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HOUKAT - SÉRIE 1995

Le cours

 

(1995)   חֻקַּת

Je vous propose de commencer le début de la Parashah concernant la מִצְוָה de la vache rousse, la פָרָה אֲדֻמָּה, et dans un deuxième temps l’épisode où Dieu va annoncer à Moïse et Aaron qu’ils n’entreront pas en Israël à cause de la péripétie des eaux de Mériba lorsque le peuple a demandé de l’eau. Dieu a demandé à Moïse de parler au rocher et Moïse a frappé le rocher... C’est assez paradoxal car la 1ère fois Dieu lui a demandé de frapper le rocher et ensuite il lui a demandé de parler au rocher mais lui demandant de prendre le bâton. Pour quoi faire si ce n’est pour frapper ? C’est un épisode assez difficile à comprendre à suivre et c’est là que Dieu décrète à Moïse et Aaron qu’ils ne rentreront pas en Israël.

 

Q : la mort des צַדִּיקִים Myriam, Moshe, Aaron... ?

R : Cela fait un peu partie du problème. En réalité on ne sait pas pour quelle faute Moïse n’est pas entré dans le pays : il y a 18 réponses différentes. Il y a l’histoire du rocher pleine d’invraisemblance. La raison la plus vraisemblable est donnée par le Midrash : Moïse est l’homme de la révélation de sagesse pour la génération du désert qui était en dehors de tout problème de société humaine classique. Il n’y avait pas de problème économique grâce à la manne qui est tombée dans le désert. Imaginez la situation de cette génération du désert avec comme chef Moshe Rabénou, comme prêtre Aaron Hakohen. C’était la génération de la révélation qui a vu tous les miracles. Les ont-ils compris ? Les ont-ils vraiment vus ? C’est un autre problème. 

Je vous ai cité dans un cours récent l’enseignement Rabbi ben Attar (Or’HaHayim) : si cette génération toute entière n’est pas entrée en Israël c’est parce que la 5ème promesse  (Parashah וַיֵּרָא) «  et je vous amènerai au pays » avait une condition : « Vous saurez que c’est Moi qui vous ai fait sortir d’Egypte » et comme cette génération n’a pas compris que c’est Dieu qui les fait sortir d’Egypte et croyait que c’était Moïse. Cela a des implications contemporaines avec ces religieux qui ne voient pas que c’est Dieu qui nous a ramené. Ils croient que c’est le sionisme et sont antisionistes. S’ils avaient les yeux ouverts, pour les croyants en tout cas : si ce n’est pas Dieu qui nous aurait ramené qui donc l’aurait fait ? 

 

C’est le drame de la génération du désert. C’est Dieu qui nous a fait sortir d’Egypte, à travers Moïse. Mais il est interdit de croire que c’est Moïse qui nous a fait sortir d’Egypte. C’est cette erreur de la génération du désert.

 

Le Gaon de Vilna met en évidence que dans tout le récit de la Haggadah de Pessah on ne fait pas allusion à Moïse : ce serait-là une ingratitude monumentale s’il n’y avait pas là une raison fondamentale. Pourquoi ? Pour ne pas qu’on croit que c’est lui qui nous a fait sortir d’Egypte. Or, c’est lui qui nous a fait sortir d’Egypte. Parce que c’est Dieu qui nous a fait sortir d’Egypte grâce à Moïse.  C’est un problème contemporain.

 

Gaon de Vilna : le verset qu’on cite שַׁלִיחַ וְלֹא אֲנִי, מַלְאָךְ וְלֹא אֲנִי : מֹשֶׁה זֶה : Moi et pas un envoyé, il s’agit de Moïse.

Voyez à quel point nous sommes une génération très comparable à la génération de la sortie d’Egypte puisque le même problème se repose.

 

Il y a ceux qui vivent les événements et qui ne voient pas que c’est Dieu qui les dirige.

Voyez à quel point c’est étonnant ce qu’on lit dans la Bible : le récit de la תּוֹרָה pour cette génération là. La תּוֹרָה nous raconte qu’ils ont assisté au fait que c’est Dieu qui intervient et ils n’ont rien vu ! Ils ont cru que c’était Moïse ! Donc on peut se consoler s’il y a des gens qui ne voient pas aujourd’hui, ils ne sont pas plus grands ou plus petits que ceux de la génération du désert. D’ailleurs d’après la Kabbale nous sommes la réincarnationמַמָּשׁ  de la génération du désert. Il y a tous les personnages. Nadan, Aviram...  etc.

 

Non seulement ce sont les mêmes problèmes mais c’est les mêmes profils d’identités, avec la même mauvaise foi, ou la même sainteté parfois pour les uns et pour les autres.  

On est doublement rassurés : le fait que nous vivions la même histoire cela nous rassure sur cette génération du désert qui provoque l’étonnement. Mais on voit bien comment il réagit.

 

Comme Moïse l’a défini, c’est le peuple « élu » בָּנוּ אֲשֶׁר-בָּחַר, qu’il a défini :

 דּוֹר עִקֵּשׁ וּפְתַלְתֹּל [Bible du Rabbinat 1899 - « génération perverse et tordue »] en français je crois qu’on ne peut pas dire autrement que « une génération de gens tordus » – עֹרֶף קְשֵׁה עַם c’est bien « un peuple à la nuque raide »  – בָּנִים לֹא-אֵמֻן בָּם  – enfants en qui on ne peut faire confiance [דְּבָרִים 32:20].

Au point que la Guémara dit : בָּנִים אבל בָּנִים לֹא-אֵמֻן

C’est cela le problème d’Israël : c’est des בָּנִים.  

 

Vous voyez cette tension entre les deux définitions d’Israël. Et inversement, la génération contemporaine est désespérée : quel est ce peuple en train de se suicider ? Ce qui se passe à la Knesset aujourd’hui... Cela c’est nous, les ancêtres de la génération du désert. Enfin grâce à Dieu – Dieu est grand – ce n’est pas parce que les Arabes le disent que l’on va se priver de le dire aussi.  

