L’OEUVRE DE LA CRÉATION
LES ENGENDREMENTS
JUIFS OU HÉBREUX
ISRAËL ET LES NATIONS
MESSIANISME
THÈMES FONDAMENTAUX

CHEMOT - SÉRIE 1971

Le cours

 

(1971)  שְׁמוֹת 

 Chapitre 3, versets 14-15     

 

וַיֹּאמֶר אֱלֹהִים אֶל-מֹשֶׁה, אֶהְיֶה אֲשֶׁר אֶהְיֶה; וַיֹּאמֶר, כֹּה תֹאמַר לִבְנֵי יִשְׂרָאֵל, אֶהְיֶה, שְׁלָחַנִי אֲלֵיכֶם

Il dit c’est ce que tu dois dire devant Israël : אֶהְיֶה m’a envoyé vers vous

 

וַיֹּאמֶר עוֹד אֱלֹהִים אֶל-מֹשֶׁה, כֹּה-תֹאמַר אֶל-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל, יְהוָה אֱלֹהֵי אֲבֹתֵיכֶם אֱלֹהֵי אַבְרָהָם אֱלֹהֵי יִצְחָק וֵאלֹהֵי יַעֲקֹב, שְׁלָחַנִי אֲלֵיכֶם; זֶה-שְּׁמִי לְעֹלָם, וְזֶה זִכְרִי לְדֹר דֹּר

 « Dieu dit encore à Moïse Parle ainsi aux enfants d’Israël, le Seigneur (Celui qui est Dieu) le Seigneur Dieu de vos Pères le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob m’envoie vers vous, tel est Mon Nom à jamais, tel sera Mon invocation dans tous les âges. »  

 

Nous allons prendre la 2ème partie de Rashi que vous pouvez lire d’abord dans la traduction officielle que vous avez. Nous lisons d’abord le verset 15. La dernière fois nous avions appris la raison pour laquelle, au verset 14, il y avait אֶהְיֶה אֲשֶׁר אֶהְיֶה, donc la répétition du mot אֶהְיֶה. Et puis à la fin du verset, il y a seulement אֶהְיֶה une seule fois.  

Nous avions vu l’explication de Rashi qui se réfère au fait que l’expression de la 1ère partie du verset indiquerait déjà un nouvel exil et que une telle annonce au moment de la délivrance d’Egypte ne serait pas supportée par les Hébreux et aurait donc handicapé leur volonté de sortir d’Egypte à ce moment-là. Nous l’avons vu en détail, je n’y reviens pas.  

C’est la raison pour laquelle alors que Moïse demande le nom qu’il doit donner comme mot de passe en ce temps-là aux Hébreux, Dieu lui répond avec un mot qui ne désigne pas Son nom mais Son essence, Son être.

 

Et il y a une 1ère réponse donc qui concerne cette situation : la sortie d’Egypte est anticipée, elle s’effectue en un temps antérieur au temps prévu. Et par conséquent, Moïse se trouve être obligé de donner l’habilitation de sa mission - le fait qu’il est vraiment envoyé par Dieu à ce moment-là - de donner ces signes avant le moment attendu par les Hébreux. Il est donc obligé de donner déjà  maintenant un nom que l’on attend à la fin des temps. 

 

C’est pourquoi, dans la 1ère partie du verset 14, Dieu lui dit « אֶהְיֶה אֲשֶׁר אֶהְיֶה» « Je serais avec vous dès maintenant, de toutes les façons Je serais pour vous, à la fin des temps ». Je ne reviens pas sur l’analyse de cette expression, mais cela implique en tout cas qu’il y aura donc encore une distance de temps et de durée entre le moment où Moïse doit délivrer les Hébreux d’Egypte et cette fin des temps. Et cette durée implique nécessairement l’éventualité d’un nouvel exil.  

 

La difficulté pour Moïse c’est qu’il redoute de se heurter à certaine une résistance en dévoilant ne serait-ce que par implication que la sortie d’Egypte va bien avoir lieu mais qu’elle s’accompagnera d’un autre exil avec une sortie définitive. La résistance pourrait se formuler de la manière suivante : puisque de toutes les façons il faudra repartir d’Israël pour de nouveau retourner en exil, alors autant rester-là et attendre la fin des temps sans ce voyage provisoire...

Je suis gêné de l’ampleur que ce cours a prise parce que le sujet choisi est très précis, c’est de l’exégèse sur un texte difficile. Je vous demande donc beaucoup de patience. Et avec une heure par semaine on ne peut voir que des bouts de versets.

 

Au verset 15 : il y a une nouvelle formule qui est donné à Moïse :    

Verset 15

וַיֹּאמֶר עוֹד אֱלֹהִים אֶל-מֹשֶׁה, כֹּה-תֹאמַר אֶל-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל, יְהוָה אֱלֹהֵי אֲבֹתֵיכֶם אֱלֹהֵי אַבְרָהָם אֱלֹהֵי יִצְחָק וֵאלֹהֵי יַעֲקֹב, שְׁלָחַנִי אֲלֵיכֶם; זֶה-שְּׁמִי לְעֹלָם, וְזֶה זִכְרִי לְדֹר דֹּר

 « Dieu dit encore à Moïse: Parle ainsi aux enfants d’Israël, le Seigneur (Celui qui est Dieu) le Seigneur Dieu de vos pères le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob m’envoie vers vous, tel est Mon Nom à jamais, tel sera Mon Invocation dans tous les âges. »   

C’est la traduction que vous avez dans vos livres. Rien que le style de la traduction simple nous montre que cela n’est pas très clair.

 

Rashi intervient sur la fin du verset :

זֶה-שְּׁמִי לְעֹלָם, וְזֶה זִכְרִי לְדֹר דֹּר

 « Tel est Mon Nom à jamais, tel sera Mon Invocation dans tous les âges. »  

Nous reprenons les deux mots hébreux :

זֶה-שְּׁמִי = tel est mon nom

וְזֶה זִכְרִי = tel est mon invocation

 

שְּׁמִי - mon nom : Il faut se demander ce qu’il désigne dans le début du verset ?

Est-ce qu’il désigne les mots «יְהוָה אֱלֹהֵי אֲבֹתֵיכֶם  le Seigneur le Dieu de vos Pères »

Ou bien est-ce qu’il désigne l’expression אֱלֹהֵי אַבְרָהָם אֱלֹהֵי יִצְחָק וֵאלֹהֵי יַעֲקֹב

Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob ?

 

Il y a une méthode facile et immédiate pour comprendre ce qu’il y a à la fin du verset « Tel est Mon Nom à jamais, tel sera Mon Invocation dans tous les âges » en divisant la 1ère partie du verset elle-même en deux.  

« יְהוָה אֱלֹהֵי אֲבֹתֵיכֶם  Seigneur Dieu de vos pères » serait שְּׁמִי  mon Nom et correspondrait à זֶה-שְּׁמִי = tel est mon nom  

Et זֶה-שְּׁמִי = tel est Mon invocation correspondrait à אֱלֹהֵי אַבְרָהָם אֱלֹהֵי יִצְחָק וֵאלֹהֵי יַעֲקֹב Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob. 

 

Sur la différence des termes en français déjà :

Mon nom : la façon qui désigne mon être, mon essence et qui résulte de la lecture du verset précédent.   

Mon invocation : la manière dont on prononce l’invocation que l’on fait de Moi, c’est-à-dire l’allusion que l’on fait de Moi lorsque l’on parle de Moi. Ce serait là l’expression « Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob ».

 

Je vous donne lecture du verset 15 en hébreu et en français:

וַיֹּאמֶר עוֹד אֱלֹהִים אֶל-מֹשֶׁה, כֹּה-תֹאמַר אֶל-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל, יְהוָה אֱלֹהֵי אֲבֹתֵיכֶם אֱלֹהֵי אַבְרָהָם אֱלֹהֵי יִצְחָק וֵאלֹהֵי יַעֲקֹב, שְׁלָחַנִי אֲלֵיכֶם; זֶה-שְּׁמִי לְעֹלָם, וְזֶה זִכְרִי לְדֹר דֹּר

 « Dieu dit encore à Moïse : Ainsi tu diras aux enfants d’Israël, Le Seigneur…  

Ce n’est donc pas écrit Adonaï mais c’est écrit י / ה /ו / ה sous la forme du nom que l’on ne prononce pas.

