozine consacrée au Gaon de Vilna où il cite une des opinions sur ce verset et qu’il critique de suite.

Voilà la thèse, l’opinion critiquée :

Toutes les qualités, toutes les vertus, nous les apprenons de la révélation de Dieu dans le monde. Comment être charitable ? Nous l’apprenons de Dieu Lui-même lorsqu’il est charitable (Les Midrashim nous le rappellent : Il pare ‘Havah, habille les premiers hommes, s’occupe de l’enterrement de Moïse… etc.) et des grands hommes qui ont été les justes de ces vertus. C’est depuis Abraham que l’on sait ce qu’est être charitable mais Abraham en a appris l’essentiel de Dieu Lui-même. Je ne veux pas prendre trop de temps, mais toutes les démonstrations à la lettre de ce principe existe. Seulement il y a une seule vertu pour laquelle c’est l’inverse et c’est Dieu qui doit l’apprendre de l’homme et l’homme ne peut pas l’apprendre de Dieu. C’est cette vertu-là qui consiste à être « craignant Dieu ». La thèse semble très forte. Il y a une vertu que Dieu ne peut pas enseigner aux hommes : que signifie pour Lui d’être craignant Dieu ?

Et par conséquent, il faut attendre qu’un homme exemplaire ait cette vertu de « craignant Dieu » pour que Dieu sache ce que signifie être « craignant Dieu ». C’est une explication typiquement juive. Mais elle est critiquée par le Rav ‘Hayim de Volozine.

Critique de la thèse :

Le Rav ‘Hayim de Volozine criteque cette explication et dit, à partir de la source s’appuyant sur le Tomer Devorah du Ramak, que Dieu aussi possède cette vertu. Et c’est pour cela qu’on l’appelle El Shaday Dieu tout-puissant.

Le Midrash donne trois explications de El Shadaï – Dieu tout-puissant. Deux que je vous cite très rapidement puisque c’est la troisième qui va nous occuper:

–  1ère explication de El Shadaï = meshaded et hamahalakhot : Dieu qui est capable d’être plus fort que le monde qu’il a créé. Il peut alors intervenir pour changer les règles du jeu : Dieu est capable de faire un miracle. C’est un peu la signification que l’on retrouve dans la traduction banale de « Tout-Puissant ». Que signifie de Dieu l’expression de Tout-Puissant ? Cela signifierait-il qu’il pourrait y avoir quelqu’un de plus puissant que lui ? On perçoit là toute la difficulté de définition des attributs. Maïmonide a beaucoup étudié le problème de la définition des attributs divins. En réalité c’est dire qu’Il est plus puissant que Lui-Même : Plus puissant que Sa volonté lorsqu’Il a créé le monde. Il l’a créé selon un certain ordre et Il peut changer cet ordre. Etre plus puissant que quelqu’un d’autre ce n’est pas cela la puissance, c’est que l’autre est plus faible : Être plus puissant que lui-même, c’est là la véritable vaillance. C’est le véritable Guibor.

–  2ème explication du Midrash : El Shadaï : « bi she yesh lo daï : Celui qui a suffisamment (daï) pour donner ». Une des d+efinitions du Créateur : Il a suffisamment et donc Il peut  accomplir les promesses qu’Il a faite. Là aussi c’est difficile car si c’est Dieu qui promet pourquoi cela ne s’accomplit-il pas ? Mais c’est encore un autre sujet.

–  3ème explication sur El Shadaï « mi shé amar le Elakouto daï vé léolamo daï » « c’est celui qui a dit à son monde jusque-là et pas plus et à sa divinité jusque-là et pas plus ». Il y a une limite au-delà de laquelle Dieu s’interdit d’intervenir dans le monde. D’une certaine manière il a Yirat Shamayim pour sa créature. La Yirat Shamayim de l’homme à Dieu c’est le respect des valeurs.

Les valeurs sont exposées, non protégées, vulnérables, parce que nous sommes libres de les violer. Et alors cette force qui consiste à ne pas violer une valeur qui est exposée, c’est cela Yirat Elohim. Yirat Shamayim est un peu au-delà, Yirat Elohim cela va dans le même sens. La Guémara, dit en utilisant un verset de Shir HaShirim, pour dire la vertu des Tsadikim en Israël, c’est l’expression « Sougah bashoushanim » : une jeune femme qui n’est protégée que par une ceinture de rose et elle n’est pas violée. C’est cela la vertu du juste.

