L’OEUVRE DE LA CRÉATION
LES ENGENDREMENTS
JUIFS OU HÉBREUX
ISRAËL ET LES NATIONS
MESSIANISME
THÈMES FONDAMENTAUX

BAMIDBAR - SÉRIE 1995

Le cours

 

(1995) בְּמִדְבַּר

 

 

On dit בְּמִדְבַּר (tout seul) ou בְּמִדְבַּר סִינַי qui est à l’état construit.

 

J’aurais l’occasion de revenir dans la Parashah de בְּהַעֲלֹתְךָ sur la manière dont la תּוֹרָה elle-même définit la spécificité de chacun de ces חוּמַשִׁים.

Un חוּמַש signifie les 5/5ème de la תּוֹרָה : תּוֹרָה חוּמְשֵי חַמִשַׁה. Le חוּמַשׁ n’est pas l’ensemble des 5 livres,  1/5ème  partie des חוּמַשִׁים, les 5 חוּמַשִׁים sont la תּוֹרָה. 

Importance de ce sujet, de savoir ce que la תּוֹרָה dit elle-même, la définition du sujet de chacun des livres. C’est à propos d’un verset que Rashi commente dans בְּהַעֲלֹתְךָ.  

Exemple :

En français pour traduire שְׁמוֹת on dit l’Exode. Parce que dans le livre où se révèle les noms d’Israël et les noms de Dieu (c’est la révélation des noms dans ce livre), et bien il y a les récits de la sortie d’Egypte. Et pour les traducteurs, la sortie d’Egypte, c’est « l’Exode », alors que c’est tout le contraire : l’exode c’est quand on va en exil. Inversion de concepts qu’il y a chez les Juifs de diaspora.   

Un exemple de l’importance de cette étude de בְּהַעֲלֹתְךָ => Livre de שְׁמוֹת se divise en 2ème partie.

Dans la 1ère partie il y a le récit de tous les événements qui ont mené à la sortie d’Egypte. Il y a là שְׁמוֹת, וַיֵּרָא, בֹּא, בְּשַׁלַּח, יִתְרוֹ, מִּשְׁפָּטִים. C’est divisé en 3 couples de Parashiot : il y a le récit des plaies, les récits de la sortie et du passage de la mer rouge, la révélation de la Tora au Sinaï et les 1ères lois données dans Parashah מִּשְׁפָּטִים. Et juste après, tout une série de Parashiot prescrivant la construction du tabernacle.  

La question de  quel est l’objet du livre de שְׁמוֹת est en fait quel a été l’objet de la sortie d’Egypte ?  

Il y a dans le judaïsme contemporain 2 attitudes à propos de la même תּוֹרָה et du même texte.  

Je vous l’explique parce que c’est important de comprendre qu’on s’est déshabitué à lire la תּוֹרָה telle qu’elle est écrite. Il y a une idéologie religieuse qui s’est plaquée sur le texte de la תּוֹרָה et qui nous empêche de la lire comme elle est écrite. 

C’est très grave car l’idéologie se substitue à la connaissance et on ne peut même plus parler ensemble. L’idéologie rend le dialogue impossible, et rend l’étude en commun utopique.  Il faut se méfier de l’idéologie.  

Le professeur Eliane Amado Valesi a consacré une de ses étude aux dangers de l’idéologie qui se fait prendre pour la connaissance. 

Vous verrez à quel point l’idéologie religieuse arrive à masquer par des fantasmes les consignes réelles de la תּוֹרָה. 

Il y a 2 attitudes concernant la question posée: quel a été l’objectif de la sortie d’Egypte, pourquoi Dieu a-t’il décidé d’intervenir en suscitant Moïse, Aaron, Myriam qui ont pris la tête du mouvement de révolte dans la diaspora des hébreux en Egypte ? (Egypte qui est la grande civilisation de l’époque, l’annexe de la civilisation babylonienne un peu comme l’Amérique est l’annexe de la civilisation européenne et le cycle de la civilisation de Babel s’achève à la sortie d’Egypte)

 

En vue de quoi ?  