 

Dieu de vos pères Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, et Dieu de Jacob M’a envoyé vers vous,

Ceci (Adonaï) est Mon Nom à jamais (donc la première partie de ce verset ce serait Mon nom Adonaï)

Et ceci est Mon invocation (c’est à dire la manière dont on M’invoque, dont on parle de Moi, c’est- à-dire Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, et Dieu de Jacob) dans tous les âges. »   

Je ne dis pas que c’est ainsi qu’il faut comprendre. C’est une première lecture du verset qui est simple.

 

Encore une fois :

Moïse a demandé à Dieu de quelle manière il doit parler de Lui au moment où il s’adresse aux  Hébreux en Egypte.

Dieu donne sa réponse au verset 14, étudié dans les cours précédents :

Va leur dire que de toute les façons Je serais maintenant avec eux ce que Je dois être à la fin des temps et au fond ils attendent maintenant le signe de la fin des temps...

Ceci implique qu’il y aura donc une fin des temps, donc un exil entretemps, et par conséquent Moïse craint de rencontrer une résistance, alors Dieu lui dit : Va leur dire simplement ceci en fin de verset 14 : « Je serais, אֶהְיֶה, avec eux »  Sous entendu : maintenant !  

Or Moïse avait demandé au verset 13 « Quel est ton nom ? » C’est–à-dire quelle est la manière dont je dois m’exprimer en parlant de Toi pour qu’ils soient assurés que c’est bien de Ta part que je viens. Alors que Dieu lui répond en désignant Son être, lui disant : De toutes les façons Je serais ce que Je suis – Je serais Moi-même, c’est-à-dire J’accomplirai les promesses que J’ai faites...

 

Et au verset 15, Dieu dit à Moïse de nouveau :

« Va dire aussi ceci aux enfants d’Israël, c’est Adonaï, (mais c’est écrit Yod Hé Vav Hé), le Dieu de vos pères, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, et le Dieu de Jacob, qui m’a envoyé vers vous ».   

En fin du verset, « tel est Mon nom à jamais », et cette 1ère partie de la fin du verset semble correspondre à ces mots : יְהוָה אֱלֹהֵי אֲבֹתֵיכֶם  Seigneur Dieu de vos Pères.

Et la 2nde partie du verset « וְזֶה זִכְרִי  = telle sera mon invocation » c’est-à-dire la manière dont on M’invoquera לְדֹר דֹּר à chaque génération de génération à génération : désignerait l’expression  אֱלֹהֵי אַבְרָהָם אֱלֹהֵי יִצְחָק וֵאלֹהֵי יַעֲקֹב  Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob. 

 

Il semble effectivement que ce soit la lecture la plus simple du verset.

 

C’est dire qu’il y a le Nom de Dieu, avec cette difficulté que c’est le mot qui désigne Son Essence, et ce n’est pas exactement ce que Moïse demandait. Moïse demandait sous quelle modalité il devait parler de Lui de tel sorte qu’ils comprennent que c’est en libérateur que Dieu vient, et non par exemple en Souverain, ou en Juge, ou en Providence mais en Libérateur.

Ce Nom  qui désigne que Dieu est Libérateur ne peut être donné qu’à la fin des temps.  

La manière dont Dieu charge de dire cela impliquerait que la fin des temps est pour beaucoup plus tard. Cette promesse que Dieu sera avec Israël déjà maintenant comme Il sera à la fin des temps, risquerait de faire comprendre qu’entretemps il y aura un exil supplémentaire. Moïse craint que cette annonce ne les inquiète et les désespère trop. 

Et voilà qu’au verset 15, Dieu dit à Moïse « de toute façon va leur dire que c’est Adonaï - Celui qui est reconnu comme Dieu par leur pères, le Dieu de vos pères, le Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob qui m’envoie vers vous… »

Et dis leur ceci :

 

זֶה-שְּׁמִי לְעֹלָם. Ceci (Adonaï) est Mon Nom pour l’éternité,

 

וְזֶה זִכְרִי לְדֹר דֹּר Et ceci est la manière dont on fait allusion à Moi à chaque génération.   

 

Alors nous pouvons comprendre de la manière suivante que l’expression יְהוָה אֱלֹהֵי אֲבֹתֵיכֶם désigne  זֶה-שְּׁמִי et que l’expression : אֱלֹהֵי אַבְרָהָם אֱלֹהֵי יִצְחָק וֵאלֹהֵי יַעֲקֹב signifie וְזֶה זִכְרִי la manière dont on fait référence à Moi à chaque génération…

 

Rashi :  

Il va nous parler de tout à fait autre chose sur cette fin de verset 15. זֶה-שְּׁמִי לְעֹלָם.

Tel (Adonaï) est Mon Nom à jamais,  

Le mot לְעֹלָם signifie littéralement « tant que dure le monde ». Le mot עֹלָם est traduit de l’hébreu par « monde » mais c’est en fait le sens de « durée ». עֹלָם signifie « la durée du monde » que l’on a l’habitude de traduire « à jamais » ou « pour toute l’éternité »  

 

זֶה שְׁמִי לְעֹלָם

חָסֵר וָי"ו לוֹמָר הַעֲלִימֵהוּ שֶׁלֹּא יִקָּרֵא כִּכְתָבוֹ

Cela est mon Nom pour toujours (לְעֹלָם

Le mot לְעֹלָם est écrit sans la lettre ו, pour qu’on puisse le lire : לְעָלֵם [« tel est mon Nom destiné à être “caché” »], à ne pas prononcer comme il est écrit (Pessa‘him 50a ; Chemoth raba).

 

וְזֶה זִכְרִי

לִמְּדוּ הֵיאָךְ נִקְרָא וְכֵן דָּוִד הוּא אוֹמֵר ה' שִׁמְךָ לְעוֹלָם ה' זִכְרְךָ לְדוֹר וָדוֹר

Hachem lui apprend comment prononcer Son Nom. De même chez David : « Hachem, c’est ton Nom pour toujours, Hachem, c’est ton invocation de génération en génération ! » (Tehilim 135, 13).  

 

Rashi nous dit que ce mot de עֹלָם en réalité dans le verset est écrit חָסֵר sans lettre ו.

En enlevant la voyelle ו cela fait que la vocalisation a changé.

לְעֹלָם = pour tout le temps que dure le mondeà jamais - est écrit sans le ו.

Il en résulte qu’il faudrait lire « לְעָלֵם» de manière à dire « pour le cacher » afin qu’il ne soit pas prononcé comme il est écrit.  

Cette racine en hébreu  ע / ל / מ  d’où provient le mot עֹלָם lui-même – cette racine עלם signifie « caché », plus que caché d’ailleurs : « occulté » - caché de telle sorte que ce ne soit même pas deviné, לְעֹלָם.  

Et Rashi explique : « זֶה שְׁמִי לְעָלֵם Voici Mon nom pour le cacher »

Normalement nous devrions lire « voici mon nom pour le monde, à jamais, pour toujours »

Mais voilà qu’il est écrit : זֶה שְׁמִי לְעָלֵם Voici mon nom pour le cacher !

 

Et qu’est-ce que cela signifie ?

Cela veut dire : « écris-le d’une manière différente de la manière dont il doit être lu ».

 

Relisons la traduction littérale : « זֶה שְׁמִי לְעֹלָם : voici mon nom à jamais » Cela veut dire « tant que durera le monde ». Le mot לְעֹלָם est écrit sans la lettre ו pour nous dire לְעָלֵם, ce qui veut dire « Cachez-le » nous dit Rashi de telle sorte que ne soit pas lu ce qui est écrit.