Je prends la formule quie me semble al plus simple : La loi de la nature protège la nature : si je viole la nature, j’en paie les conséquences. Mais les valeurs de la loi morale ne sont pas protégées.

A la longue la loi morale sanctionne, mais c’est très différent de la loi de la nature. Dans la loi de nature la sanction est immédiate. Alors que pour la loi morale, c’est en fin de compte que la sanction apparait. Entretemps, la valeur morale est exposée et peut être violée.

Yirat Elohim c’est la crainte de violer la valeur. Avec tous les niveaux possibles : la crainte du châtiment, la crainte du péché, la crainte de faire une faute… C’est à ce niveau de Yirat Elohim.  C’est une vertu encore plus haute : avoir peur de faire une faute.

Yirat Shamayim : Dieu se donne lui-même cette limite – « Daï lé Elakouto »  –  qu’Il ne dépasse pas pour que le monde puisse exister. Si Dieu ne réprime pas l’absolu de son être, le monde disparait. Alors il y a donc entre Dieu et le monde, c’est une figure symbolique, une limite qui s’appelle El Shadai. Dans le Torat ha-niglei expliqué par le Ari on retrouve cela. Nous avons une Mishnah qui dit : (Mishnah Avot) : « Ezeh hou guibor ? Ha kevesh et itsro : De qui peut-on dire qu’il est vaillant ? De celui qui maitrise ses penchants ». Comme dit précédemment, être plus fort qu’un autre c’est que l’autre est un faible.

Que signifie Atah Gibor lorsque l’on dit de Dieu qu’il est vaillant ? Alors cela veut dire plus fort que Lui-même. Il réprime Son absolu pour laisser la place à l’existence relative du monde. Cette frontière s’appelle El Shaday. Et dans cette frontière, il y a en Dieu la vertu corollaire de Yirat Shamayim que l’on trouve chez l’homme : Dieu a peur de faire du mal à son monde et alors Il se retient de l’envahir.   

Vous rapporterez cela à une remarque qu’il faut faire : Chaque fois que la Torah raconte une intervention de Dieu dans l’histoire avant la fin des temps de l’histoire, avant le rendez-vous de la fin des temps, c’est une catastrophe. Lorsque Dieu est obligé de faire irruption dans le monde, c’est une catastrophe. Je vous laisse le soin d’identifier les expériences que vous avez à ce sujet.

L’exemple le plus massif c’est les 10 plaies d’Egypte : une intervention pour sauver Israël est une catastrophe pour une civilisation entière qui disparait… L’Egypte des Pharaons.

Il y a aussi l’immense catastrophe du déluge. Nous avons là des modèles qui éclairent bien cela que lorsque Dieu décide de franchir Ses limites du El Shadday pour des raisons propres, c’est une catastrophe. Nous sommes à l’abri de ces catastrophes de chaque instant à chaque instant jusqu’à la la fin des temps : c’est cette force El Shadaï qui travaille.

Dans la religiosité populaire, surtout chez les Séfardim, sans doute aussi chez les Ashkénazim quelque chose d’équivalent,  que je connais, chaque fois qu’il risque d’avoir une catastrophe, la réaction immédiate est de dire « Shadaï ». Certains disent Rabbi Shimon Bar Yo’haï mais cela revient au même. On invoque cette force de la limite entre la Toute Puissance de Dieu et le monde dans sa relativité. Dans la politesse des Juif israélites français on dit « Dieu préserve !»    

JE refere donc certte parenthèse.

C’est donc le rav ‘Hayyim de Volozine qui nous a donné cette analyse. Ceci dit la question reste…

Chapitre 22 verset 1

וַיְהִי, אַחַר הַדְּבָרִים הָאֵלֶּה, וְהָאֱלֹהִים, נִסָּה אֶת-אַבְרָהָם; וַיֹּאמֶר אֵלָיו, אַבְרָהָם וַיֹּאמֶר הִנֵּנִי

Vayehi a’har hadevarim haeleh vehaElohim nissa et-Avraham vayomer elav Avraham vayomer hineni.

Analyse du Maharal sur les 3 sens du mot Neissa.

(Je vous invite vraiment à l’étudier dans son texte. Nous n’avons pas le temps).