 

  • Une thèse, la plus répandue chez les Harédim et ceux qui se rattachent à ce courant, consiste à dire qu’il fallait sortir d’Egypte pour aller au Sinaï recevoir la תּוֹרָה. Une fois la תּוֹרָה reçue on peut aller dans le vaste monde, partout ailleurs, pour faire des communautés, en attendant le Messie de la fin des temps. Cette idéologie religieuse est tellement ancrée que l’on est sûr que c’est ce que la תּוֹרָה Si vous demandez où c’est écrit, ils sont incapables de répondre et on s’aperçoit que ce qui est écrit c’est tout à fait autre chose. 

 

  • La 2ème thèse, qui est celle du récit du livre de שְׁמוֹת, c’est qu’il fallait sortir d’Egypte pour accomplir les promesses de fin d’exil données aux Patriarches et d’aller à Jérusalem construire le בֵּית הַמִּקְדָּשׁ dont le tabernacle était le modèle. C’est pourquoi dans le livre de שְׁמוֹת il y a deux parties : le récit de la sortie d’Egypte, et Dieu sait si ce fût difficile, parce qu’il y a avait déjà des Harédim en ce temps-là. Les Harédim sont ceux qui ont la terreur de la parole de Dieu et dans le sens positif ce sont ceux qui respectent avec terreur la parole de Dieu. On les appelle « les terrifiés », à la longue ils sont devenus « les terrifiants » ! En réalité ils ont peur de la parole de Dieu : ils sont « ‘Harédim mi divrei Háshem» et non pas « ‘Harédim et divrei Hashem ». Ils ont peur de voir la Parole de Dieu s’accomplir avec la réalisation des promesses. C’est trop difficile pour eux. Et le don de la תּוֹרָה ...

 

Je vous montrerai dans le livre de l’Exode que le passage au Sinaï a été décidé à postériori et ne faisait pas partie du plan primordial de la sortie d’Egypte. 

C’est parce que Dieu a diagnostiqué que les hébreux de ce temps-là n’étaient pas capable d’aller directement de l’Egypte en Israël qu’il les a fait contourner par le désert pendant 40 ans et entre-temps leur révéla la תּוֹרָה au désert. C’est à cause de causes secondes qui ont jouées à postériori que l’on est passé par le Sinaï.  

Normalement, le programme de la prophétie hébraïque c’est כִּי מִצִּיּוֹן תֵּצֵא תּוֹרָה - La תּוֹרָה doit sortir de צִּיּוֹן. Entre temps on a eu un ersatz de תּוֹרָה qui est מִסִּינַי תּוֹרָה. Il faut passer par מִסִּינַי תּוֹרָה (הָנִגְלֶה תוֹרָת) pour arriver à מִצִּיּוֹן תּוֹרָה (הָנִסְתָּר תוֹרָת). (Gaon de Vilna)

 

[Les Kabbalistes interdisent de faire la prière avec כַּוַנַוֹת (les intentions de ferveurs de la Kabbale) en dehors d’Israël. C’est tout juste si ce n’est pas interdit d’étudier la Kabbale en dehors d’Israël. Les Kabbalistes contemporains interdisent de faire la prière avec כַּוַנַוֹת en dehors de Jérusalem.

Je me souviens enfant en Algérie d’un vieux rabbin kabbaliste : la prière avec כַּוַנַוֹת: Le matin de שַחֲרִת on commence la prière à 6 heures du matin : pendant ¼ d’heure il faisait toutes les prières jusqu’à la עמידה de שַחֲרִת ensuite pour faire la עמידה de מִנְחָה il mettait toute la journée et en ¼ heure il faisait tout le reste pour nous rejoindre à la נְעִילָה.]

 

Le plan de la תּוֹרָה était de quitter l’Egypte et en 11 jours de marche par le chemin de la côte et arriver à Jérusalem pour construire le בֵּית הַמִּקְדָּשׁ pour donner un sens à l’histoire du monde.  

Mais on n’a pas été capable, alors à postériori la תּוֹרָה nous raconte le passage au Sinaï et les 40 ans et un peu d’étude au pied de la montagne avec Moshe Rabenou comme Madrekh  mais c’est a posteriori.  

 

On a deux séries de Midrashim sur le thème du Sinaï qui accompagnent tous les évènements de cette génération :

 

  • une série de Midrashim qui félicite Israël d’être capable de recevoir la תּוֹרָה

 

  • une série qui blâme Israël d’avoir été obligé à recevoir la תּוֹרָה au Sinaï  

 

L’une à postériori et l’autre à priori.