 

En fait dans les livres de la תּוֹרָה, ce nom est écrit יְהוָה, que l’on a l’habitude d’écrire avec un Kouf  (ק) pour éviter l’écriture du nom qu’il est interdit d’effacer. C’est écrit d’une façon et lu d’une autre « אֲדֹנָי » qui signifie « Mon Seigneur ». Ce que rendent les traductions par « le Seigneur » chaque fois qu’apparait ce nom sous cette forme-là.   

 

La notion est exacte : dans la tradition juive, la lecture de ce mot que l’on ne prononce pas  s’effectue à l’aide d’un mot qui signifie « Mon Seigneur », qui veut dire « Souverain ».

Le mot « אֲדֹנָי - Mon Seigneur » : Celui que je reconnais comme Mon Seigneur. Que signifie Seigneur ? Cela veut dire « Souverain » que je reconnais comme mon maitre, dans le sens de Roi –  אֲדוֹן.  

 

Dieu est aussi appelé מֶלֶךְ. C’est la Souveraineté du מֶלֶךְ, c’est la Souveraineté qui dépend de la reconnaissance de cette souveraineté par ses sujets. Tandis que la Souveraineté de l’Adon ne dépend pas de cette reconnaissance. L’expression connue est Eïn Melekh Vélo Am - Pas de Roi sans peuple » tandis que אֲדוֹן signifie le souverain quoiqu’il en soit, le mot de Adon désigne la notion de souveraineté.

 

On devrait dire אֲדֹנִי - Mon Souverain. Seulement comme on  parle de Dieu la forme est une forme qui fait penser à un pluriel de majesté mais c’est un singulier. Ce n’est pas un pluriel sinon pour dire « Mes Souverains » il y aurait אֲדֹנַּי avec un Pata’h.  (ַ)

Il y a un Qamats (ָ) pour indiquer une toute autre forme qui est la forme que l’on emploie pour s’adresser vraiment à Dieu. Avec un Pata’h, alors on pourrait dire comme disent les grammairiens que c’est un pluriel de majesté. Mais c’est un singulier, mais seulement ce n’est pas un singulier qui s’adresse à un particulier, mais c’est un singulier qui s’adresse à Dieu. Alors il y a אֲדֹנָי avec un Qamats.  

Dans le  תּוֹרָה סֵּפֶר, il n’y a pas de voyelle, mais dans les livres qui reproduisent les voyelles nous trouvons écrit ce mot avec les voyelles du mot « אֲדֹנָי ».

C’est la raison pour laquelle on a ici le Sheva (ֲ), le ‘Holam (ֹ ) et le Qamats (ָ)

Pourquoi-là le Sheva ? Parce qu’on met Shéva-Pata’h sous le א, mais sous le י le Pata’h-Qamats. C’est exactement l’inverse. En réalité, la voyelle c’est le Sheva mais sous le א il faut mettre un Pata’h avec le Sheva.  

 

C’est la raison pour laquelle nous avons ce mot-là écrit avec ces voyelles du mot אֲדֹנָי.

Il en résulte que les exégètes qui ne savent rien de ce qu’ils lisent ont lu ce mot Jéhovah.

C’est une grosse bourde des historiens des religions non-Juifs. Ils ne se sont pas rendus compte de quoi ils parlaient. Ils ont lu ce mot-là, dont ils ne connaissent pas la prononciation, c’est ce que d’ailleurs dit le texte depuis toujours et comme Dieu dit à Moïse : on ne saura pas comment il faut le lire. Ils disent « Jéhovah ».

 

En tout cas c’est de là que vient ce principe : le mot qui désigne le nom de Dieu est prononcé avec un autre mot. C’est ce que dit Rashi. Dieu lui dit : Je vais te donner mon nom לְעָלֵם mais d’une manière que tu le cacheras...

Rashi nous dit : on ne va pas le lire comme il est écrit.  

Le principe qu’il y a ici est enseigné par une Mishna du Talmud : on n’a pas le droit de prononcer le Nom de Dieu en dehors de Son temple. Le mot qui signifie temple est le mot הֵיכַל.    

Cet enseignement du Talmud s’appuie sur un verset de la prière du prophète ‘Habaqouq (2:20) qui dit ceci :

 וַיהוָה, בְּהֵיכַל קָדְשׁוֹ:  הַס מִפָּנָיו, כָּל-הָאָרֶץ

 «  Et הַשֵּׁם dans le palais de son sanctuaire, Silence devant Lui toute la terre » 

 

Une des significations de ce verset : Dieu est dans son temple, dans le temple de sainteté et fait que toute la terre se tait. C’est le Drash du Talmud : quand Dieu est dans son temple, on peut parler, c’est–à-dire on peut juste dire le Nom de Dieu, mais toute la terre en dehors doit se taire. C’est-à-dire qu’on ne peut pas dire le Nom de Dieu en dehors du Temple.  

La tradition talmudique a appliqué cette règle qu’on n’a pas le droit de prononcer le nom de Dieu   en dehors de son temple, de cette manière. C’est dire qu’on n’a pas le droit de prononcer le nom de Dieu en dehors de son temple. Et Son temple c’est le mot Adonaï.

Parce que le mot d’Adonaï signifie la souveraineté de Dieu. Cela veut dire que je parle de Celui que je reconnais comme mon souverain. Cela signifie donc qu’on n’a pas le droit d’invoquer le Nom de Dieu en dehors de la catégorie de la Souveraineté. En d’autres termes : On n’a pas le droit de faire allusion à Celui qui est Dieu autrement qu’en Le reconnaissant comme son souverain. Si je veux parler de Dieu je dois dire « Mon Souverain ». Lorsque je dis « Adonaï »  je parle de Celui qui est Dieu mais en tant que je Le reconnais comme mon Souverain.  

Parce que si je parle de Dieu sans le reconnaître comme mon souverain, dans l’évocation même toute seule, c’est un blasphème. De quoi je parle si je ne le considère pas comme mon souverain et que j’emploi le nom de Dieu ? C’est que je ne le considère pas comme Dieu et si je dis le nom de Dieu cela ne signifie rien !  

Ce terme יְהוָה désigne l’être de Celui qui est Dieu. Mais on n’a pas le droit de le désigner en dehors d’une invocation qui implique que je reconnaisse sa souveraineté.

C’est pourquoi pour dire «  יְהוָה » je dis « Adonaï ».   

 

Q: Question sur le nom Elohim.

R: Parler de Dieu en ne le reconnaissant pas tel, c’est se contredire en parlant.

Et il y a une grande règle dans la תּוֹרָה : il est interdit de mettre quelqu’un en situation de faute.

Il y aurait un piège pour moi. Le principe est le suivant : « On n’a pas le droit de mettre une pierre devant un aveugle ». Par conséquent, la תּוֹרָה elle-même s’interdit de me donner un nom de Dieu qui me mettrait moi en contradiction. En disant « Elohim » je reconnais la souveraineté de Dieu, c’est un terme qui signifie que Dieu a tous les pouvoirs. Le fait de dire Elohim est une autre manière de reconnaitre Dieu. Il y a dix noms employés par la תּוֹרָה et neuf de ces dix noms - dont le dixième est le nom Adonaï – signifient que je reconnais Dieu comme souverain de différentes manières. Ici Adon est une catégorie qui ressemble mais n’est pas la catégorie du מֶלֶךְ qui est une catégorie autre.

Dans la prière du matin : אֲדוֹן עוֹלָם אֲשֶׁר מָלַךְ  et מֶלֶךְ יְהוָה ce n’est pas la même chose. מֶלֶךְ c’est la fonction.

Mais je prends par exemple le nom de צְבָאוֹת. Dans le nom de צְבָאוֹת c’est de Dieu que je parle. Mais dans une catégorie telle qu’effectivement je reconnais Sa souveraineté.

 

Finalement c’est le nom d’Adonaï qui a été choisi et qui est un de ces neufs noms autres que le הֲוָיָה שֵׁם. Et la tradition talmudique a institué que c’est à l’aide de ce vocable- là יְהוָה que le Nom de Dieu serait invoqué lorsqu’on a à l’invoquer. La raison est d’ordre religieux. Cela veut dire que si je prononce ce nom je me mets en contradiction : je désigne Dieu en son être, comme s’Il ne concernait pas la souveraineté qu’Il a sur moi. Sauf s’il s’agit du grand prêtre dans le Temple. Ici il n’y a pas de doute de qui on parle : c’est celui à qui on rend le culte dans le temple.  