C’est une génération qui n’a pas de problème économique : la manne grâce à Moïse, qui n’avait pas de problème militaire : les כַּבוֹד עֲנָנֵי dont on parle à Soukot,  les nuages de la gloire qui étaient la protection du camp d’Israël c’était Tsahal dans le ciel – כַּבוֹד עֲנָנֵי  – grâce à Aaron. Et puis l’eau du puits grâce à Myriam.  

 

C’est une  génération qui n’avait pas les soucis d’une société humaine habituelle et qui par conséquent était uniquement vouée à étudier la תּוֹרָה sous la direction de Moïse, notre maitre lui-même, pour se préparer à son histoire. C’est le cas particulier d’Israël, une nation à qui la constitution a été donnée avant que son histoire ne commence. Pour toutes les nations la constitution s’élabore à travers 1000 ans d’histoire. Etudiez l’histoire de la constitution française qui s’élabore à travers une histoire de 1000 ans et de 2000 ans, et en fin de compte elle est ce qu’elle est. Tandis qu’Israël est un cas particulier. Sa constitution a été révélée avant que son histoire ne commence. C’est la תּוֹרָה. C’est pourquoi il y a eu un stage avec Moshé Rabénou comme מַדרִיך (éclaireur-instructeur) pour apprendre le droit hébraïque avant même que l’histoire ne commence. Et donc c’est une génération privilégiée. La seule comparaison que je peux faire c’est ce qui se passe dans certaines Yeshivot où l’on est à l’abri du problème économique pour pouvoir se consacrer à la תּוֹרָה.

 

Il y a dans la sociologie générale universelle l’année sabbatique inspirée d’ailleurs des lois de la תּוֹרָה. Mais c’est une année sabbatique perpétuelle qu’a vécu cette génération du désert.

C’est relié au fait que les מַּנהִגִים de cette génération sont autres que ceux de l’histoire. Ils sont les מַּנהִגִים de la préparation à l’histoire d’Israël.  

Et donc la seule hypothèse vraisemblable donnée par le Midrash expliquant pourquoi Moïse ne devait pas rentrer en Israël c’est la suivante : tout ce que Moïse a touché devient éternel. La מִּדָה  de Moshé c’est נֵצַח. « נֵצַח יִשְׂרָאֵל, לֹא יְשַׁקֵּר» (Samuel. I, 15:29).

Et par conséquent si Moïse était entré en Israël pour construire le temple, le temple aurait été indestructible, et s’il y avait faute de la part du peuple c’est le peuple qui aurait été détruit. Donc pour sauver Israël Moïse ne doit pas entrer.  

 

Qu’est-ce qu’il y a derrière ? Il y a que la génération du désert qui est appelée דֶּעַה דּוֹר la génération du savoir : c’est la génération qui a été appelée à la connaissance. Comme le dit le verset de la prière de Shabbat. אָתָּה... לָדַעַת. Et cette génération a été appelée à la connaissance. On t’a révélé pour que tu saches. Tu as été appelée à savoir. C’est une génération de la connaissance et puis il y a la génération de l’action, de l’histoire qui commence avec Josué. Ce relai entre Moïse et Josué on va en apprendre la péripétie dans les eaux de Mériba. Mais dire que c’est en punition du fait que Moïse a frappé le rocher  est une hypothèse qui n’est pas retenu par la תּוֹרָה שֶׁבְּעַל פֶּה.

 

Q: il y a une grande distinction à faire entre la génération du désert et notre génération parce que la nôtre est entrée en Israël ?

 

R: Cf. le texte du Rav Tolédano dont vous avez le texte dans la Parashah de כִּי מִצִּיּוֹן qui compare la génération du désert et notre génération et qui explique que nous nous sommes plutôt comparables à la génération qui est entrée, celle des fils de la génération du désert. Seulement malgré tout cela va plus loin dans ta question. C’est un enseignement du Rav Kook que je vais vous rappeler. Il avait fait un Seder de Pessah avec tous les cadres de la Yeshivah et c’était plein de questions jusqu’à 6 heures du matin. Il a expliqué à propos du רָשָע la phrase de la Haggadah : ilu haya sham, lo haya nigal

Le רָשָע qui dit : qu’est-ce que vous faites et qui se met en dehors de la communauté. Regardez bien la définition du רָשָע que donne la Mishna de la Haggadah : celui qui est en dehors de la communauté.  Le problème de notre temps c’est qu’on ne sait pas où est la communauté ! Laquelle est le צַדִּיק et laquelle est le רָשָע ?

 

Le texte a dit : ilu haya sham, lo haya nigal

S’il avait été là-bas cet enfant רָשָע qui pose la question en se mettant dehors, s’il avait été là-bas au temps de la sortie d’Egypte, il n’aurait pas été délivré.

Le Rav Kook a enseigné : là-bas au temps de la sortie d’Egypte il n’aurait pas été délivré, mais Po Ken dans notre délivrance même les רֶשָעִים seront sauvés.

Par conséquent, le fait que dans notre génération il y ait des רֶשָעִים n’est pas étonnant. D’après les prophéties, à la fin du dernier exil, la גֵּאֻלָה n’est pas liée à une question de mérite, c’est que c’est la loi des temps qui a joué. 

La référence se trouve dans la Guémara de Sanhédrin dans le Perek ‘Helek à propos de verset d’Isaïe parlant des événements de la גֵּאֻלָה de la fin des temps, à la fin des trois exils. Nous savons qu’il n’y a que trois exils parce qu’il n’y a que trois patriarches :  

 

L’exil d’Egypte correspond à l’histoire d’Abraham, l’exil de Babel à l’histoire d’Isaac, et l’exil de Rome à la l’histoire de Jacob, et c’est à la fin de l’exil de Rome que Jacob reçoit le nom d’Israël comme de notre temps le peuple juif a reçu le nom d’Israël. Il y a deux fois la destruction du temple et il n’y aura pas une troisième...