En fait Dieu connait à l’avance la vertu du Tsadik, ce n’est pas n’importe qui qui peut être mis à l’épreuve. C’est un Tsadik qui est capable de surmonter l’épreuve.

וְהָאֱלֹהִים, נִסָּה אֶת-אַבְרָהָם

VehaElohim nissa et Avraham.

Et Dieu éprouva Abraham

Et pourquoi il l’a mis à l’épreuve ? Parce qu’Il sait que Avraham peut surmonter cette épreuve. C’est une explication très forte. Et elle se base sur un verset des Proverbes :  Hashem Tsadik Kham : Dieu met à l’épreuve le Tsadik.

Le Tsadik qui est vraiment Tsadik, seul celui qui est capable de surmonter l’épreuve. Alors pourquoi l’épreuve ? Ce n’est pas pour apprendre à Dieu que le Tsadik est Tsadik, c’est pour le faire savoir au monde : 

« Vehaelohim nissa et Avraham » a pour résultat que le monde entier sait que Avraham a surmonté cette épreuve et a été capable de renoncer à tout ce qui était son être : le fils de la promesse.

C’est énrome. Avraham ne pouvait pas avoir de descendance, et c’est cette même descendance miraculeuse que Dieu lui demande de mettre en question dans cette mise à l’épreuve, d’être capable de cela.

Il y a derrière tout un arrière fond du Midrash que je voudrais mettre en évidence. Mais cette épreuve-là concerne au contraire la ferveur religieuse de tous les idolâtres : le sacrifice du fils !

Voyez ce que le chistianisme a fait de ce récit. Parce que c’est un sacrifice idolâtre. Le sacrifice par excellence est le sacrifice du fils. L’horreur des horreurs ! Ici, Dieu demande à Avraham d’être capable d’être pieux à la manière des idolâtres, et il y réussit ! C’est énorme !

Le mythe chrétien est le mythe plus idolâtre possible pour la sensibilité juive.

Il contient les trois fautes fondamentales :

–  Shefi’hout Damim.

–  Guilouï Arayot.

–  Avodah Zara.


Shfi’hout Damim. Il y a le meurtre accompli du fils par le père. C’était la sensibilité religieuse des idolâtres. Cela aide à comprendre pourquoi ceux qui y croient prennent pour postulat que c’est cela le vrai sacrifice. C’est la sensibilité opposée à celle d’Avraham.


Guilouï Arayot: une naissance qui n’a pas de père : c’est d’une impureté énorme !


Avodah Zara: la pire des idolâtries : adorer un homme. Pire encore, un juif en plus!

Il y a une différence de sensibilité radicale.

Il faut bien mettre cela en évidence qu’avec cette mise à l’épreuve d’Avraham de savoir s’il est capable d’être Yiré haElohim. Parce que Avraham est le Tsadik de la Midat Ha’Hessed. Il est donc Yiré Hashem. Et il a été éprouvé par deux fois pour savoir s’il est Yiré Hashem. La dernière épreuve en tant que Tsadik de Midat Ha‘Hessed, c’est lorsqu’il surmonte son être et renvoie Ishmaël et Hagar. Il s’en débarrasse. Cela arrivera puisque nous vivrons cette histoire. Comment cela arrivera ? Vous êtes assez jeune pour le voir ! Je vous ai consolé ?  

La 10ème épreuve : Abraham va  être éprouvé par la Midat haDin. Cela ne suffit pas qu’il soit le Tsadik de la Midat Ha’Hessed, il faut qu’il soit le Tsadik de l’unité des valeurs. 

Alors, il met la pierre de la vertu de la charité mais compatible avec la vertu de rirgueur. Alors il faut que la vertu de rigueur l’éprouve.

Donc l’objectif de cette mise à l’épreuve c’est de savoir s’il est capable d’être Yiré Elohim.

Reste à savoir pourquoi cela se fait par le sacrifice d’Isaac ?

Et pourquoi pas autrement ?

Pourquoi comme ça ?

C’est notre problème de l’étude ce soir. Comme vu au début avec le Maharal, Dieu sait qu’il est capable, mais cette mise à l’épreuve est nécessaire pour le faire savoir au monde entier : Avraham est le juste de la vertu de charité qui est capable d’être le père de Isaac. Et dans cette scène, c’est Isaac qui est le maître d’Avraham.