Cela ne veut pas dire que les rabbins ne connaissent pas la prononciation de ce nom. On la connait. Mais ce n’est pas Jéhovah. C’est une erreur qu’un enfant de תּלָמוּד- תּוֹרָה ne fait pas.

 

Adonaï : אָדָם  - אֲדוֹן

La racine de אֲדוֹן en hébreu c’est une racine qui signifie la relation de souveraineté du maître, non pas dans le sens de magistrat mais dans le sens de celui qui est plus que moi.

Cf. le latin maximu.

Effectivement, le mot אֲדוֹן peut être considéré comme le superlatif du motאָדָם . En ôtant le ם du mot de אָדָם  et ajoutant la désinence du superlatif en וֹן (Vav-Noun) cela donne אֲדוֹן. 

C’est la notion qu’il y avait dans le vieux français avec la notion de magister.

En hébreu cela a une nuance bien précise, celle de l’engendreur : celui qui a fait que j’ai pu exister.

Effectivement, dans la תְפִלָּה, chaque fois que se présente le mot de אֲדוֹן, c’est toujours « הַנְשָׁמוֹת אֲדוֹן » ou « הַתּוֹלְדֹת אֲדוֹן »...

 

La racine «  אד» en hébreu signifie une force. Pas dans le sens de כֹחַ, mais une force pure dontאַדִּיר  est l’adjectif. Son superlatif est אֲדוֹן i.e. le plus fort.

אֲדוֹן c’est l’idée de celui qui est plus que moi et grâce à qui je suis moi. C’est exactement en vieux français le sens de Seigneur.

 

Le principe est le suivant : on n’a pas le droit de prononcer le nom de Dieu en dehors de la catégorie de la soumission à une souveraineté. C’est effectivement ce thème que Rashi met en évidence dans son commentaire, mais avec une nuance que nous allons essayer de mieux comprendre.  

 

Rashi nous dit: Le mot לְעֹלָם n’est pas écrit avec un ן et cela met en évidence le fait que cela signifie donc : « Je vais te dire quel est Mon Nom et tu ne t’en serviras que d’une manière telle que tu pourras le cacher ».

Que signifie le prononçant en le cachant ? Cela signifie qu’on ne doit pas le prononcer comme il est écrit.  

 

Il y a d’ailleurs différents degrés à ce problème :

  • Le nom qui est écrit mais non pas prononcé.
  • Le nom qui est prononcé mais non pas écrit.
  • Le nom qui n’est ni écrit ni prononcé.
  • Le nom qui est écrit comme il est prononcé.  

 

Retenons surtout le principe général : cette idée qu’il faut occulter, qu’il faut cacher cette révélation qui est donnée. Premier principe important : parce qu’on n’a pas le droit de formuler cette désignation de qui est Dieu en dehors du fait de le reconnaître comme étant souverain sur soi.  

Alors on nous indique d’ailleurs que le mot יְהוָה devrait avoir un ן mais qu’il n’en a pas. On ne trouve jamais le mot יְהוָה avec un ן. De la même manière que le mot de לְעֹלָם.  

Et on signale d’autre part qu’il en résulte que la valeur numérique du mot יְהוָה est de 65 comme le mot de הֵיכַל = 65. Ce que cela signifie nous mènerait trop loin, mais vous voyez à peu près.

 

Q: Si dans chaque mot de la תּוֹרָה le nom de Dieu est caché, comment comprendre alors les mots רָשָע et רָע?

R: Je ne peux répondre que sous forme d’anecdote : La controverse entre les מִתְּנָגְדִים et les ‘Hassidim. Les מִתְּנָגְדִים ne reconnaissent comme autorité que l’autorité de leur rabbin tandis que les ’Hassidim ne reconnaissaient comme autorité que l’autorité de leur צַדִּיק. La différence c’est que leur צַדִּיק pouvait aussi être rabbins alors que leurs rabbins...

Les מִתְּנָגְדִים: que signifie Rabbi ?  בְּנֵי יִשְׂרָאֵל רֹאשׁ ! Les chefs des enfants d’Israël

Les ‘Hassidim leur répondaient : Que signifie Rabbi ? הַשֵּׁם בְּנֵי רָע...

Regardez ce qu’il y a dans רָשָע et dans רָע.

 

Q: ……

R: le mot de מֶלֶךְ étymologiquement c’est le chef de guerre - celui qui marche devant – c’est très exactement le terme Rex en latin. Regulus le roi – le conducteur – la notion de règle, le régulateur...

Le mot italien de Duce...

 

Retour au sujet :  

Nous avons compris le principe et la raison pour laquelle ce mot est caché, לְעָלֵם, c’est-à-dire qu’il ne doit pas être lu ni prononcé comme il est écrit.  

Dans Rashi – זֶה שְׁמִי לְעֹלָם qui est écrit זֶה שְׁמִי לְעָלֵם: voici mon nom pour le cacher » dont le sens littéral c’est : Voici Mon nom permanent, ce que Je suis de toute éternité ». Mais il y a aussi écrit « וְזֶה זִכְרִי לְדֹר דֹּר – et voici la manière de m’invoquer à chaque génération… »  

Et Rashi met en évidence la règle que l’écrit, la forme cachée, celle qui est permanente est écrite, et la forme invoquée n’est pas la même. Et la forme qui est invoquée c’est le mot Adonaï.  

Les deux enseignements sont parallèles.

C’est-à-dire dans la 1ère partie de la fin du verset - « Tel est mon nom à jamais » - Dieu a expliqué à Moïse comment il fallait écrire ce nom-là c’est-à-dire le cacher puisque ce n’est pas ainsi qu’il est prononcé. Et dans la 2ème partie de la fin du verset, il y a indiqué comment il faut le prononcer, c’est-à-dire de la manière dont Abraham, Isaac et Jacob ont reconnu sa souveraineté.

Voilà donc les deux niveaux qui apparaissent-là.

 

Il nous faut mieux comprendre la différence entre le nom qui est écrit et qui n’est pas lu, et le nom qui est prononcé. De telle sorte que nous comprenions quel est le contenu du message que Moïse va leur donner à cette génération. Il veut leur parler de Celui qui est Dieu, et dont je vous lis les lettres sans le prononcer  י / ה /ו / ה, mais il leur donne sous le mot de Adonaï.  

Cela signifie donc qu’il y a obligation des enfants d’Israël de reconnaître Dieu comme souverain de telle sorte que leur libération d’Egypte soit possible. Et au fond d’une autre manière, de s’identifier comme vraiment les descendants Abraham, d’Isaac et de Jacob, puisque le verset lui-même précise : « Celui qui est le Dieu d’Abraham, Dieu de Isaac, et Dieu de Jacob m’a envoyé vers vous.. ».

C’est dire que de la même manière qu’Abraham, Isaac et Jacob ont accepté la souveraineté de Celui dont il est parlé, de la même manière vous  avez accepté Sa souveraineté de telle sorte que la sortie d’Egypte soit possible.  

Alors on pourrait se demander quelle est la différence entre les deux notions, puisque c’est bien Dieu tel qu’il est désigné par le 1er terme qui a été reconnu comme souverain par les Patriarches ?

Et pourtant, d’après l’explication de Rashi, nous voyons que l’un désigne l’éternité (c’est-à-dire ce que Dieu est en lui-même quelque soit la génération dans laquelle il est invoqué) alors que l’autre désigne au contraire la manière dont Dieu est invoqué dans telle ou telle génération différente.

 

Explication:

L’expression de fin du verset לְדֹר דֹּר - de génération en génération.

