Re confinement : Quand la force de l’instant a disparu, il ne reste que l’habitude
Si dans les premiers temps de l’émergence du virus, le saisissement général a figé l’instant, l’a immobilisé, capturé et a interrompu le mouvement incessant de notre monde, pour laisser une place, au retrait, à la délicatesse, au scrupule, et nous a permis d’imaginer un instant que l’humanité avait d’un seul coup réalisé qu’il fallait cesser de se répandre sur le monde sans précaution particulière, que le moment du « Chabbat de l’humanité » était arrivé, pour nous laisser entrevoir les prémices d’un monde meilleur basé sur le souci de l’autre, et qui reposerait sur le respect des valeurs morales. Il faut croire que tout cela n’a été que très provisoire. C’est la force de l’instant qui fait que lorsqu’il est loin et que le moment finit par être familier que l’on revient aux habitudes de pensées antérieures. C’est ce qu’il se passe en Egypte avec le Pharaon juste après les 10 plaies. La force de l’instant a contraint le Pharaon à laisser sortir les hébreux d’Egypte après la dernière plaie, la plus terrible, celle des premiers nés. C’est la force de l’instant qui l’a amené à un acte de contrition et de retrait, acceptant de voir sa souveraineté amoindrie par une force qui lui était infiniment supérieure et qui gère le monde d’après la loi morale. Mais trois jours après, lorsque la force de l’instant s’est dissipée et que les conditions de vie ont repris leurs cours habituels alors le Pharaon est revenue aux habitudes de pensée antérieures et a décidé de poursuivre le peuple des hébreux pour aller l’exterminer. C’est ce qui a provoqué sa perte. C’est aussi ce que nous vivons aujourd’hui ou la coexistence avec le virus commence à s’installer durablement et à devenir une habitude que l’on intègre à notre manière de vivre. Il semble que nous soyons désormais contraints d’inscrire notre cohabitation avec le virus sur du long terme, et comme toujours l’homme a su s’adapter et désormais nous nous habituons progressivement à vivre avec. La force de l’instant a disparu pour laisser la place à une forme d’habitude à cohabiter avec le virus Alors que le surgissement du virus dans notre monde a suscité un saisissement qui a pu se lire à travers l’étrangeté de nos villes désertée au moment du premier confinement qui s’est imposé pratiquement partout sur la planète, et ou l’homme avait accepté de se retirer partiellement du monde pour laisser une place pour autre que lui, notre habitude de vivre avec le virus peut aussi se lire à travers la nouvelle façon dont nous appréhendons ce re confinement qui a été imposé en France depuis quelques jours. La légèreté avec laquelle le re confinement est mise en œuvre par les français eux-mêmes illustre de façon saisissante que la stupeur, l’appréhension, l’angoisse qui s’étaient imposées à tous, ont laissé place à une vague habitude qui a transformé les réflexions, qui ont émergé avec le jaillissement du virus dans notre monde, en une forme de résignation. La force de l’instant s’est dissipée et a laissé la place à une accoutumance, une habitude et une lassitude à force de cohabiter avec ce virus et d’envisager d’avoir à le faire pendant un long moment encore. La transcendance s’est faite immanence, le saisissement habitude, le jaillissement s’est transformé en débit tranquille et insonore. Et les rues de Paris sont pleines pendant ce nouveau confinement, comme témoignage de cette habitude que nous avons acquise à vivre avec le virus. Les grandes surfaces ont eu l’autorisation de rester ouvertes, ces temples modernes qui nous permettent de nous divertir, de passer le temps, de répondre à notre instinct désormais le plus élémentaire, celui de consommer, si possible des choses totalement inutiles et qui vient désormais au même niveau que de celui de se nourrir. Soyons rassurés le petit commerce de première nécessité absolue, la boutique Apple, sur les champs Elysées est resté ouvert pendant cette période de confinement…. Tout un programme. Non seulement l’accès aux grandes surfaces est autorisé en cette période de confinement mais cela permet en plus de lever le dernier obstacle (s’il existait encore) en déculpabilisant la population et en lui indiquant qu’en ces temps difficiles consommer est utile, l’endroit est protégé, préservé et à l’abri du virus, un lieu de résistance à la propagation du virus….Et dans le même temps les librairies, ces petits commerces qui apportent la nourriture de l’esprit, elle sont fermées. Il y a eu certes une merveilleuse résistance sur Internet, et les réseaux sociaux pour soutenir les libraires, pour crier cette injustice effrayante ou certain peuvent ouvrir alors que d’autres ont ordre de fermer, ou dans les rues de la ville se déversent un flot incessant de personnes auto de confinées et que dans le même temps les petits commerces « non essentiels » eux seraient condamner à fermer. Tout cela n’a plus de sens. Et puis il y a cette petite musique qui commence à gêner un peu, celle qui nous fait prendre conscience que l’on est en train de nous imposer, à tous, ce qui est essentiel pour nous et ce qui ne l’est pas. On est en train d’uniformiser la notion de « choses essentielles » et la vision d’un monde qu’on aurait aimé ne plus jamais revoir remontent à la surface de manière un peu nauséabonde. Quelle décadence, quelle tristesse, quelle image renvoyons-nous de nos sociétés contemporaines qui ne reposent désormais plus que sur la satisfaction de l’individu. Il faut épancher les désirs les plus immédiats. Or qu’est ce qui est vitale ? Par définition, c’est lorsque l’homme n’a pas la liberté. Par exemple l’homme n’a pas la liberté de manger ou de ne pas manger, s’il ne mange pas, il disparait. Aujourd’hui l’homme a perdu la liberté par rapport à la consommation. Quelle déception, Quelle désillusion, quelle douche froide pour tous ceux qui avaient imaginé un instant que la propagation du virus allait permettre à l’humanité de réaliser que d’autres voix étaient possibles, et voyaient dans cet événement un moyen de revenir à des choses plus essentielles et de permettre à
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