C’est là le 1er sens de la mise à l’épreuve. C’est indiqué dans les Midrashim cités par le Maharal par le fait que le mot Ness a un sens second par rapport à Nissayon « mise à l’épreuve », c’est un « étandard ». C’est-à-dire pour faire savoir qui est Abraham et le proclamer. C’est la bannière du héraut qui proclame le Roi qui vient derrière.  Nissé et Avraham a fait savoir au monde entier qui était Abraham.

Il y a là quelque chose qui est que finalement il n’y a que les Juifs qui comprennent cette vertu. Toutes les nations du monde le comprennent à la manière idolâtre. La vertu d’Abraham n’est pas d’accepter de risquer de sacrifier son fils, parce qu’il sait qu’il ne le sacrifiera pas. La preuve ? Un verset dit : « Où est l’agneau du sacrifice ? – Dieu y pourvoira. » mais on trouve un bélier qui dans le Midrash représente l’Egypte. Effectivement, c’est l’Egypte à la sortie d’Israël qui va être sacrifier à la place d’Israël. Et ce bélier nous dit le Midrash, était préparé depuis la création du monde. Le Midrash parle ici au niveau de l’histoire des civilisations. Cela veut dire que pour qu’Israël soit sauvé, il faut que l’Egypte soit sacrifiée.

Na’hmanide intervient chaque fois qu’il en a l’occasion à ce sujet : Le Midrash dit que c’est pour le faire savoir aux nations, mais elles ne peuvent le savoir qu’à la manière des idolâtres. Croire que la vertu d’Abraham est d’égorger son fils alors que sa véritable vertu c’est qu’il est Yiré Elohim, qu’il est aussi capable de percevoir les impératifs de la justice absolue.

Je t’ai donné un être, donne-le !

On ne peut le payer qu’en le rendant. C’est au moment où on est prêt à le rendre qu’on l’a acquis. C’est cela l’épreuve pour Isaac. Et Isaac est impatient de la réaliser.

Mais nous sommes en général plus fils d’Abraham que fils d’Isaac. Je sais par expérience que notre sensibilité, sauf les ‘Hassidim de la Midat HaDin – les ‘Hassidim de Novardok – des ‘Hassidim dures et impitoyables – en général les ‘Hassidim sont ceux de la Midat HaRa’hamim.

Le grand Rav de Novardok était de la même communauté que le Torah Tmimah, Rav Lévi Epstein.

On les préparait à des épreuves.

Bien comprendre cette notion de Ness : rendre public la vertu d’Abraham.

Il n’y a qu’en Israël de la tradition hébraïque que l’on comprend bien cette vertu, que le juste de la vertu de charité soit sensible aux impératifs de la vertu de justice absolue, alors que dans la mentalité des nations c’est cette vertu qui consiste à accepter de sacrifier son fils pour montrer que l’on est pieux : c’est le dieu Molokh. Par analogie dans le comportement des nations c’est cette tendance à sacrifier des hommes pour des idéaux éphémères. C’est l’histoire des sociétés humaines.

3ème indication du Maharal : c’est le 3ème sens du mot Ness qui signifie miracle.

C’est le sens habituel qui vient à l’esprit avant celui de « mise à l’épreuve » ou de « bannière ».

Q : Dans Melakhim, l’épisode du roi de Moav qui sacrifie son fils sur les remparts et cela est efficace, pourquoi ?

R : Cela a l’air de réussir pour eux. Il y a plusieurs passages chez les prophètes à propos de ces rites de morts, où les prophètes accusent les Hébreux d’adopter ce type de rite parce qu’ils sont sûrs qu’ils sont efficaces. Un rite de construction, surtout un palais ou sanctuaire : le fils est enterré dans les fondations. Dans le Maghreb, on sacrifie une bête sur le seuil de la maison construite, pratique que les rabbins ont interdit pour les Juifs.