Effectivement, entre Abraham, Isaac et Jacob, il y a déjà 3 générations. C’est-à-dire : Voici comment mon nom a été invoqué de génération en génération par Abraham, par Isaac, par Jacob. C’est-à-dire qu’Isaac a invoqué le même nom que son père Abraham et Jacob a aussi invoqué le même nom. Lequel ? Celui qui est prononcé, c’est à dire qu’ils ont reconnu Dieu comme souverain. Par conséquent, c’est aussi ce que les Hébreux au moment de la sortie d’Egypte ont à faire.   

Il y a un nom permanent qui est écrit mais qui n’est pas lu. Il y a d’autre part la catégorie à laquelle, à chaque génération, ce nom doit être invoqué. Et nous avons compris que selon la règle cette catégorie c’est le mot Adonaï, c’est-à-dire reconnaître la souveraineté de Dieu.  

 

Or, nous voyons même que dans l’expression qui est désignée par le mot de זֵכֶר - et voici comment on me mentionne de génération en génération -  cette expression est donnée par le verset sous la forme suivante : « Celui qui est le Dieu d’Abraham, le Dieu de Isaac et le Dieu de Jacob ». C’est-à-dire qu’il y a là déjà là 3 générations. Alors quel est l’essentiel du message que Moïse va leur apporter ? C’est qu’il n’ajoute pas une 4ème génération ! C’est-à-dire que nous n’avons pas ici l’expression qu’au fond ils attendaient et qui serait analogues à celles-ci : « Dieu de Moïse ».  

 

Au fond, ils attendaient un message de cet ordre : connaissant le Dieu d’Abraham, le Dieu de Isaac et le Dieu de Jacob, et Moïse leur annonçant au nom de ce Dieu que le temps est venu de réaliser la sortie d’Egypte, alors comment se nomme le Dieu de Moïse ?  

Et Moïse est chargé de leur répondre : le Dieu duquel je vous parle c’est le Dieu d’Abraham, le Dieu de Isaac et le Dieu de Jacob... C’est dire qu’ils sont renvoyés à la fidélité que les patriarches ont eu, et donc à cette nécessité de s’identifier, en filiation de façon authentique, comme fils d’Abraham, d’Isaac et de Jacob.  

Il y a donc l’indication suivante :

Jusqu’à la fin des temps, Dieu sera toujours invoqué comme Dieu d’Abraham, Dieu de Isaac et Dieu de Jacob.    

Le message qui est donné là, c’est qu’ils réclament de lui le nom que Dieu portera à la fin des temps, c’est-à-dire au fond à la dernière génération. Et à ce moment-là cela aurait pu être une expression analogue à « Dieu de Moïse » par exemple. Simplement pour situer ce personnage qui aurait été celui d’une révélation nouvelle par rapport auזֵכֶר  de זִכְרִי לְדֹר דֹּר.

 

Or, le fait que dans l’expression Dieu d’Abraham Dieu de Isaac et Dieu de Jacob – nous trouvons déjà  3 générations, et le fait que le contenu même du verset dit : « et pendant toutes les générations jusqu’à la fin des temps, c’est ainsi que mon nom sera invoqué, c’est alors une manière de leur faire comprendre que le temps présent n’est pas le temps de la fin des temps. 

Il y a plusieurs hypothèses possibles dans les textes que nous étudions à ce sujet. C’est soit l’expression de « Dieu d’Israël » – soit l’expression « Dieu de David ». Je vous ai signalé précédemment l’hypothèse possible « Dieu de Moïse ». 

Nous ne trouvons jamais dans la liturgie des expressions de ce genre « Dieu d’Israël », « Dieu de David ».  Sauf dans des contextes qui ne sont pas des phrases d’invocation. Sauf dans des contextes explicatifs où nous disons que le Dieu que nous reconnaissons est le Dieu d’Israël. Mais cette formule cette invocation Celui qui est Dieu en tant que Dieu d’Israël n’est pas encore réalisée. 

 

L’enseignement est donné dans la גְּמָרָא à propos de David. On nous dit ceci : David a demandé un jour à Dieu pourquoi dit-on « Dieu d’Abraham, Dieu de Isaac et Dieu de Jacob » et pas « Dieu de David » ? Dieu a répondu : Je les ai éprouvés et ils ont surmonté leurs épreuves ? Veux-tu que Je t’éprouve ? David : d’accord ! Dieu a éprouvé David qui n’a pas surmonté l’épreuve.

 

La גְּמָרָא nous donne cet enseignement pour bien nous faire comprendre pourquoi on dit de Dieu sous son invocation de souveraineté « Dieu d’Abraham, Dieu de Isaac, et Dieu de Jacob »,  parce qu’ils ont réussi en tant que Abraham, en tant que Isaac, et en tant que Jacob.

Bien sûr David lui-même reconnait le Dieu d’Israël comme son Dieu et par conséquent le Dieu d’Israël est le Dieu de David. Mais je veux dire que cette expression « Dieu de David » n’est pas entrée dans les formules de l’invocation de ce qui est dit par rapport à ce qui est écrit. « Adonaï » c’est le mot qui renvoie à « Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac et Dieu de Jacob ». A chaque génération, c’est le « Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, et Dieu de Jacob »  

 

D’autre part, nous avons dans les règles de la תְּפִלָּה, le fait qu’il y a 18 bénédictions dans le שְׁמונֶה עֶשְׂרֶה, parce qu’il y a 18 fois dans la תּוֹרָה l’expression « Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac et Dieu de Jacob ». 

Donc le passage cité de la גְּמָרָא citée au sujet de David signifie que le temps de l’histoire d’Israël n’est pas encore réalisé du point de vue de l’épreuve dont on a parlé précédemment, de façon telle que Dieu puisse être nommé, du point de vue de l’invocation liturgique, comme « Dieu d’Israël ».

 

En d’autres termes, la תּוֹרָה n’est pas encore réalisée dans l’histoire humaine de manière telle que Dieu peut être nommé « Dieu de Moïse ». C’est en cours d’histoire, c’est en cours de tentative, mais ce n’est pas encore réalisé comme Abraham, Isaac et Jacob ont eux déjà réalisé eux l’épreuve dont ils avaient à rendre compte. 

Dit d’une autre manière, les valeurs qu’Abraham, Isaac et Jacob avaient à réaliser sont déjà réalisées, alors on peut dire déjà « Dieu d’Abraham, Dieu de Isaac, et Dieu de Jacob ».

Mais tant que la valeur ultime qu’il y a à réaliser, où nous aurions cette expression « Dieu de Moïse », « Dieu de David » « Dieu d’Israël », n’est pas encore réalisée, alors la mention que l’on doit faire de Dieu c’est cette catégorie de la souveraineté, c’est-à-dire le mot de « Adonaï ».

 

***

 

Q: …

R: Le peuple d’Israël a déjà réussi en tant que Jacob mais pas en tant qu’Israël. Alors je pense que c’est peut-être le temps. Il est possible que cela va arriver.

 

Q : …

R : C’est exactement cela. Ce que les Hébreux attendent ils ont raison de l’attendre, mais il faut qu’ils comprennent que ce n’est pas encore possible. Le fait que les Hébreux attendent ce שְׁמ nouveau, c’est légitime. Seulement, il faut le cacher, et il faut encore se renvoyer au nom de l’essence - c’est-à-dire le nom caché - parce que ce n’est pas encore le temps, et la mention, l’invocation, qui sera faite dans toutes les générations jusqu’à la fin des temps sera encore celle de Dieu d’Abraham, Dieu de Isaac et Dieu de Jacob. C’est légitime mais ce n’est pas le temps. C’est empêché parce que ce n’est pas possible encore. 

 

D’autres exemples classiques avec des risques d’inversion du point de vue du jugement de valeur: 

« Tu es poussière et c’est à la poussière que tu retourneras ». Il ne faut pas se frotter les mains, il ne faut pas croire que c’est comme ça que cela doit être ! L’accentuation (dans le texte biblique) signifie: dommage ! Et c’est encore comme ça : L’homme est pris de la poussière pour qu’il devienne lumière, et il retourne à la poussière !