 

A priori ils sont blâmés d’être à ce niveau où ils ont besoin qu’on leur explique comment être hébreux. Au Sinaï, ils se sont préparés pendant 40 ans pour savoir comment fonctionnent les juifs.

 

Mais à postériori, vu l’état dans lequel ils étaient à la sortie d’Egypte, on les félicite d’être à ce niveau-là et d’être arrivé au Sinaï. Imaginez un peuple d’esclaves complètement dénaturés par l’exil d’Egypte et qui a quand même réussi à arriver au Sinaï !  

A priori il n’y a aucune allusion au Sinaï dans le plan de la sortie d’Egypte. A postériori puisque c’est nécessaire alors il faut le faire et on l’a fait.  

En tout cas, il faut de nouveau lire le texte comme il se donne. Il faut lire le texte comme il est écrit, On lit le texte dans l’ordre, on ne sait pas ce qui va se passer après, même et surtout si on le sait.

 

בְּמִדְבַּר:

Un des sujets essentiel, c’est la séparation entre la tribu de Lévi et les autres tribus, du point de vue non seulement du dénombrement mais également du point de vue des fonctions de chaque tribu dans l’organisation d’Israël. C’est un sujet très difficile. Parce qu’avec le temps, les Juifs dans l’exil qui a suivi la destruction de la société d’Israël biblique ont complètement oublié en quoi la תּוֹרָה concerne les différentes tribus, sauf la tribu de Lévi.  

 

Exemple :

Le Talmud institue en détail une des dispositions que la תּוֹרָה nous donne que chaque chef de tribu devait écrire son תּוֹרָה סֵּפֶר. C’est le même texte pour tous mais la lecture de ce texte dépend du lecteur, il peut être lu de différentes manières. En hébreu on ne dit pas l’écriture comme en français  mais « מִקְרָא » : la lecture. Car ce livre ne dit que ce que le lecteur en lit. Si le lecteur lit en hébreu des prophètes hébreux, c’est la תּוֹרָה qu’il lit, sinon il en sort n’importe quoi. Si c’est un slave ou un grec il en sort la religion orthodoxe, si c’est un anglo-saxon, il en sort le protestantisme, si c’est un latin, il en sort le catholicisme, si c’est un arabe il en sort le Coran, etc... Cela dépend du lecteur.

Dans toutes les langues juives « étudier » se dit « lire ». C’est vrai en espagnol aussi.  

Il y a une dimension de sens de la תּוֹרָה propre à chaque tribu et on a oublié et on a gardé uniquement la signification de la תּוֹרָה issue de la sensibilité propre à la tribu de Lévi, c’est-à-dire à ceux qui ont vocation sacerdotale – les Lévites. 

On étudiera à travers les différents textes cette identité des Lévites. C’est mutatis mutandis la classe libérale mais essentiellement les rabbins, les gens pieux, la vocation sacerdotale, la vocation de piété, de sainteté... C’est ce qui est censé représenter de notre temps la tribu de Lévi.

 

Or, la tribu de Lévi avait pour vocation de faire l’unité des tribus d’Israël.

Le drame aujourd’hui c’est que ceux qui tiennent le rôle de la tribu de Lévi s’instaurent comme une autre tribu d’Israël, à part des tribus d’Israël. C’est grave. C’est en Allemagne que cela est apparu : « la communauté séparée ».  

Quand les orthodoxes allemands ont fondé les communautés séparés, les הַדּוֹר גְּדֹלִים, les גְּדֹלִים d’Israël les ont excommuniés. Ils les ont mis en «חֵרֶם   ». On ne se sépare pas de la communauté ! La communauté c’est le peuple ! Il y a des excuses : en réaction à la réforme...etc.  Mais c’est Dieu qui est la Providence du monde et le Créateur du monde n’est pas un créateur de sectes.  

Il faut s’habituer à se dégager de l’idéologie religieuse. A la suite d’une imprégnation des mentalités après un long voyage dans laגָלוּת , on a adopté des comportements intellectuels des païens. Les גּוֹיִם et leurs religions sont d’origine païenne. On est intoxiqué et encombré de faux sens. Il y a une bonne foi fondamentale qui fait qu’un juif reste un juif, même intoxiqué. Et il peut être désintoxiqué.  

Il faut lire la bible telle qu’elle est écrite et ne pas projeter dessus des idéologies, fussent-ce t’elles religieuses car encore plus dangereuses.

