Face A
Face B
Face C
Texte A
/ L’intitulé choisi c’est la notion de miracle en relation avec ‘Hanoukah. Je vais vous rappeller très briévement un certain nombre de données pour arriver au sujet lui-même que je vais définir.
La notion de miracle est un problème qui est en question chez les théologiens. Je vais un peu schématiser la manière dont ce problème se pose entre deux groupes de théologiens que je vais définir un peu de façon abstraite : Ceux qu’on peut appeller les rationalistes et les non-rationalistes.
Il n’y a pas vraiment de vocabulaire précis pour ce que je voudrais expliquer, peu importe l’approximation des termes ce sont les idées qui sont importantes.
Ceux que j’appelle les rationalistes sont ceux qui ont des difficultés à donner un base à la notion de miracle dans sa définition élémentaire : l’intervention de Dieu.
On se rappelle que la première définition de Dieu pour les théologiens c’est le Créateur du monde qui a instauré dès l’origine de l’histoire du monde des lois de la nature à travers lesquelles ce monde fonctionne. Dans la cohérence de la théologie monothéiste c’est le Créateur qui est le garant des lois de la nature. Il n’y a pas d’opposition, de tension, de conflit, entre la notion de la nature et la notion de la création dans le monothéisme intégral. C’est un sujet pour lui-même que je vous rappelle pour mémoire.
Ce premier groupe de théologiens a des difficultés à donner un fondement à cette idée que à partir du moment où le Créateur a instauré un ordre des lois (Seder) à travers lesquelles l’histoire du monde fonctionne, quelque soit l’histoire des phénomènes, de penser une intervention ponctuelle qui serait le miracle – suspension des lois de la nature – de la part du Créateur lui-même, qui interviendrait en tant que Providence.
Pourquoi ?
Parce que cela impliquerait un Shinouï, c’est-à-dire un changement, une modification, une altération de la substance divine qui est définie comme simple et immuable.
Il y a différentes écoles dans cette thèse. J’en citerai deux. Certains qui identifient l’essence divine avec la connaissance. Et donc un changement dans la connaissance impliquerait un changement dans l’essence. Et la difficulté essentielle pour ce groupe de théologiens est l’idée qu’il puisse y avoir Shinouï changement dans l’absolu absolument simple de la substance divine.
D’où vient la difficulté ? C’est qu’on identifie l’essence divine avec la connaissance.
Vous comprenez quel est l’abord de ce problème : étant donné que les événements du monde sont changeants et mouvants, Shinouï perpétuel, le fait qu’il y ait changement dans la connaissance de Dieu au moment où les changements se passent impliquerait qu’il y ait changement dans Son essence même. D’où la difficulté.
Nous trouvons une difficulté analogue sur une autre catégorie, chez un groupe de théologiens qui identifient la substance divine avec Sa volonté. De la même manière s’il y a changement dans la volonté, ce qui impliquerait l’intervention ponctuelle dans l’histoire du monde, il y aurait changement dans la substance.
Il y a d’autres nuances mais je me borne à vous indiquer ces grandes tendances. Sans même vous donner de noms car cela nous ferait une érudition un peu trop vaste. Je me baserais tout à l’heure sur une mise au point de ce problème du Maharal dans un chapitre de sa 2ème préface au livre de Gvourot Hashem sur les événements et les miracles de la sortie d’Egypte. Ensuite nous terminerons sur un texte qui se relie à l’épisode de ‘Hanoukah
Je reviens donc à la définition du problème : ce premier groupe de théologiens que j’ai appelé « rationalistes » parce que les lois de la raison s’opposent à cette éventualité d’un changement, d’un Shinouï, dans l’essence divine. Les lois de la raison sont basées sur le principe d’identité ; et par conséquent, toute idée d’un Sinouï de ce type est difficile à intégrer dans un système qui a pour postulat que Dieu créateur du monde a institué les lois suivant lesquelles le monde fonctionne. Et par conséquent, supposer qu’il y ait intervention de Dieu après la Création impliquerait donc cette difficulté qu’entraine l’idée du Shinouï, l’idée du changement en Dieu.
Il y a alors deux catégories :
1- Ceux qui par postulat identifient l’essence divine avec la connaissance, alors que dans l’autre groupe la difficulté serait évacuée de façon très simple : la connaissance est une fonction, un attribut, et non pas l’essence elle-même.
2- Ceux qui identifient l’essence divine avec la volonté. Et là encore la volonté est une fonction, un attribut et non pas l’essence elle-même.
Le deuxième groupe des théologiens est complétement à l’aise dans ce problème de l’éventualité de la notion de miracle : un événement d’intervention du Créateur après la création suspendant provisoirement, ponctuellement, l’ordre des lois de la nature. C’est la définition simple du terme de miracle en français tel que la question se posera à nous dans ce sujet. L’autre groupe de théologiens est donc à l’aise dans la lecture du texte biblique tel qu’il est écrit en hébreu et tel qu’il décrit des événements d’interventions à tous les niveaux de la providence. De nouveau nous sommes dans la cohérence du monothéisme intégral : c’est le Créateur lui-même qui intervient alors même qu’il intervient à travers d’autres catégories de puissances supérieures comme les anges par exemple. C’est une parenthèse furtive, je n’ai pas l’intention de rentrer dans ce sujet-là. Mais en tous les cas dans le monothéisme intégral : même à travers un ange selon le récit biblique – officiellement on ne sait pas ce qu’est un ange, par conséquent, j’y fais simplement allusion puisque le récit biblique en parle – c’est Dieu lui-même qui intervient à travers l’ange.
Je voudrais donc étudier à ce sujet un des paragraphes de la 2ème préface que le Maharal a consacré à son livre Gvourot Hashem sur un des points particuliers de l’argumentation qui l’oppose à ces théologiens que j’ai appelé « rationalistes ». Cela ne signifie par qu’ils soient opposés à l’idée de miracle, mais l’idée de miracle leur parait difficile à intégrer dans une vision des relations entre Dieu Créateur du monde et l’histoire du monde basée sur les lois de la raison humaine. Et je dirais pourquoi. En général, ces auteurs qui sont parmi les grands maîtres de la tradition juive expliquent la chose de la manière suivante : on ne peut nier les récits bibliques, ils sont là – ce qui fait problème d’ailleurs – mais il faut donc expliquer cela en disant que dès la création Dieu aurait prévu qu’il y aurait ponctuellement ces événements qui apparemment sont des exceptions dans l’ordre naturel du monde tel que le raconte le récit biblique. A mon avis, avec une telle thèse, cela complique la difficulté au lieu de l’évacuer. Cela voudrait dire que finalement il y aurait des caprices à l’origine de ce déterminisme du monde qui ferait qu’il y ait prévu à l’avance des événements d’un ordre fatal, tel que par exemple la sortie d’Egypte ou l’événement que nous commémorons à ‘Hanoukah et qui va nous servir d’exemple : dès l’origine de l’histoire du monde, il était prévu que lorsqu’il y aurait conflit entre les Judéens et les Grecs, une fiole d’huile brûlerait 8 jours au lieu d’un seul… Vous comprenez comment ces « rationalistes » avec ce souci d’évacuer une difficulté accumulent finalement des difficultés beaucoup plus grandes.
Ce sera l’essentiel du sujet que nous étudierons avec le texte du Maharal.
Avant cela je voudrais lire le passage que nous lisons dans la Téfilah le Al HaNissim qui témoigne qu’à ‘Hanoukah on commémore des miracles. Le 1er mot de cette Tefilah que je vais lire dans le Moussar Séfardi, le texte est le même dans le Moussar Ashkénazi, mais un mot change qui me semble important à signaler parce qu’il n’y a aucune allusion dans ce texte au miracle de la fiole d’huile.
Cela a du vous frapper chaque année d’ailleurs lorsque vous lisez le Al HaNissim de ‘Hanoukah on n’y fait pas allusion. Je vais lire le texte et le traduire.
Je voudrais rappeler que, dans la Guémara, il y a trace de la discussion qui implique une hésitation qui a sans doute duré un certain temps avant que la Halakhah et les Dinim de ‘Hanoukah aient été fixés par le Beit Hamidrash des ‘Hashmonayim pour savoir quoi commémorer dans l’événement de commémoration de ‘Hanoukah.
Voici le contenu de cette Ma’hloqet : certains pensent qu’il faut commémorer le fait que le jour de ’Hanoukah les soldats de Judah Makabi sont entrés dans le temple avec des torches sur leurs lances parce que c’était ‘Hanoukah. Voilà une première thèse qui est moins connue que celle que nous réalisons chaque année dans la commémoration.
Pour la 2ème thèse, l’événement de miracle qui est commémoré, c’est le fait que lorsque les Grecs s’étaient emparés du temple de Jérusalem pour l’annexer à un rite judéen du paganisme de l’empire grec, (il y a tout un sujet dans cette phrase mais je vous l’indique en passant), ils ne voulaient pas détruire la judéité comme telle, mais ils voulaient la banaliser comme une des religions de l’universel humain du style empire grec. Parce que tous les empires de ce modèle se pensaient comme étant l’oecumen comme on dit en grec, c’est-à-dire « l’universel humain civilisé », les autres n’étant que des barbares, même pas des païens ! Et avec la volonté de ramener la spécificité de l’identité Israël à l’indice historique des Judéens de cette époque à une parmi les cultures religieuse de l’univers. Ils avaient donc rendu impurs les instruments, les Kélim, les ustensiles du temple, et en particulier les huiles dont le grand-prêtre se servait pour allumer le candélabre du temple. Et comme vous le savez, il fallait de l’huile pure, c’est-à-dire qui n’avait été au contact d’aucune impureté transmise par l’homme lui-même impur, pour pouvoir assurer la validité du rite de l’illumination du candelabre.
Et voilà que toutes les huiles avaient été rendues impures ! Or, on a trouvé – je ne dirais pas « par miracle » parce que ce mot serait banalisé – une petite fiole contenant la quantité d’huile pour illuminer durant une journée le candelabre du temple et elle a duré 8 jours. Et le Beit Din, le Sanhédrin, des Makabim a institué en commémoration de ce fait les 8 jours de ‘Hanoukah tels que nous les connaissons.