 

Dieu à Moïse : כִּי תִשָּׂא - 33:20

וַיֹּאמֶר, לֹא תוּכַל לִרְאֹת אֶת-פָּנָי:  כִּי לֹא-יִרְאַנִי הָאָדָם, וָחָי

Car l’homme ne peut pas me voir et vivre   

Il ne faut pas non plus se frotter les mains, tant mieux c’est comme ça...

L’accent dit : dommage ! Vous n’en n’êtes pas encore capables...

Cela veut dire que c’est une Madréga.

 

Je cite ces exemples pour faire comprendre qu’il y a ainsi un certain nombre de thèmes, qui sont exacts dans leurs contenus mais qui risquent d’être inversés du point de vue du jugement de valeur. 

En fait, cela signifie que Moïse n’est pas habilité à donner le nom de Dieu du point de vue de ce qui se prononce, au niveau où cela a été possible pour Abraham, Isaac et Jacob. C'est-à-dire ces expressions que je vous cite parce qu’elles existent dans les textes : Dieu de Moïse, Dieu de David, et Dieu d’Israël. Je veux dire que nous sommes capables d’être le peuple d’Abraham et dire de notre Dieu qu’il est le Dieu d’Abraham, le peuple d’Isaac et de dire…etc. Nous n’en sommes pas encore capables pour Moïse, pour David et pour Israël, et pour ce que signifie le nom en définitive pour Israël.

 

Q: …..

R: On a le droit de dire « Dieu d’Isaac » qu’après lui. Isaac lui n’a jamais dit « Dieu d’Isaac », il a dit « Dieu d’Abraham ». Je vous donne la source.

בְּרֵאשִׁית: C’est une révélation de Dieu à Jacob et où Dieu dit à Jacob [Gn. 28.13]:

אֲנִי יְהוָה אֱלֹהֵי אַבְרָהָם אָבִיךָ, וֵאלֹהֵי יִצְחָק

« Je suis le Dieu d’Abraham ton père, et le Dieu d’Isaac... ». Or, Isaac est encore vivant.

 

Rashi : וֵאלֹהֵי יִצְחָק

אַף עַל פִּי שֶׁלֹּא מָצִינוּ בַּמִּקְרָא שֶׁיִּחֵד הַקָּדוֹשׁ בָּרוּךְ הוּא שְׁמוֹ עַל הַצַּדִּיקִים בְּחַיֵּיהֶם לִכְתּוֹב אֱלֹהֵי פְּלוֹנִי מִשּׁוּם שֶׁנֶּאֱמַר הֵן בִּקְדוֹשָׁיו לֹא יַאֲמִין כָּאן יִחֵד שְׁמוֹ עַל יִצְחָק לְפִי שֶׁכָּהוּ עֵינָיו וְכָלוּא בַּבַּיִת וַהֲרֵי הוּא כַּמֵּת וְיֵצֶר הָרַע פָּסַק מִמֶּנּוּ

(תַּנְחוּמָא)

 

Il est vrai que, nulle part dans le texte, le Saint béni soit-Il n’a associé de leur vivant Son nom à celui des justes, en écrivant « Eloqim d’un tel », car il est écrit : « même en Ses saints Il n’a pas confiance » (Iyov 15, 15). Ici, cependant, Il a uni Son nom à celui de Yitzhak, parce que sa vue s’était assombrie et qu’il était obligé de rester chez lui. Il était donc comme mort, et son penchant au mal l’avait quitté, [de sorte qu’il était devenu hors d’état de pécher] (Midrach tan‘houma guemara).

 

Où est la question ? On ne permet pas de définir son nom par quelqu’un qui est encore vivant parce que tant qu’il est vivant, il risque encore d’échouer. Objection : Isaac est toujours vivant ? Réponse : Isaac n’avait plus de הַרַע יֵצֶר, il était tellement vieux, d’ailleurs aveugle de vieillesse, qu’il n’avait plus de mauvais penchant, et donc il était considéré comme mort. [Vous voyez la définition d’un vivant !] Il n’y avait plus aucun risque qu’Isaac fasse de faute puisqu’il n’avait plus aucune envie. Isaac était aveugle de vieillesse. A cette époque là il dit à Jacob (c’est dans le contexte de la bénédiction des enfants d’Isaac) [Gn. 27.1]: 

וַיְהִי כִּי-זָקֵן יִצְחָק, וַתִּכְהֶיןָ עֵינָיו מֵרְאֹת

Il arriva, comme Isaac était devenu vieux, que sa vue s'obscurcit…

 

Les yeux d’Isaac ne pouvaient plus voir à cause de la vieillesse et Isaac convoque ses enfants pour le bénir et leur dit : je ne sais quel jour je vais mourir. 

וַיֹּאמֶר, הִנֵּה-נָא זָקַנְתִּי; לֹא יָדַעְתִּי, יוֹם מוֹתִי

Isaac reprit "Vois, je suis devenu vieux, je ne connais point l'heure de ma mort.

 

Il y a d’ailleurs un Midrash qui dit:

Parce qu’il est arrivé à un stade où il ne peut pas dire dans quelle année, mois ou semaine, mais il ne compte plus qu’en jours. Il est à la fin de sa vie alors il est considéré comme étant hors de ce danger d’avoir à faire des fautes et déjà on peut parler du « Dieu d’Isaac ». 

Plus tard, un grand maître de la קַבָּלָה sera Rabbi Itzhak Saggi Nahor (hébreu: יצחק סגי נהור Isaac Plein de lumière) (1160 - 1235, Posquières) de Gérone (Catalogne) – c’était Isaac l’aveugle. 

 

Vu dans l’étude précédente avec Rashi sur le verset 15 dans sa dernière partie sur la différence de sens qu’il y a en hébreu entre le mot שְׁמ qui signifie le nom et le mot זֵכֶר qui signifie la manière dont on l’invoque.

 

Verset 15.

וַיֹּאמֶר עוֹד אֱלֹהִים אֶל-מֹשֶׁה, כֹּה-תֹאמַר אֶל-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל, יְהוָה אֱלֹהֵי אֲבֹתֵיכֶם אֱלֹהֵי אַבְרָהָם אֱלֹהֵי יִצְחָק וֵאלֹהֵי יַעֲקֹב, שְׁלָחַנִי אֲלֵיכֶם; זֶה-שְּׁמִי לְעֹלָם, וְזֶה זִכְרִי לְדֹר דֹּר  

 « Dieu dit encore à Moïse Ainsi tu diras aux enfants d’Israël, Le Seigneur (C’est écrit יְ/ה/וָ/ה sous la forme du nom que l’on ne prononce pas ) Dieu de vos pères Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, et Dieu de Jacob M’a envoyé vers vous, Ceci (Adonaï) est Mon Nom à jamais, Et ceci est Mon invocation (c’est-à-dire la manière dont on m’invoque, dont on parle de Moi, c’est-à-dire Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, et Dieu de Jacob) dans tous les âges. »  

 

זֶה-שְּׁמִי לְעֹלָם Ceci (Adonaï) est Mon Nom pour l’éternité,

וְזֶה זִכְרִי לְדֹר דֹּר Et ceci est mon invocation de génération en génération  

Etude de la différence de sens entre le mot שְׁמ– le nom - et זֵכֶר -  la manière dont on l’invoque.

 

Dans les versets 13 et 14, il y a une discussion entre Moïse et Dieu. Moïse est chargé de faire sortirIsraël d’Egypte au temps de la sortie d’Egypte, et il demande quel est le Nom de Dieu au nom duquel il vient et par lequel il doit Le désigner pour délivrer Israël.

Nous avons vu en détail les raisons de cette contestation possible entre l’Israël de ce temps et Moïse qui est chargé de les délivrer. Il est apparu un premier nom, le nom hébreu אֶהְיֶה qui signifie « Je serais ». 

Ensuite, au verset 15, Dieu donne à Moïse le Nom qu’il a révélé aux Patriarches et que par conséquent toute la descendance des Patriarches connait déjà depuis Abraham, Isaac et Jacob, qui sont les trois 1ères  générations, et Moïse arrive à la 6 ème génération. Donc depuis Abraham jusqu’à Moïse, la tradition du Nom connu par les patriarches était restée : c’était l’expression « ADONAÏ, Dieu de vos pères Dieu d’Abraham, Dieu de Isaac, et Dieu de Jacob m‘a envoyé vers vous ».