 

Le verset d’Isaïe dit [60:22] : אֲנִי יְהוָה, בְּעִתָּהּ אֲחִישֶׁנָּה

« Je suis HM en son temps je l’accélérerais »

 

La Guémara demande : Si c’est « en son temps » que signifie l’accélération, si c’est accéléré que signifie « en son temps » ? Le Pshat veut dire : le temps venu ce sera accéléré ! Et cela peut se calculer avec les dates mais ce n’est pas le moment ce soir.

La Guémara dit : il n’y a pas de contradiction : s’ils méritent « j’accélérais », s’ils ne méritent pas « en son temps ». Cela veut dire que comme l’événement est arrivé d’après la loi des temps il ne dépend pas du mérite. Ce qui dépend du mérite ce n’est pas l’événement, c’est la manière dont cela se passe, et à quel prix. Et le fait qu’on ait été délivré de l’exil est irréversible et cela ne dépend pas du mérite, parce que la loi des temps a joué. Nous sommes à la fin du 6ème millénaire. Nous sommes à Erev Shabbat c’est pour cela que les événements s’accélèrent. C’est l’enseignement du Gaon de Vilna dans la manière dont le Rav Kook l’a enseigné.  

 

Cela veut dire qu’il y aurait deux thèses : seuls les צַדִּיקִים auraient droit à אֶרֶץ יִשְׂרָאֵל ou c’est Israël et le peuple d’Israël qui aurait droit à אֶרֶץ יִשְׂרָאֵל. Ce sont deux thèses radicalement différentes.

 

***

 

Je vous explique le sujet que je veux étudier car vous êtes habitués au fait que dans chaque texte il y a autant de sujets que de mots dans le texte. C’est la question de la vache rousse. Je vous rappelle rapidement de quoi il s’agit : celui qui s’était rendu impur par contact d’un cadavre qui est le principe de toute impureté, même par simple proximité, peut se rendre pur avec le bain rituel d’aspersion des eaux contenant les cendres de la vache rousse. Et alors cette loi là est appelée par la תּוֹרָה : חֻקַּת הַתּוֹרָה le statut de la תּוֹרָה    

Le mot de חוֹק au féminin חֻקַּת  (en hébreu moderne c’est la constitution) c’est le statut, la loi intransigeante indiscutable pour laquelle on n’a pas à chercher ni causalité ni finalité. C’est comme cela. L’exemple des axiomes pour la mathématique. On ne cherche pas la raison des axiomes.

La question est de savoir pourquoi cette מִצְוָה en particulier qui permet que celui qui est impur peut se rendre pur par les cendres de la vache rousse, est חֻקַּת הַתּוֹרָה?

 

Quel rapport avec la notion de תּוֹרָה qui dépasse infiniment une des מִצוֹת de la תּוֹרָה ?  

Beaucoup de Midrashim et commentateurs posent la question ainsi : Pourquoi le verset ne dit pas  הַטֻמאַה זֹאת חֻקַּת : voici le statut de l’impureté – ou הַטָמֵא זֹאת חֻקַּת de l’impur – ouזֹאת חֻקַּת הַפָרָה  voici le statut de la vache ?  

C’est ce point là que je voudrais étudier dans ce texte que nous allons lire après une petite introduction de vocabulaire.

 

Question de vocabulaire :

Nous avons en hébreu pour dire la loi énormément de termes. Et chacun de ces termes a une signification particulière.  

Il y a les מִצוֹת, les חֻקִּים, les מִּשְׁפָּטִים.  

D’une façon très générale מִצוֹת c’est לָּמָקוֹם אָדָם בֵּין. חֻקִּים c’est לָּחֲבֵרָוֹ אָדָם בֵּין. Cela peut être l’inverse. מִצוֹת c’est לָּחֲבֵרָוֹ אָדָם בֵּין et חֻקִּים c’est לָּמָקוֹם אָדָם בֵּין. מִּשְׁפָּטִים c’est לָּחֲבֵרָוֹ אָדָם בֵּין. Ce sont les jugements de la vie sociale.  

 

Je schématise un peu le sujet sur deux termes : חוֹק et מִּשְׁפָּט. On a l’habitude de dire que  חוֹק c’est une מִצְוָה pour laquelle on n’a pas à chercher de raison. C’est comme ça.

Il y a un équivalent dans une expression traditionnelle  הַכָּתֻב גְּזֵרָה: le texte a décidé comme ça – הַמֶלֶךְ גְּזֵרָה   – le roi a décidé comme ça.גְּזֵרָה  un décrêt.

Alors que מִּשְׁפָּט c’est un règle dont on peut trouver les tenants et les aboutissants parce que מִּשְׁפָּט c’est un jugement.  

Or, c’est très difficile tant pour מִּשְׁפָּט que pour חוֹק. Mais surtout pour חוֹק. Qu’est-ce que cela voudrait dire ? Qu’il y a des dispositions de la תּוֹרָה, des חֻקִּים, des חֻקַּוֹת, il y a une nuance mais cela va à peu près dans le même sens, qui seraient à la limite arbitraires ? Purement disciplinaire. Pratiquer les מִצוֹת comme on pratique une discipline. Que cela n’ait pas de signification autre que le fait que cela me soit demandé. Que cela n’a pas de signification autre que le fait qu’il faille le faire. Mais cela ne va pas avec la תּוֹרָה. La תּוֹרָה c’est la révélation de la Sagesse que Dieu nous révèle pour la vie dans le monde qu’Il a créé. Que signifie le fait que le חוֹק n’a pas de signification ?  

 

D’autant plus que dans le début de la Parashahבְּחֻקֹּתַי, Rashi dit :

26:3

אִם-בְּחֻקֹּתַי תֵּלֵכוּ; וְאֶת-מִצְו‍ֹתַי תִּשְׁמְרוּ, וַעֲשִׂיתֶם אֹתָם

Si vous suivez mes חֻקַּוֹת,  et que vous les observiez et vous les accomplissiez... alors viennent toutes les bénédictions.

אִם-בְּחֻקֹּתַי, תֵּלֵכוּ...