Vous voyez deux thèses. Très schématiquement parce que ce n’est pas le sujet:
– la 1ère thèse semble être dans le sens de la commémoration de l’événement historique national militaire qui a permis la restauration de l’indépendance de la Judée et la restauration du culte de la Torah dans sa pureté.
– la 2ème thèse semble comme venir atténuer cet aspect historique et national pour se ramener à un aspect à la limite purement religeux. Et à travers les siècles on s’est habitué à retenir cet aspect purement religieux d’un miracle « religieux », et il a fallu le temps présent où le folklore israélien a réinstitué l’autre aspect : l’aspect de l’indépendance proprement nationale. Cette question s’étudie pour elle-même, elle se rattache à un autre problème d’ordre général que nous avons étudié dans d’autres sujets, raison pour laquelle il y a une telle réserve dans le Talmud concernant toute l’histoire des Hasmodéens et de leur dynastie et tout ce qui a été l’histoire du 2ème temple après la restauration de l’indépendance judéenne sur les Grecs, plus exactement les Gréco-syriens. Cela vient de ce que cette dynastie hasmodéenne à la longue est devenue saduccéenne, est sortie de la tradition de la loi de Moïse en particulier sur 2 points que je vous rappelle rapidement :
1- Le premier point c’est qu’ils ont cumulé les pouvoirs sacerdotale et politique, ce qui est inerdit par la Torah. Au moment de la lutte de l’indépendance contre l’empire grec parce qu’il y avait cas d’urgence, alors il était possible à une famille des Lévites, des Kohanim, de prendre provisoirement le pouvoir politique et d’instaurer la royauté hasmodéenne. Mais dès que l’événement avait porté ses fruits, elle aurait dû rendre le pouvoir politique à la dynastie royale et rentrer dans le temple en tant que Kohanim. Or, il a été instauré une théocratie. Et en cela la Torah a été violée. La dynaatie des Hasmodéens sort de la tradition qui, elle, continue à passer par les Pharisiens et entre dans la clandestinité. Le Talmud c’est le Talmud des Pharisiens. Lorsque le 2ème royaume de Judah, devenu d’obédience saduccénne, aura été détruit par les Romains il disparait. Nous savons très peu de choses des Saduccéens, seul nous est restée la tradition des Pharisiens. Donc, il était normal que dans ce Talmud des Pharisiens il y ait cette réserve concernant toute cette histoire de ce qu’il est advenu des Makabi. L’événement en lui-même en tant que réussite miraculeuse va être gardé comme l’événement central de la commémoration de ‘Hanoukah, mais l’accent va être mis beaucoup plus sur l’aspect religieux que sur l’aspect national qui en fin de compte va aboutir à une catastrophe au temps des Romains.
2- La 2ème grande règle de la Torah qui a été violée par les Hasmodéens c’est la conversion de force de peuplades iduméennes au judaïsme. Cela a été à l’origine d’une énorme catastrophe. C’est peu connu sous cette forme. Premièrement, le principe de l’interdiction de la conversion par groupe : les conversions sont individuelles. Et les Hasmodéens pour des raisons d’ordre politique ont voulu judaïser, rendre judéens, les Iduméens. Or, finalement c’est une dynastie iduméenne qui a pris le pouvoir. Il suffit de citer Hérode et cela me mène à ce que je voulais dire : de cette erreur des Hasmodéens d’avoir converti en masse des Iduméens est sortie le christianisme. C’est un autre sujet. Il m’a suffit de vous citer Hérode pour vous situer la période. Or, l’identité chrétienne est sortie d’une alliance entre Rome et Edom contre les Judéens. Cela a été facilité par l’existence de toute une population prétendument juive mais d’origine iduméenne.
Petite parenthèse qui me semble importante à signaler : ceux qui connaissent les Evangiles savent à quel point certains évangélistes se font une coquetterie de rappeler leurs origines iduméennes. C’est l’indice de l’importance du problème que je viens de signaler : la suspicion sur certains prétendus judéens qui étaient en réalité des Iduméens convertis à l’eau bénite si j’ose dire, au temps de cette dynastie des Iduméens. Je referme la parenthèse.
La première étude, je l’ai choisi à cause du premier mot : Al Hanissim.
et je vous signale que le mot de Ness signifie miracle dans le sens élémentaire rappelé précédemment, c’est-à-dire un événement ponctuel qui d’après l’ordre habituel des lois de la nature n’aurait pas du se produire, et qui s’est produit de façon miraculeuse pour assurer un certain salut. Tout à l’heure nous aurons à retrouver plus précisément le vocabulaire hébreu de cette notion de miracle. Il y a différents termes, et je vous en citerais deux en particulier. Mais pour le moment c’est ce terme de Ness. Un événement arrive, et on réagit en disant que c’est un Ness, c’est-à-dire que selon l’ordre habituel de la nature cela n’aurait pas dû se produire, mais c’est arrivé ! Et c’est arrivé au moment où cela assure un salut – Pourkane – c’est le mot araméen pour dire délivrance.
Al Hanissim :
הנרות הללו אנו מדליקים
Hanérote halalou anou madliqim… Ces chandeliers de lumières, nous allumons…
על הניסים
Âl hanissim pour les miracles
ועל הפורקן
vé âl hapourqane et pour la délivrance
ועל הגבורות
véâl haguévourote et pour les vaillances
ועל התשועות
véâl hatéshouôte et pour les saluts
ועל הנפלאות
vé âl haniflaote et pour les merveilles
ועל הנחמות
véâl ha né’hamote, et pour les consolations
שעשית לאבותינו בימים ההם בזמן הזה
shé âssita laavotéinou que Tu as fait pour nos pères
bayamim hahém en ces jours-là (c’est-à-dire l’époque des Hasmodéens)
bazémane hazéh en ce temps-là (c’est le moment de ‘Hanoukah dans l’année).
על ידי כוהניך הקדושים
âl yédé Kohanéikha haqédochim par Tes Cohanim saints.
C’est le Pshat, mais on peut élargir le sens en lisant Bayamim Hahém c’est arrivé dans cette époque-là Bazémane hazéh cela arrive aussi de notre temps.
Mais le Pshat de Bezmane Hazeh cela veut dire dans ces jours-là de l’année.
Je signale que c’est la même introduction pour Pourim et pour ‘Hanoukah.
Et quelle est la nature de la différence du miracle à Pourim et à ‘Hanoukah ?
Pour dire qu’à Pourim aussi on commémore un miracle comme à ‘Hanoukah ! Mais c’est que à Pourim les événements de miracle sont appelés Ness Nistar, des miracles cachés, imperceptibles, sinon par un diagnostic qui réclame une certaine sagesse. C’est-à-dire des événements qui sont complétement occultés, derrière les conditionnements des lois de la nature. Et nous retrouverons cette notion tout à l’heure discutée par le Maharal à propos du problème général que porterait une attitude qui consisterait à dire qu’il n’y a pas de mystère avec le miracle, tout est miracle… Faites bien attention ! Ce n’est pas ce que veut dire la notion de Ness Nistar le miracle caché. Il y a un ordre de la nature, mais il y a des interstices qui laissent diagnostiquer que de façon occultée (Nistar) des événements miraculeux se passent, mais c’est de manière cachée. Cela ne veut pas dire que tout dans le déroulement de la nature est miracle. Il y a des thèses de ce type, mais cela va être rejeté par le Maharal de façon claire en se basant sur une Guémara très claire d’ailleurs.
Vous voyez qu’il y a une stratégie d’une conscience religieuse du type « foi du charbonnier » qui consisterait, pour évacuer le problème de la difficulté de la notion du miracle, de dire qu’il n’y a pas de difficulté puisque tout est miracle ! C’est d’une toute autre manière que tout ce qui se passe est voulu par Dieu. Pas à travers la catégorie du miracle, mais à travers la catégorie d’une Hashga’ha dans l’ordre des lois de la nature. Si je crois que tout est miracle, cela veut dire que rien n’est miracle ! Et cela veut dire surtout qu’il n’y a pas d’ordre de la nature, et donc qu’il n’y a pas de garant du Créateur ayant créé son monde et gérant son monde selon sa volonté. Très souvent la piété naïve, plus ou moins inconsciemment, en tout cas au niveau de l’intelligence, abouti à se contredire elle-même.
A Pourim, il s’agit bien de Nissim puisque la Téfilah que je viens de lire commence par la même introduction. Mais le Ness est caché à travers un événeemnt historique dont on ne peut percevoir l’importance vraiment qu’à postériori. Evénement qui n’a pas simplement son importance historique, comme tous les événements historiques qui sont définis comme tels à cause de leur conséquence, mais il s’agit d’un événement qui n’aurait pas dû se passer d’après l’ordre habituel de ce que nous savons des lois qui régissent les événements dits historiques. Le fait que le roi Assuérus ait pour femme la reine Esther, et que cela a sauvé le peuple juif de ce temps d’une Shoah qui aurait pris des dimensions insoupçonnables dans l’empire perse de ce temps-là. Les voies de la providence ont travaillé à travers un récit qui apparemment est très anecdoctique : le miracle est caché !
A ‘Hanoukah le miracle est dévoilé. C’est pourquoi il y a dans la Halakha la nécéssité de témoigner publiquement de ce miracle. C’est le Pirsoumei Nissa (propager–diffuser-publier le miracle), qui a lieu aussi à Pourim mais à ‘Hanoukah il est beaucoup plus spectaculaire.
Bimê Matityáhu ben Yocha-nan cohen gadol, Chashmonaí uvanav,
Au temps de Matiatiahou fils de Yo’hanane le grand prêtre des Hasmodéens et de ses fils…
Il ne faut pas oublier les fils là parce que c’est à travers les fils que les événements proprement nationaux militaires ont eu les conséquences de la révolte de conscience d’un Kohen parmi les Kohanim.
… « ke’sheomda Malkhout Yavan ha’reshaah al amekha Yisrael
lorsque s’est dressé l’empire de Grèce le méchant contre ton peuple Israël…
le’hashkicham Toratecha
pour leur faire oublier ta Torah.