 

***

 

1er Rashi sur le 1er verset

וַיְדַבֵּר יְהוָה אֶל-מֹשֶׁה בְּמִדְבַּר סִינַי, בְּאֹהֶל מוֹעֵד:  בְּאֶחָד לַחֹדֶשׁ הַשֵּׁנִי בַּשָּׁנָה הַשֵּׁנִית, לְצֵאתָם מֵאֶרֶץ מִצְרַיִם--לֵאמֹר

Le 1er jour du 2ème mois de la 2éme année de leur sortie du pays d’Egypte en disant

 

שְׂאוּ, אֶת-רֹאשׁ כָּל-עֲדַת בְּנֵי-יִשְׂרָאֵל, לְמִשְׁפְּחֹתָם, לְבֵית אֲבֹתָם--בְּמִסְפַּר שֵׁמוֹת, כָּל-זָכָר לְגֻלְגְּלֹתָם

 « Dénombrez toute l’assemblée des enfants d’Israël » « Selon leur famille, selon leur maison paternelle »  

 

 בְּמִסְפַּר שֵׁמוֹת   Par le nombre des noms 

 שְׂאוּ, אֶת-רֹאשׁ élever-enlever la tête-dénombrez

 C’est là que réside paradoxe du dénombrement qui peut être bénéfique ou maléfique.

 

כָּל-עֲדַת בְּנֵי-יִשְׂרָאֵל Toute l’assemblée des enfants d’Israël

 

עֲדַה assemblée. C’est la racine ע-ד-ו - leitvaed s’assembler  

Le vocabulaire de la sociologie française explique bien ce problème

Le rassemblement d’hommes est soit en société soit en communauté. 

Une société est un rassemblement d’hommes autour d’intérêts. Une communauté est un rassemblement d’hommes autour d’idéaux.  

L’idéal est lorsque la société et la communauté coïncident. Le cas particulier d’Israël est d’être une société qui est une communauté et c’est une communauté qui est une société. Lorsque la société ne fait pas communauté elle disparait (en Israël). Lorsque la communauté ne fait pas société, elle disparait.  

J’ai connu à l’époque à Paris une seule communauté qui était vraiment une communauté parce qu’elle était aussi une société, c’est celle de la rue Cadet dirigée par le rabbin Munk. Ils vivaient leur judaïsme ensemble.  

 

Beaucoup de communautés ressemblent en fait à des paroisses où l’on vient prendre des prestations de services religieux. Cela n’a rien à voir avec une véritable communauté qui doit être d’autre part une véritable société.  

L’assimilation a mené le fait que les communautés ne sont plus des sociétés. Il y a des sociétés juives mais elles ne sont plus des communautés ; elles se rassemblent autour d’un intérêt une fois par an... Certains pour la Toussaint...  

Le cas particulier d’Israël c’est que c’est un ensemble d’hommes d’une famille humaine qui a intérêt à suivre un idéal.  

 

Chez tous les hommes il y a un idéal et il y a un intérêt. Mais pour Israël cela coïncide. Israël a intérêt à être vertueux. Il y a ce cas particulier où l’intérêt et la vertu doivent coïncider. Sinon Israël disparait ou plutôt rentre dans la clandestinité de l’exil en attendant des temps meilleurs. Sociétés et communautés disparaissent toutes deux sans cette coïncidence.

 

שְׂאוּ אֶת-רֹאשׁ כָּל-עֲדַת בְּנֵי-יִשְׂרָאֵל  

Dans le sens de dénombrer chaque « un » - par tête – c’est vraiment chaque personne.

Contradiction apparente, paradoxe => la personne est de l’ordre de la qualité alors que ce sont des individus que l’on compte. On se trouve devant le paradoxe du dénombrement. 

 

On est arrêté de suite par le texte :

לְמִשְׁפְּחֹתָם   « selon leur famille »  

מִשְׁפְּחֹתָם ici dépasse le cadre familiale et est équivalent à Shevet-tribu.

Car à l’origine une tribu c’était un membre de la famille de Jacob, qui a fait souche familiale et la famille du chef du fondateur de la tribu est devenue une tribu mais à l’origine c’est une famille.  

La tribu d’Israël n’existe pas par adjonction d’individus ensemble, mais par filiation familiale. 