Ne va pas croire qu’il s’agit ici de suivre les commandements et de les appliquer parce que cela a été dit par la suite וַעֲשִׂיתֶם אֹתָם  Donc אִם-בְּחֻקֹּתַי תֵּלֵכו

 

Que vous travaillez dans la תּוֹרָה, dans le sens d’étudier. Etudier la תּוֹרָה c’est sous la rubrique חֻקֹּתַי. Donc cela veut dire d’apprendre ce que cela veut dire.  

Si on doit une conduite, littéralement une casuistique, la science des cas, de loi dont on ne comprend pas la signification on risque d’en déduire des règles fausses. Si on ne comprend pas le sens de lois, comment conclure pour telle ou telle situation de l’histoire ou telle ou telle situation de la vie ?  

Une comparaison : imaginez un garçon de laboratoire ignorant : peut-on lui confier une ordonnance de médecin ?  

Cette idée que l’on ne peut pas comprendre ce que la תּוֹרָה demande est une idée difficile. Alors c’est pourquoi il faut aménager tout cela.

 

Un Midrash raconte que le roi Salomon, le plus sage d’Israël, a cherché à comprendre le sens de la vache rousse sans y parvenir.

 

קֹהֶלֶת 7:23

 אָמַרְתִּי אֶחְכָּמָה, וְהִיא רְחוֹקָה מִמֶּנִּי

Je disais: "Je voudrais me rendre maître de la sagesse!" Mais elle s'est tenue loin de moi.

Le Midrash ajoute : c’est pour expliquer que Moïse seule la comprenait.  

Il y a donc ici un problème que nous allons étudier. Nous sommes faibles en capacité de compréhension des axiomes de la תּוֹרָה, mais cela ne veut pas dire qu’ils n’ont pas de sens !  

 

Exemple : Je voudrais évacuer cette idée très saducéenne que les מִצוֹת de la תּוֹרָה il ne faut pas chercher à les comprendre mais y obéir parce que cela n’a pas d’autres sens que le fait que cela nous ait été demandé. C’est une attitude très louable du point de vue de la fidélité qu’on demande à ceux qui sont incapables de la connaissance. Mais ceux qui sont incapables de connaissance, ce n’est pas à eux qu’on confie l’élaboration du Code. On confie l’élaboration du Code à ceux qui comprennent de quoi il s’agit. Sinon on va déduire un code faux. Et c’était el cas des Saducéens.  

Cela veut dire qu’on va se condamner à pratiquer une תּוֹרָה fausse parce qu’on va confier au raisonnement inductif et déductif comment on fait dans ce cas-là sans savoir ce que signifie la règle. Vous voyez la catastrophe !  

 

C’est une catastrophe qui nous a atteints quand les Romains ont interdit la סְּמִיכָה. Cela rejoint notre question du רָשָע pour savoir de quel côté se trouve la communauté. Jusqu’à ce temps-là des Romains on savait à quel חֲכָם il fallait s’adresser pour savoir ce que la תּוֹרָה dit. Le חֲכָם en question n’avait pas à expliquer le sens de ce qu’il nous disait. Mais cela ne veut pas dire qu’il ne possédait pas ce sens-là !  

De la même manière que le médecin ne vas pas nous expliquer le fonctionnement du tube digestif avant de vous donner un cachet d’aspirine. Cela ne veut pas dire qu’il ne le connait pas.

J’ai choisi l’aspirine parce que personne ne sait pourquoi l’aspirine guérit. C’est une découverte extrêmement importante. Celui qui l’a inventé a fait plus de bien à l’humanité que des millions d’humanistes parlant du bien et du mal. 

 

On savait ce qu’était la שְמִיכָה: à la fin de sa vie le maître de la génération donnait –cela vient de haut en bas – le nom de son successeur. Aujourd’hui, on fait des élections au consistoire.  Le grand rabbin n’élit pas son successeur.  

C’était donc le Dayan de la génération qui avait beaucoup d’élèves. Mais lui savait lequel d’entre eux était capables de lui succéder comme Dayan. Cela ne veut pas dire que les autres n’étaient pas des חֲכָמִים תַּלְמִידֵי, mais celui qui était capable de dire ce qu’est la loi dans ce cas-l à, voilà ce qu’il faut faire... 

 

Les חֲכָמִים n’ont jamais été en controverse avec la loi, ils sont en controverse sur l’histoire et sur la situation historique pour laquelle il fallait faire parler la loi.

Si le temps est gris voilà ce que dit le verset... si le temps est bleu voilà ce que dit le verset...

C’est là que porte la controverse : est-ce que je vois bleu ou gris ?

Et vous savez très bien que les gens ne savent pas voir de quoi il s’agit. L’exemple que je donne habituellement c’est le journalisme : vous prenez trois journaux sur le même événement et il y a 4 opinions. C’est très difficile d’être un témoin de vérité.

 

C’est le problème de la controverse des חֲכָמִים. Alors c’est le maître qui sait lequel de ses élèves sait diagnostiquer non pas le sens de la תּוֹרָה lui-même mais ce qui se passe dans l’histoire. C’est là-dessus qu’il y a controverse. Parce qu’il y a la tentation de croire qu’on peut faire dire à la תּוֹרָה ce qu’on veut. Ce n’est pas vrai. Tous les חֲכָמִים en controverse sur une Halakha ont le même verset. Je peux vous en donner la démonstration dans la Guémara on trouve 12 opinions sur un sujet et je vous démontrerais que les 12 avaient le même sens du verset sur quoi porte la controverse ? Sur l’événement historique à propos duquel il fallait légiférer. Beaucoup croient en toute bonne foi que les חֲכָמִים sont en controverse sur le sens du verset.   

C’est d’autant plus vrai pour le Talmud qu’on ne peut pas lui faire dire ce qu’on veut. De toute façon quelque soit les opinions, quand la Halakha למַעֲשֵׂה a été décidée alors on peut comprendre comme ça si l’événement était comme ça, et c’est תּוֹרָה. Mais voilà que l’événement n’est pas comme cela.