Invité à un « colloque sur les anges » dans une abbaye catholique française, un pasteur protestant avec humour me demande si je crois aux miracles de Lourdes, je répond que oui. Silence dans la salle… J’ajoute : à condition que ces miracles soient authentifiés par la commission catholique épiscopale des  évéques… Grand silence plus lourd encore. J’ajoute :  Cela  prouve seulement que Dieu s’occupe de toutes ces créatures et ne prouve rien sur la vérité ou non de la religion catholique. Ils se sont alors détendus en apprenant que Dieu s’occupe aussi d’eux…

Il faut bien comprendre ce qu’est le monothéisme : Le Dieu unique est le Dieu pour tous (et non comme il se le pense le Dieu de tous) Le Dieu un est celui qui est providence de toutes ces créatures, chacune à sa manière, chacun à travers son imaginaire religieux. Pour Israël, c’est l’interdiction des images. C’est un cas particulier. C’est à part.

Midrash inventé :

Quand Dieu a créé le premier homme, Il lui a dit : « Si tu es sage tu auras une image ! »

Et rendez-vous au Sinaï. Israël au Sinaï s’entend Dieu lui dire : « Tu seras sage et tu ne te feras pas d’image !». Et rendez-vous à Jerusalem… On y trouve des tas d’images…

Je crois très sincérement aux miracles chez les Goyim : c’est Dieu qui s’en occupe. Mais nous avons cette consigne : « vous ne serez jamais comme eux… » Parce que cela risque de marcher et nous risquons d’y croire comme eux…

Ness = miracle.

Ces mises à l’épreuve des Patriarches Abraham Isaac et Jacob sont des mises à l’épreuve d’êtres qui sont dans ce monde-ci, le monde terrestre de l’histoire des hommes, mais qui sont miraculeuses.

Le Maharal dit quelque chose de très d’important. On a tendance à parler des grands de la Torah comme si c’était des Juifs du coin, et de croire que la grande valeur de ces hommes d’exception c’est qu’il s’agit de gens normaux comme nous… Le Maharal bloque cette idée. L’histoire de ces hommes, Abraham, Isaac, Jacob, qui a secoué l’humanité entière, et personne n’a eu le courage d’analyser pourquoi dans l’inconscient de l’humanité entière, Abraham c’est Abraham, Isaac, c’est Isaac, et Jacob c’est Jacob et que surprise, cela existe : il y a un peuple comme ça ! Les gewns ont peur de rentrer dans cette quesiton alors ils banalisent le fait. J’ai entenud des gens dire sérieusmeent que la grande valeur d’Abraham c’est qu’il est comme nous. Il faut se méfier de ce genre d’attitude..   

Maharal : chapitre 11 dans Sanhédrin :

    « Ce n’est que pour Avraham que le texte a explicité ses 10 épreuves. Et il y a là un sujet très important, car les Avot engendreurs d’Israël en tant qu’engendreurs ne sont pas des hommes comme les autres hommes naturels, ce sont des « hommes divins » « Anashim Elohim »

Anashim Elohim : ce n’est pas comme en mentalité chrétienne des hommes qui participent de l’être de la divinité mais qui sont conformes au projet de Dieu lorsque Dieu a créé son monde – un oeuvre divine, cela veut dire telle que Dieu l’a voulue, qui reste créature et non divine au sens de Dieu lui-même. A partir de cet exemple on peut voir que la différence de mentalité entre les nations et Israël n’est pas un mythe, mais une réalité premiérement culturelle.

***

Explication du Midrash sur :

וַיְהִי, אַחַר הַדְּבָרִים הָאֵלֶּה

Vayhi A’har Hadevarim Haeleh

Et ce fut après ces choses-là.

Je vous cite les deux explications classiques que Rashi rappelle et je citerai une 3ème qui est celle du Rashbam – petit fils de Rashi.

Le Midrash va prendre le mot de Devarim non pas dans le sens d’événements mais dans le sens de paroles. Le terme Davar en hébreu a plusieurs sens importants, le lien entre la parole et l’événement doit être étudié un jour.

וַיְהִי, אַחַר הַדְּבָרִים הָאֵלֶּה

Vayhi A’har Hadevarim Haeleh

et il arriva après ces événements,

Le Midrash traduit : et il arriva après ces paroles.

Le Midrash : les paroles de qui ?

Le Midrash propose plusieurs réponses entre lesquelles Rashi a décidé de choisir 2 d’entre elles :

ð  Après les paroles d’Ishmaël concernant Isaac.

ð  Et aprés les paroles du Satan concernant Avraham.