Il y a une identité qui vient du fondateur de la famille. Cela n’a rien à voir avec les rassemblements démographiques des sociétés modernes où l’on fait partie d’un ensemble par adjonction géographique de personnes aux origines différentes qui n’ont rien à voir.

Dans les quartiers des villes modernes, c’est un conglomérat de personnes sans liens familiaux. Il en résulte un melting pot identitaire qui ne correspond à rien au plan du Créateur des lignées humaines. Ce sont des mélanges.  

Une phrase dans Parashah בְּמִדְבַּר du Rav Toledano : « on ne quitte pas sa famille ».

Si on est rassemblé sur des principes d’idéologies par exemple, si l’idéologie échoue on la quitte mais sa famille on ne la quitte pas. Il a donné l’exemple du communisme. Lorsqu’il échoue les anciens communistes ont abandonné allégrement le parti communiste. Mais sa famille on ne la quitte pas.  

Le recensement ce n’est pas pour avoir un nombre brut, une addition du total des individus. Il s’agit de dénombrer avec l’identification particulière de chaque personne dans son affiliation et sa filiation. Nous sommes une génération privilégiée où les familles juives dispersées dans le monde entier pendant 2000 ans se sont retrouvées. 

J’ai vécu la rencontre étonnante des Sefardim avec les Ashkénazim les considérant comme des גּוֹיִם européens, et réciproquement comme des גּוֹיִם arabes. Une séparation depuis 2000 ans mais c’est la même identité, la même famille).  

 

בְּמִסְפַּר שֵׁמוֹת  Le nombre des noms

כָּל-זָכָר לְגֻלְגְּלֹתָם  De tous mâles fondateurs chef de famille par crâne  

On ne comptait pas les personnes mais on comptait le demi- shekel. Chacun donnait un demi-shekel en rachat de sa personne, c’est ce qu’on appelle le גֻלְגּוֹלֶת.  

 

L’expression que je voudrais approfondir c’est בְּמִסְפַּר שֵׁמוֹת Le nombre des noms  

 

Rashi:  « Par le fait du prix qu’ils ont à Ses yeux, Il les compte à tout moment »  

Il y a une identité humaine particulière qui est précieuse aux yeux de Dieu. Il faut relire le texte depuis l’histoire du 1er homme jusqu’à l’histoire des Patriarches pour arriver à la nation d’Israël sortie d’Egypte. Ce ne sont pas n’importe quel type d’homme.

André Chouraqui disait à propos de l’expression de peuple élu « le pauvre peuple élu est souvent en ballotage » balloté par les événements...

 

L’expression « peuple élu » est difficile. En hébreu « Asher ba’har banou mi kol haamim » « qui nous a choisi de tous les peuples ». On traduit dans tous les peuples. Nous avons une Guemara dans ‘Haguigah page 3 : « Asher ba’har banou mi kol haamim Il nous a pris de tous les peuples pour faire le peuple d’Israël » Cela a été enseigné a propos d’Abraham.  

L’illustration de cela, c’est le rassemblement des exilés : Il nous a pris de tous les peuples et nous emmenons avec nous le גוֹי du coin. C’est pour cela que les Juifs français doivent sauver la France du salut d’Israël. Ils aiment la France plus qu’Israël et les גּוֹיִם du coin les détestent, car ils s’aperçoivent qu’il n’y a pas plus anti-français qu’un juif-français. 

Asher barar banou mi kol haamim

L’illustration de cela est le rassemblement des exilés et cela n’existe nulle part ailleurs. Prenons le melting-pot américain, c’est quelque chose qui y ressemble. Les américains sont de toutes les origines mais chacun garde son origine distincte dans l’identité américaine tandis que chez les Juifs, c’est l’inverse qui s’est produit : on ramène avec soi l’identité des גּוֹיִם dans l’identité juive. C’est très différent.  

 

Jacob Gordin zal => « Être élu c’est être universel », c’est tout le contraire de ce qu’on peut croire qu’un parmi les peuples a été élu arbitrairement. L’élection d’Israël est l’élection de l’universel humain dans une société qui se constitue depuis le 1er homme jusqu’au temps de la sortie d’Egypte. Et la תּוֹרָה nous a raconté cette histoire. Comment l’humanité a distillé Israël tout en étant marâtre de l’enfant qu’elle a enfanté.  