C’est le mot que je voulais signaler : dans le Moussar Ashkénaze c’est Leshake’ham torateikha.
Je traduis d’abord le Moussar Ashkénaze : pour leur faire oublier ta Torah. Alors que dans le Moussar Séfarade il y a Leshake’ham Mi-Torateikha : pour les faire oublier de Ta Torah.
Il y a là quelque chose d’assez important que je voudrais mettre en évidence avant de dire la suite : les Grecs ont failli réussir, n’était-ce la fidélité juive à eux-même pendant 2000 ans, à faire que la Bible la Torah elle-même apparaisse comme étant de l’héritage culturel universel d’indice chrétien sans plus aucun rapport avec le judaïsme : faire oublier Ton peuple Israël de Ta Torah !
Il y a là une intention dans la Guirsa Séfaradite qui est importante et qui a été mise en forme par le Rav Hutner dans une de ses Drashot sur ‘Hanoukah. J’ai utilisé le contenu de son analyse.
Je dois dire pour êre objectif que le Rav Hutner a donné cette analyse pour justifier le Moussar Ashkénaze. Mais il semble bien que l’analyse du rav Hutner finalement justifie plutôt le Moussar Séfarade, grammaticalement en tout cas.
C’est-à-dire que non seulement il y avait un des édits des Grecs d’interdire l’étude de la Torah, cela fait partie de la suite :
ou’lehaaviram mi’houkei retzonekha
et de les faire transgresser les statuts de Ta Volonté…
Donc y compris la Mitsvah de Talmid Torah. Mais il y avait une intention beaucoup plus profonde et insidieuse : dénaturer le lien entre Israël et la Torah. J’ai vécu dans une ambiance culturelle européenne où en tout cas officiellement c’était le cas. Avant la guerre mondiale, je me souviens de l’université: citer la Bible cela voulait dire la Bible des Chrétiens. Cela n’existait pas « la Bible des Juifs » ! C’était aussi indécent de relier la Bible aux Juifs que de s’évanouir dans un salon de Pompadour un tasse de thé à la main, comme on disait à l’époque à l’université.
Voilà comment les concepts ont évolué : on parlait d’abord des Hébreux, ensuite des Juifs, puis des judéo-chrétiens, et ensuite des Chrétiens. Tout le reste était oublié et la Bible c’était la Bible des Chrétiens. J’ai connu des grands penseurs juifs qui connaissait la Bible en grec qui faisaient semblant de ne pas savoir que l’original était en hébreu ! Il citait la Bible en grec à bout portant !
Et l’idée que les Juifs c’est cela Israël dont parle la Bible c’était évacuée de la culture générale. Sauf quelques individus plus ou moins érudits, on ne faisait aucun rapport entre les Juifs et Israël dont parlait la Bible ! Parce que l’Israël dont parlait la Bible c’est l’Eglise ! Vous avez compris comment cela a failli réussir depuis que les Grecs ont obligé à traduire la Bible en Grec. Cela a commencé avec la Septante. Cela s’est vulgarisé avec la Vulgate… et puis cela a continué comme cela.
ve’Atá, be-ra-chamêcha harabim,
Et toi, par ta grande miséricorde
amádta lahêm beet tsa-ratam:
Tu t’es dressé en leur faveur au temps de leurs problèmes angoissants (tsarot),
ráv-ta et rivam,
Tu as querellé leurs querelles (l’événement national)
dánta et dinam,
Tu as jugé leurs jugements ( tu es intervenu pour juger que c’est eux qu’il fallait sauver)
nacámta et nicma-tam;
Tu as vengé leur vengeance
masarta gibborim beyad ‘halashim
Tu as livré des vaillants entre les mains des faibles
C’est là que la notion de miracle commence : l’ordre des choses veurt que les forts soient les forts et les faibles soient les faibles. Où se traduit ce miracle : suspension de l’ordre habituelle du fonctionnement des phénomènes du monde par le fait que les forts sont livrés entre les mains des faibles !
Si j’ose dire, de notre temps nous avons vécu cela au début de l’état d’Israël. Maintenant il faudrait peut être un peu modifier le vocabulaire.
ve’rabim beyad me’atim,
et les nombreux dans la main des moins nombreux
u’temaim beyad tehorim »
les impurs aux mains des purs
u-reshayim beyad tsdikim
et les méchants entre les mains des justes…
En quoi est-ce un miracle ? Parce que l’ordre impersonnel de la nature ne fait pas de différence entre les méchant et les justes.
vezedim beyad ossekê Toratêcha
et les orgeuilleux entre les mains de ceux dont la préoccupation est Ta Torah.
Et là, je crois qu’il ne s’agit ni des Grecs ni des Hasmodéens, mais des Mityavnim, ces Juifs hellénisés qu’on appelait les Zédim. Il y a toute sorte d’événements dans notre histoire que l’on peut rattacher à cette notion.
Oulekhá assíta shem gadol veqadosh baolamêkha,
Et à Toi tu as fait un grand nom et saint dans ton monde,
Retenez cette expression, shem gadol veqadosh baolamêkha, nous allons la retrouver dans l’étude du Maharal.
ul’amechá Yisrael
et pour Ton peuple Israël
assíta teshuá guedolá
tu as fait un grand salut
ufurcan, kehayom hazê.
Et une délivrance jusqu’à aujourd’hui
Veachar cach báu vanêcha lidvir Beitêkha,
Et après cela tes enfants sont venus sur le parvis de Ta maison
ufinu et Hecha-lêkha,
et ils ont débarassé ton sanctuaire
Vous rattacherez l’expression dans un verset de l’histoire d’Eliézer lorsqu’il va dans la famille de d’Abraham pour Rivcah et qu’on lui dit Vanifti et habayit : J’ai débarrassé la maison. Rashi : J’ai débarrassé la maison de la Avodah Zara. C’est le même sens ici.
vetiharu et Micdashêkha;
et ils ont purifié ton sanctuaire
Cela implique donc la purificaiton de l’huile pour l’illumination du candelabre.
vehid-lícu nerot bechatsrot cod-shêcha,
et ils ont allumé des lumières dans les parvis de ton sanctuaire
J’ouvre une petite parenthèse: nous sommes tellement familiers à toutes ces traditions que nous rattachons la fête de ‘Hanoukah à cet événement historique de la victoire des Judéens contre les Grecs et que c’est à partir de ce temps-là qu’il y a la fête de ‘Hanoukah.
Ce qu’il faut comprendre c’est que tous les jours commémorés du calendrier ont depuis toujours leur signification dans l’ordonnance du calendrier, et lorsque l’autorité traditionnelle d’un certain temps diagnostique que l’événement historique de signification du jour dans l’année est arrivé, alors elle attribue la commémoration de ce jour-là en relation avec l’événement historique ainsi diagnostiqué.
Pour le dire en d’autres termes, ‘Hanoukah le 25 Kislev, depuis toujours c’est ‘Hanoukah. Jusqu’à cet événement historique de la victoire des Hasmodéens contre les Grecs c’était une fête disons folklorique populaire qui s’appelait ‘Hag HaOurim et c’est un terme qui est revenu de notre temps, la fête des lumières. Et à partir de l’événement historique de cette victoire des Judéens contre les Grecs, le Beit Din des Hasmodéens a décidé qu’à partir de maintenant cette fête a trouvé son événement historique, et voilà sa commémoration.
Ce qu’il faut comprendre c’est que cela a pris du temps avant que cette Halakha soit intégrée dans la tradition comme nous la connaissons. Et il y a eu controverse. Nous n’avons plus tellement de documents historiques, mais, pour juger à quel point la controverse a pu être intense, il suffit de comparer la controverse contemporaine concernant Yom Haatsmaout. Voilà une date, le 5 Iyyar, le jour de l’indépendance de l’état d’Israël, connue des Kabalistes depuis toujours.
Dans le calendrier de commémoration des communautés kabalistes tous les jours de l’années sont commémorés. Tous les jours ont une signification. Et dans la communauté « officielle », seule les jours où des événements fondateurs de l’histoire collective d’Israël sont déjà apparus dans l’histoire sont commémorés. Mais dans le calendrier des communautés Kabalistes, tous les jours de l’année ont une liturgie particulière de chaque jour. Dans d’autres traditions religieuses c’est le cas aussi. Il y a des communautés d’initiés qui ont une liturgie beaucoup plus complexe que celle connue dans les communautés « officielles ».
Par exemple, le 28 Iyyar, le jour de Jérusalem. Je me souviens qu’avant le 28 Iyyar historique de la libération de Jérusalem, le 28 Iyyar était commémoré. Et je vous donnerais un certain nombre de repères : c’est la Hilloulah de Shmouel Hanavi, et c’était commémoré au Merkaz Harav le jour de la Aliah du Rav A.I. Kook. Il y avait une petite brochure sur le 28 Iyyar avant l’événement qui portait comme titre: « HaYom HaGadol VéHaNora Hazeh Kaf ‘Het béIyyar : ce jour grand et redoutable le 28 Iyyar ». Lorsque l’événement est arrivé, les plus étonnés étaient ceux qui savaient !
Je vais vous donner un exemple beaucoup plus massif. D’abord je rappelle pour ‘Hanoukah, c’est le fait que le 25 Kislev qui est le jour du solstice d’hiver dans le calendrier hébraïque, il y avait depuis toujours, depuis les premiers hommes dit la Guémara (Avoda Zara 8a), depuis Adam harishone, la commémoration de la fête des lumière. Quand l’événement du risque de la disparition de la lumière – je passe sur un registre symbolique – la Torah – et puis de sa résurgence par miracle est arrivé dans l’histoire, c’est cet événement là qui a été dit ‘Hanoukah historique. Il y a une ‘Hanoukah cosmique.