 

Exemple dans les problèmes contemporains :

Vous avez entendu parler du Rav Amitan de Goush Letsion. Il a été un ami de la Yeshivah du Mercaz Hazav, ce n’est pas n’importe qui. Il y a eu un Psak Halakha ces derniers temps des rabbins orthodoxes américains décrétant par Halakha l’interdiction de donner les territoires aux Arabes. Interrogé à la radio sur ce problème il a déclaré que c’est un faux problème, ce n’est pas une question de Halakha, la seule question de Halakha c’est de savoir si les accords d’Oslo sont bons pour Israël ou pas. Dans le cas positif on peut donner les territoires, ce n’est pas une question de Halakha... Vous voyez le raisonnement de jésuite, je n’ai pas dit pharisien !

 

Le problème c’est qu’il n’ose pas dire que la תּוֹרָה dit qu’il ne faut pas rendre les territoires. Ça c’est תּוֹרָה. Il dit le vrai problème, c’est le diagnostic politique et historique : est-ce que les accords d’Oslo c’est bon pour Israël ou non ? Et une erreur là-dessus c’est plus grave qu’une erreur de lecture. 

Les rabbins du Talmud en étude ne viennent jamais nous enseigné ce que veut dire le verset. Leur étude commence à partir du verset qui va de soi. Etant donné ce que dit le verset – et cela s’apprend chez son rabbin – voilà comment on en déduit la loi...  

 

Le véritable diagnostic n’est pas du tout de savoir ce que la תּוֹרָה dit du Golan. La véritable controverse porte sur la véritable valeur du Golan pour le sort d’Israël. Mais la תּוֹרָה dit que le Golan c’est Israël il n’y a pas de problème. Celui qui prend le pari de Munich ne peut pas le nier.  

J’ai été élevé à une école qui enseignait qu’il n’y a qu’un sens à la תּוֹרָה, pas trois ou quatre. Il y a une manière de chanter juste et des fausses notes. Il y a milles manières de mourir et une seule de naître. Il y a une seule vérité et toutes les manières de se tromper.  

 

La controverse entre Hillel et Shamaï ne porte pas du tout sur la signification du verset mais sur le temps dans lequel nous vivons. Est-ce que nous vivons encore dans le temps du עוֹלָם הַזֶּה ou déjà dans le temps du עוֹלָם הַבָּא? La Halakha כְּעוֹלָם הַבָּא c’est Beit Shamaï. La Halakha כְּעוֹלָם הַזֶּה c’est Beit Hillel. La Halakha comme Beit Shamaï c’est la Halakha comme au temps de la révélation. La Halakha comme Beit Hillel c’est la Halakha à partir du moment où la révélation a cessé. 

C’est tous le problème du mariage et des divorces : quand Il et Elles se chamaillent...

 

Q : que dire de בָּתּוֹרָה פָּנִים שִׁבְעִים?

 

R : c’est tout à fait autre chose. בָּתּוֹרָה שִׁבְעִים cela veut dire à la racine du problème qu’il y a un visage de la תּוֹרָה qui correspond à chacune des nations. אוּמוֹת שִׁבְעִים, לָשׁוֹן שִׁבְעִים, שִׁבְעִים. Mais de manière plus générale שִׁבְעִים c’est la multiplicité. Cela veut dire étant donné qu’il y a une multiplicité de situations socio-politiques possibles alors on peut déduire de la תּוֹרָה la

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C’est le verset de la תּוֹרָה, ce qu’il dit. La multiplicité n’est pas dans la תּוֹרָה mais dans la réalité sur laquelle on fait réagir la תּוֹרָה. Grâce à ta question je comprends que tu n’avais pas compris ce que j’avais dit.  

 

A propos de בָּתּוֹרָה פָּנִים שִׁבְעִים « C’est comme un marteau qui éclate le rocher et fait jaillir 70 étincelles ». Mais il y a un seul rocher. Le rocher réagissant sous le marteau produit ces étincelles-là.  

Pour dire les choses simplement : si je dois décider pour un enfant mineur ou un adulte majeur, ce que demande la תּוֹרָה n’est pas la même chose. Mais c’est le même verset qui décide pour l’un et pour l’autre.  

Effectivement,  בָּתּוֹרָה פָּנִים שִׁבְעִים parce qu’il y a שִׁבְעִים possibilité de voir le monde, alors il y a פָּנִים שִׁבְעִים pour le monde. Mais Halakhah למַעֲשֵׂה : Kol Ha-over Al Divrei ‘Hakhamim Hayav Mita. Une fois décidé la Halakha celui qui ne la respecte pas est ‘Hayav Mita. Même s’il est un des חֲכָמִים de ces 70.  

 

J’entends souvent surtout les libéraux me dire : mais chacun a le droit d’avoir son opinion comme Hillel et Shamaï ? Oui, mais il s’agit d’Hillel et Shamaï et ce n’est pas toi ! Ce n’est pas n’importe quel petit juif qui peut décider que c’est comme ça suivant son opinion...

A partir du moment où la halakha est tranchée même si c’est rabi Akiva on n’a pas le droit de faire comme lui. Pourtant c’est Rabi Akiva. Cela veut dire : si la réalité dans le monde est comme Rabi Akiva la Halakha est comme lui.    

Je schématise en vous indiquant le cas classique de la méthodologie du Talmud : rabbi untel dit ceci, et rabbi untel dit ceci... et le maître de la génération se lève et dit : la Halakha est comme celui-là ! Cela veut dire qu’ils sont tous présents et si la réalité était comme ils la voient, la Halakha serait comme ça. Cela ne veut pas dire que les autres disent faux, mais comment cela peut-il être vrai et pas réel ? Parce que c’est les grands de la Torah ! Ce n’est pas n’importe qui qui peut se mettre entre les 70 חֲכָמִים du Sanhédrin. 

 

C’est pourquoi je vous ai parlé de la סְּמִיכָה: jusqu’en ce temps-là des Romains on savait où était les maitres de la génération. Mais depuis on ne sait plus. Raison pour laquelle il y a ces milliers de sectes : chacun disant « mon rabbin dit que... ». Comment s’en sortir ?