Israël sort de l’humanité comme un l’enfant qui sort d’une mère indigne qui devient marâtre et qui veut empêcher cet enfant d’exister. Il n’y a qu’à lire tout ce qui se passe autour de Jérusalem. 

Effectivement, l’histoire montre que cette haine des גּוֹיִם envers Israël accompagne la fin de chaque sortie d’exil. Au niveau individuel, il y a quantité d’amis d’Israël : c’est peut-être le petit peuple au monde qui a le plus d’amis à l’échelle individuel. Mais ils sont impuissants. La puissance appartient aux Etats et aux hiérarchies politico-religieuses. Elle n’appartient pas aux amis d’Israël. 

 

Jacob Gordin : « Etre élu, c’est être universel, et cela coûte cher ».

Très paradoxalement, c’est l’exil qui prouve qu’Israël est universel. Un juif est d’origine hébraïque et c’est parce qu’il est d’origine hébraïque qu’il peut être n’importe quel גוֹי . Il peut être français, il peut être allemand.   

Il a ce paradoxe de l’exil qui fait qu’il y a une dimension de l’universel chez les Juifs qui leur vient de l’hérédité hébraïque. Et quand les juifs se rassemblent et redeviennent des Hébreux c’est l’universel qui se rassemble...

Vous voyez la dimension de définition que Rashi va mettre en évidence : Pourquoi Dieu compte-t-il les Hébreux ? Un peu comme des pierres précieuses.  Il les a cherché dans le sable du monde depuis des siècles et alors Il les a rassemblé, alors Il les compte...  

Il y a une qualité de l’universel humain qui est représenté dans l’identification familiale de chaque membre d’Israël, alors qu’autour il y a perte complète de l’identification originelle des familles humaines. Sauf pour deux exemples que donne la Guemara : les Perses et les Romains.  

Les Perses ont hérité de la filiation par Ismaël. Et c’est de notre temps que l’on voit que les Perses qui s’appellent Iraniens, c’est Ismaël. Il n’y a que de notre temps que cela se dévoile. L’Islam anti-israélien c’est d’abord l’Iran beaucoup plus que l’Arabie-Saoudite. Les grands d’Israël savaient que la Perse réalise l’identité d’Ismaël et que Rome réalise l’identité d’Ésaü.  

Il n’y a que 3 lignées de la famille d’Abraham qui s’identifient typologiquement à l’échelle de l’antropos originel, c’est Israël et puis l’Islam par la Perse et la Chrétienté par Rome.

 

Suite du Rashi :

« Pourquoi Dieu se préoccupe de savoir combien sont-ils ? »  

Y a-t-il un nombre suffisant ? Est-ce qu’ils sont capables faire coïncider société et communauté ?

Pourquoi Dieu se préoccupe de ces gens-là ?  

Parce qu’il s’agit de l’élection à l’échelle universelle.  C’est à ce peuple que Dieu s’est adressé en direct. Il s’est adressé à l’humanité à travers ce peuple en différé, mais Il s’est adressé en direct à ce peuple. Même si les Juifs ne veulent pas le savoir, tous les hommes le savent grâce aux chrétiens et musulmans, que c’est aux prophètes hébreux que le Dieu unique et le Dieu un s’est adressé. Il y a un consensus universel qui d’ailleurs irrite les Juifs car il les oblige à se regarder en face dans la glace. La réaction des Juifs déjudaïsés est de vouloir être comme les autres mais ils savent bien que c’est impossible. C’est pour cela qu’ils le réclament avec grossièreté. Ils lisent quelque chose qu’il y a dans le Talmud mais ils le lisent mal :

«הַגּוֹיִם כְּכָּל » « comme toutes les nations ensemble ».

Mais הַגּוֹיִם כְּכָּל comme une parmi les nations ...  

Il y a une chose qu’Israël peut enseigner aux Juifs : c’est que les Juifs croient qu’ils sont Juifs parce qu’ils le veulent bien. C‘est faux. C’est une erreur de croire que être juif se choisit. On ne peut échapper à cette identité. Les israéliens l’ont compris. Un politicien : « La guerre des 6 jours a dévoilé qu’Israël en tant qu’Etat, était le Juif des Nations ». C’est difficile à avaler !  