La Guémara explique comment le 1er homme fêtait ‘Hanoukah. C’est un Midrash que j’aime beaucoup : le 1er homme a été créé selon le récit biblique le jour de Rosh Hashanah, le 1er Tishri. Et ce jour-là il a mangé une pomme avec du miel comme on le fait ce jour-là (rires…) ! Un pépin de la pomme a eu pour conséquence que la lumière commence à décroître dans le monde. Effectivement, à partir de Rosh hashanah la quantité de lumière dans la journée décroit jusqu’au solstice d’hiver. Alors il a eu peur que par sa faute la lumière risque de quitter le monde. Quand à partir du 25 Kislev il a vu la lumière recroître, alors il a allumé des feux pour aider la lumière à croître. Dans toutes les traditions humaines, à cette époque, il y a quelque chose qui ressemble à la fête de la lumière. Par la suite, le christianisme va transposer le 25 Kislev au 25 décembre (comme par hasard) et va aussi instaurer une fête de la lumière, donnant une liturgie à sa manière de ce qu’était la fête de la lumière de toutes les traditions depuis le premier homme selon le Talmud.
Alors ce qui est vrai pour ‘Hanoukah est vrai pour toutes les fêtes ! Jusqu’à la sortie d’Egypte, Pessa’h était connu. Mais ce que commémorait Pessa’h jusqu’à la sortie d’Egypte n’était pas encore la sortie d’Egypte. Quand l’événement de la sortie d’Egypte a eu lieu, la Torah diagnostique : à partir de maintenant, Pessa’h c’est la sortie d’Egypte !
vehid-líku nerot bechatsrot kod-shêcha,
et ils ont allumé des lumières dans les parvis de ton sanctuaire
Et vous voyez que ce texte ne fait pas allusion à ce qu’on appelle classiquemnt le miracle de la fiole d’huile, mais désigne comme miracle l’événement lui-même qui a été énuméré.
J’en reprends l’essentiel :
Tu as livré des forts entre les mains des faibles
et les nombreux dans la main des moins nombreux
les impurs aux mains des purs
et les méchants entre les mains des justes…
et les orgeuilleux entre les mains de ceux dont la préoccupation est Ta Torah.
C’est l’événement qui n’est pas « normal » d’après une vue naturelle des phénomènes des lois de la nature, c’est l’événement qui est le miracle. Et la raison pour laquelle la tradition va finalement se fixer sur le miracle ponctuel de la fiole d’huile qui dure 8 jours alors que normalement elle devait durer un jour, a été mise en évidence lorsque la dynastie des Hasmodéens devenue saduccéenne quitte la tradition et on va alors occulter tout cet aspect de l’événement pour ne garder que cela…
Encore au temps de ma jeunesse c’était la tradition habituelle, et de notre temps on retrouve avec l’état d’Israël, l’autre dimension de la commémoration.
Je finis le texte :
ils ont purifé ton sanctuaire, ils ont allumé des lumières dans les parvis de ton sanctuaire…
veca-veú shemonat yemê Chanucá êlu, leho-dot ul’halel leshimechá hagadol.
et il sont fixés ces huit jours de louanges et d’action de grâce.
Retenez le mot de Hallel que nous allons retrouver.
Texte B
/ Des miracles et des merveilles
Vénodé léshimkha ha gadol sélah
Et nous sommes reconnaissant à ton grand nom
Voilà ce texte, qui est le texte de base de la liturgie de ‘Hanoukah dans la Tefilah (la prière), caractérise cette notion de miracle, en dehors de l’allusion à tel ou tel prodige par rapport à des choses qui nous semblent inhabituelles comme voir une quantité d’huile brûler beaucoup plus de temps qu’elle ne le devrait d’après les lois de la nature.
***
Je reprends donc le problème général.
Nous allons lire maintenant un texte du Maharal qui est un texte de théologie que je lirais assez rapidement pour mettre en évidence l’essentiel sur le point suivant.
Dans l’introduction, nous avons vu que ce qui gênait les théologiens rationalistes par rapport à la notion de miracle, c’est l’idée qu’il puisse y avoir un changement dans la volonté du Créateur. C’est la volonté du Créateur qui a institué l’ordre des lois de la nature, en hébreu le Tévah, la nature, et l’idée que Dieu intervienne pour changer les lois de la nature c’est un cas particulier de son action de providence. Le cas général étant le fait qu’Il intervienne dans la gestion du monde à travers les lois de la nature, en tout cas dans la cohérence du monothéisme intégral.
Mais ce cas particulier, en contradiction avec les lois de la nature, est une idée qui gène les théologiens que j’appelle par méthode « rationalistes ». En fait, un théologien n’est par définition pas rationaliste puisqu’il croit en Dieu, et que la raison livrée à ses propres forces n’y croit pas, mais nous n’avons pas d’autres vocabulaire en français pour les définir, ce sont disons les théologiens non-mystiques. Il vaudrait mieux employer des attributs négatifs.
Pourquoi cette difficulté ? A cause de l’existence du texte biblique qui raconte des événements de ce type que nous commémorons à ‘Hanouka. Depuis le 1er Shabat du monde, depuis que la nature fonctionne, le texte biblique raconte l’intervention de Dieu pour réaliser dans l’histoire des hommes des événements qui ne devraient pas se passer si le monde ne fonctionnait que d’après les lois que Diue lui-même a institué. C’est cela qui gêne les théologiens. Ces théologiens sont par ailleurs des croyants, des grands maîtres de la tradition. Ils seraient beaucoup plus à l’aise si le texte biblique n’existait pas. Mais alors ils n’auraient pas de chaire de théologie…
Pourquoi cette difficulté ?
C’est parce qu’à partir d’un certain temps dans l’histoire du monde, le monde a changé par rapport à ce problème. Ce n’est plus le monde où, de façon visible et diagnosticable, Dieu intervient, et que j’appelle d’habitude le monde où Dieu se révèle. Le temps de la Bible a été clos. C’est le temps où est clos la période de la révélation dévoilée de l’intervention de Dieu dans le monde. C’est la période de l’achèvement de la prophétie. Achèvement qui ne veut pas dire fin dans le sens total. Cela veut dire occultation. Il y a une rémanence de ce qui s’est passé en ce temps-là. Mais je vous rappelle la formule essentielle pour situer ce problème. On a oublié que la révélation a eu lieu et que c’était sérieux parce qu’on a oublié qu’elle a cessé. Le fait même qu’on ait oublié ce phénomène de cessation de la prophétie a dénaturé la relation à la notion même de prophétie. Les hommes se relient au monde comme il se trouve depuis l’arrêt de la prophétie – c’est-à-dire il y a 2600 ans à peu près la fin du 1er temple – comme si c’était le monde dont la bible parle. Or, la bible parle d’un monde où Dieu intervient de façon dévoilée. Mais ce n’est pas le nôtre ! Donc il s’est passé quelque chose ! On a oublié ce qui s’est passé ! Ce qui s’est passé c’est la clôture du temps de la révélation.
Et alors nos théologiens, finalement, évoluent dans un monde où il est difficile de formuler et de diagnostiquer les choses dont parle la Bible dans le monde tel que l’homme cultivé en a expérience dans sa représentation disons rationnelle.
J’essaie de vous faire comprendre la difficulté de ces théologiens du moyen-âge, comme Maïmonide, qui bien sûr dans son enseignement de rabbin parle des miracle de la Bible avec la foi du charbonnier. Après tout c‘est un rabbin ! Mais quand il fonctionne comme théologien et comme philosophe il s’évertue à essayer de faire comprendre à un rationaliste, pour qui le monde n’est que le monde de notre contemporanéité dans lequel il n’y a aucune évidence des choses dont parle la Bible, que l’on peut quand même lire la bible. Avec des stratégies intellectuelles. Je vous en rappelerais une qui évacuent les difficultés de ces récits de miracle.
Que Dieu aurait prévu dès la Création du monde que les miracles racontés par la Bible se passeraient comme il se sont passés.
C’est une des explications que l’on accroche à Maïmonide. Le texte de Maïmonide est plus subtil que cela, mais en général les universitaires accroche à Maïmonide la thèse suivante : dès la création, Dieu a prévu que la mer rouge s’ouvrirait le jour où elle devait s’ouvrir. Dès la création du monde Dieu a prévu qu’une petite fiole d’huile donnerait de l’huile pour 8 jours…etc.
Encore une fois, cette explication complique le problème. N’est-il pas plus simple d’admettre que Dieu est Dieu.
Pour un théologien « normal », il n’y a aucun mystère quand Dieu intervient : c’est Dieu qui intervient ! Bien entendu, il faut craindre les faux diagnostics, les miracles de sorciers, et toute cette superstition. Depuis la fin de la prophétie, les théologiens se trouvent dans le même monde que celui des philosophes. Or, le monde des philosophes c’est un monde où il n’y a pas de révélation. Or, c’est le monde de l’histoire depuis la destruction du 1er temple, où la révélation a cessé. Que signifie qu’elle a cessé ? Elle s’est cachée ! Mais nous ne rencontrons plus d’événements de ce type, des récits de miracles de la Bible.
L’argument principal de ces théologiens dits « rationalistes » – et encore une fois, je réserve leur quant-à-soi intérieur – il suffit de lire leurs autres livres comme par exemple de Maïmonide. Si nous lisons ce qu’il dit des miracles dans Mishnei Torah cela n’a rien à voir avec ce qu’on lui fait dire dans le Guide des Égarés. Et pas seulement Maïmonide, le Ravdak, Saadiah Gaon, et tous les autres…
Maharal :
Indépendamment des arguments que je vous ai cité en introduction, il y a un argument auquel le Maharal va se confronter dans le texte que nous allons lire.
C’est l’idée que le miracle brise l’ordre du monde. C’est la notion de Seder.
Je vous dis tout de suite la thèse du Maharal : Il va expliquer que les miracles eux-aussi obéissent à un ordre. Il y a un ordre des miracles qui n’est pas le même que l’ordre des lois de la nature, mais il n’y a pas d’arbitraire. Ce n’est pas n’importe quoi dans l’ordre de l’arbitraire qui est défini par le miracle par les catégorie du récit biblique. S’il nait un veau à 5 pattes ce n’est pas un miracle c’est un déchet statistique. Et il y a des veaux à 5 pattes qui naissent. Par exemple, nous savons que pour 10 000 naissances il y a un garçon qui nait circoncis. C’est statistique ce n’est pas forcément un miracle. Je dis « pas forcément » c’est pour les familles où cela arrive, je veux les laisser croire qu’il y a un miracle…
Le Maharal explique : il ne faut pas croire que il y ait un arbitraire dans ces événements que nous définissons comme miracle dans la définition simple : un événement qui contredit les lois habituelles du fonctionnement des phénomènes selon l’ordre de la nature. Ce n’est pas arbitraire, il y a un ordre des choses. Et là, il y a une logique très profonde. C’est le Créateur qui fait des miracles. Ce même Créateur qui a institué les lois de la nature, c’est lui qui fait des miracles. Donc dans l’ordre de Sa volonté un autre niveau de Son projet pour l’histoire de Son monde.