Ce qui fait que la plupart des Poskim - Poskei halakha - les grands du savoir qui donnent les décisions on une puissance d’érudition telle qu’il raisonne et décide   sur des décisions antérieures la décision postérieure qu’ils doivent prendre doit en tous les cas ne jamais contredire ce qu’il y avait avant. Mais c’est dans le cas où ils ne savent pas quelle est la forme de la loi. Alors ils raisonnent sur des décisions antérieures. Mais si quelqu’un sait quel est le sens de la loi c’est lui  qui doit décider.  

 

On est en plein désarroi à cause de cela. Le fait que les Romains aient arrêté la סְּמִיכָה.  

Maïmonide dit citant la Guémara « Ya’hid véRabim Halakha kéRabim : un seul et plusieurs la Halakha est comme les plusieurs » - quand on a un cas nouveau on prend la majorité des décisionnaires. Cela ne veut pas dire que la minorité a eu tord mais qu’elle a eu un diagnostic qui n’est pas celui de la majorité qui est quand même le diagnostic le plus vraisemblable des חֲכָמִים. Mais qui sont les חֲכָמִים. Mystère dans le mystère. Mais Maïmonide ajoute vé Im  Ha Emet ito Hou haRabim mais si la vérité est avec lui qui est tout seul c’est lui la majorité. אֱלֹהִים הוּא יְהוָה et Hashem est tout seul. יְהוָה est un singulier et אֱלֹהִים est un pluriel. 

 

Il faut faire une analyse de motivation : c’est qu’en général on va chercher pour avoir une réponse le maitre dont on sait à l’avance la réponse qu’il va donner. C’est très dangereux. Cela veut dire que c’est la Halakha pour lui mais pas pour la majorité.  

 

Au temps où la vie religieuse était normale chaque Rabbin décidait pour ses juifs parce qu’ils les connaissaient. Ils savaient de quel type de juifs il s’agissait. On l’apprend de Parashah מַּטּוֹת. Dans les anciens temps la Halakha était que chaque ville, chaque tribu, avait son Sanhédrin. La Halakha pour un juif du Yémen ne peut être donnée que par un juif yéménite. La Halakha pour les Juifs de Tchécoslovaquie ne peut même pas être donnée par un rabbin yougoslave. Chacun ses juifs ! Aujourd’hui il y a un tel désordre qu’il nous faut bien une Halakha de principe pour tous les Juifs. Mais pour l’application c’est le rabbin de la communauté qui décide.  

Pour certaines questions il faut demander comment sa propre grand-mère faisait et à quel rabbin s’adresser. Pour telle autre question il faut voir le דִין בֵּית אֲב de la ville.  

Par exemple il y a naissance d’un petit garçon. Il y a des communautés où c’est interdit de donner le nom du grand-père s’il est encore vivant. Il y a des communautés où c’est le contraire... Qui va trancher ? Et parfois c’est très compliqué parce que la femme et le mari ne sont pas de la même communauté. On fait comme le Dayan de la ville sinon on fait comme le rabbin de la communauté d’origine.  

La grande pagaille actuelle c’est que les gens ont spontanément tendance à aller voir le rabbin dont ils savent par réputation qu’il aurait tendance à répondre comme on voudrait qu’il réponde.

 

Baba Batra page 10

C’est un exemple très clair  d’un maitre qui demande á chacun de ses élèves ce qu’un verset signifie. Et on a x réponses différentes. Les différences ne viennent pas de ce que dit le verset mais de l’application de ce verset dans une situation sociologique, sociopolitique.

Vous avez compris maintenant la différence de תּוֹרָה שֶׁבִּכתָּב - תּוֹרָה שֶׁבְּעַל פֶּה. Celui qui ne sait pas lire תּוֹרָה שֶׁבִּכתָּב c’est un Sadducéen. Ce n’est pas un Pharisien. C’est-à-dire que c’est quelqu’un dont la lecture de la תּוֹרָה dépend de la valeur de son dictionnaire alors que la תּוֹרָה des Pharisiens se réfère à la transmission de la tradition depuis Moïse.

Je crois que cela suffit mais il était important de le clarifier.

 

***

 

וַיְדַבֵּר יְהוָה אֶל-מֹשֶׁה וְאֶל-אַהֲרֹן לֵאמֹר

Dieu s’est adressé à Moïse et Aaron en disant...  

 

Il faudrait étudier pourquoi il s’adresse aux deux à la fois mais je n’ai pas le temps ce soir.  

זֹאת חֻקַּת הַתּוֹרָה, אֲשֶׁר-צִוָּה יְהוָה לֵאמֹר:  דַּבֵּר אֶל-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל וְיִקְחוּ אֵלֶיךָ פָרָה אֲדֻמָּה תְּמִימָה אֲשֶׁר אֵין-בָּהּ מוּם אֲשֶׁר לֹא-עָלָה עָלֶיהָ עֹל

Voici le statut de la תּוֹרָה Que Dieu prescrit en disant Parle aux enfants d’Israël Qu’il prenne pour toi Une vache rousse תְּמִימָה  [תְּמִימָה  ce n’est pas dans le sens de sans défaut ce qui va être dit par la suite, תְּמִימָה  cela veut dire entièrement pure en tant que rousse : pas un seul poil qui ne soit pas roux]. Qui n’a pas de défaut. Sur laquelle n’est jamais monté le joug

 

La תּוֹרָה continue. Il faut brûler cette vache en y ajoutant d’autres ingrédients à ces cendres de la vaches pour pouvoir, une fois mis dans le bain rituel, rendre purs ceux qui s’étaient rendu impurs par l’impureté de la mort.

Et le grand paradoxe c’est que le Kohen qui préparait ces cendres de la vache rousse lui se rendait impur. Et nous avons là un thème très important je vous signale cela simplement car cela nous prendrait trop de temps. C’est ce paradoxe que celui qui rend pur ceux qui étaient impurs par là même, alors qu’il était pur, il se rend impur. C’est cela la פָרָה אֲדֻמָּה  חֻקַּת

Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de sagesse là-dedans. Il y a une sagesse qui est au-delà de la force de la raison. C’est un axiome de sagesse qui nous vient de plus haut que de l’au-delà de la raison. Les Maala mé hasekhel en hébreu cela ne veut pas dire que c’est absurde mais que c’est plus sagesse alors que beaucoup de gens traduisent les Maala mé-hasekhe comme quelque chose d’absurde. Plus haut que l’intelligence comme si c’était plus bas que l’intelligence.