Ce n’est que depuis l’émancipation que les Juifs se sont inventés ce fantasme qu’ils sont Juifs parce qu’ils le veulent bien. On étudiera cela à Shavouot : quand Dieu a renversé le Har Sinaï sur Israël et le Maharal explique : ne croyez pas que vous avez accepté car vous l’avez décidé...

 

Suite de Rashi :

« Quand ils sont sortis d’Egypte, Il les a compté, après la catastrophe du veau d’or, Il les a compté pour savoir combien il en restait (et si cela pouvait faire un Israël cohérent). Et lorsqu’Il a décidé de faire résider sa Présence dans le Tabernacle, Il les a compté (pour savoir si la société-communauté d’Israël est suffisamment présente pour que la Présence de Dieu réside parmi eux) le 1er de Nissan, le Tabernacle a été dressé, et le 1er Iyaar Il les a compté. » 

Je voudrais introduire la lecture de la Guemara sur cette question-là :

Je reprends l’expression de מִסְפַּר שֵׁמוֹת le nombre des noms :

il y a contradiction apparente, on entend la collision des catégories. 

En effectuant la synthèse des sciences cela commence par les sciences de la quantité. La science la plus rigoureuse c’est les mathématiques. Ensuite, vient l’astronomie et ensuite la physique... Et on passe au niveau des sciences de la qualité. Les sciences de la liberté et de l’emploi de la liberté...  

Le nombre c’est la quantité et le nom désigne la qualité.

Le nombre des noms c’est caractéristique de ce dénombrement pour Israël.  

Nous naissons à l’indice numérique de l’individu. Et puis il faut acquérir le nom de cet individu. 

Un verset lu dans les prières qui accompagnent le mort :

« Il vaut mieux un nom qu’une bonne huile et le jour de la mort que le jour de la naissance ».

 

C’est tiré des Proverbes de Salomon, c’est très paradoxal.

« שֶׁמֶן טוֹב» c’est l’huile de l’onction, c’est la bonne renommée.  

En français, on dit de quelqu’un d’important qu’il est « une huile ».

Il vaut mieux un nom qu’un titre. Et c’est au jour de la mort que l’on sait si le nom a été confirmé.  Au jour de la naissance on a devant soi un programme : tu seras untel... mais il n’y a qu’au jour de la mort que l’on sait si on l’a été ou pas. Il faut acquérir le nom à partir de la formule numérique (tel numéro de carte d’identité : cela c’est le nombre. Quand on nomme quelqu’un, on le destine à être. Le père prophétise sans le savoir en nommant son fils : « tu seras untel » !

Cela implique une prudence dans le choix des noms. Il y a des noms difficiles à porter. 

Le péril du dénombrement c’est précisément de provoquer le jugement : on se compte. C’est interpeller les individus en leur demandant s’ils font réellement partie de l’identité collective d’Israël. On est jugé au niveau Israël et si on n’y est pas encore c’est dangereux.  

C’est pour éviter ce risque de jugement anticipé que l’on procède au rachat-expiation de sa personne. Car tant qu’on n’a pas fini sa vie on n’est pas encore vraiment et on ne le sait pas encore. Il faut un jugement pour le savoir, et c’est dangereux. Alors on dénombre les שְׁקָלִים qui représentent l’offrande d’expiation du fait du dénombrement.  

 

Commentaire du Guelilé Zahav :  

[Le dernier verset de Parashah בְּחֻקֹּתַי a pour derniers mots בְּהַר סִינָי]  

« Il y a un Midrash qui dit ceci : « voici les commandements qui nous ont été révélés בְּהַר סִינָי, et ce qui suit c’est le dénombrement dans le désert du Sinaï». Le Midrash Yalkout enseigne : au moment où Israël a reçu la תּוֹרָה les Nations du monde ont jalousé Israël et ont dit : qu’ont-ils ceux-là à s’approcher de Dieu plus que les autres ? Dieu a répondu : amenez vos livres de généalogies de même que Mes enfant amènent les leurs. »  

[Ils connaissent leurs filiations et affiliations (c’est le contenu de la 1ère Parashah de notre Sidra) jusqu’aux ancêtres hébreux, lesquels ont gardé la filiation au 1er homme. Il y a là une identification humaine et familiale qui est le cas particulier d’Israël. ]  

« Ils se sont affiliés par leur famille, ils n’ont mérité de recevoir la תּוֹרָה que par le mérite de leur fidélité d’identité familiale. »  

Ce sont les hébreux restés hébreux que l’on retrouve au Sinaï. S’en suit tout un développement. On verra comment la Guemara intervient :

 

Guemara :

« Rabi ‘Hanina bar Papa ... à l’avenir הוּא בָּרוּךְ הָקָדוֹשׁ prendra un תּוֹרָה סֵּפֶר et le prendra dans son sein et Il dira : « que celui qui s’est occupé de cette תּוֹרָה vienne et qu’il reçoive son salaire ».