Vous comprenez pourquoi le Talmud nous habitue à être rebelle à cette attitude de débusquer le miracle partout. La religiosité talmudique a horreur de cela. Cela va jusqu’à cette consigne : il ne faut pas s’attendre à un miracle. Si le miracle vient, on fait une fête. Et bien sûr, on espère toujours que s’il faut, pourvu qu’il y ait…, mais d’abord vivre dans l’ordre du monde tel que Dieu l’a voulu en le créant.
Eïn soum’him al ha-ness (Pessachim 64b) on ne compte pas sur le miracle.
Le Maharal va nous dire qu’il y a un Seder propre aux Nissim.
Je vais introduire cela par une analyse très brève de deux mots du vocabulaire biblique qui disent les miracles. Il y a au moins 7 mots différents, je vais en prendre deux. Ot et Mofet.
Le miracle est toujours appelé smultanément Ot et Mofet.
La signification de Ot, c’est un signe. C’est-à-dire un événement qui a une signification.
Mofet dans l’hébreu moderne signifie une preuve. Mofet c’est un prodige. C’est un événement qui en lui-même sert de preuve. Cette notion de miracle a ces deux dimensions entre autres.
Je vous cite un texte du Sifrei, un des Midrashim sur la Torah, à propos de la sortie d’Egypte. Le même événement était Ot pour les Hébreux et Mofet pour les Egyptiens. Les Hébreux en percevaient la signification et les Egyptiens étaient frappés par l’aspect de prodige qui les terrorisait. Dans le même miracle ces deux dimensions, Ot ou Mofet. Mais le fait qu’il y ait signification n’évacue pas l’aspect Mofet, l’aspect prodige.
Par expérience pédagogique, je sais que très souvent l’esprit humain a tendance dès qu’il atteint la signification d’un événement de le banaliser. Pourquoi ? Parce qu’il en connait la signification, alors cela perd tout sens. Comprenez le sens des mots : signification et sens. Parfois on hésite à donner des significations pour éviter que cela perde du sens. C’est pourquoi on ne donne de significations qu’à ceux qui sont capables d’apprécier le sens si j’ose dire.
La 2ème explication du Sifrei était de dire que c’était Ot baShamayim Mofet al haarets un signe dans le ciel et un prodige sur terre. On peut relier d’ailleurs les deux niveaux de signification.
Texte du Maharal :
C’est une des objections des théologiens rationalistes que le Maharal discute.
Nous en avons vu déjà deux :
– L’identification de l’essence divine avec la fonction de connaissance. Le Maharal refuse cela. L’essence divine est autre que le fait que Dieu soit capable de connaissance absolue. C’est un de Ses attributs.
– L’identification entre l’essence divine et Sa volonté. Là encore le Maharal en prenant à l’appui des versets très clairs évacue tout cela.
Son argumentation principale est de dire que tout ce que nous savons de Dieu c’est qu’il est Qadosh, séparé, à part, des conditionnements du monde. Et que nous ne connaissons aucune autre définition de Son essence sinon qu’elle est en-dehors, séparée de tout ce qui conditionne le monde de la Création. Et par conséquent, les théologiens qui affirment que Dieu est tout entier connaissance, tout entier volonté, sortent cela de leur tête dit le Maharal. Ce que la Torah dit c’est que Dieu est Qadosh. On traduit par « Saint » en français mais dans le sens étymologique « à part » et donc non soumis aux conditionnements du monde.
Par conséquent, il en résulte que le fait qu’Il soit connaissant du monde Lui permet de suivre les fluctuations des changements de ce qui se passe dans le monde sans que Son essence soit atteinte puisque c’est une fonction. De la même manière, pour la volonté lorsqu’il décide d’intervenir au moment où il intervient, ponctuellement, et non pas, comme selon la stratégie intellectuelle des théologiens rationalistes l’imaginent, de prévoir tout avant de créer le monde comme si c’était une mécanique fataliste. Le Maharal est parfois très sévère pour ces théologiens. J’espère avoir montrer que ce n’est pas la foi théologique qui est en question mais leur système pédagogique ; parce qu’ils se trouvent dans un monde où il faut s’expliquer avec des arguments d’athées. Alors leur théologie devient une athéologie. On commence le texte :
Une autre difficulté consiterait à dire à ordonnancer l’existence des existants, il n’est pas possible que lui-même change leur ordre – seder. Parce que lorsqu’il fait exister cette chose nouvelle du miracle – Ot – comme par exemple le fait que le soleil se soit arrêté au temps de Josué, et ce cas-là serait une annulation et un changement dans l’ordre des phénomènes. Et il n’est pas pensable que le désordre vienne de Celui qui avait mis l’ordre. N’est-ce pas que contre cette objection ont déjà répondu nos maîtres : lorsqu’ils ont enseigné par exemple : Dieu a fait une condition avec l’œuvre du commencement (le monde) que lorsqu’il serait nécessaire que la mer s’ouvre elle s’ouvrirait. Leur intention était de dire qu’il leur a semblé difficile de penser après que tous les existant existent selon un certain ordre qui vient de Dieu lui-même, il est impossible qu’il y ait un changement dans cet ordre car l’œuvre de Dieu et l’ordre qu’il a mis dans le monde est digne d’être éternel et de ne pas changer. Et aussi que toutes les créatures sont créées par le Nom de Dieu.
[Il y a ici un autre problème mais je n’ouvre pas de parenthèse, la médiation du Créateur c’est le Nom de Celui qui est Dieu.]
Et du fait que tous ont été créés par Son Nom qui est éternel, subsistant à jamais, de même que Son Nom est un existant éternel, ainsi sont dignes d’être les créatures du commencement qui dépendent de Son Nom.
[Si Son nom est éternel, ce qu’Il a créé doit être éternel. Vous voyez la difficulté parce que la notion d’éternel et la notion de créé semblent être en contradiction. C’est pourquoi il dit « les créatures qui dépendent de Lui ». En quoi sont-elles créatures si elles sont éternelles ? Puisque créature cela veut dire qu’il y a eu un commencement. « Au commencement Dieu créa… » Je laisse cette difficulté de côté. J’avance :.]
« כִּי בְּיָהּ יְהוָה, צוּר עוֹלָמִים Ki BeYah Hashem Tsour Oulamim « Car avec/par Yah Adonaï roc éternel ». (Isaïe 26:4) (cette citation ouvrirait une autre parenthèse dans laquelle je n’entre pas…) Et en cela ils ont dit, que lorsque les créatures ont été créées était déjà prévu dans cet ordre le miracle qu’il y aurait dans l’histoire des créatures. De même qu’a été ordonnancé de par Sa Volonté l’ordre de la nature. Et cet ordre-là (le terme a changé non plus Seder mais Sidour. Seder c’est la structure de l’ordre, Sidour c’est l’ordre lui-même. Si je mets en ordre des éléments, les éléments sont dans un certain Sidour, mais quelque soit les éléments la structure s’appelle le Seder). Cet ordre des choses dans l’œuvre du commencement Dieu n’a pas décidé que le monde serait que nature.
[Il y a là une idée importante : nous sommes habitués à dire que le monde est la nature. C’est la création devenue la nature lorsque Dieu a décidé de lui donner son autonomie. L’idée qu’il y a là, c’est que le monde c’est la nature. Mais ce n’est pas la nature strictement nature: il y a des interstices dans lesquels un autre ordre peut apparaitre.]
Mais il y a aussi un ordre pour les miracles qui ne sont pas d’après la nature. De telle sorte que en fin de compte le miracle se fasse.
Le Maharal critique en cela les positions décrites précédemment. Ce n’est pas que Dieu avait prévu que l’événement du miracle se fasse, mais qu’il y ait possibilité d’un événement s’il doit se faire.
Il y a un ordre de la nature, mais il y a aussi un ordre des miracles. Ce qui ne veut pas dire que ces miracle soient prédestinés de manière fatale. C’est une notion très différente de celle de la fatalité. Les astrologues modernes commencent un peu à corriger cette notion de fatalité astrologiques en y introduisant un peu cette notion-là que l’événement n’est pas fatal mais possible. Depuis quelques dizaines d’années, un nouvelle astrologie a corrigé tout ce qu’il y avait de fatal et de prédéterminé, le fatum des Latins, la prédiction astrologique. Je vous le signale parce que cela existe et que vous risquer de le rencontrer : une irruption de la mentalité biblique dans l’astrologie moderne.
Q : Comme s’il y avait deux structures parallèles, la structure d’un certain ordre voulu et la structure d’une possibilité ?
R : l’idée est là mais il y en a une infinité, et non pas seulement deux. Il y a l’ordre de la nature. C’est la structure de base qui fait que le Olam, le monde créé, est devenu la nature. Et il y a une infinité de niveaux qui, suivant la Volonté de Dieu, joue à tel ou tel moment. Infinité et non pas deux seulement. Il y a un ordre de miracle qui est à un certain niveau et il y a un autre ordre qui est à un autre niveau. Par exemple, une naissance impossible qui arrive quand même c’est à un certain niveau de ces structures auxquelles tu penses. De l’huile qui brûle 8 jours au lieu d’un jour, c’est un autre niveau. Du vinaigre qui brûle comme si c’était de l’huile. On en a des traces dans le Talmud.
Q : Le miracle avec Elisha le prophète… ?
R : C’est toi le prophète parce que c’est ce texte que l’on va étudier !
Garder l’idée essentielle de ce texte du Maharal : de même qu’il y a un Seder de la nature, il y a un Seder des Nissim. Il donne d’autres exemples.