 

La comparaison que j’ai étudié c’est en mathématiques, déjà au lycée quand j’étudiais cela au Talmud Torah : le produit des extrêmes et des moyens est égal. Il y a une très grande sagesse là-dedans et c’est un axiome. Cela ne peut pas se démontrer. Le produit des extrêmes et des moyens est égale. 

Ici nous avons : ce qui est pur, l’impur rend impur le pur.

 

C’est la grande capacité de Moïse, c’est pourquoi la vache rousse est nommée du nom de Moïse. Moïse était capable de faire cela : rendre pur ce qui était impur, pour que la גֵּאֻלָה arrive. Et par là même il rend impur ce qui est impur.  Réfléchissez à la sagesse qu’il y a là-dedans. Très peu de grands d’Israël ont eu ce courage d’être Moïse. Parce que rendre pur ce qui était impur cela rend impur ce qui était pur. Qui est atteint ? C’est le Kohen qui prépare la פָרָה אֲדֻמָּה . C’est grâce à la פָרָה אֲדֻמָּה  que le peuple va être purifié, mais pas lui le Kohen qui devient impur.

 

Pontifex en latin, le pontife c’est le prêtre des ponts. A l’extrémité des ponts se trouvait un prêtre qui levait des impôts religieux pour passer sur le pont. Mais cela va plus loin. Le prêtre c’est lui-même le pont, on lui passe dessus. Pour passer d’un côté à l’autre c’est sur le prêtre qu’on passe. C’est cela la difficulté d’être Kohen. 

 

Cela ressemble beaucoup : seul Moïse a été capable de rendre pur le peuple d’Israël qui était impur dans l’exil. Mais par là même il se condamne lui à ne pas rentrer en Israël. C’est un ’Hidoush, faite attention je n’ai pas de sources là-dessus. Mais il faut bien comprendre cela.

C’est pourquoi les textes disent que la פָרָה אֲדֻמָּה  est appelée du nom de Moïse. Et on attend qu’il y ait une פָרָה אֲדֻמָּה  pour garantir la גֵּאֻלָה. Mais vous savez très bien que chaque année les journaux annoncent sa découverte. Mais examinée à la loupe on voit qu’on n’y est pas encore. C’est ce mystère d’une créature parfaite dans un monde imparfait. Si on trouve une créature parfaite dans un monde imparfait  c’est sûr qu’on est en train de basculer dans le monde à venir. Parce que notre monde est imparfait. Ce qui définit notre monde c’est le מוּם, le défaut.

Retenez bien cela : עוֹלָם הַזֶּה c’est עוֹלָם הַמוּם.  

 

Rappelez-vous ceux qui savent lire dans la תְּפִלָּה du Shabbat matin le Yotser:

Méshartim VaHashem Meshartav...

Vous avez un astérisque sur מ – ו - מ – מוּם.   

Le service de ce monde-ci entraine un défaut.

Il y a là le mystère de ce monde-ci dont le défaut principal...

 

Je reprends les versets du בְּרֵאשִׁית מַעֲשֵׂה. Il y a un verset que je voudrais vous expliquer d’après la Kabbalah mais sans entrer dans le détail de la Kabbalah.

יִקָּווּ הַמַּיִם מִתַּחַת הַשָּׁמַיִם אֶל-מָקוֹם אֶחָד

Que les eaux se rassemblent dans un seul endroit

 

Regardez bien en hébreu :

יִקָּווּ הַמַּיִם: qu’il y ait un קָּו, un lien, entre מ et מ.

Il y a deux מ dans מַּיִם. Il y a le מ de l’origine et le מ de l’accomplissement.

Quel est le mot qui apparait là ? מָקוֹם  (מ-ו-מ) !

Et le sens de cela : c’est qu’il y ait un קָּו entre les eaux d’en-haut et les eaux d’en-bas.

מַּיִם = (מ-י-מ): quand le י descend il descend en ו. Donc en haut il y a écrit מַּיִם et en bas il y a écrit מוּם.  

 

C’est la différence entre le monde projeté par Dieu qui est déjà עוֹלָם הַבָּא, les מַּיִם. Et le monde de ce monde-ci qui est descendu en מוּם. Leמָקוֹם  est en bas.   

Or, le mot de מוּם a pour valeur numérique הַטבָע, la nature. La nature, par rapport au monde de vérité c’est l’endroit du défaut.  

Quel est le défaut de la nature ? C’est la mort !

Le fait qu’il y ait la mort dans la nature entraine l’impureté.

Par conséquent, la תּוֹרָה serait impraticable si on ne savait pas comment guérir l’impureté de la mort. C’est-à-dire : dans le monde de la nature, la תּוֹרָה n’est pas chez elle. Raison pour laquelle le Midrash explique que lorsque Moïse est monté pour recevoir la תּוֹרָה, les anges n’ont pas voulu la lui donner, disant : « Ce n’est pas pour vous en bas ! ». Il faut être un ange pour pourvoir pratiquer la תּוֹרָה. Parce que dès qu’il y a impureté, il n’y a plus de קְדוּשַה. Or, la תּוֹרָה c’est pour la קְדוּשַה.

 

Voilà la grande contestation des גּוֹיִם contre Israël. Vous prétendez pourvoir pratiquer la תּוֹרָה mais on ne peut pas tant qu’il y a la mort. Pour ceux qui auraient étudié le christianisme c’est exactement la différence entre le christianisme et le judaïsme. Le christianisme est une religion de la mort. C’est pourquoi ils ne veulent pas de la תּוֹרָה, réservée au anges et non aux juifs hypocrites faisant semblant de pratiquer la תּוֹרָה avec des trucs comme la פָרָה אֲדֻמָּה .Quel est ce truc qui vous permet de faire comme si et faire semblant que vous ne mourrez pas ?

Voilà le fond du problème.  