 

La fin du verset 15 : « Tel est Mon Nom à jamais », c’est le mot que nous lisons « ADONAÏ ».« Telle sera la manière dont on m’invoque, la manière dont on fait allusion à Moi, de génération en génération ».

 

A ce propos, nous avons déjà étudié la semaine dernière l’enseignement de Rashi disant qu’il y a une différence dans la manière dont le Nom de Dieu est écrit dans le texte de la תּוֹרָה et dans la manière dont on le prononce. Jusqu’à présent nous l’avons prononcé ADONAÏ mais le Nom de Dieu est écrit différemment.    

Nous allons reprendre tout cela et je vous ajouterai un enseignement plus général de telle sorte de comprendre l’intention du commentaire de Rashi.

 

שְׁמ  

Nous avons le 1er mot qui est le mot de שְׁמ qui en hébreu veut dire le « nom ». C’est le mot qui signifie en français le nom de quelqu’un. Et lorsque Dieu charge Moïse de délivrer Israël d’Egypte, nous savons déjà que ce n’est pas exactement le temps, c’est anticipé. Moïse craint que les Hébreux viennent lui demander au nom de qui il vient annoncer que le temps est arrivé quand même. Alors il demande un nom. Le nom c’est le mot par lequel on désigne la manière dont on connait quelqu’un. 

Nous ne pouvons pas connaître, nous qui sommes dans le monde, l’essence de Dieu. Mais nous pouvons connaître la manière dont il se révèle, la manière dont il se relie au monde, ce que la תּוֹרָה appelle le Nom de Dieu. Il y a Dieu et Son Nom. Il y a plus en Lui que dans Son Nom. Dans les expressions traditionnelles, la différence se retrouve entre « הוּא בָּרוּךְ» et « שְׁמוֹ בָּרוּךְ ».

הוּא בָּרוּךְ  signifie que « Lui est béni ».

שְׁמוֹ בָּרוּךְ, signifie que « son Nom est béni ».

Donc, il y a une différence entre הוּא et שְׁמוֹ, c’est-à-dire entre Lui et Son Nom.

En d’autres termes, Lui est beaucoup plus que Son Nom. Son Nom c’est la manière dont il se révèle pour moi, mais ce qu’Il est en Lui-même, c’est beaucoup plus. 

Le Nom désigne l’être mais uniquement la manière dont l’être se révèle, et non pas la manière dont l’être est en lui-même. On ne peut pas connaître Dieu Lui-même, on ne peut connaître que Son Nom. Cela signifie la manière dont Il se révèle. 

Si quelqu’un s’appelle Yitzhak, on a beau savoir qu’il se nomme Isaac on ne saura pas qui il est sans jamais l’avoir rencontrer. Toutes proportions gardées c’est à peu prés la même chose.

Ce que Dieu est en Lui-même nous ne pouvons pas le connaître mais nous pouvons connaître la manière dont il se révèle. Ce que la תּוֹרָה, l’hébreu de la Bible, appelle le Nom de Dieu.

 

זֵכֶר: 

Dans la derrière partie du verset 15 :

Tel est mon nom – שְׁמ - à jamais

Telle sera mon invocation - זֵכֶר - dans tous les âges 

זֵכֶרsignifie en français « souvenir » mais sa signification hébraïque c’est la manière dont on mentionne quelqu’un ou quelque chose. Le fait de mentionner quelque chose ou de faire allusion à...  לדַּבָר זֵכֶר.  Ceci fait penser à cela, ceci fait qu’on se souvient de cela… Ce n’est pas le nom lui-même mais c’est une allusion. Dans זֵכֶרil y a encore moins que dans שְׁמ. 

שְׁמ veut dire le nom  tel qu’on le reçoit de la révélation par Dieu Lui-même.

זֵכֶר c’est le mot par lequel on fait allusion au שְׁמ, c’est-à-dire au Nom.

Ceci renvoie à cela, ceci pour se souvenir de cela, ceci c’est la mention de cela... 

Le verset dit le nom que nous ne lisons par « Adonaï, Dieu de vos Pères, Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac et Dieu de Jacob » et le verset dit à la fois « tel est Mon Nom de façon permanente, tout le temps que dure le monde לְעֹלָם – à jamais – et tel est aussi la manière dont on y fait allusion en chaque génération.»  

 

Or, il est écrit dans la תּוֹרָה  « יְהוָה »  et on le lit ADONAÏ.

Et on met à ce nom-là les voyelles du nom ADONAÏ.

Donc, il est écrit comme cela יְהוָה  et on le lit ADONAÏ. 

Nous savons déjà pourquoi : ce nom qui représente la révélation de Dieu pour les mondes c’est le fait de se référer à l’être de Dieu. Mais on n’a pas le droit d’invoquer l’être de Dieu en dehors de ce que signifie le nom ADONAÏ – qui signifie Mon Souverain – Mon Seigneur – c’est-à-dire en dehors de la catégorie de la Souveraineté. Je n’ai pas le droit de faire allusion à Dieu sinon en disant qu’il est Mon Maitre, Mon Seigneur, Mon Dieu, Mon Souverain. Sinon il y aurait une contradiction dans l’évocation et l’invocation elle-même.

 

Reprenons notre verset tel qu’en parlait Rashi :

זֶה-שְּׁמִי לְעֹלָם: ceci est mon nom pour toujours (יְ/ה/וָ/ה)

וְזֶה זִכְרִי לְדֹר דֹּר: et ceci sera la manière dont on fait allusion à Moi à chaque génération (ADONAÎ) 

 

Il a divisé la difficulté en deux, en nous montrant que c’est bien ainsi que c’est réalisé du point de vue de la liturgie elle-même : pour parler de Celui qui est Dieu avec Son Nom, on en parle de la manière dont on l’invoque c’est-à-dire par Sa Souveraineté. 

Lorsque nous disons « Mon Dieu » en réalité nous voulons dire ADONAÏ – cela veut dire Mon Souverain – et nous disons très exactement « Celui que je reconnais comme Souverain », moi l’homme et Lui le Créateur... 

Mais parler de Lui de façon directe nous n’en avons le droit que en  tant que nous disons en même temps que nous le reconnaissons comme Souverain. Sinon il y a une contradiction dans les termes. Sinon, cela voudrait dire que je parle de Dieu sans que je le reconnaisse comme Dieu. Sinon, il y aurait une contradiction dans la définition même. Cela veut dire : je dirais Dieu sans le reconnaître comme Dieu. Pour dire Dieu en le reconnaissant comme Dieu, il faut dire ADONAÏ.

 

Rashi :

Rashi nous avait montré que dans le verset de la תּוֹרָה, le mot לְעֹלָם – à jamais – tout le temps que dure le monde - (non pas l’éternité qui est un autre concept) – ce mot est écrit sans Vav.

Nous savons aussi que le mot d’Adonaïest écrit sans Vav.

Rashi lit non pas « לְעֹלָם» mais « לְעָלֵם – pour le cacher ».

C’est à dire « Ceci est Mon Nom pour le cacher ».

 

Comment le cacher ? 

Rashi a dit : il est écrit d’une certaine manière mais nous le prononçons d’une autre manière. Et la manière dont nous le prononçons cache la manière dont il est écrit. Le cache à la manière dont le temps enveloppe la présence de Dieu.

C’est la règle suivante : On n’a pas le droit de faire allusion à Dieu sans le reconnaître comme son Souverain. (C’est de la logique élémentaire : Si je dis « Dieu » et que je ne dis pas « Mon Dieu » alors de qui je parle ?) 

שְּׁמ le nom est la manière dont Celui qui est Dieu se révèle à moi.

La force du commentaire de Rashi : la manière dont Il se révèle, il me le cache.

C’est pourquoi Rashi dit : Le nom n’est donné que pour être caché. C’est le nom qui cache celui qui se révèle par le nom qui le révèle. 