Le Maharal donne une citation de la Guémara de Shabat:
« Celui qui dit le Hallel tous les jours est un blasphémateur ».
Le Hallel est la prière de louange après un miracle. Pourquoi celui-ci est-il considéré comme un blasphémateur ? Parce qu’il considère que tout est miracle ! Donc il ne considère par que le miracle existe comme tel. C’est comme s’il n’admettait pas qu’il y a un Minhag HaOlam une manière de se conduire du monde qui est garantie par la Volonté du Créateur.
Une expression que nous rencontrons dans la liturgie : Dieu qui est El Néeman.
’El melekh Ne’eman (אל מלך נאמן ), Dieu, Roi, en Qui l’on place sa confiance.
Dans la prière, en dehors de la collectivité, on ajoute ces 3 mots dans la lecture du Shéma pour faire le nombre des mots. On traduit habituellement « Dieu fidèle ». Que signifie que Dieu est fidèle ? Il est fidèle à Ses promesses fidèle à Sa parole donnée, Dieu à qui on peut faire confiance, Dieu digne de foi. Cela semble être l’inverse mais c’est le sens du terme El Nééman. « Dieu à qui on peut faire confiance ». C’est enseigné à propos des lois de la nature : les lois de la nature sont garanties par le Créateur. On peut lui faire confiance qu’il n’y aura pas de miracle tous les jours…
Parce que si nous étions dans un monde enchanté alors la liberté de l’homme n’aurait pas d’appui. On peut faire confiance à Dieu que le monde fonctionne comme Il l’a voulu. C’est avec Abraham que cette conscience apparait dans l’histoire. La conscience moderne qui est sortie de la conscience magique, la conscience affolée dans la crainte que les phénomènes changent par caprice des dieux. Abraham sort de cette conscience magique et fonde la modernité.
Bien entendu, la Bible nous raconte des miracles et chacun dans l’expérience de sa vie en a expérience. En général on n’en parle pas parce que seul celui qui l’a expérimenté comprend de quoi il parle. Je vous donnerais presque le conseil de ne jamais en parler si vous avez dans votre vie l’expérience de choses dites miraculeuse dans l’ordre du miracle caché. Des événements inattendus qui ne devraient pas se passer normalement qui se passent quand même…
El Néeman : cela veut dire que l’on peut faire confiance à Dieu que le monde fonctionne comme les savants nous disent qu’il fonctionne (lorsque ces vrais savants établissent les vrais lois des phénomènes). Alors cela garantit cette sécurité de la conscience, c’est en cela que Dieu est fidèle.
C’est l’allusion au verset [Tehilim 148:6] :
חָק-נָתַן, וְלֹא יַעֲבוֹר
‘Hok Natan VéLo Yaavor:
Il a institué un statut et Il ne le transgresse pas.
Haftara : 2 Rois chapitre 4
C’est un récit dans la Bible qui parle de quelque chose d’analogue à ce miracle de la fiole de ‘Hanoukah. Une fiole d’huile qui ne devait brûler qu’un jour et a brûlé 8 jours. Pourquoi 8 jours et non pas 9 ou 7, 6… ? Quel en est la signification ?
C’est un enseignement du Maharal que le chiffre 8 est à l’indice du 8ème jour qui est le temps messianique. Il y a les 6 jours du commencement, le 7ème jour où est logé toute l’histoire du monde, le 7ème jour aboutit au 8ème qui est le jour messianique. Shmoneh, huit en hébreu, c’est la même racine que Shémén qui veut dire l’huile. C’est le jour de l’onction par laquelle le dignitaire était oint. Ha Melekh Ha-Mashia’h : le roi qui était choisi par le prophète parmi tous les prétendants légitime pour être oint. On l’appelait le Melekh HaMashia’h le roi oint. Ce mot est devenu en français le mot Messie à travers le grec qui a pris un décalque de Mashia’h. Messia dans les bibles traduites est devenu messie en français. Le mot messie en français connote ce que les Français disent du Christ. Cela n’a rien à voir avec la notion étymologique de Mashia’h qui était un roi. Il y avait 2 Messi’him : le roi messie et le prêtre messie. Le Kohen HaMashia’h et le Kohen HaMashia’h. Cela veut dire que le 8ème jour est défini comme étant le jour de l’onction le jour de l’huile. Il est fort possible que l’expression française « une huile » pour dire une personne importante vienne de là.
Où est la signification messianique de l’événement ? C’est très simple comme d’habitude : pendant combien de temps cette fiole qui ne devait brûler a-t’elle duré ? Pendant le temps qu’il fallait pour préparer l’huile nouvelle. Il a fallu 8 jours pour préparer l’huile nouvelle, alors elle a brûlé 8 jours ! La signification messianique de cela est maintenant très claire: où était l’aspect miraculeux du miracle ? C’est que quelque chose de pur était resté. Un reste de reste de reste, qui a, si j’ose dire, tenu le coup le temps qu’on prépare la nouvelle huile. Il faut le comprendre au niveau des hommes : Il était restée une poignée de Judéens fidèles qui ont réussi à faire la transition de l’histoire jusqu’à ce que la restauration de la nation judéenne apparaisse. C’est ce que nous avons vécu dans notre génération. Or, cet événement comme tel est à l’indice huit.
La signification doit d‘abord être mise dans l’événement, alors après on comprend la signification du chiffre. Ne faites pas les choses à l’envers. Ce n’est pas parce que 8 est le chiffre messianique que cela a duré 8 jours, c’est parce que l’événement était messianique que cela a duré 8 jours. Par exemple : ce n’est pas parce que l’horloge marque l’heure qu’elle fasse qu’il est cette heure-là. C’est l’inverse, c’est parce qu’il est cette heure-là que l’horloge le marque…
2 Rois Chapitre 4 :
וְאִשָּׁה אַחַת מִנְּשֵׁי בְנֵי-הַנְּבִיאִים צָעֲקָה אֶל-אֱלִישָׁע לֵאמֹר, עַבְדְּךָ אִישִׁי מֵת, וְאַתָּה יָדַעְתָּ, כִּי עַבְדְּךָ הָיָה יָרֵא אֶת-יְהוָה; וְהַנֹּשֶׁה–בָּא לָקַחַת אֶת-שְׁנֵי יְלָדַי לוֹ, לַעֲבָדִים
Une femmes parmi les femmes des fils de prophètes
(Les Bnei Ha-Neviim בְנֵי-הַנְּבִיאִים étaient les élèves de prophètes. Retenez que cela ne se passe pas n’importe où mais dans une famille de prophètes. Il y avait des écoles de prophètes où les Bnei Ha-Neviim בְנֵי-הַנְּבִיאִים que l’on traduit par fils de prophètes s’initiaient à la prophétie. Une des disciplines qu’ils apprenaient était la musique. Pour pouvoir être prophète il fallait, entre autres grandes qualités, être capable d’être grand musicien. Les Bnei Ha-Néviim on les prenait chez les musiciens. C’est clair quand on parle des Léviim, les Lévites, qui étaient les chanteurs. Je crois que dans la société juive contemporaine si on cherchait qui sont les Lévites j’aurais tendance à répondre que ce sont les poètes. Ceux qui sont capables de les écrire et d’en faire le chant. Poiën créateur qui a donné le mot Païtan qui est le mot rabbinique du temps des Grecs. Je crois effectivement que cette fonction des Lévites est en quoique ce soit jouée de notre temps par les poètes. Derrière les grands mouvements de l’histoire juive, il y a d’abord des poètes. Le discours d’un poète est commun à toute la communauté, alors que le discours d’un idéologue n’est commun qu’à ses fidèles. Ce n’est pas pour rien que les prophètes étaient de si grands poètes. Ce qu’il faut comprendre c’est qu’ils étaient musiciens. La preuve c’est qu’on ne lit pas on chante, et pour chanter il faut être musicien.
וְאִשָּׁה אַחַת מִנְּשֵׁי בְנֵי-הַנְּבִיאִים צָעֲקָה אֶל-אֱלִישָׁע לֵאמֹר, עַבְדְּךָ אִישִׁי מֵת, וְאַתָּה יָדַעְתָּ, כִּי עַבְדְּךָ הָיָה יָרֵא אֶת-יְהוָה; וְהַנֹּשֶׁה–בָּא לָקַחַת אֶת-שְׁנֵי יְלָדַי לוֹ, לַעֲבָדִים
Une femmes parmi les femmes des fils de prophètes…
Traduction du rabbinat :
La femme de l’un des jeunes prophètes vint se plaindre à Elisée, disant:
Tsaaqah צָעֲקָה est beaucoup plus fort que cela: a crié, a réprimandé.
Je vous dis ce que j’ai entendu hier sur ce verset du Rav Eliyahou. Je me trouvais à une soirée où il se trouvait aussi, et il a cité ce verset pour tout à fait autre chose, il a donné un Diyouk une précision de sens que je voudrais mettre en evidence cela nous servira pour ce texte. Il a cité cela en disant : c’est une femme qui était pleine de dettes, et le créancier est venu réclamer ses dettes qu’elle ne pouvait pas payer, et lui réclamer ses deux enfants comme esclaves au service du roi d’Israël. En ce temps-là c’était A’hav-Achab un païen marié à Izevel-Jézabel.
La revendication de cette femme au prophète Elisée est très forte, elle le met en accusation : comment peux-tu laisser faire une chose pareille que des enfants d’un fils de prophète reçoivent une telle éducation chez des païens ! Cela veut dire que ce qui va déclencher le miracle à venir est un événement suffisamment important pour qu’on apprenne pourquoi le prophète va déranger le bon Dieu pour faire un miracle. Vous voyez déjà le parallèle avec l’identité des Makabi. Toute l’identité des Judéens est en risque d’être hellénisée, alors il faut faire quelque chose pour être sauvé de cela. Cela veut dire qu’il faut arriver à comprendre l’événement au niveau du miracle. Est-ce que l’événement justifiait le miracle ? Alors le miracle devient vraisemblable, et après on comprend comment il fonctionne. Si on a déjà compris cela c’est l’essentiel. Pourquoi de tels récits nous gênent-ils ? Parce qu’ils sont apparemment anecdotiques. Des histoires de bonne-femmes, de foi de charbonnière, si j’ose dire ! Parce qu’elle n’arrive pas à payer ses dettes, le bon Dieu va faire que de l’huile va couler, comme on va le voir ! Ou bien parce que les Judéens voulaient allumer leur candelabre, une petite fiole d’huile va brûler 8 jours au lieu d’un !