Effectivement, il faut savoir que c’est הַשָּׁמַיִם מִן תּוֹרָה. Nous avons reçu une תּוֹרָה des anges pour la pratiquer sur terre. Et tous les גּוֹיִם contestent cela. Quels sont ces trucs avec lesquels vous faites semblant de pratiquer la תּוֹרָה ? Vous ne pratiquez pas la תּוֹרָה, vous êtes morts, impurs...

 

On lit cela dans Rashi :

זֹאת חֻקַּת הַתּוֹרָה  

לפי שהשטן ואומות העולם מונין את ישראל לומר מה המצוה הזאת ומה טעם יש בה, לפיכך כתב בה חקה, גזירה היא מלפני ואין לך רשות להרהר אחריה:

C’est parce que le Satan et les peuples du monde contestent Israël, en disant: "Qu'est-ce que cette מִצְוָה, et quel est son sens?" C’est pourquoi est écrit le mot de חֻקַּה. C’est un décret devant Moi ; tu n'as aucun droit de contester là-dessus. -- [Yoma 67b]

 

להרהר

C’est ce qu’on dit au Satan et aux גּוֹיִם, pas aux Juifs ! Alors vous voyez comment cela résout la difficulté de tout à l’heure : le fait de dire que חֻקַּה cela n’a pas de sens et qu’il ne faut pas en chercher le sens, c’est pour le Satan et les גּוֹיִם, ce n’est pas pour nous. Nous nous allons comprendre ce que cela veut dire. Mais étant donné qu’il y a une contestation de la part des גּוֹיִם arguant de cette complaisance de la part de Dieu nous donnant un truc pour pratiquer la תּוֹרָה alors même qu’il y a l’impureté !   

En principe on ne peut pratiquer la תּוֹרָה que s’il n’y a plus la mort. La תּוֹרָה c’est pour le monde à venir. La תּוֹרָה c’est pour les קְדוֹשִים, mais vous vivez dans un monde où il y a l’impureté. Alors qu’est-ce que vous racontez que vous pratiquez la תּוֹרָה ?

Et alors on va leur sortir un mode d’emploi : les cendres de la vache rousse qui rendent purs ceux qui sont impurs... La réaction de גּוֹיִם ne peut être que : « vous vous foutez de nous ! ».

 

Alors on leur répond : on ne cherche pas à comprendre, le Bon Dieu l’a dit point final !  

Les Sadducéens déjà parlaient comme cela. Il y a une phrase dans la Guémara Shabbat 88 sur נַעֲשֶׂה וְנִשְׁמָע: quand les Sadducéens disaient aux Pharisiens : vous êtes un peuple « Paziz » « qui se précipite » : dès que Dieu vous a donné les 10 commandements, vous avez dit « נַעֲשֶׂה וְנִשְׁמָע»  « nous ferons et nous comprendrons », qu’est-ce que cet empressement ? On leur répond : nous avons confiance en Dieu et c’est Dieu qui parle, on est tranquille ! Cela veut dire que les autres sont des athées qui ne savent pas de quoi ils parlent...  

 

Alors les גּוֹיִם disent : quel est donc ce pharisaïsme de la vache rousse ? On leur répond pareillement : « C’est Dieu qui a dit, c’est חוֹק et on ne cherche pas à comprendre ! » Mais c’est aux גּוֹיִם et au Satan que l’on dit cela, et pas aux בְּנֵי יִשְׂרָאֵל. Je ne fais que lire Rashi.  

C’est un חוֹקּ: c’est grâce à cette disposition que la תּוֹרָה est possible et c’est pourquoi cette מִצְוָה s’appelle חֻקַּת הַתּוֹרָה, parce que sans cette מִצְוָה la תּוֹרָה est impraticable.

Ce n’est pas plus compliqué que cela, il m’a fallu une heure pour dire deux mots.

 

Q : On l’attend depuis des millénaires ?

R : C’est pour cela qu’on est impur. Mais il faut bien savoir quel est le problème. Si nous avions un Sanhédrin capable de diagnostiquer une vache rousse, il y aurait une vache rousse. Pourquoi n’y-a-t-il pas de vache rousse ? Parce qu’il n‘y a pas encore de Moïse ! S’il y avait un Moïse alors il y aurait une vache rousse !

 

Je voudrais ajouter pour les 5 minutes restantes :

Une lecture que j’ai lu dans le Ora’h ‘Hayim sans la retrouver, c’est peut-être dans un commentateurs du  Ora’h ‘Hayim qui va répondre de manière beaucoup plus massive aux גּוֹיִם et au Satan : le véritable mystère c’est de savoir pourquoi Dieu s’adresse à Israël pour donner la תּוֹרָה. Le véritable mystère c’est דַּבֵּר אֶל-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל.

 

Regarder comment il le montre dans le texte :  

זֹאת חֻקַּת הַתּוֹרָה אֲשֶׁר-צִוָּה יְהוָה לֵאמֹר:  דַּבֵּר אֶל-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל וְיִקְחוּ אֵלֶיךָ פָרָה אֲדֻמָּה תְּמִימָה אֲשֶׁר אֵין-בָּהּ מוּם אֲשֶׁר לֹא-עָלָה עָלֶיהָ עֹל

Voici le caractère mystérieux de la תּוֹרָה (celui qu’on ne discute pas et qui n’a pas de raison) et que Dieu a prescrit en disant : Parle aux enfants d’Israël !

 

Et c’est cela qui est חֻקַּת הַתּוֹרָה!

On trouvera explication à tout dans la מִצְוָה, sauf une chose : Pourquoi c’est aux Juifs que c’est donné ? C’est cela le mystère !  דַּבֵּר אֶל-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל: Cela personne ne pourra l’expliquer.  

 

Effectivement, on arrive à la notion de חֻקַּה qu’on ne peut pas expliquer.

 

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Merci de copier les lettres affichées*

Laurence Kaioun

22 Juin 2023 à 12h14

Super de proposer le texte des cours ce qui facilitera la compréhension ! Par contre se serait top de pouvoir la lire tout en écoutant l'audio sur le même appareil.
Merci pour tout votre travail.
Shabbat shalom