Il y a aussi la réponse : Et après les paroles d’Avraham, où le Midrash fait parler Avraham pour énumérer tous les caractères invraisemblable de cette mise à l’épreuve :

« Comment ! l’enfant de la promesse doit être sacrifié ?  Rien n’aurait de sens ! » Il s’agit vraiment d’une épreuve colossale. Et croire tout de même au sens de l’expérience du non-sens, c’est vraiment le drame de la conscience religieuse dans les moments de mises à l’épreuve. Je me réfère à l’expérience de la Shoah.

Comme tous les juifs algériens, on avait perdu la citoyenneté française au temps de Vichy, et on a été quand même mobilisé pour le débarquement des Alliés pour une raison apparemment banale : les pieds noirs qui dirigeaient l’Algérie ne voulaient pas que les Juifs soient dans les rue pendant que le non-juifs soient à l’armée. Ils avaient peur pour leur femme. Nous avons donc été mobilisés à la légion étrangère. Je suis un ancien légionnaire. Après nous avons été versé à la Coloniale, je suis aussi un marsouin. On a vécu plusieurs mois dans une situation intenable : les Alliés avaient débarqué et le statut des Juifs continuaient. Avec les Allemands au pouvoir, c’était un malheur pour le statut des Juifs mais il y avait une issue possible. Avec les Alliés victorieux, le statut des Juifs continue ? On se disait : Il n’y a pas d’issu. C’est ce genre d’épreuve du non-sens. On a finalement été reclassé dans l’armée régulière avec l’arrivée de De Gaulle au pouvoir. Mais de Charybe en Schilla c’est grâce à lui qu’on est en grande partie en Israël.

1- Les paroles d’Ishmaël concernant Isaac, c’est Ishmaël qui dénonce la vertu de Isaac d’être circoncis à 8 jours alors qu’on lui a pas demandé son avis, tandis que lui fut circoncis majeur à 13 ans et qu’il a adopté volontairement le Dieu d’Avraham. Il y a là une interpellation du monde entier vis-à-vis d’Israël : Israël selon la chair par hérédité de naissance sans choix ou Israël selon l’esprit avec l’adhésion à l’âge majeur !

Réponse d’Isaac : Ishmaël a accepté le sacrifice d’un membre, moi si Dieu me le demandait j’offrirais tout mon être entier…

« Après ces paroles », alors Dieu demande et exige ce sacrifice !

Israël est interpellé par cela dans son histoire. C’est un thème très profond. « Après les paroles » d’Ishmaël à Isaac : Isaac doit être prêt à n’importe quel moment de son histoire à faire la preuve que si on lui demande il est prêt….

2- Il y a les paroles du Satan concernant Avraham : « Ce vieillard stérile, Tu lui donnes un enfant dans sa vieillesse et voilà qu’il  fait une grande fête pour tous et des troupeaux entiers en festin sans T’offrir un seul sacrifice ? Dieu répond : « Tout cela Avraham l’a fait pour son fils, mais si Je lui demande, il Me le donnera… »

C’est là le danger d’avoir à rendre compte qu’effectivement Israël est Israël. Ce qui n’est pas évident qu’Israël soit Israël au yeux du monde bien que cela le soit pour nous qui vivons cette histoire. 

A l’enterrement de Its’haq Rabin, le monde entier découvre le rite funéraire dans la tradition juive. En France, le grand rabbin Sitruk était interrogé pour expliquer la cérémonie : pas de fleurs dans la tradition juive mais des pierres : au même moment à la télé on apporte des couronnes mortuaires…

Il n’est pas du tout évident aux yeux des Goyim qu’Israël est Israël de la Bible. Il faut en faire la preuve.

Après la guerre des 6 jours, une rencontre au Kotel lors de Min’ha avec le Mufti de la mosquée : on s’est parlé en arabe sur le problème de savoir à qui est Jérusalem, invité à prendre le thé, le Mufti ne considérait pas les Juifs sionistes commes de vrais juifs d’Israël. C’est un vrai doute chez les Goyim… J’ai compris à quel point chez les Goyim c’est un vrai problème ce doute pour savoir si ce sont vraiment des juifs…  C’est cela qui est en question dans le Midrash.

Rashbam :

J’ai surtout compris cette question grâce au Rashbam :

La mise à l’épreuve d’Abraham c’est pour savoir s’il est Yiré Elohim.