Nous avons appris jusqu’à présent que c’est le nom qui révèle l’être, mais nous savons déjà qu’il y a plus dans l’être que dans le nom. Monsieur Untel s’appelle Untel, nous connaissons son nom mais nous ne le connaissons pas lui-même. Nous savons par convention que lorsqu’on dira ce nom-là on fait allusion au personnage. Mais on ne connait que le nom et non pas le personnage.

 

Nous sommes jusqu’à présent dans la définition que le nom révèle l’identité de quelqu’un. Comme nous nous servons de langues conventionnelles on ne peut pas se rendre compte.

En principe chaque mot devrait révéler l’identité de la chose qu’il désigne. Mais en réalité c’est simplement conventionnellement qu’on emploie ces mots pour les désigner. En quoi le mot « table » qui désigne une table représente-t-il l’identité de l’objet table ? Il y a un décalage dans les langages conventionnels entre les mots et ce que le mot est censé révéler.

 

Mais dans la langue d’Adam - הַקֹדֶשׁ לָשׁוֹן - le mot révèle l’identité. Le nom des personnages de la Bible n’est pas du tout leur nom conventionnel d’état civil mais il désigne l’identité. Si je comprends ce que veut dire « Abraham », « Isaac » je sais qui est « Abraham », « Isaac »...etc. Et ceci dit, ce nom qui est censé révéler l’être qui se révèle à moi en réalité me le cache. C’est ce que dit Rashi. Il me révèle le nom pour le cacher. 

Imaginez que la parole révèle la pensée. Mais il y a plus dans la pensée que dans la parole, comme pour l’être et le nom. Ceci dit la parole qui révèle la pensée en réalité la cache. Vous ne saurez jamais ce que je pense, vous saurez à la rigueur ce que je dis... La parole qui me révèle en réalité me cache. 

Cela va très loin, au point qu’en hébreu on désigne le vêtement par le mot בֶּגֶד, dont la racine בָּגֵד signifie trahir. Cela veut dire que le vêtement ce n’est pas moi. Ce par quoi un être se révèle en réalité le cache. Je ne connais en réalité que la connaissance que j’ai de ce que je connais. Mais je ne connais pas ce que je connais.

 

***

 

Q : la nomination des animaux par l’homme démontre une connaissance de leur essence ?

R : Dieu a créé les animaux, je vous cite le verset (Gn. 2.19), il les a présenté à l’homme de telle sorte que tout ce que nommerait l’homme serait le nom de la chose en question. 

L’objectif de la science quel qu’elle soit est de trouver le nom de l’objet de science. La formule d’un corps pour la biologie ou la chimie. Effectivement, la science tend à donner le vrai nom des choses. Si je connais le vrai nom d’une chose, j’en connais toute la connaissance. C’est exactement ce problème. 

 

Un Midrash dit que lorsque Dieu a voulu créé l’homme, les anges n’étaient pas d’accord car ils en contestent sa valeur. Dieu répond aux anges : vous vous ne savez pas nommer les autres, lui le saura. A propos de ce verset. Finalement Dieu demande à l’homme comment Dieu lui-même s’appelle ? L’homme répond « Adonaï » ce que les anges ne savaient pas. Il y a beaucoup de mystères dans ce Midrash, mais effectivement cela va dans ce sens. C’est ce que nous appelons en hébreu le הַקֹדֶשׁ לָשׁוֹן.

 

L’objectif de la science moderne, qui commence à Descartes, c’est de pouvoir nommer les corps, de nommer les phénomènes, de telle sorte d’en avoir la connaissance. 

Effectivement, lorsqu’on connait la véritable définition d’un corps on le possède. On en possède la connaissance. Mais la science est incapable de nommer les phénomènes humains, la personne humaine. C’est l’objectif duהַקֹדֶשׁ לָשׁוֹן. 

Par postulat, nous allons admettre que l’hébreu de la bible est une langue absolue de cet ordre. Chaque mot de l’hébreu biblique désigne une connaissance absolue de ce dont il parle.   

C’est la raison pour laquelle nous avons un texte dans la גְּמָרָא qui dit que la תּוֹרָה tout entière c’est le Nom de Dieu. 

Le nom global, total, est יְהוָה  , construit sur la racine de l’être.

Les Midrashim – pas le Pshat - expliquent qu’on pourrait le lire : « Il est- Il a été- Il sera »

 

Dans cette image,  Dieu – le monde – la relation globale de Dieu avec le monde, c’est Celui qui fait être le monde. Par conséquent, Son Nom global c’est l’être.

Mai ceci dit, Il a par ailleurs une relation partielle pour chaque objet dans le monde       

Et pour chacune de ces relations partielles il y a un mot de l’hébreuהַקֹדֶשׁ לָשׁוֹן.  

Cela veut dire que tous les mots de la bible sont à des degrés divers comme ce mot là YHWH, mais il y a des degrés de généralisation.

 

Maintenant, le mot de « être » c’est le mot le plus total : Dieu s’appelle l’être par excellence parce que c’est le monde qui est et Dieu Celui qui le fait être, mais tous les autres mots de la Bible même שׁוּלחָן c’est un des noms que Dieu a par rapport à l’objet en question. Alors si on comprend le nom de שׁוּלחָן on comprend ce qu’est une table... etc.    

J’ajoute une indication à ce sujet : Dans les sociétés primitives on ne donnait jamais son nom à quelqu’un. A moins qu’on soit assuré qu’il s’agit d’un ami.

 

3 choses que le primitif ne dit jamais :

  • un nom,
  • une mélodie qui lui appartient, sa manière de chanter,
  • et sa manière de siffler. 

Dans les phénomènes purement sociologique, les jeunes gens savent cela que : on a un nom secret, un chant secret, et une manière de siffler secrète. Même dans les mouvements de jeunesse c’est comme cela. 

Au niveau des sociétés primitives, on ne dit pas quel est son nom, à moins d’être assuré qu’il s’agit d’un ami. Sinon on donne un pseudonyme, un pseudo-nom. 

L’explication est la suivante:

Si vraiment le nom désigne vraiment l’identité de la personne, celui qui connait le nom possède l’identité en question. Si vraiment je sais comment s’appelle quelqu’un, je sais qui il est et je peux faire de lui ce que je veux. Il suffit de tirer sur les ficelles qu’il faut ! C’est pourquoi c’est dangereux. Surtout quand on s’appelle Israël !

 

***

Q : ……

R : Dans la descendance de Noah la lignée de Shem a cette science du Shem.

 

Q : Yafet, la sciences et la beauté des formes et l’esthétisme, la définition des choses, et Shem la connaissance humaine, la définition des êtres ?

R : Grosso modo oui c’est comme cela. Tant dans Shem que Yafet que dans ‘Ham, il y a un risque de réussite et un risque d’échec. On peut être Shem צַדִּיק ou Shem רָשָע, Yafet et ‘Ham צַדִּיק ou רָשָע. Ce qui est arrivé pour ‘Ham devenu רָשָע, Yafet devenu בֶּנונִי et Shem devenu צַדִּיק.

Chacun d’entre eux peut réussir dans sa vocation ou échouer. Dans la prophétie de Noah à ses enfants on voit effectivement que Yafet a aidé Shem, et Yafet participera au salut de Shem alors que ’Ham a été disqualifié... Ceci dit nous connaissons les procédures par lesquelles on peut sauver même ‘Ham même Yafet.

L’échec de Yafet : ramener la connaissance par l’esthétique exclusivement : transformer en chose morte formelle...

L’échec de Shem : ce qu’on appelle en logique le nominalisme : c’est-à-dire prendre les mots pour les choses. Ou si vous voulez cette exagération de l’esprit juif qu’on appelle le פִּלפּוּל, alors qu’on a la science du langage, il y a le langage qui s’enferme sur lui-même et on commence à raisonner sur les mots sans se rendre compte que cela renvoie à des réalités.

 

 

 

Donnez votre avis ou posez vos questions aux intervenants et nous vous y repondrons

Merci de copier les lettres affichées*