Panique chez les גּוֹיִם, viennent les idolâtres en mélange.

 Alors Dieu leur dit : ne vous rassemblez pas devant Moi en pagaille mais que chaque nation et ses scribes (de l’état civil) se présentent. Et tous les peuples se sont rassemblés (לְעַם c’est le peuple par filiation familial. Mot proche ‘אוּמָה’ = descendants de la même אֵם mère -  עַם = gens qui sont ensembles)

Chaque fois qu’intervient le nom לְעַם peuple dans le sens de filiation familial, c’est le royaume.  

Y aurait-il mélange devant Dieu qui a créé les lignées humaines ?

Lorsque les peuples se sont rendu compte que seul une Nation qui peut se définir comme nation dans les filiations des 70 familles de qui se sont perdus dans le grand mélange de la diaspora humaine, alors apparait d’abord la nation de Rome d’abord.  

Pour quelle raison ?

Parce qu’elle est la plus importante. Et d’où le savons nous qu’elle est importante ? On se réfère à la vision de Daniel où les 4 bêtes représentent les grandes civilisations, la dernière étant Rome. Et à ce propos la bête qui représente Rome nous dit le verset « elle a dévoré toute la terre».  Cette 4ème bête du rêve de Daniel c’est Rome. « Elle a obligé que sa nature s’impose à tout le monde. »  

 

L’impérialisme romain => Toutes les nations modernes se rattachent au droit romain. Les parlements de tous les pays africains ou asiatiques singent le sénat romain. C’est lui qui a dévoré toutes les terres à travers le colonialisme. 

« Alors Dieu a dit aux Romains (ils sont convoqués car ils ont gardés leur filiation de מָלכוּת qui se rattache à Esaü) : de quoi vous êtes vous occupés ? Nous avons fait de grands marchés, de grands bains, nous avons rassemblé beaucoup d’argent et d’or, et tout cela pour Israël afin qu’Israël apprennent à faire des marchés et des banques.... »  

Il n’y a pas d’art juif. Il y a un art judéo-quelque chose....  

C’est l’interpellation au jugement dernier, Dieu va demander aux Nations ce qu’elles ont fait. Elles argumentent leurs prouesses de civilisation. On a servi la תּוֹרָה puisque les Juifs ont besoin de marchés, de bains, de banques...

Dieu leur répond : c’est pour vous que vous les avez faits.

 

Ensuite viennent les Perses qui racontent des choses effectuées...

Même réponse divine. Alors les גּוֹיִם sont coincés, et disent : « on savait pas ».

« Alors on efface tout et on recommence ? »  

Non, la תּוֹרָה c’est sérieux on n’efface pas mais je vais vous donner une מִצְוָה.

Et Dieu leur donne la מִצְוָה de la סֻּכָּה. Si vous la faite cela équivaut à toute la תּוֹרָה.

Dieu provoque la canicule et comme la Halakha autorise à quitter la Soukah, les גּוֹיִם sortent en claquant la porte de la סֻּכָּה. La réaction des גּוֹיִם est de dire « la תּוֹרָה ne peut pas se pratiquer, on claque la porte ».  

Quand un Juif ne peut pas accomplir la מִצְוָה il est malheureux au contraire du גוֹי  qui en est heureux.  

Suite du Midrash => alors les anges on dit : on ne peut pas faire le jugement dernier, on ne peut juger que les Juifs qui sont les seuls à avoir accepté la תּוֹרָה ? Dieu répond on va juger les Juifs avec les גּוֹיִם => on va juger les גּוֹיִם d’après leurs Juifs.  

 

Les Juifs ont la responsabilité des גּוֹיִם. On les jugera d’après leurs Juifs. Par exemple Dieu va demander aux Juifs allemands « Ai-Je bien fait de créer l’Allemagne... ? »

 

 

 

 

 

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