Ce qui est en jeu est beaucoup plus important que cela. Voilà l’exemple que le rav Eliyahou a donné :
וְאִשָּׁה אַחַת מִנְּשֵׁי בְנֵי-הַנְּבִיאִים צָעֲקָה אֶל-אֱלִישָׁע לֵאמֹר, עַבְדְּךָ אִישִׁי מֵת, וְאַתָּה יָדַעְתָּ, כִּי עַבְדְּךָ הָיָה יָרֵא אֶת-יְהוָה; וְהַנֹּשֶׁה–בָּא לָקַחַת אֶת-שְׁנֵי יְלָדַי לוֹ, לַעֲבָדִים
Une femmes parmi les femmes des fils de prophètes est venu se plaindre en disant : Ton serviteur, mon mari est mort: et toi tu sais que ton serviteur était craignant Dieu. Or, le créancier est venu prendre mes deux fils pour lui comme esclaves. »
On ne parle pas de n’importe qui, le miracle a lieu pour un craignant Dieu.
וַיֹּאמֶר אֵלֶיהָ אֱלִישָׁע, מָה אֶעֱשֶׂה-לָּךְ, הַגִּידִי לִי, מַה-יֶּשׁ-לכי (לָךְ) בַּבָּיִת; וַתֹּאמֶר, אֵין לְשִׁפְחָתְךָ כֹל בַּבַּיִת, כִּי, אִם-אָסוּךְ שָׁמֶן
Elisha lui dit: que puis-je faire pour toi. Raconte-moi ce que tu as dans la maison.
Il lui dit qu’il ne peut pas faire un miracle sur rien. Si elle a quelque chose il peut le miraculer. Sans base, rien !
וַתֹּאמֶר, אֵין לְשִׁפְחָתְךָ כֹל בַּבַּיִת, כִּי, אִם-אָסוּךְ שָׁמֶן
Elle dit : Il n’y a rien de ta servante dans la maison sinon une fiole d’huile.
וַיֹּאמֶר, לְכִי שַׁאֲלִי-לָךְ כֵּלִים מִן-הַחוּץ, מֵאֵת, כָּל-שכנכי (שְׁכֵנָיִךְ)–כֵּלִים רֵקִים, אַל-תַּמְעִיטִי
Il dit : Va et demande pour toi des Kélim des vases.
Retenez ce terme Kéli, il faut qu’il y ait un Kéli pour que le miracle vienne. Il faut qu’il y ait un véhicule du miracle. Alors, on traduira Kéli pour l’histoire de l’événement par des vases, des récipients… Mais en hébreu, Kéli, cela veut dire des véhicules de présences. Présences qui ne peuvent venir que s’il y a des véhicules. De la même manière que le Or-lumière dépend de son Kéli-réceptacle. Sans Kéli, le Or ne vient pas.
La lumière ne vient que s’il y a un véhicule approprié.
Texte C
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וַיֹּאמֶר, לְכִי שַׁאֲלִי-לָךְ כֵּלִים מִן-הַחוּץ, מֵאֵת, כָּל-שכנכי (שְׁכֵנָיִךְ)–כֵּלִים רֵקִים, אַל-תַּמְעִיטִי
Il dit : Va et demande pour toi des Kélim des vases vides au dehors, chez tous tes voisins, des vases vides, mais pas en petit nombre.
Il y aura autant de miracle qu’il y aura de Kélim. Vous voyez donc que la racine du miracle c’est le Kélim.
וּבָאת, וְסָגַרְתְּ הַדֶּלֶת בַּעֲדֵךְ וּבְעַד-בָּנַיִךְ, וְיָצַקְתְּ, עַל כָּל-הַכֵּלִים הָאֵלֶּה; וְהַמָּלֵא, תַּסִּיעִי
Tu viendras tu fermeras la porte sur toi et sur tes enfants, et tu verseras de cette huile sur tout les Kélim et tu mettras ceux qui sont déjà pleins de côté.
On voit déjà dans le détail même du récit que cela nous renvoie à un vocabulaire que reprendront les Kabalistes part la suite pour dire que lorsque Dieu a créé le monde, Il a d’abord créé des Kélim et il y a déversé la lumière. Si on ne dispose pas du Kéli approprié pour que vienne l’influx que représente le miracle, cet influx ne vient pas. Encore une fois, un récit de ce type pour illustrer ce qu’on a appris avec le Maharal évacue toute notion de caprice d’arbitraire dans cette notion de miracle. Ce n’est pas n’importe quoi qui se passe, et cela ne se passe que là où le Kéli est approprié.
וַתֵּלֶךְ, מֵאִתּוֹ, וַתִּסְגֹּר הַדֶּלֶת, בַּעֲדָהּ וּבְעַד בָּנֶיהָ; הֵם מַגִּישִׁים אֵלֶיהָ, וְהִיא מיצקת (מוֹצָקֶת
Elle le quitta et elle ferma la porte sur elle et sur ses enfants. Et eux approchèrent des Kélim et elle versait.
וַיְהִי כִּמְלֹאת הַכֵּלִים, וַתֹּאמֶר אֶל-בְּנָהּ הַגִּישָׁה אֵלַי עוֹד כֶּלִי, וַיֹּאמֶר אֵלֶיהָ, אֵין עוֹד כֶּלִי; וַיַּעֲמֹד, הַשָּׁמֶן
Et il arriva, lorsque les Kélim furent pleins, elle dit à son fils apporte moi un Kéli encore, et il lui dit : il n’y a pas d’autre Kéli. Et l’huile s’arrêta.
C’est là où je voulais arriver. Quand il n’y a plus de Kélim cette huile s’arrête ! Et cette huile a cette capacité, si les événements le nécessitent, de faire ce qu’elle aurait dû être dans l’intention du Créateur. Nous sommes dans un monde où la volonté de Dieu finalement est Tsimtsoum, est dans sa plus grande économie. Nous avons peu de lumière dans beaucoup d’obscurité. Mais la Volonté du Créateur est que la lumière soit tout.
Qu’est-ce que cela qu’une goutte d’huile ne brûle que le temps d’une goutte d’huile ? L’huile qui brûle devrait brûler ! Pourquoi un seul instant ? Je veux dire que la véritable nature de l’huile se dévoile dans le miracle.
Je vous prends une formule habituelle de la prière : toute prière est d’une certaine manière une demande du miracle. L’état du monde d’après le fonctionnement du monde n’est pas supportable et la prière demande à Dieu un changement pour que le monde soit plus vivable. C’est ce qu’il y a derrière toute demande de prière. Avec la difficulté considérable de se mettre devant Dieu pour Lui dire que le fonctionnement de Son monde ne nous satisfait pas, et Lui demander de faire quelque chose. C’est énorme cette entreprise de la prière ! Il faut donc des conditions pour que l’entreprise même de la prière soit permise.
Telle est la formule de toute prière : « Que Ta Volonté se fasse ! »
Cela veut dire que lorsque j’ai obtenu ce miracle demandé c’est Sa Volonté qui s’est faite. Alors la vraie question c’est de savoir pourquoi elle ne se fait pas !
Nous sommes dans un monde que nous appelons le monde de la nature qui est un monde diminué dans l’ordre de la Volonté de Dieu. La Volonté de Dieu c’est que la lumière brille. Et non pas avec cette économie.
Cela veut dire que lorsque le miracle apparait c’est un peu du Monde à Venir qui vient dans ce Monde-ci. Et dans le Monde à Venir, il n’y a pas ce Tsimtsoum, cette diminution des choses.
Un des miracles invraisemblables : l’ânesse de Bilaam. La première fois que j’ai demandé au Rav Kook de nous expliquer un peu quelque chose là-dessus il nous a regardé en souriant en disant: « le problème n’est pas tant l’ânesse de Bilaam qui parle mais toutes les autres qui ne parlent pas ! »
A partir du momnent où l’on a compris que le monde que Dieu veut est le monde de l’abondance absolue, alors rien n’est invraisemblable dans cet ordre du miracle. Le vrai problème est ailleurs. C’est d’accepter de vivre ces choses que nous vivons, avec leur sens. Ce n’est plus le problème de l’invraisemblance des choses que le texte raconte, parce que trop anecdotique, ou trop arbitraire, ressemblant aux contes de fée ou de grand-mères…
Dans sa signification, ce miracle de la fiole d’huile, nos générations l’ont vécu. Il a fallu qu’une poignée tiennent le coup le temps qu’on prépare la récolte nouvelle. Alors c’est vrai à tous les niveaux. Il n’y a qu’à voir ce que la société israélienne représente après les dernières générations de l’histoire juive en Europe.
Qund vous entendez les discours officiels qui comparent les fondateurs du pays aux Makabim sachez qu’ils ne savent pas à quel point ce qu’ils disent est vrai. De leur temps ce miracle de la fiole d’huile s’est reproduit. On a pu faire ce qu’on a fait : ce qui est dit dans la prière de ‘Hanoukah : les nombreux aux mains des plus faibles…etc.
Q: Quelle est la différence entre le Ness et la Hashga’ha ?
R: La Hashga’ha c’est la protection providentielle. Ce n’est pas nécessaire que cela se traduise par des miracles. Il peut y avoir des miracles dans l’ordre de la Hashga’ha mais cela n’est pas nécessaire. Le Ness c’est quand une loi de la nature est suspendue pour que la Hashga’hah intervienne. Il n’y a aucune chanche pour qu’une petite juive plaise à l’empereur de Perse. Or, c’est elle qui a trouvé grâce dit le texte, et c’est par là finalement que tous les autres fils de l’événements se sont tresssés pour arriver au résultat que les Juifs de Perse ont été sauvés des Amalécites.Aucune cohérence sociologique ne peut rendre compte d’un phénomène pareil.