Mais pourquoi par le sacrifice d’Isaac ? 

Le Rashbam explique : par le sacrifice d’Isaac parce que c’est une punition pour certains comportements d’Abraham. Il ne faut pas le prendre comme c’est écrit « Et il arriva après les événements antérieurs ». Qu’y a-t-il eu dans les événements antérieurs ? Une alliance entre Abraham et Abimelekh, roi du territoire de Gaza, la Philistie. Rashbam cite des versets qui montrent un 4ème sens du terme Nissa, dans le sens de punir. Il cite des versets, je vous renvoie au texte du Rashbam..

Dans la Revue Mahayav cette année il y a toute une étude sur l’explication du Rashbam. L’auteur le Rav Zisberg a fait le bilan de toutes les fois ou des responsables de la politique d’Israël ont donné des territoires d’Erets Israël. Cela commence par Abraham proposant à Loth de prendre Kikar HaYarden, et puis Abraham reconnaissant que Gaza appartient à Abimelekh, aux Philistins, puis d’autres exemples. On ajoutera, à la fin des temps, ce qui se passe de notre temps…

Alors que Dieu promet à Abraham le pays d’Israël – qui s’appellait à l’époque le pays du nom de ses conquérants, le pays de Canaan – Abraham consent à une alliance à Beer-Shevah pour reconnaître que ce territoire appartient à Abimelekh.

Le Rashbam y voit là la faute cause de Aqedat Its’haq.

Sans faire d’analogie arbitraire on peut se demander si ce que nous vivons en ce moment même est du même ordre.

Je vous citerais au moins un verset qui dans sa formulation même indique à quel point nous vivons ces événements.

Chapitre 20 verset 15 :

C’est avant l’alliance à Beer-Shevah aux septs puits.

וַיֹּאמֶר אֲבִימֶלֶךְ, הִנֵּה אַרְצִי לְפָנֶיךָ:  בַּטּוֹב בְּעֵינֶיךָ, שֵׁב

Vayomer Avimelech hineh artsi lefaneycha batov be’eyneycha shev.

Vayomer Avimelekh

Et Abimelekh dit

hineh artsi lefaneykha

voici ma terre devant toi

batov be’eyneyhha shev.

où tu veux tu t’installes.

On retrouve ici l’argument des Palestiniens : ma terre et vous y vivrez où vous voulez…

Abraham entend cela et ne dit rien et après cela il signe un accord avec Abimelekh avec comme garant les 7 brebis du sacrifices et le serment de Beer-Shevah « puit du 7 » et « puit du serment ».

Voilà ce qu’enseigne le Rashbam.

Maharal :

Maharal sur le comportement d’Abraham :

Abraham est le Tsadik de la Midat Ha’Hessed, il n’est pas encore d’Israël. Quand Israël agit comme cela c’est une faute mais quand Abraham agit comme cela c’est une vertu. C’est ainsi qu’agit le Tsadik du ‘Hessed absolu. L’autre passe avant moi : alors prend ! C’est Abraham, le modèle de cette vertu-là. Mais ce n’est pas encore Israël. Si Israël agit ainsi c’est une faute. En Abraham, dit le Maharal, c’est « une vertu exagérée ». En Abraham il n’y a pas faute, mais voilà que dans notre identité il y a cette tendance-là, en tant que fils d’Abraham, et on risque, en tant qu’Israël, de se comporter comme lui, et là c’est une faute.

Rashbam : la mise à l’épreuve d’Avraham, c’est de savoir s’il est Yiré Elohim.

Mais pourquoi par « le sacrifice d’Isaac » ?

C’est formulé par le Rashbam : en punition de l’alliance d’Abraham avec le roi de Philistie à Gaza.

Voyez à quel point c’est la même chose !

C’est pourquoi je vous dis : n’allez pas raconter que c’est la même chose, parce qu’il vous faudra une heure pour expliquer les choses et personne ne comprendra que c’est la même chose.

Cela aurait pu être autrement cette mise à l’épreuve pour savoir si Avraham est Yiré Elohim et le faire savoir. Pourquoi comme cela ? C’est formulé ainsi : « Je t’ai donné ce fils pour cette terre. Tu ne veux pas de cette terre ? Rends-moi ce fils ! »

Et  lorsque cela arrive comme cela c’est extrêmement impressionnant. 

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