Lorsqu’une règle de conditionnement joue au niveau du phénomène socio-historique, le fait que l’empereur Assuérus mette sur le trône de Perse la reine Esther dans les conditions sociologiques de ce temps-là est une impossibilité. En ce temps-là, c’est impossible ! Or, c’est arrivé quand même ! C’est un miracle au niveau des lois sociologiques. Concernant le miracle au niveau physique, la suspension des lois déterministes est plus évidente. Mais il faut l’entendre aussi au niveau du conditionnement historique. C’est pourquoi tranquillement on va introduire le rappel de Pourim par Al Hanissim vé al hapourqane comme pour ‘Hanoukah.
Q : Pour le passage de la mer rouge ?
R : Les lois de la nature ont été suspendues.
J’ai entendu une fois d’un de mes maitres qui l’a dit très sérieusement : vous voulez savoir c’est quoi un rabbin miraculeux ? C’est un rabbin que c’est un miracle qu’il soit rabbin !
Q: inaudible
R: Dans un cours sur le fondement de l’induction : qu’est-ce qui peut m’assurer que les lois fonctionneront demain comme elles ont fonctionné hier ? L’habitude fait que les lois ont fonctionné jusqu’à aujourd’hui, que le soleil s’est levé du côté où il s’est levé me rend sûr que demain il se lévera de ce même côté… Mais je n’en sais rien à l’avance. Il y a un acte de foi qu’on appelle l’induction qui fonde le fonctionnement de la conscience scientifique. Il faut donc s’émerveiller de cela. Si on garde cette capacité d’émerveillement on reste plus familier à la notion de miracle. Ceci dit, si le soleil se lève de l’autre côté cela veut dire qu’une autre loi a joué, un autre Seder. C’est arrivé deux fois : au temps de Métoushéla’h et au temps de Josué.
Pour quelqu’un qui n’est pas au courant de ces Sédarim, ces ordres des choses, il dirait que c’est un miracle dans un sens magique mais c’est ce sens de miracle magique que je voulais précisément évacuer.
Un verset étudié à propos de l’annonce de la naissance d’Isaac à Sarah. Sarah rit et dans ce rire il y a 7 dimensions de rires : joie, émerveillement, doute…
Mais elle rit. Alors Dieu lui dit [Gn.18:14]:
הֲיִפָּלֵא מֵיְהוָה, דָּבָר
Ha-itpalel Me-Hashem Davar?
Est-ce qu’une chose est trop merveilleuse pour Dieu?
Une autre lecture plus proche du texte hébreu a le sens suivant : est-ce que Dieu a besoin de faire un miracle pour intervenir ? C’est encore plus fort que le miracle. Si Dieu est Dieu, a-t’Il besoin de faire des miracles à la manière des magiciens ? Ce qui est interdit dans la tradition biblique c’est de croire aux miracles des magiciens. Or, la piété folklorique habituelle ne croit aux miracles qu’à la manières des magiciens ! C’est cela qu’il y a de grave. Si j’ose dire, la Bible ne nous fait croire que en des miracles normaux. Les miracles de la bible sont sains, alors ils sont saints.
Q : Les miracles de Moïse avec le bâton devenant serpent ?
R : C’est justement de cela que le texte du Maharal parle dans la suite. Il s’agit d’un bâton qui se transforme en serpent, et un serpent qui se retransforme en bâton. Apprenez autant qu’il faut les lois de l’évolution et vous verrez que à l’origine il y a des végétaux et ensuite des animaux. Le temps qu’il faut pour que dans le miracle il y a un catalyseur du temps. Il faut bien comprendre les choses au niveau où ces théologiens en parle. Ce n’est pas n’importe quoi qui est devenu un serpent, c’est un bâton ! Je vous donne des analogies sous forme de peinture surréaliste: si vous voyez les images suivantes : une algue, une feuille de palmier, une arrête de sardine, et le squelette de l’homme de l’homme préhistorique. C’est la même réalité mais il a fallu le temps. C’est la même chose. Il faut voir les choses à ce niveau-là. Un bâton est devenu serpent, ce n’est pas n’importe quoi qui est devenu un serpent.
Q : Dans ce passage se trouve une compétition avec les magiciens ?
R : Il y a un point du texte où l’on s’aperçoit que les magiciens sont capables de faire la même chose que Moïse. La réponse qui a été donnée est à deux niveaux. Premièrement, si la loi de la nature qui joue est levée elle l’est pour tous. Donc si Moïse par sa prière obtient qu’une loi de la nature soit levée pour que le signe se fasse, les magiciens le peuvent aussi. Mais il y a une différence. Ils peuvent déclencher la plaie mais ne peuvent pas l’arrêter. Effectivement, même à la naissance du christianisme il y a eu un conflit entre les premiers Chrétiens et les magiciens qui prétendaient faire des guérison miraculeuses analogues. Les miracles dont parle la Bible ne sont pas des miracles de types magiques. Retenez cette notion-là ce n’est pas n’importe quoi. Enfin de compte, il arrive dans l’histoire de la civilisation que beaucoup de choses qu’on croyait des miracles magiques (en dehors des miracles du récit biblique) finalement ont fini par avoir une explication naturelle. Les magiciens étaient aussi souvent des illusionistes. Il y a deux termes dans le récit biblique pour les illusionistes et les magiciens.
Q : A priori le miracle de ‘Hanoukah s’est produit à un moment où il n’était plus nécessaire ?
Dès que les Makabi ont pris le relai pour réinaugurer le temple, l’occupation grecque était déjà terminée pourquoi alors à ce moment là bénéficient-ils d’un miracle ?
R : C’est très bien ce que vous dites là, cela veut dire qu’effectivement il y a un aspect gratuit dans le miracle, il est dans tous les cas en plus. Si j’ai bien compris, on avait déjà la victoire, et on a eu 8 jours pour allumer le candelabre le temps qu’on prépare l’huile pure, on aurait pu attendre 8 jours. Seulement c’était le jour de ‘Hanoukah !
Q : Le miracle a été défini comme une rupture par rapport à l’ordre naturel, comment est-on sûr que l’ordre naturel on le connait ?
R : Il suffit que ce soit l’ordre naturel comme on le connait. Sinon ce n’est pas un miracle.
Il y a vraiment miracle dans le sens d’un Ness que si l’ordre naturel tel qu’on le connait est rompu.
Q : Est-ce que cela veut dire que ce qui aurait pu être considéré comme un miracle il y a 1000 ans parce qu’on parvenait à une telle conclusion…
R : Je vais vous donner un exemple dans la technique : je me rappelle les premiers téléphones !
Quand les Midrashim nous racontait que le premier homme entendait d’un bout à l’autre du monde on concluait à l’imagination orientale du Midrash. Je n’ai pas dit qu’il avait un téléphone, c’est peut-être pire, on découvrira d’autres choses. Mais cela reste miraculeux dans le sens merveilleux en tout cas.
Il faut essayer de retrouver une sérénité de l’esprit talmudique. Il faut savoir premièrement que Dieu est Créateur et que c’est Lui qui garantit les lois de la nature. Et Il nous demande de fonctionner d’après le monde qu’Il a créé. Maintenant, s’il arrive des occasions, des occurrences, où l’on a besoin d’un miracle, on peut demander. Mais c’est l’exception. Les théophanies sont l’exception. C’est la pensée magique qui vit à l’envers.
Blague :
Rabbi Méir rencontre l’enchanteur Merlin.
Rabbi Méir lui dit : Enchanté !
Merlin lui a répondu : Ravi !
Tous ces récits des enchanteurs, si vous voulez, ont plongé leur époque dans un atmosphère de merveilleux mais dans une atmosphère de conscience magique. Les récit des miracles de la bible ne sont pas du tout de cet ordre. Raison pour laquelle la Torah n’en parle pas.
Q : Vous avez parlé de la notion d’abondance des miracles de cet état originaire tel qu’il était prévu au départ. Il y a des miracles où on ne voit pas vraiment la dimension d’abondance.
R : Je vous dis à quoi je pense maintenant : il y a deux facteurs : un facteur d’abondance qui est indéniable, et le facteur de suppression des médiations du temps. Par exemple, les guérisons miraculeuses. Si on avait la technique suffisante qui ferait qu’on ait tant de temps pour l’obtenir, il y a miracle lorsqu’elle est instantanée. Il y a une sorte de catalyseur du temps. Un exemple de prière chez les mystiques : « Que le peu que je mange se fructifie dans mon sein ». Je mange un peu mais que cela devienne abondant en moi. Et il y a effectivement des récits qui montrent que les ascètes se nourrissaient de peu de choses qui en eux se fructifiait. La volonté du Créateur c’est Zeh Olam Malé un monde plein de lui-même. Mais nous avons un monde vide de lui-même. Habituez-vous un peu au monde qui vous attend ! C’est le monde tel que Dieu a voulu le créer qu’Il donnera à ceux qui le mérite.
Une anecdocte à propos de ces histoires de miracles : à la tribune avec des catholiques et des protestants à une réunion de théologiens dans le nord de la France, un pasteur protestant avec un humour intentionnel m’a posé une colle : monsieur le rabbin croyez vous aux miracles de lourdes ? J’ai répondu : Oui ! Silence dans la salle… J’ai ajouté : A une condition c’est que ces miracles soient garantis par une commission épiscopale. Le silence s’est fait pesant…
J’ai ajouté : Cela ne veut pas dire que le catholicisme soit plus vrai que le judaïsme cela veut dire que le bon Dieu s’occupe de toutes ses créatures même catholiques, et chacune à sa manière.
A condition en tout cas d’évacuer tout ce qu’il peut y avoir de mentalité magique.
Effectivement, si une commission épiscopale avec des médecins (ce sont les précautions qu’ils prennent) garantissent vraiment une guérison miraculeuse, que en l’état de l’art de la médecine on ne peut pas obtenir par les médiation du temps qu’il faut alors, c’est un miracle que Dieu a fait. Mais Dieu ne s’occupe pas que des Juifs Il s’occupe de toutes ses créatures. Et cela a rassuré les Chrétiens je dois vous dire…
Q : Y a-t’il encore des dates qui n’ont pas encore été réalisées ?
R : Toutes celles qui ne sont pas encore réalisées !